06/02/2016
Viktor Orban « Chavez de l’Europe » ?
Viktor Orban « Chavez de l’Europe » ?
Migrations coercitives orchestrées : guerre du sionisme à l’Europe
(Premier d’une série de onze articles)
Gearóid Ó Colmáin – Dissident Voice – ICH – 1er février 2016
« Si une agression contre un pays étranger soumet à contrainte sa structure sociale, ruine ses finances et le force à abandonner une partie de son territoire pour servir d’asile à des réfugiés, quelle est la différence entre cette forme d’agression et la déclaration de guerre suivie d’invasion classique ? »
Sawer Sen, Ambassadeur de l’Inde aux Nations Unies
Dans une conférence de presse donnée à l’Union Européenne le 3 septembre 2015, le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a déclaré sans ambages, parlant de l’actuelle crise des réfugiés en Europe, que c’était « le problème de l’Allemagne ». Il voulait dire par là que les réfugiés en train de s’amasser à la frontière de la Hongrie se rendaient en fait, pour la plupart, en Allemagne. Il soulignait ainsi le fait que la très grande majorité des réfugiés n’avaient aucune intention de rester en Hongrie. Orbán a été fortement critiqué pour sa décision d’ériger une barrière de sécurité sur la frontière entre son pays et la Serbie, afin de contenir le flot des migrants en train de pénétrer illégalement sur le territoire hongrois.
Alors que les médias de masse dominants de l’Union Européenne brossent d’Orbán le portrait d’un dictateur de droite xénophobe, la décision d’ériger cette barrière a pourtant été prise en rigoureux accord avec les règlementations de l’U.E., qui exigent que tout immigrant désireux de pénétrer dans la zone Schengen soit enregistré à la frontière d’entrée par la police du pays concerné. Il est quand même assez paradoxal que Bruxelles fasse grief au Premier ministre hongrois de vouloir respecter les règles européennes !
Le quotidien français Le Monde présente le PM hongrois comme quelqu’un qui essaie de criminaliser les immigrants illégaux. Quel étrange pays en effet que celui qui criminalise ceux qui violent ses lois !
Pourquoi donc Orbán se retrouve-t-il sous un feu de critiques aussi nourri ? Depuis son arrivée au pouvoir en 2010, Orbán a mis en œuvre, dans la politique intérieure et sociale de son pays, des mesures qui vont à l’encontre de celles dictées par la Commission européenne. En 2013, la Hongrie a fermé le bureau du FMI sur son territoire et remis les finances du pays sous le contrôle de l’État.
Le Fonds Monétaire International est une institution-clé de la gouvernance mondiale américano-sioniste, et il y a peu de pays qui aient réussi à échapper à ses griffes, c’est-à-dire à un endettement permanent. C’est pourquoi la décision de la Hongrie de montrer la porte au FMI a été considérée comme rien moins qu’un acte de téméraire insubordination à l’égard de l’impérialisme US.
La Hongrie s’est aussi attiré des critiques par sa législation sur les médias, qui a mis hors la loi l’ingérence des canaux de propagande US tels que La Voix de l’Amérique, estimées contraires à l’intérêt public. En conséquence de quoi l’Union Européenne, qui n’a aucun scrupule à interdire les stations de télévision iraniennes, a vertement reproché à la Hongrie ses « violations de la liberté d’expression ».
Orbán avait exprimé en 2013 à Chatham House sa conviction qu’il existait une « conspiration gauche-verte » contre les « valeurs traditionnelles ». Il faisait sans aucun doute allusion aux sempiternelles tirades des va-t-en-guerre sionistes de gauche comme celles du parlementaire européen Daniel Cohn-Bendit contre la Hongrie. C’est Cohn Bendit d’ailleurs, qui a sarcastiquement qualifié Orbán de « Chavez de l’Europe », cette sorte d’injures idéologiques illustrant bien la vacuité du paradigme gauche-droite de l’ère post-soviétique.
Le « nationalisme » d’Orbán n’a rien d’impérial. C’est plutôt une philosophie nationale qui combat et qui affaiblit l’impérialisme. En fait, c’est un nationalisme au sens de libération nationale d’une oppression néo-coloniale qui a pris la forme des institutions financières internationales et de l’Union Européenne.
La défense des « valeurs traditionnelles » par Orbán l’a rapproché idéologiquement du programme du président russe Vladimir Poutine, qui a rendu visite à la Hongrie en 2014. Pendant cette visite, Orbán a loué le rôle du dirigeant russe dans les efforts faits pour trouver une solution pacifique à la guerre de Syrie. En 2014 encore, il a déclaré aux médias hongrois que la guerre d’Ukraine avait pour cause la volonté des États-Unis de contrôler toute l’Europe de l’Est. Il a également souligné qu’ils voulaient attirer la Hongrie dans cette crise.
Le Premier ministre hongrois ne fait pas mystère de sa volonté de poursuivre une politique intérieure et extérieure indépendante. Ainsi, la Hongrie entretient également des liens étroits avec la Chine et l’Iran. C’est pourquoi tenter de présenter Viktor Orbán comme faisant partie de la droite réactionnaire impérialiste et xénophobe est simplifier à outrance le jeu complexe des forces géopolitiques qui s’affrontent dans l’arène politique actuelle, et c’est ignorer surtout les forces profondes qui sont à l’origine de la crise des réfugiés/migrants et qui la dirigent. Ainsi, comparer l’opposition d’Orbán à l’immigration à celle du Premier ministre anglais David Cameron est aussi simplifier abusivement la question.
Le Premier ministre David Cameron fait grand cas de son opposition à l’immigration, mais elle n’a rien à voir avec le programme réel du gouvernement britannique. La politique anti-immigration de Cameron n’est que le simple appel à la xénophobie dont les Tories ont besoin pour maintenir leur niveau de voix aux élections. Le régime de Cameron sert le capitalisme financier international sous sa forme la plus brutale et le capitalisme financier a besoin d’une immigration constante. Les objectifs d’Orbán, au contraire, sont déterminés par son conflit avec le capitalisme financier et avec l’idéologie libérale qui conduit à la mondialisation.
Viktor Orbán a proposé que les migrants/réfugiés soient renvoyés en Turquie jusqu’à la fin de la guerre de Syrie. C’est une proposition raisonnable. Le slogan « Bienvenue aux réfugiés » et les manifestations en faveur de l’immigration qui le soutiennent servent les objectifs géostratégiques américano-israéliens. Peu de gens ont l’air de s’en rendre compte, et, actuellement comme lors du « Printemps Arabe » de 2011, la caravane du cirque de l’impérialisme US ne manque pas de passagers enthousiastes.
Dans ce sens-là, Viktor Orbán de Hongrie mérite, d’une façon très limitée, d’être appelé le « Hugo Chavez d’Europe ». Alors que, dans l’ensemble, sa politique est loin d’être de gauche (interdire les symboles du communisme, par exemple, ne l’est certainement pas), son adoption d’une forme traditionnelle, dirigiste, de capitalisme, assortie d’une politique sociale fortement pro-famille et d’une politique extérieure à multiples vecteurs, rapprochent réellement la Hongrie de pays comme le Vénézuéla, la Biélorussie, l’Érythrée et d’autres qui s’efforcent, eux aussi, de maintenir leur souveraineté face à l’impérialisme.
Un article profondément tendancieux et hostile du journal Le Monde décrit néanmoins assez précisément la politique d’Orbán comme étant « économiquement de gauche et culturellement de droite ». Une réserve s’impose cependant. Sa politique est « de gauche » du point de vue de la finance corporatiste mondialisée, mais, dans la mesure où elle favorise surtout la bourgeoisie patriote nationale, elle est « de droite » du point de vue des classes laborieuses.
La politique étrangère multi-vectorielle de la Hongrie a été bénéfique au pays et elle l’a été aussi pour d’autres pays partenaires de l’hémisphère Sud tels que le Vénézuéla. Pour ne prendre qu’un exemple : un produit technologique en matière d’énergie photovoltaïque, développé en Hongrie et financé par la Chine, a été exporté en 2013 au Vénézuéla. On croit que la nouvelle technologie hongroise pourrait non seulement permettre au Vénézuéla d’être autonome en matière d’électricité, mais pourrait même en faire un pays exportateur d’électricité. La coopération du Vénézuéla avec la Hongrie est vitale pour l’industrialisation du pays.
Ce que les pays évoqués ci-dessus ont en commun, c’est qu’ils s’efforcent tous de construire un volontarisme national, dans le but d’endiguer la marée de la « mondialisation » et tous les maux économiques et sociaux qui en découlent. Cela implique une bourgeoisie nationale patriote alliée aux classes laborieuses contre la bourgeoisie compradore « internationaliste » et le « Nouvel Ordre Mondial ». C’est, à maints égards, un renversement de la dynamique des classes de la Deuxième Guerre mondiale, où l’Union Soviétique a conduit une classe ouvrière internationale organisée, en association avec ce qui restait de la bourgeoisie démocratique, contre le fascisme international.
Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán est arrivé au pouvoir dans un pays ravagé par le FMI et par un parti « socialiste » profondément corrompu, qui avait émergé des décennies de l’état-providence capitaliste de Janos Kadar, un libéral qui avait remplacé le communiste Rákosi au cours de la contre-révolution qui s’est déroulée en Europe dans les années 1950, lorsque le capitalisme « à caractéristiques socialistes » a remplacé le socialisme du Kominform. Par euphémisme, on a qualifié de « dé-Stalinisation » ce qui n’était, en fait, qu’une tentative de rétablir les modes de production capitalistes.
La crise idéologique hongroise a culminé avec la tentative de coup d’État de 1956, quand la CIA, opérant depuis Vienne, a essayé de renverser le régime assiégé avec l’aide d’anciens collaborateurs du nazisme. La « Révolution hongroise » de 1956 fut, à maints égards, l’intelligent prototype de bien des opérations de changement de régime orchestrées par les USA qui allaient suivre des décennies plus tard.
Bien qu’Orbán soit réputé avoir « combattu le communisme » lorsqu’il était étudiant, il a surtout, comme beaucoup d’autres de sa génération, combattu un type particulier de capitalisme, par lui perçu comme une « conspiration de gauche » contre le peuple. Les Marxistes-Léninistes ont toujours considéré le triomphe du révisionnisme khrouchtchévien de 1956 en URSS et la dé-Stalinisation subséquente de l’URSS et des démocraties populaires d’Europe de l’Est, comme une contre-révolution opposée à la dictature du prolétariat.
Les réformes de Khrouchtchev impliquaient l’abandon de toute planification nationale centralisée, la réintroduction du profit comme régulateur de production, le tout combiné à une politique étrangère cynique et anti-marxiste de « coexistence pacifique » entre capitalisme et socialisme. Pour justifier cette politique, Khrouchtchev a écrit un long discours fallacieux calomniant Staline. Toutes les accusations portées contre Staline dans ce discours de Khrouchtchev se sont, depuis, avérées mensongères. Le révisionnisme soviétique n’a pas tué le socialisme qu’en URSS, mais – à la notable exception de l’Albanie – il a aussi tué l’espoir de socialisme dans le monde. Cette destruction du marxisme-léninisme par les révisionnistes soviétiques et, plus tard, chinois, a conduit à une résurgence du trotskisme dans les pays impérialistes occidentaux. Et c’est cette « Nouvelle Gauche » qui constitue l’avant-garde de l’impérialisme occidental contemporain.
« En tuant Trotski, les États-Unis faisaient coup double » (Louis Scutenaire)
Dans ce sens-là, Orbán a raison de parler de conspiration « de gauche » contre la civilisation, car ce que nous voyons aujourd’hui, c’est le triomphe de l’idéologie trotskiste, sous la forme du sionisme et du néo-conservatisme, où l’internationalisme prolétarien a été remplacé par les « droits humains » internationaux d’une part, et le « djihad islamiste » de l’autre, nouvelle alliance révolutionnaire en guerre contre les classes laborieuses.
Il n’y a qu’à voir le poing tendu des révolutions colorées US et l’appel permanent aux rébellions juvéniles pour comprendre à quel point le capitalisme est en train de resserrer sa prise sur l’humanité en s’appropriant les symboles révolutionnaires de la gauche. De fait, le capitalisme US contemporain, c’est, pour employer une expression de Trotski, la « révolution permanente ». Ou, pour employer celle du Grand Stratège US qu’est le général Thomas Barnett, « la mondialisation à la mode US est une révolution socio-économique pure ».
Mais c’est une révolution qui est en guerre contre la classe ouvrière. Un des résultats du « Printemps Arabe » en Égypte fut l’abrogation des lois sur le travail qui faisaient obligation aux sociétés de payer leurs ouvriers, lorsqu’elles fermaient leurs usines pour cause de moindre demande. Un grand nombre des grèves qui finirent par renverser le régime de Moubarak ont été dirigées par des syndicats « indépendants » financés par les États-Unis.
Étant donné l’intransigeance d’Orbán sur la question des réfugiés, il y a de fortes chances pour qu’il soit bientôt confronté à un « mouvement de protestation populaire » soutenu par les USA et Israël, dans le but de provoquer un changement de régime en Hongrie. Les révolutions colorées impliquent souvent le transport de milliers d’étrangers sur le lieu des manifestations par les services d’espionnage US opérant sous couvert d’Organisations Non Gouvernementales (ONG). C’est arrivé en Biélorussie en 2010. Beaucoup des jeunes gens qui essaient aujourd’hui d’entrer en Hongrie pourraient dans un proche avenir être utilisés comme bélier pour déstabiliser l’État hongrois.
Depuis le « Printemps Arabe » fomenté par la CIA et ses multiples ONG en 2011, depuis la destruction totale de la Libye par l’OTAN et sa guerre par procuration contre la Syrie, des millions de gens sont devenus des réfugiés. C’est à cause de tout cela qu’ils fuient vers l’Europe. Mais ils ne sont pas la cause principale de la « crise en cours » ou plutôt, de la phase actuelle d’une crise longue et profonde en cours de déroulement.
L’invasion et la destruction de la Libye en 2011 a poussé des millions de désespérés à tenter de traverser la Méditerranée. Cette crise toujours en cours a été diversement « couverte » par les médias occidentaux de masse. Par exemple, le naufrage d’un bateau en Méditerranée en juillet 2015 a eu droit à exactement 4 lignes dans le quotidien français Le Figaro, quoique plus de cent personnes y aient trouvé la mort.
Cependant, depuis qu’un enfant noyé a été trouvé sur la côte de Turquie en 2015, la crise des réfugiés est entrée dans une phase nouvelle, la photo de l’enfant étant utilisée pour battre le rappel d’un soutien public aux bombardements de l’OTAN contre la Syrie pour « arrêter les massacres ».
Alors que personne ne sait au juste combien il y a de Syriens parmi les migrants qui fuient vers l’Europe, les médias de masse font une véritable fixation sur ceux-là, en dépit du fait qu’ils ne représentent qu’une minorité des migrants actuellement massés à la frontière hongroise.
Le débat sur ce qu’il convient de faire pour résoudre la crise des réfugiés/migrants tourne à présent autour de la question de savoir s’il faut les accueillir dans les pays d’Europe ou pas. Ce faux débat pour ou contre les migrants sert évidemment à masquer une nouvelle et très destructive phase dans la stratégie géopolitique USA/OTAN. Un grand nombre des réfugiés qui assiègent aujourd’hui la frontière de la Hongrie viennent de camps de réfugiés en Turquie. Or, les services secrets autrichiens ont révélé que des agences gouvernementales US financent le transfert de ces réfugiés en Europe afin de déstabiliser tout le continent. Cette nouvelle initiative géostratégique consiste à utiliser des réfugiés désespérés, dans le but constamment poursuivi par les États-Unis et Israël de diviser le continent européen pour y régner.
En France, Radio Internationale a révélé que 95% des migrants de la vague actuelle en train de déferler sur l’Europe sont des jeunes hommes de 25 à 30 ans. On dit que beaucoup d’entre eux veulent échapper à la mobilisation dans l’armée syrienne, qui a perdu des milliers d’hommes et de femmes courageux depuis le début de la guerre que le sionisme fait à leur pays. La prépondérance de jeunes mâles en bonne santé parmi les soi-disant réfugiés m’a été également confirmée par des enquêteurs de la chaîne russe RT. Interrogé sur la question des réfugiés par BMTV, l’ambassadeur de Russie en France, Alexandre Orlov a répondu : « Tout ce que je peux voir, ce sont des jeunes gens qui fuient la guerre au lieu de défendre leur pays ». Oui, pourquoi y a-t-il si peu de femmes et d’enfants vulnérables parmi les réfugiés qui fuient la guerre de Syrie ?
La traversée de la Méditerranée vers l’Europe peut coûter normalement jusqu’à 11.000 dollars, soit bien plus d’argent que ce que la plupart des ouvriers européens pourraient économiser sur des années de dur labeur, et pourtant, on nous dit que des millions d’Irakiens et de Syriens ravagés par la guerre se retrouvent capables de dépenser ces sommes colossales pour faire le voyage. Comment cela est-il possible ?
La glorification des jeunes hommes qui fuient la conscription en Syrie en même temps que la démonisation des jeunes hommes et des jeunes femmes héroïques qui se battent en Syrie pour libérer leur pays, sont profondément significatives de la turpitude morale de nos propres classes dominantes, dont la déloyauté et la lâcheté sont les caractéristiques principales.
En septembre, une camerawoman hongroise a été filmée en train de faire trébucher un réfugié qui portait un enfant au passage de la frontière. La vidéo a aussitôt fait le buzz. Cette femme poursuit aujourd’hui l’homme en justice parce qu’il a changé sa déclaration des faits à la police. La version de Petra Laszlo est qu’elle a paniqué quand les réfugiés se sont précipités sur elle. L’incident a provoqué beaucoup d’indignation dans les médias politiquement corrects. Mais, depuis, des patriotes syriens se sont livrés à quelques recherches sur la « victime » de Laszlo. Il semble que l’homme s’appelle Osama Abdel-Muhsen Alghadab et qu’il soit membre de Japhat al-Nosra, le groupe terroriste affilié à Al-Qaïda qui a massacré des milliers d’innocents en Syrie. [Voir notre post du 5 octobre dernier. N.d.T.]
L’incident a provoqué beaucoup d’indignation dans les médias politiquement corrects
Ceci ne signifie absolument pas que tous les réfugiés qui essaient d’entrer en Hongrie soient des terroristes. Mais, dans un contexte de guerre totale, où sont engagés plusieurs réseaux internationaux de terroristes opérant sous l’égide des services secrets américains, israéliens et européens, cet incident est un argument de plus en faveur de la politique de stricte observance des procédures d’immigration normales d’Orbán.
En février 2011, le leader libyen Mouammar al-Khadafi avait mis l’Europe en garde contre le danger d’une invasion par des migrants et en particulier par des terroristes d’Al Qaïda s’il était renversé. Le président syrien Bachar al-Assad a, lui aussi, mis l’Europe en garde contre le danger d’invasion par des milliers de terroristes d’Al Qaïda et de l’« État islamique » déguisés en réfugiés. Il est tout à fait possible que ce scénario soit en train de se concrétiser.
Gearóid Ó Colmáin est un journaliste et analyste politique irlandais. Il vit à Paris. Il s’intéresse principalement à la mondialisation, à la géopolitique et à la lutte des classes. Il collabore régulièrement à Dissident Voice, Global Research, Russia Today International, Press TV, Sputnik Radio France, Sputnik English, Al Etijah TV et Sahar TV. Il a aussi fait des apparitions sur Al Jazeera et Al Mayadeen. Il écrit en anglais, en gaélique et en français.
Traduction c.l. pour Les Grosses Orchades
« La plupart des malheurs des hommes viennent de ce qu’ils ne donnent pas aux mêmes mots le même sens. »
Diderot
« Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. »
Albert Camus
À la suite d’un de nos posts récents, il nous a été conseillé de lire Béla Hamvas, ce que, idiots mais disciplinés, nous avons fait dans la très faible mesure de nos moyens, puisqu’un seul des livres de cet auteur a jamais été publié en français. Ses œuvres ne sont hélas, pour l’instant, accessibles que dans sa langue d’origine et en serbo-croate.
Précisons toutefois qu’un extrait de ce qui est qualifié de « roman-culte » - Carnaval - a été traduit en français (mais non publié, pas trop demander non plus !). On le trouvera ICI.
Tout ce que nous savon de Hamvas, c’est que Georg Lucáks et lui avaient une conception différente de l’art moderne et que le gouvernement hongrois (communiste depuis peu) le mit, en 1948, sur une liste « b » (impropre à la publication).
L’intelligentsia française post-moderne, qui n’est pourtant pas communiste, est à ce point hermétique à tout ce qui n’est pas hexagonal (ou yankee) qu’on ne trouve aucune fiche Wikipedia qui lui soit consacrée en français. En anglais, il en a une.
Béla HAMVAS
Un livre de prières pour les athées. Philosophie du vin.
Éditions du Rocher – 2005
244 pages
« Un livre d’une drôlerie irrésistible écrit par l’un des écrivains hongrois les plus remarquables du vingtième siècle. Un livre de prières pour les athées est à la fois un pamphlet contre les bigots de tout poil (athéistes et piétistes) en même temps qu’une formidable exhortation à la vie. » dit la 4e de couverture.
Nous n’y avons pas trouvé la drôlerie irrésistible annoncée par l’éditeur, à moins qu’on ne la voie dans la manière de manger, de boire et d’embrasser les femmes que préconise l’auteur avec le sérieux d’un pape qui aurait décidé de jouer les provocateurs pour se calmer de l’agacement que lui procurent les si prévisibles pécheurs.
Pour commencer, il ne faut pas longtemps (deux pages) pour comprendre que Béla Hamvas ne sait pas ce que c’est qu’un athée, non plus qu’un matérialiste. À sa décharge, reconnaissons que ceux qui se sont vantés de l’être et qui l’ont fait souffrir ne le savaient pas non plus, ce qu’ils ont embrassé sous les noms d’athéisme matérialiste n’étant autre chose que leur nouvelle religion. Il convient donc de lire ce livre en remplaçant « athées » par « hostiles aux religions traditionnelles » et « matérialistes » par « prosaïques ».
C’est un peu comme, lorsqu’on lit Céline… il vaut mieux faire abstraction des mots juif, youpin, youtre, etc., et se concentrer sur le reste, si on veut savoir ce qui l’a tant fait grincer des dents. Car ces deux écrivains ont beaucoup souffert du monde qui les entourait, c’est indéniable.
Béla Hamvas a vécu, en Hongrie, une vie d’artiste et sans doute aussi de penseur, sous la férule déléguée (en pidgin à la mode, on dit « proxy ») de compatriotes appliquant les volontés d’évadés du Talmud, qui croyaient avoir entendu Karl Marx leur parler d’entre les nuages. Rien n’est pire, hélas, qu’une bureaucratie imposant aveuglément les règles d’une religion, inévitablement intolérante – elles le sont toutes –, qu’elle ne comprend pas.
Pour son malheur, Hamvas semble avoir été un sensualiste et peut-être même un contemplatif (on le saurait si on en avait lu davantage). Or, quoi de plus odieux, de plus insupportable qu’une société pas vraiment sortie de l’infantilisme, qui se sert des moyens de la domination ordinaire pour imposer sa loi à des esprits spéculatifs allergiques aux entraves ?
Ayant ainsi décidé que ses tourmenteurs étaient des « enfants arriérés, voire des débiles mentaux » – oublieux du cas que faisait des simples d’esprit son Sauveur – il entreprend de les remettre à leur place en leur décrivant par le menu ce qu’ils ratent. Et pendant qu’il y est, il règle leur compte aussi aux puritains, aux bigots et autres piétistes, aussi pires que les autres si c’est possible.
« Le piétiste est homme à exiger que tout le monde vive de son et d’eau pure ; il voudrait voir les plus belles femmes vêtues d’oripeaux informes, il aimerait pouvoir interdire le rire et couvrir le soleil d’un voile noir. Le piétiste est partisan de l’abstinence. Je sais fort bien que ma seule devise a éveillé son indignation. Le piétiste est partisan de l’abstinence. Je sais fort bien que ma seule devise a éveillé son indignation, qu’il a demandé sur un ton sinistre et courroucé : “Allons donc, qu’est-ce encore que ce blasphème ? ” Il a été choqué parce que j’ai eu l’outrecuidance de dire que Dieu se trouvait aussi dans le jambon cuit. Eh bien, il aurait intérêt à se calmer. Il va entendre des propos encore plus osés. Je promets de montrer une considération toute particulière à son égard et de ne manquer aucune occasion de le scandaliser dans toute la mesure du possible. On doit ménager l’athée parce qu’il est sot, ignorant, étroit d’esprit et simpliste. Le piétiste, lui, ne saurait espérer autant d’indulgence. Qu’il sache donc que je le guette du coin de l’œil et que plus il prendra l’air grave, plus je me rirai de lui. Plus il épanchera son indignation, plus je me délecterai et je ne lui dirai même pas pourquoi. »
L’auteur est, soit dit en passant, né dans un presbytère, comme tant de grands brimés de la littérature.
Deux mots, pendant qu’on y est, sur cette accusation de « matérialisme » si libéralement distribuée aux mécréants par tant de croyants par ailleurs grands prosaïques sous le soleil.
Mis à part les anciens Étrusques, profondément conscients de ce que vie et mort ne sont que des transformations de la matière et en même temps si obsédés par le religieux et ses rites que le mot « cérémonie » vient de Caeré, nous ne connaissons qu’un seul vrai matérialiste parmi nos contemporains. Il s’appelait John Cowper Powys. Comme Béla Hamvas, il était sensualiste, et le mot « contemplatif », pour le qualifier, paraît ridiculement faible, au point que, ayant divinisé la matière (qu’il appelait Déméter, allez savoir pourquoi) il pouvait tomber en extase à la seule vue d’un lichen sur un vieux mur. On veut dire en extase comme sainte Thérèse d’Avila ou saint Jean de la Croix, et qui plus est, à volonté, car il ne devait pas, lui, attendre que sa déesse se manifeste ou lui apparaisse : il la convoquait. Son œuvre est pleine d’évocations de ce genre qu’on aurait tort de ne pas prendre au sérieux.
« Extase pour vieux monsieur devant un vieux mur »… ce sont là des mystères que les prosaïques ne sauraient se figurer.
Mais puisque nous avons eu la désinvolture de faire dévier notre compte-rendu de lecture vers un autre auteur, rappelons que l’Angleterre, dans l’ostracisme de ses grands hommes, n’a rien à envier à quiconque. John Cowper Powys n’a jamais réussi à gagner vraiment sa vie qu’en Amérique (en y donnant plus de 10.000 conférences populaires) et, rentré dans son pays d’origine, il y a passé les trente dernières années de son existence dans une gêne proche de la misère, en lutte perpétuelle avec des éditeurs dont la préoccupation principale fut toujours de lui faire, à force de chantage, couper la moitié de ses manuscrits. Tant il est vrai que, comparées avec la censure économique, celles de l’Inquisition du Moyen Âge ou du communisme le plus sévère ne furent et ne sont toujours que bluettes. Elle seule est totale et irrémédiable. La Grande Bretagne continue, plus d’un demi-siècle après sa mort, de traiter avec un dédain condescendant un de ses plus grands artistes et penseurs, davantage révéré – et publié – en France ou aux États-Unis que dans son impécunieux pays, où l’on manque toujours de moyens pour le publier comme il le mérite. « Trop de pages, Monsieur Powys ! ». « Trop de notes, Monsieur Mozart ! ».
Béla Hamvas, qui ne va pas jusqu’à diviniser la matière, passe cependant en revue avec le plus grand sérieux ce qu’elle peut offrir d’irrésistible aux croyants. Tout y passe : la nourriture, la peau des femmes (savez-vous qu’elle n’a pas le même goût sur la lèvre supérieure qu’à la base du cou ?) et, bien sûr, le vin. Surtout hongrois. À ce propos, et sans vouloir minimiser ses qualités assurément rares, on regrette que des règles commerciales européennes (ah, Bruxelles ! plaie pire qu’athéistes et piétistes réunis) aient interdit à certain pinot gris d’Alsace de se prétendre de Tokay. C’est vrai que le légendaire vin de ce nom est hongrois et rien d’autre, mais ils auraient pu lui permettre de s’appeler « Tokay non autorisé » ou quelque chose de ce genre, parce qu’il était très bon et qu’à présent, perdu qu’il est parmi tous les autres vins d’Alsace, comment le retrouver ? Quant au vrai… on n’est pas Crésus.
Que faut-il faire pour que d’autres livres de Bela Hamvas soient publiés en français ? Des manifs ? Pétitionner ?
On ne voudrait pas avoir l’air de rabâcher sur la grande misère de l’édition française (ah, Jane Ellen Harrison toujours pas publiée au bout de plus d’un siècle !), mais avouez qu’il y a de quoi. Pourtant, dans les années qui ont suivi la guerre de Yougoslavie, la Croatie finançait carrément la publication dans l’Hexagone de ses auteurs nationaux, le Ministère de la Culture finançant leur traduction. Mais sans doute la Croatie a-t-elle, avec la France, des accords que les autres pays de l’Est n’ont pas (l’Europe ! l’Europe ! l’Europe !). Cela dit, quelqu’un ne pourrait-il avoir l’oreille de M. Orban ? Et celle de… c’est qui, maintenant ? ah, oui, bon… Sinon, qui sait si, un de ces jours, un petit éditeur suicidaire ne va pas se mettre à publier Hamvas à retardement, comme les éditions Gallmeister se sont mises à publier systématiquement, quoiqu’avec 25 ans de retard, le plus grand romancier américain vivant. Tout arrive.
En attendant, bouffez votre Dan Brown et taisez-vous.
Un peu d’art véritable pour finir…
Pussy Riots : le retour
Après un passage obligé par Hollywood et coachées par Madonna…
il était impensable qu’elles ne participent pas à la campagne de haine « sans précédent même dans l’Allemagne nazie » en cours contre la Russie.
On n’en attendait pas moins d’elle et d’elles.
Démence ? Bof ! Conception zunienne de la propagande.
Mis en ligne le 6 février 2016.
18:19 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
Les commentaires sont fermés.