13/11/2015
ON NE DANSE PAS AVEC L'APARTHEID
Serments d’ivrognes.
On avait dit « plus avant le 6 décembre ».
C’est que la guerre est déclarée.
Sur deux fronts.
Celui de l’apartheid.
Celui des liquettes.
Apartheid
Quand ce sont les états qui boycottent, pas de problème. Ils appellent cela « sanctions ». Mais quand ce sont les peuples, la loi change. Car, eux, ils n’ont pas le droit. Demandez aux états. Surtout au français.
BDS (suite et pas fin)
En janvier prochain, à l’invitation de l’Opéra Garnier, doit se produire à Paris la troupe de ballet israélienne Batsheva. Dans tous les pays où elle est passée, cette troupe, utilisée par le gouvernement israélien dans des buts de propagande évidents, a été accueillie par de fortes manifestations de BDS (car l’abstention de consommation n’est pas, dans les pays civilisés, un délit comme en France).
Aux États-Unis, en Angleterre, en Écosse, en Australie comme au Chili ou en Nouvelle Zélande, les militants pour les droits de l’homme ont fait la démonstration que les danseurs de Batsheva sont financés et soutenus par le gouvernement israélien, et sont parfaitement conscients du rôle qu’ils jouent.
Parmi leurs sponsors, des entreprises d’armement israéliennes, Eastronics et IDB International, de même que le KKL, fer de lance de la politique de confiscation des terres palestiniennes.
Que vous arrivera-t-il si vous n’y allez pas ? Serez-vous dénoncés par vos envieux voisins, vos enfants ?
Pour en savoir davantage et, notamment, comment vous pouvez vous manifester par mail, par écrit ou par téléphone au directeur de l’Opéra Garnier, voir ici :
http://www.europalestine.com/spip.php?article11179
Voir aussi ce qu’a à dire du boycott Éric Hazan, juif et un des derniers vrais éditeurs français qui restent (ainsi que l’auteur d’un de nos livres de chevet) :
Pour le boycott
universitaire et culturel
de l'état d'Israël
Eric Hazan
Le mouvement de boycott des produits israéliens, ou plus largement le mouvement BDS (boycott, désinvestissement, sanctions) prend chaque jour plus d’ampleur dans le monde entier. Même en France, la propagande qui cherche à assimiler ce mouvement à de l’antisémitisme rencontre de moins en moins d’écho. Il est cependant un point sur lequel des personnes de bonne foi, des partisans sincères d’une paix juste en Palestine-Israël ont des réserves : c’est le boycott universitaire et culturel.
Vous risquez d’affaiblir, disent-ils, d’isoler le camp des partisans de la paix en Israël.
Cet argument repose sur l’idée qu’il existe un bon et un mauvais Israël. D’un côté les laïques, ashkénazes (ça ne se dit pas mais ça se pense très fort), de gauche, qui animent la vie intellectuelle et artistique de Tel Aviv. De l’autre, les hommes en noir, les colons, les extrémistes fascisants, malheureusement aux postes de commande sous le règne de Netanyahou.
C’est une distinction fallacieuse. C’est oublier que la « gauche » israélienne porte la responsabilité de la situation actuelle, que c’est Itzhak Rabin, sa figure emblématique, qui a décidé en 1991 le blocus des territoires palestiniens par des barbelés et a fait casser à coups de pierre les mains des jeunes manifestants. C’est oublier que jamais la « gauche », jamais le « camp de la paix » n’a élevé la voix quand l’armée et l’aviation israéliennes massacraient des civils à Jénine, à Naplouse et à Gaza. Le bon Israël et le mauvais, le camp de la paix et celui de la guerre sont aussi solidaires que les deux faces de la même pièce de monnaie.
Oui, mais quand même, la littérature israélienne, le cinéma israélien dénoncent les excès de l’occupation, œuvrent pour l’entente et la réconciliation. Boycotter ces écrivains, ces artistes, c’est affaiblir ceux qui luttent pour la paix.
Ces livres, ces films sont des articles d’exportation. Pour faire face à la réprobation mondiale, il faut des arguments, il faut montrer qu’il existe en Israël des gens qui pensent autrement. Mais où, mais quand un écrivain israélien, un cinéaste israélien a-t-il pris clairement position contre l’occupation, contre les crimes de guerre ? Ni Amos Oz, ni David Grossmann, ni Amos Gitai, les plus célèbres, les plus talentueux, les plus aimés en France. Leur travail visant à montrer combien l’expression est libre en Israël vaut plus que cent escadrons de chars Merkava. Ce sont des collaborateurs de l’occupation.
Mais vous mélangez culture et politique. La culture est universelle et l’université israélienne est là pour la défendre.
L’université israélienne a avec l’armée des liens serrés, organiques, officiels. Le Technion, le grand institut scientifique de Haïfa, collabore avec la société privée d’armements Elbit, dont l’un des dirigeants siège au conseil d’administration de l’Université hébraïque. On y a mis au point les drones et les bulldozers télécommandés qui servent à détruire les maisons palestiniennes. Sur des campus comme ceux de l’Université hébraïque, de l’université de Haïfa ou du collège de Zfat, l’armée a implanté des bases militaires et les étudiants-soldats assistent aux cours en uniforme. Au collège de Zfat (Safed, en Galilée), on forme les futurs membres des services secrets, à l’université Ben Gourion, des pilotes militaires, à l’université de Haïfa, des officiers de la marine de guerre.
L’université israélienne est en outre un instrument d’apartheid, car pour les inscriptions et les diplômes, il est généralement demandé que le candidat ait terminé son service militaire – que les Palestiniens citoyens israéliens ne font pas.
Lire également une tribune d'un collectif de différentes personnalités, dont Eric Hazan, parue dans Le Monde du 15 janvier 2015 : Non à l'union sacrée
Source : http://palestine.katinfo.fr/
Pendant qu’on y est, tiens, faisons-nous plaisir :
Eric HAZAN
L'Invention de Paris
Il n'y a pas de pas perdus
Le Seuil 2002, rééd. 2012
448 pages
Un somptueux cadeau à faire à vos proches pour leurs étrennes.
Et si vous êtes fauchés, il existe même en « poche » à présent (8,10 €).
Places royales et faubourgs brumeux, enceintes, barricades et passages, c'est la trame serrée des quartiers parisiens qui organise cette déambulation proposée aux flâneurs des rues et des livres.
On y voit naître, au rythme des enceintes successives, l'éclairage public, l'enfermement des pauvres et des fous, le numérotage des maisons, les terrasses des cafés et la police de proximité. Du Marais des Précieuses au XIe arrondissement des « branchés », on assiste aux migrations de la mode, à l'apparition de microvilles dans la ville, celles de Scarron, de Des Grieux, de Desmoulins, de Rubempré et de l'autre Lucien, Leuwen, celles de Gavroche, de Baudelaire et de Manet, d'Apollinaire, celles encore de Nadja, de Doisneau ou d'Anna Karina.
Mais les vrais héros du livre, ce sont des anonymes, les architectes du désordre qui, de génération en génération, se sont transmis l'art d'empiler les magiques pavés, au faubourg Saint-Antoine en prairial an III, au cloître Saint-Merri en juin 1832, au clos Saint-Lazare en juin 1848, à Belleville en mai 1871, au quartier Latin en mai 1968, démontrant chaque fois - et plaignons ceux qui croient la série close - la force de rupture de Paris.
Éditeur et écrivain, Eric Hazan dirige les éditions La Fabrique fondées en 1998. Il est notamment l'auteur de Chronique de la guerre civile (La fabrique, 2004), Changement de propriétaire, la guerre civile continue (Seuil, 2007) et de L'Invention de Paris (Seuil, 2002.)
Et ne lésinons pas :
Raymond Queneau
Connaissez-vous Paris ?
Folio, 2011 – 5,20 €
192 pages
Y a-t-il un rapport entre l'eau de Javel et le quai du même nom ? Combien y a-t-il d'arcs de triomphe à Paris ? Quel agréable souvenir dentaire est attaché à la place des États-Unis ? Entre novembre 1936 et octobre 1938, Raymond Queneau pose chaque jour aux lecteurs du quotidien L'Intransigeant trois questions sur Paris. L'Histoire s'y mêle à l'anecdote, la pratique documentaire aux dérives dans la ville, le sourire au savoir. Sur une idée d'Emmanuel Souchier, la présente édition vous propose plus de quatre cents de ces questions assorties de leurs réponses. Pour parcourir la Ville Lumière en compagnie de l'un de ses plus éminents piétons et découvrir une oeuvre méconnue de Raymond Queneau, jamais encore publiée en volume.
Boycott pas permis et boycott permis…
Une tentative de boycotter Roger Waters fait un bide à New York
3 novembre 2015
Le lobby israélien vient d’appeler toutes les personnes s’apprêtant à aller au spectacle de Roger Waters dans un théâtre de New York à aller se faire rembourser leur place, en raison de son appel au boycott d’Israël, mais pas un seul billet n’est revenu ! Le bide total !
La salle sera pleine à craquer, non seulement tous les billets sont achetés et personne ne veut se faire rembourser, mais les Américains se ruent pour essayer d’en acheter.
Le musicien britannique ne cache pas sa critique de l’occupant israélien. Il s’est déplacé en Palestine occupée pour écrire et dessiner sur le mur de l’annexion, et appelle depuis plusieurs années tous les artistes à boycotter Israël tant que le peuple palestinien est occupé, colonisé et martyrisé.
Waters n’hésite pas à dire que « collaborer avec Israël, c’est soutenir les colons qui brûlent des bébés et les soldats qui écrasent au bulldozer des jeunes pacifistes comme Rachel Corrie ».
Et il affiche son mépris face à ceux qui essaient de l’intimider en exerçant le sempiternel chantage à l’antisémitisme.
Le Centre Simon Wiesenthal, que l’arme du boycott ne gêne pas - il a en effet appelé au boycott de la France, en 2003, et appelle à celui de Roger Waters — a demandé au public de faire en sorte que le musicien britannique joue dans un théâtre vide, et il s’est engagé au remboursement de toutes les places.
Raté !
Le directeur général du théâtre a indiqué mercredi qu’aucune demande de remboursement n’avait été présentée. En fait le théâtre est pris d’assaut par des Américains qui essaient d’obtenir des places.
Source : http://www.i24news.tv/en/news/international/90884-151030-...
Ce que pense de la France le célèbre journaliste Glenn Greenwald :
Le militantisme contre Israël criminalisé au pays de Charlie Hebdo et de la « liberté d’expression ».
La marche post-Charlie Hebdo pour la « liberté d’expression » de Paris était une escroquerie, pour de multiples raisons, ainsi que je l’ai écrit à ce moment-là. Elle fut conduite par des dizaines de dirigeants du monde, dont bon nombre emprisonnent, voire tuent, des gens pour avoir exprimé des opinions interdites. Cette marche a été saluée par beaucoup d’Occidentaux qui feignent d’être bouleversés uniquement lorsque des atteintes à la liberté d’expression sont le fait de Musulmans, mais non – ce qui est bien plus fréquent – de leurs propres gouvernements contre les Musulmans.
Le pire est que la marche s’est déroulée dans un pays qui est l’un des pays occidentaux les plus hostiles à la liberté d’expression, comme la France l’a démontré dans les jours qui ont suivi la marche, en arrêtant et en poursuivant en justice des Musulmans et d’autres militants contre Israël, pour leurs opinions politiques. Un livre remarquable, un best-seller du philosophe français Emmanuel Todd, sorti cette année, avance que cette marche « pour la liberté d’expression » a été un simulacre inspiré par des sentiments politiques divers – xénophobie, nationalisme et préjugés anti-musulmans – qui n’avait rien à voir avec la liberté d’expression.
Source : http://arretsurinfo.ch/le-militantisme-contre-israel-crim...
Glenn Greenwald
Est un journaliste d’une importance devenue planétaire (voir son parcours sur Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Glenn_Greenwald ).
Depuis février 2014, il dirige, du Brésil, le magazine en ligne The Intercept, qui sert surtout, actuellement, de plateforme pour présenter les révélations d'Edward Snowden et ainsi poursuivre la publication d’enquêtes sur la surveillance globale par les États-Unis.
Glenn Greenwald est membre de la Freedom of the Press Foundation, une ONGI créée en décembre 2012 par Daniel Ellsberg qui soutient et finance des actions d'intérêt public axées sur la liberté d’expression et la liberté de la presse. Cette organisation a ainsi levé des fonds pour retranscrire l'intégralité du procès de Bradley Manning, le soldat américain accusé d'avoir transmis 250 000 câbles diplomatiques américains et 500 000 rapports de l'armée américaine concernant la seconde guerre de l’histoire contemporaine de l’Afghanistan et de la guerre d’Irak à Wikileaks; l'armée américaine ayant refusé de publier les transcriptions.
Aujourd’hui, en France, en vertu de cette loi et de son interprétation, vous ne pourriez plus vous en prendre à Hitler.
Pendant la guerre non plus ...
Puisque la décision d’interdire le boycott en France se base sur un texte de loi sur la presse prescrivant une peine de prison ou une amende qui peut aller jusqu’à 45 000 € pour « provocation – par voie de presse - à la discrimination, la haine ou la violence envers une personne ou un groupe à raison de l’origine, l’appartenance ou la non-appartenance à un groupe ethnique, une nation, une race ou une religion déterminée », M. Yahia Gouasmi, descendant du prophète Mahomet, s’était, en avril, constitué partie civile en invoquant précisément cet article à l’encontre des Charlie.
Il avait dû, pour que sa plainte fût jugée recevable, prouver la réalité de sa descendance. (Pourquoi diable ?) Mais MM. les juges chipotent. Ils ne sont pas tout à fait convaincus, voyez-vous, de sa filiation (donc le délit n’existe plus).
Ce n’est pas Clochemerle (ce serait belge). C’est pire.
Du Daumier au cube.
Yahia Gouasmi-Charlie Hebdo : le face à face !
Le 14 avril 2015 Monsieur Yahia Gouasmi a fait citer Monsieur Laurent Sourisseau, directeur du journal Charlie Hebdo devant la 17ème chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Paris, pour chef d’accusation d’injures publiques à caractère racial.
Les suites de cette affaire ont eu lieu le début du mois de novembre et durant cette session, il a été question de la recevabilité de la citation.
En effet, le Parquet considère que « le seul arbre généalogique rédigé de la main de la partie civile, elle-même, ne saurait être considéré comme une preuve suffisante de sa descendance et permettra ainsi au tribunal de la déclarer recevable à agir ». De ce fait, de nouvelles pièces ont été fournies notamment : L’identification des attestations de l’authenticité de la filiation de Monsieur Gouasmi, établies par « l’Institut mondial de vérification et le comité international de l’ordre des descendants du Prophète Mohamed », DAR EL ALAMIYA qui ont leurs représentations dans tout le monde musulman (Turquie, Syrie, Maroc, Koweït, Arabie saoudite …) ainsi que l’arbre généalogique, accompagné des certificats d’investigations établissant la filiation de Monsieur Gouasmi, certifiés par le doyen des Chorfas Alaouite, reconnu par le Ministère de l’intérieur du royaume du Maroc.
Les conclusions du président du tribunal concernant la recevabilité de cette filiation auront lieu le 15 Décembre 2015. Le comité de soutien continuera à informer tous les sympathisants et tous ceux qui soutiennent M. Gouasmi dans ses démarches des suites de cette affaire dont le prochain rendez-vous a été fixé le 15 décembre 2015. Nous espérons que le respect de la loi sera garanti pour tous, ici en France. Le tribunal, en tenant compte uniquement du cadre de la loi ne pourra que constater la recevabilité de cette filiation et condamner Charlie Hebdo pour injure à caractère racial.
Comité de soutien de Yahia Gouasmi
Source : http://www.partiantisioniste.com/
Et maintenant, il y a les Russes.
D’ici que la France soit mise au ban des nations pour ses crobars…
Pour réprimer la campagne BDS, la France de Hollande et Valls fait mieux qu’Israël !
.Paris – Attaque, par la police, d’une manifestation pacifique pro-palestinienne
Le 20 octobre, la Cour de cassation, la plus haute juridiction de France, a confirmé la condamnation de douze militants du mouvement de solidarité avec la Palestine, pour avoir appelé publiquement au boycott des produits israéliens.
La décision de la Cour de cassation ajoute à l’inquiétude déjà grande que suscitent les graves violations de la liberté d’expression soutenues par le président français François Hollande, depuis l’assassinat des journalistes dans les bureaux du magazine Charlie Hebdo en janvier.
Elle fait aussi de la France, le seul pays, avec Israël, à pénaliser les appels à ne pas acheter de produits israéliens.
Mais la loi française, qui comprend des sanctions pénales, est plus sévère que celle d’Israël qui permet de poursuivre les partisans du boycott pour préjudice financier, mais pas de les emprisonner.
« Une triste journée »
Source : http://www.info-palestine.net/spip.php?article15711
Pour rappel :
En droit international
l’apartheid est un crime
« (Il serait) pourtant temps, comme dit la chanson,
De sortir de ce siècle ou d’en avoir raison. »
Alfred de Musset
On ne laisse pas passer un texte de cette importance sans l’attraper au lasso. On le lit, on le relit et on se le met de côté pour plus tard.
Le parti de la liquette face au répulsif anti-limace* naturel
Frédéric Lordon – Le Saker F. – 11 novembre 2015
(article repris du Monde Diplomatique d’octobre 2015)
(*) http://www.dicoperso.com/term/adaeaeb0acada45c52,,xhtml
«...Les dévots qui se sont engagés corps et âme dans la défense d’un ordre ignoble et forment sans le savoir l’avant-garde de la guenille, sont encore trop bêtes pour comprendre que leur faire peur en mots – ou bien en tartes à la crème – est la dernière solution pour leur éviter de connaître plus sérieusement la peur – dont ils ne doivent pas douter qu’elle viendra, aussi vrai qu’une cocotte sans soupape finit par exploser.» F.Lordon
Si l’on avait le goût de l’ironie, on dirait que le lamento décliniste ne se relèvera pas d’un coup pareil, d’une infirmation aussi catégorique ! Coup d’arrêt au déclin ! Mais l’ironie n’enlève pas la part de vérité, fut-elle ténue : un pays où les hommes du capital finissent en liquette est un pays qui a cessé de décliner, un pays qui commence à se relever. Car, dans la tyrannie du capital comme en toute tyrannie, le premier geste du relèvement, c’est de sortir de la peur.
Source : http://lesakerfrancophone.net/le-parti-de-la-liquette-fac...
Et puisqu’on est dans l’intelligence, restons-y : celle-ci est de droite, avec de la musique.
Sahib Teri Bandi
Slobodan Despot – Despotica
25 Janvier 2015
Qu'on me suive ou qu'on me zappe: cette fois-ci, j'ai décidé de sauter du coq à l'âne. Commençons par le coq. Dans l'Ancien Testament, le succès en ce bas monde est signe de bénédiction divine. Celui qui possède beaucoup de bétail et un puits d'eau claire est aimé de Yahvé. Rien n'a changé depuis : Freysinger triomphe et soudain l'élu est lu et son catogan sanctifié, les journalistes envahissent sa cuisine et il se découvre des légions d'amis de toujours.
Il n'en a pas toujours été ainsi et c'est ici qu'on passe à l'âne. Lorsque j'ai eu l'idée saugrenue — pour l'époque — de consacrer un essai au seul phénomène politique intéressant en Suisse romande (Oskar et les minarets, éd. Favre, 2010), la presse offusquée l'a bonnement ignoré. A la TSR, tout de même, je fus convié à une émission de débats où chacun devait présenter son nouvel ouvrage. En arrivant sur le plateau, je m'aperçus — ô surprise ! — que les autres invités avaient tous un exemplaire, annoté, de mon livre ! Le guet-apens pour le mal-pensant, qui plus est en direct. Que faire à un contre cinq ? La meilleure défense étant l'attaque, je demandai d'emblée à ces belles âmes de me dire ce qui était imprimé sur le t-shirt que je portais, par chance, ce soir-là. « Euh… — Ben… — C'est du russe ? » Non. C'était l'alphabet cyrillique serbe de trente lettres, l'écriture d'une des grandes communautés immigrées de ce pays. Ils ignoraient sans doute que les Serbes eussent un alphabet propre. Comme ils ignorent l'histoire et les mœurs des Albanais ou des Tamouls. Tout ce qu'ils savent, c'est qu'ils sont « pour ». Et contre l'obscurantisme UDC. Cette petite gêne remit la balle au milieu du terrain et l'on put causer.
L'adhésion rationnelle à des principes masque souvent une insensibilité intérieure à ce qu'ils impliquent. Le sectarisme interne se double en Occident d'un aveuglement plus grave encore face au reste du monde. Nous courons au conflit terminal en réduisant (délibérément) tout le monde musulman à des régimes de fadas sanguinaires, la Russie à une dictature kagébiste et la Chine à une dévorante termitière. A quand remontent les dernières approches nuancées de ces univers-là ? Cela vous semble abstrait ? Voyez Chypre. Des Grecs mal rasés lessivant le butin de Russes adipeux, c'est plus aisé à détrousser que des Allemands proprets. Mais les Boches y passeront à leur tour, justement à cause de leur morgue et de leur indifférence à l'autre.
Le coq et l'âne baignent tous deux dans la lumière égale du Créateur. Notre rationalisme dissèque au lieu d'unir et la morale est son scalpel. D'où notre bêtise qui étonne les voyageurs persans.
Au fait : cherchez Sahib teri bandi sur YouTube. Vous trouverez un chant traditionnel de Nusrat Fateh Ali Khan (« Seigneur, je suis ta servante ») et sa version électrique par le génial guitariste Derek Trucks. Et dites-moi, entre la joie du soufi pakistanais et la concentration monacale du jeune sudiste blond, ce qui vous parle le plus. La seule vraie connaissance est là.
Le Nouvelliste, 22 mars 2013.
Cette chronique, comme toutes celles que j’ai écrites pour le Nouvelliste entre 2011 et 2013, est rééditée en volume dans Nouvelleaks
Slobodan DESPOT
NOUVELLEAKS - La fin du monde se fait attendre
Xénia – 2014
141 pages
Réunies dans un recueil, les 66 fameuses et très lues chroniques de Slobodan Despot dans Le Nouvelliste.
« Slobodan Despot est un artificier dont la vérité par la littérature est l'arme absolue ». (Bernie Constantin)
Mis en ligne le vendredi 13 novembre 2015.
19:36 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
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