13/04/2015
SYRIZA ESPOIR DE LA GRÈCE ET DE L'EUROPE
SYRIZA
Espoir de la Grèce et de l’Europe
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Notre édito (vous pouvez sauter)
Lorsque, en 1945, les Grecs s’aperçurent que de nouveaux envahisseurs succédaient à ceux qu’ils venaient de vaincre, ils ne déposèrent pas les armes. Ils continuèrent à se battre. Ils furent les seuls. On a dit que cette résistance à la colonisation étrangère était surtout le fait des communistes. La résistance au nazisme avait dû l’être aussi, alors. Le nazisme changeait d’uniformes et ils l’avaient compris. Qui aurait l’effronterie de le leur reprocher ?
Lorsque, en 1948, l’Italie, qui savait de quoi elle sortait, se prépara à porter massivement les communistes au pouvoir, Palmiro décida qu’il fallait les perdre, ces élections. De justesse, mais les perdre. Pas de sang ! Pas de sang ! Il avait donc compris ce qui se passait en Grèce.
Le sang continua d’y couler, pendant que toutes les gauches d’Europe regardaient ailleurs. Certes, il y avait eu Yalta, et l’URSS, respectueuse des accords signés avec les capitalistes occidentaux, laissa les Grecs à leurs problèmes. Mais les foules, elles, n’avaient rien signé et n’étaient tenues en rien de respecter des accords qui faisaient bon marché de leur internationalisme et d’ailleurs, déjà, de leur souveraineté. Mais, docilement, elles s’alignèrent sur leurs bourgeois.
Ce n’était pas la première fois.
En 1936, alors que la République espagnole qui venait de naître tout ce qu’il y a de plus démocratiquement avait été aussitôt prise à la gorge par les crocs des meutes hitléro-mussoliniennes, les « gauches » d’Europe se mobilisèrent, sous la houlette de leurs partis et syndicats, en un Front Populaire qui arracha de haute lutte… un « acquis social » mémorable : les congés payés. Et tout le monde partit en vacances. À bicyclette. L’Espagne, elle, continua de lutter seule jusqu’à son écrasement en 1939. Certes, presque aussitôt éclata la IIe mondiale et on eut d’autres chats à fouetter. Sauf qu’il n’y aurait pas eu la guerre, si les peuples d’Europe avaient aidé l’Espagne.
Encore ne fut-ce pas tout, puisque, en 1991, les mêmes capitalistes qui avaient jadis armé les hitléro-mussoliniens décidèrent de démembrer la Yougoslavie et que l’Europe, cette fois, ne se contenta pas de regarder ailleurs pendant qu’on massacrait, elle y alla. Ou plutôt, elle encouragea joyeusement à y aller les troupes mercenaires soldées de ses deniers. Ah, l’inoubliable enthousiasme guerrier de Charlie-Hebdo et de Cavanna ! Ah, ces jacassantes gauches… Qu’ont-elles fait de leur principe d’Égalité ? Qu’ont-elles fait de leur Fraternité ? Quand donc auront-elles honte ?
Aujourd’hui, tout recommence. Les Grecs et les Espagnols, une fois de plus se battent seuls contre l’ennemi commun pendant que les autres « peuples de gauche », du rose pâle au rose saumon, le cul calé dans leurs fauteuils, regardent en bouffant leur popcorn. Les plus engagés comptent les coups. Ne serait-il pourtant pas temps qu’ils se livrent à ce que les cathos appelaient dans le temps « examen de conscience » et les bolchos « autocritique » ?
Si les gauches d’Europe n’avaient pas permis l’écrasement des Espagnols en 1939, il n’y aurait pas eu de IIe Guerre mondiale. Si elles n’avaient pas permis l’écrasement des Palestiniens en 1948, des Grecs en 1949 et des Yougoslaves de 1991 à 2001, si, enfin, elles n’avaient pas permis la complicité active de leurs parasites respectifs avec les nazis Usrahello-Ukrainiens depuis plus d’un an, il n’y aurait pas, aujourd’hui, de IIIe planétaire en cours. Au nucléaire.
Ne parlons même plus de leur internationalisme de pacotille, mais pour s’en tenir au Liberté-Égalité-Fraternité (devise de Robespierre, qui leur sert de logo commercial sans substance), ont-elles oublié ou font-elle honteusement semblant de n’avoir jamais su que son unité-indivisibilité ne peut pas plus être remise en cause que la consubstantialité du Père, du Fils et du Saint-Esprit pour les chrétiens ? Qu’attendent-elles pour s’en souvenir, non pas pour se livrer à de glaireux actes de contrition, mais pour sortir de leur pleutre apathie, retrousser leurs manches et faire une bonne fois LEUR DEVOIR bordeldedieu ?!
Les grèves politiques de solidarité sont-elles :
- faites pour les chiens ?
- la terreur des apparatchiks ?
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« L’art de la guerre »
Grèce, le facteur Otan
par Manlio Dinucci
Autant que par affinités culturelles et historiques, la Grèce espère l’aide de la Russie pour résoudre son problème économique. Cependant, le putsch organisé par l’Otan, en 1967, rappelle les limites politiques de la souveraineté des États européens en général et de la Grèce en particulier.
Réseau Voltaire International | Rome (Italie) | 7 avril 2015
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Le souvenir du coup d’État militaire, organisé par l’Otan en 1967, hante la vie politique grecque. Aujourd’hui, la Grèce peut-elle se rapprocher de la Russie ?
Aléxis Tsipras rencontre Vladimir Poutine à Moscou le 8 avril, au moment même où l’UE, la BCE et le FMI tiennent un nouveau sommet sur la Grèce, qui le jour suivant doit rembourser une échéance de 450 millions d’euros du prêt concédé par le Fonds monétaire international.
Les thèmes officiels, dans la rencontre de Moscou, sont ceux du commerce et de l’énergie, dont la possibilité que la Grèce devienne le hub européen du nouveau gazoduc, remplaçant le South Stream bloqué par la Bulgarie sous pression états-unienne, qui, à travers la Turquie, apportera le gaz russe au seuil de l’UE. On parlera aussi d’un possible relâchement des contre-sanctions russes, en permettant l’importation de produits agricoles grecs.
Source : http://www.voltairenet.org/article187269.html
Source d’origine : Il Manifesto (Italie)
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Les théoriciens de la place Syntagma
Alexander Clapp – LRB – 20 mars 2015
Il y a une ville, au sud de Budapest, que les Hongrois appellent Görögfalva, « Village grec ». Son nom officiel est Nikos Beloyannis, qui fut un commandant communiste dans la Guerre Civile grecque. Après la défaite de la gauche, en 1949, certains communistes grecs s’enfuirent en Yougoslavie, d’autres en Asie Centrale, une poignée construisit cette colonie temporaire, juste en dehors de la grande plaine hongroise. Ils n’avaient pas l’intention de rester plus de quelques mois, le temps, pour la gauche, de se regrouper en Grèce. Leur équipe de football, Partisan, installa ses buts en dehors de l’agglomération. Leur journal, La lutte populaire, continua la guerre civile sur le papier. La place centrale, Lenin Tér, fut pavée en bleu à la grecque. Un prix fut attribué chaque année à l’étudiant qui réussissait la meilleure copie du portrait de Beloyannis par Picasso : L’homme à l’œillet.
Après la chute de la Junte, quelques villageois retournèrent en Grèce. D’autres, plus nombreux, repartirent en 1989. Aujourd’hui, aucun enfant n’y parle plus le grec, quoique l’école locale fasse venir des expatriés grecs de Budapest pour y enseigner. Quand j’ai demandé à un des expats ce qu’il pensait de Syriza, il m’a demandé si Alexis avait viré l’Église ou pas. Au café Platán, passé la rue Szarafisz, les derniers colons d’origine de Beloyannis étaient réunis autour d’une antique télévision, installée en-dessous d’un portrait d’Engels.
Syriza est, à ce jour, la meilleure chose qu’ait produit la gauche restée au pays. Le premier pas important vers sa victoire électorale ultérieure avait été fait en 1992, quand une coalition appelée Synapismos avait regroupé les gens de gauche restés en Grèce après la Guerre Civile – qui étaient alors des eurocommunistes – et ceux rentrés d’endroits comme Beloyannis, qui étaient restés des communistes « orthodoxes ». Trois ans plus tard, presque la moitié des communistes orthodoxes avaient quitté la coalition, à cause de ce qu’ils considéraient comme trop de capitulations devant les intérêts capitalistes. Alexis Tsipras, le mouton noir d’une famille d’ingénieurs affiliée au Pasok, qui avait 18 ans à l’époque, y resta avec les eurocommunistes. La mission que s’était donnée Synapismos était d’établir une « vraie » gauche grecque. En 1981, Andreas Papandreou avait fait campagne sur la promesse que le Pasok apporterait le socialisme à la Grèce. Mais la « décade Pasok » des années 80 ne fit qu’accroître le clientélisme qu’il avait juré d’éradiquer. À partir des années 1990, lorsque le « nouveau Pasok » d’après la mort de Papandreou accueillit à bras ouverts les investissements étrangers et les privatisations, Synapismos devint le foyer des éléments de la gauche radicale. Les jusqu’auboutistes repentants revinrent et les premiers groupes de l’altermondialisme se joignirent à eux. « L’idée était de représenter au Parlement un radicalisme que devaient bien avoir dans leurs gènes les électeurs qui avaient jusque là voté mécaniquement pour le Pasok », m’expliqua Alékos Alavános, le mentor intellectuel de Tsipras. « Mais il était difficile de savoir à l’avance à quel point la base populaire du Pasok y resterait intégrée. Offrir une alternative électorale n’était pas assez. Nous devions creuser plus profond. »
( Ci-dessus : Alékos Alavános)
Synapismos commença à attirer des féministes, des verts et de jeunes militants. Ceux-là furent les sunistóses, les « petits bouts », qui fusionnèrent en Syriza en 2004. Les eurocommunistes étaient les plus loin à la droite de tous ces bouts. Depuis lors, le fossé n’a fait que se creuser, entre les fondateurs pro-européens de Syriza et la faction anti-U.E., constituée de tous ceux qui avaient afflué dans le parti au milieu des années 2000, puis qui l’ont inondé au début de la crise économique.
Quand Syriza arriva au pouvoir le 25 janvier, il fit un certain nombre de gestes et de déclarations symboliques, pour bien montrer qu’il appartenait toujours à la « vraie » gauche. Tsipras rendit visite à Kaisariani, site d’un massacre de partisans communistes par les nazis en mai 1944. La privatisation du port du Pirée par la compagnie de navigation chinoise Cosco « serait revue en faveur du peuple grec ». La fermeture des centres de détention pour réfugiés était à l’étude. Les immigrants sans papiers ne pourraient plus être fouillés à tout bout de champ par la police. La citoyenneté grecque serait accordée à tous les enfants de parents migrants. La police anti-émeute et les Unités pour le Rétablissement de l’Ordre ne pourraient plus circuler armés de fusils. La majorité des membres de Syriza élus au Parlement prêtèrent serment civilement, non plus religieusement.
Pour un parti de gauche, en Grèce, prendre le pouvoir est une chose, mais une autre est, pour ses membres, de parler – même dans des déclarations publiques – comme ils prendraient la parole dans des séances de théorie critique. Le cabinet de Tsipras est plein de gens qui ont tous un doctorat, plus familiers de la « gouvernementalité » que du gouvernement. Yannis Panousis, un théoricien de la criminologie, est en charge du ministère de l’Ordre public. Le Transport maritime est revenu à Giorgos Stathakis, historien du plan Marshall ; Ginnis Tsironis, un écologiste, est ministre de l’Environnement ; Aristidis Baltas, qui est philosophe, a le ministère de l’Éducation ; Costas Fotakis, physicien des lasers est ministre de la Recherche. La gauche eurocommuniste, d’où sont issus les plus vieux universitaires de Syriza, était une créature du système universitaire grec. Beaucoup d’entre ses membres avaient été à l’université Panteion d’Athènes, spécialisée dans la théorie sociale et politique, ou bien étaient sortis d’universités provinciales, fondées sous la Junte mais qui étaient devenues les principaux foyers de politisation pendant les années Pasok.
Giorgos Stathakis, ministre du Transport maritime
Ginnis Tsironis, ministre de l’Environnement
Aristidis Baltas, ministre de l’Éducation
Costas Fotakis, ministre de la Recherche
Nikos Kotzias, ministre des Affaires étrangères
La victoire de Syriza a aussi provoqué une fuite des cerveaux à l’envers. Il y a un an d’ici, Rania Antonopoulos était directrice de l’égalité économique entre les genres du Levy Institute, au Bard College de New York, où elle s’était spécialisée au cours des années 70, dans les actes de garantie dans l’emploi rural en Inde. « En 2012, j’envoyai un message “Contactez-moi” via la version en ligne du journal de Syriza, Avgi. “Écoutez, mon nom est Rania Antonopoulos. J’ai assisté, en Amérique Latine, à tout ce qui se passe en Grèce. Si je puis faire quoi que ce soit pour vous, n’hésitez pas.” ». Euclid Tsakalotos, un économiste de Syriza, lui a écrit par retour, et Antonopoulos a commencé à se rendre en Grèce tous les quelques mois, pour rencontrer les dirigeants de Syriza. Elle est aujourd’hui vice-ministre du Travail. « Faire une carrière politique ne m’intéresse pas », dit-elle, « je n’ai pas l’intention de rester en politique. Syriza m’a demandé de m’y coller par devoir patriotique. »
Rania Antonopoulos
Syriza n’essaie nullement de dissimuler ses penchants universitaires. En bas de la rue où se trouve le quartier-général croulant du parti, à Psiri, une redoute gauchiste d’Athènes, se trouve l’Institut Nicos Poulantzas. C’est le think tank de Syriza, où quelque deux cents intellectuels du parti, pour la plupart économistes, polissent leurs théories depuis 1997. Des gens de gauche de plus de vingt organisations similaires d’Europe – la Fondation Rosa Luxembourg en Allemagne, les Espaces Marx en France – arrivent chaque semaine pour y faire des conférences. Un bureau de presse, Nissos, publie chaque année plusieurs volumes d’érudition du parti. Des analyses, produites par des membres du parti – « Économie politique de la dette publique », par Nikos Theocharakis ; « Développement, reconstruction productive, memoranda et dette en Grèce, pays d’1.5 millions de chômeurs », par Nadia Valavani, ministre des Finances alternatif – paraissent dans Avgi, sur les ondes de Kokkino, la station de radio du parti, et sur left.gr, son blog. « Les politiques de Syriza nous laissent faire marcher l’Institut comme nous l’entendons », m’a dit Georgios Daremas, un de ses administrateurs. « Nous émettons des idées ; ils se saisissent de l’une ou l’autre. »
Nicos Poulantzas, un sociologue marxiste qui s’est tué en 1979 à l’âge de 43 ans [en se jetant de la Tour Montparnasse, NdT], a été la personnalité décisive dans le renouvellement de la pensée de gauche en Grèce, et il reste l’ancre intellectuelle du parti. Une poignée des dirigeants de Syriza d’aujourd’hui l’ont connu. Son cousin Vasilis m’a montré une photo de Poulantzas, prise le soir de la chute de la Junte en 1974. Il est en train de rire avec Konstantinos Tsoukalas, aujourd’hui un des Membres du Parlement de Syriza. Ils sont entourés de femmes, de bouteilles de champagne et de ballons. Quelqu’un a donné à Poulantzas une pancarte « Tu es le prêtre du marxisme » et une grande banderole pend du plafond : « La Grèce vous salue, sociologues prophétiques ! ». De Paris, où il enseignait, Poulantzas avait regardé la Junte s’effondrer, lorsque la faction policière de Joannidis, avait renversé la faction militaire de Papadopoulos. Il était préoccupé par les exemples du Chili et du Portugal. Au Chili, la gauche n’avait pas pénétré une structure étatique cruciale : l’armée. Au Portugal, en 1974-75, elle avait démoli certains secteurs de l’État en voulant les occuper – le Ministère de l’Agriculture par exemple – ce qui avait rendu totalement inutilisables certaines parties de l’État récemment acquises. La tâche de la gauche n’était pas de s’emparer de l’État par un assaut frontal, à la Lénine, ni de l’encercler par des mouvements populaires, comme le préconisait Gramsci. C’est une stratégie double qui s’imposait. Pour commencer, la gauche devait pénétrer l’État. Ceci exigeait qu’elle jouât le jeu électoral. Une fois à l’intérieur, elle pourrait démocratiser les structures de l’État en détruisant les réseaux du pouvoir capitaliste. « La lutte », a écrit Poulantzas, « doit toujours s’exprimer par le développement de mouvements populaires, d’organismes démocratiques, surgissant à la base comme des champignons apparaissent après la pluie, et par l’essor de centres d’auto-direction. » Ces mouvements auraient pour tâche de travailler en tandem avec le front politique, mais d’agir aussi comme un frein. Le système du parti ne doit jamais prendre le pas sur l’expression de la volonté populaire.
Les dirigeants de Syriza se sont bien gardés de politiser les mouvements de citoyens, non seulement parce que Poulantzas y était opposé, mais parce qu’ils comprennent combien il serait facile, en Grèce, pour des sociétés d’organisation civile, de se faire capturer par des appareils d’État. L’euphorie dans laquelle baigne Syriza lui donne quelquefois l’apparence d’un mouvement populaire de base. Il n'en est rien. Syriza n’a pas dirigé de grèves de travailleurs ; il n’a pas figuré de façon éminente dans les initiatives sociales – soupes populaires, conseils locaux, refuges pour sans abri – qui ont émergé suite à l’effondrement des services publics de base. Quand des manifestations estudiantines et antifascistes ont commencé, en 2006, à Athènes, Syriza les a soutenues en paroles mais n’a guère fait plus. Pendant la crise, le parti n’a pas détourné à son profit les manifestations anti-austérité, en dépit de leur potentiel politique. Les Grecs ont voté pour Syriza, parce que, seuls à gauche, ses dirigeants offraient un complément politique à l’espèce d’activisme que représentaient tous les mouvements de rues.
Syriza fait office de conduit. Eleni Kyramargiou, qui prépare son doctorat en sociologie, consacre son temps libre à faire du bénévolat dans les refuges pour immigrants. Konstantina Venieri, qui est journaliste, collecte de la nourriture en boîtes pour le comité de son quartier. Anastasia Veritzoglou, qui est infirmière à temps partiel, travaille bénévolement dans une clinique médicale improvisée. C’est leur appartenance à Syriza qui les relie. Pour y adhérer, vous devez prouver votre engagement auprès de mouvements qui n’en font pas techniquement partie ; pendant quelques mois, on vous demande de participer à des rassemblements solidaires ou de prendre part à des initiatives populaires. Syriza garde ces réseaux bien séparés de ses opérations politiques. Ses dirigeants parlent de drastiriopoisi, « activation », pas de « recrutement ». Le parti n’a que 35.000 membres, une fraction du soutien dont dispose Démocratie Nouvelle, le parti qu’il a écarté du pouvoir. L’identité de Syriza n’est pas fixe : on ne doit pas y avoir sa carte de membre, et la plupart des « membres » auxquels j’ai parlé m’ont assuré qu’ils n’avaient, en fait, jamais rien signé du tout. Il est même difficile de se rendre aux meetings de Syriza dans Athènes ; personne n’a l’air de savoir s’il y en a régulièrement.
Tsipras a peu d’amis dans l’élite capitaliste et un accès limité aux fonds étrangers qui ont permis au Pasok de balancer des cadeaux en guise de carottes sous le nez de chaque secteur de la société grecque. Syriza ne peut pas distribuer de subventions. Ce qu’il fait, c’est générer du soutien en étant ce que Lucio Magni a reproché au Parti Communiste Italien de n’être jamais devenu : un « parti léger », qui interprète la société au lieu d’essayer de la transformer. « Quand vous étiez dirigeant syndical sous le Pasok, votre travail, c’était d’être reconnaissant envers le gouvernement », dit Giorgos Gogos, secrétaire général de l’Union des Dockers du Pirée. « Syriza exige que nous nous fassions le relais des critiques. »
Giorgos Gogos
À Thessalonique, en 2011, l’État s’est donné beaucoup de mal pour essayer de privatiser l’approvisionnement de la ville en eau. Plus de cinquante groupes de citoyens se sont spontanément mobilisés pour s’opposer à cette mesure ; il y a eu des manifestations en chaîne et des piquets devant des bâtiments gouvernementaux. Tsipras en a entendu parler et a encouragé des groupes à continuer de se former. Au niveau de l’État, il leur a donné une voix : « L’eau n’est pas une marchandise » a-t-il dit au Parlement. « Il faut organiser un référendum pour la sauvegarder. Nous sommes les 99%. » Finalement, le référendum a eu lieu et, en mai dernier, les habitants de Thessalonique ont voté pour arrêter la privatisation. Un membre éminent du Pasok, Kriton Arsenis, a aussitôt fait allégeance à Syriza. Et un contingent de parlementaires de Syriza a fait le voyage de Dublin pour expliquer aux Irlandais comment organiser une campagne de ce genre.
Beaucoup d’observateurs sympathisants de la gauche grecque prétendent que Syriza n’est pas dans une position qui lui permette de réformer l’État. Ils font allusion à la nébuleuse de l’armée, de la police, du système judiciaire et des oligarques grecs, au pays et à l’étranger. Dans ses interviews, Yanis Varoufakis, le ministre des Finances, les appelle « les forces obscures » du pays. Elles sont « l’état profond », qui s’est cristallisé pendant la Guerre Civile en arme de la droite pour éradiquer les communistes. Les parents de beaucoup de membres de Syriza ont été victimes des persécutions de la droite pendant ces années-là ; le père de Varoufakis a été emprisonné à Makrouisos, un camp de concentration pour prisonniers politiques situé au large des côtes de l’Attique. Des membres de Syriza eux-mêmes ont combattu la rechute dans l’autoritarisme sous la Junte. Étudiante, Nadia Valavani a été torturée par la police des colonels.
Nadia Valavani
Cette frange de droite a continué de se tapir et de menacer après la chute de la Junte, pendant les metapolitefsi, les soi-disant décennies de prospérité démocratique. Sa manifestation la plus visible est Aube dorée, qui a pu prospérer, en partie parce que le ministère de la Justice l’a autorisé à opérer depuis des années avec une impunité virtuelle. Elle a des soutiens dans l’Église et dans la police. Deux généraux à la retraite siègent au Parlement européen sous l’étiquette Aube dorée.
Pour ce qui est de l’Église, Tsipras est apparu en public avec l’archevêque Ieronimos, pour montrer aux Grecs qu’il n’essaie pas de renverser l’orthodoxie. Quant à l’armée, il fraie avec quelques généraux à la retraite. Le mois dernier, au ministère de la Défense, j’ai rencontré l’un d’entre eux, Nikos Tsokas, un commandant de l’OTAN, que les Grecs appellent maintenant kokkinos stratigos, le « général rouge ».
Le général à la retraite Nikos Toskas
Tsipras a parlé avec lui l’été de 2012, et les deux hommes sont tombés d’accord sur le fait que quelque chose devait être entrepris, à propos du nombre croissant d’incursions turques dans l’espace aérien grec. Toskas est aujourd’hui sous-secrétaire à la Défense. Malgré la riche histoire des coups d’état militaires en Grèce – huit dans le siècle qui vient de s’achever – l’armée grecque ne représente pas, pour l’instant, un danger pour Syriza. La dernière rumeur en date sur l’éventualité d’un nouveau putsch remonte à 2011 et se rapporte à un chef militaire nationaliste du nom de Frangoulis Frangos. Je l’ai rencontré les jours derniers à la terrasse d’un café, sous l’Acropole. « Je peux juste dire que nous n’avons pas eu de sérieux problèmes avec les politiques depuis quelques décennies » m’a dit Frangos. « Ils nous respectent et nous les respectons. »
C’est la police qui pourrait causer le plus d’ennuis à Syriza. En 2010, alors que les premières mesures d’austérité faisaient leur apparition, une nouvelle force de police spéciale appelée DIAS fut créée. Les policiers de DIAS circulent par paires, à moto, dans Athènes, et y créent une atmosphère d’intimidation étatique. « Pour ce qui concerne DIAS, nous avons demandé à l’État de ne pas se servir uniquement d’hommes inéduqués d’à peine passé vingt ans » m’a dit Antonis Zacharioudakis, vice-président du Syndicat des policiers. « Mais les politiciens voulaient que l’austérité soit imposée par une très faible partie de la société, presque comme par un groupe d’étrangers. Il y a des dizaines de milliers d’hommes comme ceux-là qui, au cours des cinq dernières années ont appliqué ainsi la répression d’État ; et ils savent très bien que la population, dans son ensemble, les méprise. »
La police a mis Syriza dans une position particulière. Le parti doit donner suite à sa promesse de ne pas continuer à donner l’impression que l’État est en guerre avec le peuple. En même temps, réduire les forces de police pourrait aggraver le sentiment d’insécurité. La mise en œuvre de la politique du gouvernement en matière d’immigration a été maladroite : les centres de rétention pour immigrés ont été fermés dans tout le pays, mais la décision de Syriza de relâcher les immigrants sur la place Omonia d’Athènes pousse les gens dans les bras de la droite. Un autre problème est celui des salaires des employés du secteur public. Ils dépendent des fonds d’urgence alloués à la Grèce, à condition qu’elle persévère dans l’austérité, à laquelle, bien sûr, Syriza a juré de résister. Si on refuse à la Grèce les prêts dont elle a besoin pour payer ses salariés, la police prendra-t-elle fait et cause pour les populistes anti-Syriza ? Démocratie Nouvelle a jadis amadoué la police avec des promesses de hausses de salaires « quand l’ordre économique serait rétabli ». Syriza n’a en rien fait mine de l’imiter. En dépit des tentatives faites pour purger la police de quiconque porte des svastikas tatouées ou affiche des sympathies fascistes, la moitié des officiers continue à voter pour Aube dorée. Dans les semaines qui viennent, Yannis Panousis, un criminologue de l’université d’Athènes et aujourd’hui vice-ministre de la Protection civile, a l’intention de superviser le licenciement de tous les officiers de police ayant des liens avec Aube dorée. Il devrait y en avoir une centaine m’a-t-il dit, peut-être plus. « J’ai enseigné à la plupart de ces types, à l’académie de police. Ils sont très faciles à repérer. » Son intention est de desserrer l’étroite association entre la police et Aube dorée en éduquant les policiers dans des universités, aux côtés des autres étudiants. Mais des réformes de cette envergure prennent du temps, et Syriza n’en a pas beaucoup à sa disposition. Le procès d’Aube dorée commence ce mois-ci. On craint que ses chefs se présentent comme des victimes d’un système judiciaire injuste, ne soient acquittés et sortent de prison en héros. En juin, l’extension de dette obtenue de l’U.E. par Syriza vient à échéance.
Yannis Panousis, « le plus poitevin des ministres grecs ».
L’intransigeance de l’Allemagne au cours du premier round des négociations a mis Syriza face au dilemme de trahir entièrement sa rhétorique anti-austérité ou de proposer un référendum public sur l’opportunité, pour la Grèce, de sortir de l’U.E. Dans le premier cas, il perd tout espoir de soutien populaire massif. Dans le second, il perd le filet de sauvegarde supposé lui être garanti par son appartenance à l’U.E.
J’ai quitté Athènes peu avant les élections et j’y suis retourné un mois après. C’est une ville légèrement différente que j’ai retrouvée. Il y avait davantage d’immigrants qui erraient dans les rues, particulièrement dans des endroits comme Mets, où je n’en avais jamais vu avant. Ils avaient toujours l’air malheureux. La Grèce, pour eux, est un relais d’étape, pas un domicile. Les gens, à Kodonaki, s’en plaignaient par-dessus leurs apéritifs. Mais, dans l’ensemble, les Athéniens étaient plus xalara, « ragaillardis », comme disent les Grecs. Syriza avait fait des petits mais substantiels progrès. Les grilles en fer forgé qui entouraient le Parlement avaient été enlevées. Mon voisin m’a soutenu qu’il avait vu des politiciens prendre le métro pour se rendre au Parlement. Les gens se plaignent toujours du gouvernement, mais plus avec la hargne qu’ils déversaient sur Antonis Samaras. La présence policière a été réduite. Dans la rue Ermou, près de l’accès à la place Syntagma, où ils avaient coutume de traînasser en groupes armés, les sbires ont disparu, du moins pour l’instant.
Traduction c.l. pour Les Grosses Orchades.
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Quelques liens :
http://tlaxcala-int.blogspot.be/2015/01/la-grece-et-ses-deux-alexis.html
http://www.oocities.org/tourkopanayis/pictures.html
http://lesamisdekarlmarx.over-blog.com/article-23948329.html
D’autres liens de sites à suivre :
https://solidaritefrancogrecque.wordpress.com/
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Au moment où on met en ligne, on ne sait rien des accords pris ou pas pris à Moscou par le premier ministre grec et le président de Russie.
Il a filtré que les deux pays ont beaucoup de choses à partager, que, sans doute, le Turk Stream, qui devait s’arrêter à la frontière grecque, va traverser le pays et ainsi fournir du gaz au Sud de l’Europe ; que les sanctions russes à l’encontre de l’Europe seront probablement levées en ce qui concerne la Grèce, et, bref, que la Russie aidera la Grèce de toutes les façons possibles sauf en lui baillant des fonds qui « ne feraient qu’envenimer ses rapports avec l’U.E. ». Pour le reste, il vous faudra, comme nous, attendre.
Russia and Greece to ink Turkish Stream gas pipeline deal within days - Greek minister
http://rt.com/business/248629-greece-russia-memorandum-pipeline/
Russia Rapprochement Highly Popular in Greece
http://russia-insider.com/en/playing-putin-card/5492
Putin and Greek PM Agree Closer Ties Short of Russian Financial Aid
http://russia-insider.com/en/putin-offers-cooperation-greece-no-financial-aid/5434
Greeks Warned Not to Ride With Putin by Mainstream
Phil Butler
[Updated] Greece’s Prime Minister is meeting with Russia’s Vladmir Putin today to discuss closer relations and a possible bailout of the Greek economy. Meanwhile, western mainstream media exhibits fearful commentary on the potential.
http://russia-insider.com/en/greeks-warned-mainstrream-media-beware-putin/5417
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Entretemps, Madame Sarah Wagenknecht (Die Linke) a « remis ça ». Vous vous souvenez de son retentissant discours du mois de novembre dernier, où elle avait sonné les cloches à la chancelière ? Le 19 mars 2015, elle est remontée à la tribune du Bundestag (affichant plus que jamais sa couleur) pour mettre à jour ses remontrances.
Discours de Sahra Wagenknecht au Bundestag : « Mme Merkel, votre politique atlantiste emmène l’Europe droit dans le mur »
Transcription traduite en français
« Monsieur le président, Madame la Chancelière, Mesdames, Messieurs. En des temps meilleurs, la politique étrangère allemande avait deux priorités : l’intégration européenne, et une politique de bon voisinage avec la Russie. Cela devrait vous inquiéter, Madame Merkel, si vous daigniez m’écouter, que presque dix ans après votre nomination comme chancelière, les nationalismes et les conflits en Europe prospèrent plus que jamais, et que les dissensions avec la Russie laissent la place à une nouvelle Guerre froide.
Le directeur de l’influent think-tank (groupe de réflexion – NdT) Stratfor, lors d’une récente conférence de presse, a dressé une liste claire des intérêts spécifiques des USA en Europe : le principal est celui d’éviter une alliance entre l’Allemagne et la Russie, car, je cite : « Ensemble, ils seraient la seule puissance capable de menacer les États-Unis. » Cette supposée menace des intérêts américains a été repoussée avec succès dans l’immédiat. L’Union européenne est née, et a cherché dans le contexte du partenariat avec l’Est, à casser toute coopération économique et politique entre les pays intéressés et la Russie. Mme Merkel, cela visait évidemment et directement la Russie ! Ce n’était pas dans l’intérêt des pays concernés.
Source : http://arretsurinfo.ch/mme-merkel-votre-politique-atlanti...
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Pourquoi des polars ? Parce que quelqu’un nous a écrit « Vous faites des posts sur la Grèce et vous ne parlez même pas de Markaris ». Vrai. Et regrettable. D’où cette rubrique.
Nous commencerons cependant par un autre…
Un polar hexagonal fait la presque Une de la grosse cavalerie des merdias ces jours-ci : le dernier opus de Fred Vargas. On ne le lira pas. Non qu’il soit nul comme polar – on n’en sait forcément rien – mais parce qu’il y en a des tas d’autres et qu’on ne traîne pas avec n’importe qui. Comme si cela ne suffisait pas, c’est le moment qu’a choisi le Saker francophone pour publier un papier où la même auteuse tartine des considérations pseudo-philo sur ce qu’elle prend pour des révolutions. Ouch ! La totale.
Disons-le tout net, ils sont plutôt bien les Saker depuis leurs soubresauts de janvier dernier. Ils traduisent tant de choses intéressantes qu’on a même du mal à les suivre. Mais se lancent aussi quelquefois dans la publication de quelque article franco-français pas toujours à la hauteur de leurs ambitions. Comme quand la chère Rosa Llorens fait des infidélités au Grand Soir pour débloquer sur le pape… Ou comme cette sorte de carte blanche à Vargas. À notre avis, ils sont jeunes et n’ont pas encore appris à trier, se cultiver un peu en politique. Pas dur : il suffit d’appliquer quelques règles universelles de morale publique en guise de grille de décryptage. Et, bon, le monde ne s’est pas fait en un jour.
Donc, Vargas. Nous, qui sommes assez vieux pour savoir trier et qui avons lu jadis, non sans plaisir, ses anciens titres, nous savons aussi que mémé Vargas est de la bande à Charlie. Le vrai Saker a dit ce qu’il en pensait et nous pensons de même. Résumé lapidaire d’un autre grand (William Blum Anti-Empire Report Hé ho le Saker francophone, besoin de traducteurs !) :
« En politique internationale, les Charlie Hebdo étaient néo-conservateurs. Ils ont soutenu chacune des interventions de l’OTAN, de la Yougoslavie à celles d’aujourd’hui. Ils étaient anti-musulmans, anti-Hamas (ou toute autre organisation palestinienne), anti-russes, anti-cubains (à l’exception d’un seul d’entre eux), anti-Hugo Chavez, anti-Iran, anti-Syrie, pro-Pussy Riots, pro-Kiev. Ai-je besoin de continuer ? »
Au moment de l’ubuesque Appel des Douze, nous nous étions ici demandé pourquoi ils n’étaient pas treize. Autrement dit : Fred Vargas-BHL même combat.
Or, voilà-t-il pas que, dans sa dernière histoire de gendarmes-z-et-voleurs, elle s’en prend à Robespierre. Ou plutôt, à ces quelques historiens et péquenots qui ont récemment cassé leurs tirelires pour acheter, à la place d’un État en-dessous de tout, à quelqu’un qui n’aurait pas dû se les faire payer, de précieuses archives nationales. (Ce n’est pas parce que le Pirée est chinois que les lettres de Robespierre doivent devenir yankees !). En panne d’inspiration Mâme Vargas ? Plus cap d’inventer des personnages de fiction dignes d’intérêt ? Allez savoir. Et tous les plumitifs à gages de service de se récrier : Ah, que c’est bien, ce livre, et, ah, que Fred Vargas est sans conteste l’Agatha Christie des Batignolles !
Une question qu’on se pose : si elle tient tant que ça à jouer les Patricia Cornwell… si elle aime tant que ça les tueurs en série – vrais ou supposés – pourquoi ne se sert-elle pas des siens, de ceux qu’elle admire ? On va vous le dire : « Robespierre » fait vendre. George Doublevé c’est moins sûr. Elle devrait le savoir, pourtant, que la guillotine, même au temps de M. Giscard d’Estaing, n’a jamais coupé qu’une tête à la fois, alors que ses chéris n’ont pas seulement cramé en masses des populations, inintéressantes certes, mais qui vont continuer à crever pendant des dizaines de générations, naître macrocéphales, à deux têtes ou sans bras ni jambes, ce qui vous a tout de même une autre gueule dans le polar gore que des archives dédaignées par des clientéleux démago. Nous, ce qu’on en dit…
À part quoi, il y a en ce moment, un journaliste US qui nous plaît bien. Il s’appelle Phil Butler (Hé, ho, le Saker francophone !). Ses papiers sont si jubilatoires que les médias russes pas trop à droite commencent à s’en délecter. La visite en cours d’Alexis Tsipras à Moscou vient de lui donner (voir plus haut dans sa langue) l’occasion de se défouler à cœur joie, sur l’Invincible Armada merdiaque, qui, d’une seule voix, se rue au secours du malheureux PM grec : « Faites gaffe à Poutine ! Il va vous entraîner dans le caca ! » etc. etc. Ne savent visiblement pas, se marre Butler, ce que « Plus rien à perdre » veut dire, et cèdent à une bien réjouissante panique. Ah, comme on le comprend, car c’est toujours – ici aussi - pareil : quand une petite main atlantiste se met à gagner son beefsteack en bavant un peu plus qu’à l’accoutumée sur Robespierre, on sait que les maîtres du monde ont les chocottes. Que Poutine tout seul ne leur suffit plus. Que Poutine + Castro + Chavez + Khadafi + Nasrallah + Assad non plus. Qu’il leur faut y ajouter Robespierre, mort depuis 221 ans. Croyez-nous, c’est jouissif.
Une autre fois, faites-nous penser de vous parler de Mémé Sigaut.
Mais trêve de bavardages :
Pétros MÁRKARIS
Romancier grec né à Istanboul en 1937. Scénariste de cinéma et de télévision et auteur d’un certain nombre d’ouvrages dont une petite dizaine de romans policiers plus ou moins athéniens et contemporains. Accessoirement spécialiste de Bertold Brecht et traducteur de Goethe et de Wedekind.
Son commissaire Charitos flirte avec la soixantaine, a une épouse prénommée Adrienne (Adriani en grec) qui a toujours raison, ce qui l’énerve, une fille surdouée (Ekaterina) qui fait des études de droit et une Mirafiori hors d’âge dont le dernier soupir toujours imminent constitue de livre en livre, un suspense qui en vaut bien d’autres. Il sillonne avec elle des rues d’Athènes chroniquement embouteillées aux noms imprononçables et dont il ne nous fait grâce d’aucune. Pas de raison ! La Ve Avenue, c’est ringard, à force.
Sa caractéristique principale, à Charitos, c’est qu’il a commencé sa carrière de jeune flic dans les prisons de la Junte et que, blanchi sous le Pasok – vous dire s’il est écoeuré – il n’a jamais tout à fait perdu le contact avec d’aucuns à qui il lui était arrivé de glisser un bout de mégot entre les lèvres, au sortir d’une séance de torture, persuadé que ce serait le dernier. Lambros Zissis est de ceux-là, aussi revenu de tout moralement que physiquement, qui vit en misanthrope, loin de la foule exaspérante. Il va le voir, quand il n’arrive pas à s’expliquer politiquement quelque chose, et parce qu’il fait le meilleur café d’Athènes. Il n’est d’ailleurs jamais si heureux que lorsqu’il peut s’asseoir, loin des réflexions d’Adriani, à la terrasse ou dans le fond d’un café, pour en siroter un, même tiède, même si le garçon le snobe.
- Cette fois, nous sommes d’accord, dis-je en souriant.
- Erreur. Moi, je suis avec l’assassin.
Il a de nouveau son air malin. Et il change soudain de sujet :
- J’ai appris que Katérina va s’occuper des immigrés. Bravo.
Toujours le même. Il ne dit pas « Katérina m’a dit », mais « j’ai appris », craignant que je ne sois fâché de ce que ma fille et lui soient en contact. Mais je sais bien qu’elle lui dit tout, lui demande toujours conseil, et cela ne me gêne en rien, au contraire, je crois qu’il lui fait du bien en lui disant ce que je ne peux ou ne sais pas lui dire.
- Dans tout ce que j’ai fait, je me suis toujours planté dit Zissis. Sauf avec ta fille. Dès la première rencontre, quand tu me l’as amenée et que tu nous as laissés seuls, j’ai compris que cette fille-là allait tout faire bien.
Oui, dans les romans de Markaris, la jeune génération « remet ça », comme dans l’article d’Alexander Clapp. Ses trois derniers volumes parus forment un tout : la Trilogie du jugement. Le dernier, publié en 2012, anticipe les bouleversements actuels, même si ce qu’il annonce n’est pas tout à fait ce qui se passe, parce que le futur ne réalise jamais vraiment ce qu’on craint ni ce qu’on espère. Vous savez… les impondérables.
Liquidations à la grecque,
traduit par Michel Volkovitch,
Paris, Seuil, 2012
réédition, Paris, Points, 2013
336 pages
Le Justicier d’Athènes,
traduit par Michel Volkovitch, Paris, Seuil, 2013
réédition, Paris, Points, 2014
336 pages
Pain, éducation et liberté
traduit par Michel Volkovitch,
Paris, Seuil, 2014
256 pages
Que cela ne vous empêche pas de lire ceux qui les ont précédés :
- Journal de la nuit
- Une défense béton
- Le Che s’est suicidé
- Actionnaire principal
- L’empoisonneuse d’Istanboul
Et ceux qui ne manqueront pas de les suivre.
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Quelque chose, à la réflexion, nous a frappés, c’est que les autres anciennes dictatures ont, elles aussi, leurs Pétros Markaris, auteurs marqués par le passé, dont les héros sont souvent des rescapés de l’enfer à visage humain. Anciens jeunes idéalistes qui ont tout affronté, tout enduré et survécu. Qui se retrouvent à gagner chichement leur vie, au milieu de nouvelles couches à iPads et à selfies, tels Gulliver chez les pygmées, d’une postérité pour laquelle ils auraient sacrifié leur vie et qui ne les voit même pas.
On ne vous fera pas l’injure de vous dire qui est le grand Montalban, emblématique au point que le grand Camilleri a donné son nom à son héros principal, avec un o au bout pour faire italien. Et on ne va vous mentionner qu’un titre de chacun d’eux. À vous de trouver les autres si cela vous intéresse, en tapant leurs noms dans Google.
Espagne
Manuel Vásquez MONTALBÁN
Né en 1939, mort en 2003 (d’un arrêt cardiaque à l’aéroport de Bangkok). Catalan, fils d’une couturière et d’un militant du PSUC.
Surtout connu pour ses romans policiers dont le héros est Pepe Carvalho. Inclassable, il se définissait lui-même « journaliste, romancier, poète, essayiste, anthologiste, préfacier, humoriste, critique et gastronome », ou plus simplement « communiste hédoniste et sentimental ».
On se rappellera ses débuts en fanfare de 1972 avec J’ai tué Kennedy.
Et on trouvera la (très longue) liste de ses autres œuvres sur Wikipedia.
Manuel Vasquez Montalban
J’ai tué Kennedy, ou les mémoires d’un garde du corps
Christian Bourgois – 1994 – 211 pages
Seuil (Points Poche) – 2007 – 203 pages
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Francisco González LEDESMA
Né à Barcelone, en 1927, mort à Barcelone, le 2 mars dernier, à 88 ans.
Il a d’abord, comme Simenon, publié sous de nombreux pseudonymes : Silver Kane, Rosa Alcázar, Fernando Robles, Taylor Nummy, Enrique Moriel. Jusqu’à ce que la mort de Franco lui permette de le faire enfin sous son véritable patronyme. Los Napoleones sera suivi de beaucoup d’autres et Ledesma collectionnera les prix.
Il est le père de l’inspecteur Ricardo Mendez, qui n’a rien à envier à Kostas Charitos, à Pepe Carvalho ou à Salvo Montalbano. Une sacrée génération !
Pour la plupart situés à Barcelone, ses romans ont pour cadre les quartiers populaires où se démènent des marginaux et des ouvriers, maltraités par le franquisme et laissés pour compte de la démocratie. L'inspecteur Méndez y mène ses enquêtes de façon assez peu conventionnelle, tout en faisant « preuve d'un aimable scepticisme ».
Mais Barcelone est, bien plus encore que Mendez, le véritable personnage central de ses romans, une Barcelone qui se modernise alors même que l'inspecteur vieillit et qu’il a la nostalgie de ce qu’elle était « avant » et ne sera plus jamais.
Le dossier Barcelone
Paris, Gallimatd, La Noire – 1998
Réédition Gallimard Folio Policier – 2003
368 pages
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ESPAGNE ET… ARGENTINE
Carlos SALEM
Est un écrivain, poète et journaliste argentin, né à Buénos Aires en 1959. Il a fui, comme d’autres, la dictature argentine et vit en Espagne depuis 1988. Installé à Madrid en 2000, il collabore à des magazines comme Cosmopolitan ou Marie-Claire, il faut bien manger, et il écrit des romans, des polars et des livres pour enfants. À partir de 2006, il devient un des animateurs du bar culturel Bukovski Club, où il organise des séances hebdomadaires de lectures d'œuvres poétiques et de courts récits de fiction.
Je reste roi d’Espagne
Arles – Actes Sud – 2011
400 pages
Juan Carlos a disparu, laissant derrière lui une note énigmatique : « Je pars à la recherche de l'enfant. Je reviendrai quand je l'aurai trouvé. Ou pas. Joyeux Noël » Pour lui mettre la main dessus, le ministre de l'Intérieur joue sa dernière carte : José Maria Arregui, l'inspecteur mélancolique et sanguin qui, quelques années plus tôt, a déjà, par hasard, sauvé la vie au roi une première fois...
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CHILI
Ramon Diaz ETEROVIC
Né à Punta Arenas en 1956, principalement connu pour son détective privé Heredia (sans prénom). Il se réclame de la gauche, est marié à l’auteur chilien Sonia González Valdenegro, dont il a trois enfants.
« La novela policial que escribo está estrechamente ligada a los crímenes políticos que han asolado a Chile y a Latinoamérica. Un crimen que abandona el cuarto cerrado o las motivaciones individuales, y se relaciona al poder del Estado, a los negociados políticos y económicos, a la falta de credibilidad en la justicia, a la búsqueda de verdad. La novela policial ha sido para mi una perspectiva para hablar de temas sensibles en la sociedad chilena, como los detenidos desaparecidos, el narcotráfico, la carencia de una democracia real, las traiciones. Mis novelas las siento como una crónica de la historia chilena de los últimos 20 o 25 años, y con las novelas ya escritas y otras que escribiré, deseo construir una suerte de comedia humana chilena. »
La dictature militaire d’Augusto Pinochet (1973-1990) a anéanti l’utopie du président socialiste Salvador Allende, mais elle a tué aussi l’espérance, du moins aux yeux du brave Heredia, souvent embrumé par l’alcool.
Ce privé, Don Quichotte des causes perdues et des petites misères, est un orphelin de l’espoir, désenchanté par la transition démocratique, sans complaisance à l’égard des parvenus, des affairistes, des opportunistes, des repentis, des aigris et des cyniques, méchants caractères typiques du genre humain.
Il vit avec un chat, appelé Simenon, qui n’envoie pas dire à son humain, généralement, ce qu’il pense. On ne sait pourquoi, mais on croirait entendre, quelquefois, son homonyme…
Ramon Díaz-Eterovic
Les sept fils de Simenon
Métailié – 2004
294 pages
À ce jour, six aventures d’Heredia et Simenon ont été traduites en français
Un entretien
https://carnetsduchili.wordpress.com/2011/05/28/ramon-diaz-eterovic/
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ITALIE
Andrea CAMILLERI
On ne pourrait, même si on le voulait, vous les recenser tous, les auteurs italiens survivants de la dictature fasciste et/ou rescapés des années de plomb. Il y faudrait un volume. Contentons-nous de rappeler que chez le plus célèbre et le plus âgé de tous, outre les aventures et mésaventures de Salvo Montalbano et de sa fine équipe, outre les réflexions à deux voix sur le temps présent (avec Saverio Lodato : Un inverno italiano. Cronache con rabbia 2008-2009), il y a aussi les souvenirs du temps de la dictature mussolinienne, quand le vieux Camilleri était un petit balilla de dix ans endoctriné comme les autres.
La prise de Makalé
Paris – Le livre de poche – 2008
277 pages
Une bourgade de Sicile en 1935. Alors que les troupes mussoliniennes envahissent l’Éthiopie, le petit Michilino, six ans, perçoit le monde à travers les valeurs catholiques et fascistes qu’on lui inculque en famille, à l’église, à l’école et dans son groupe de Balilla (encadrement fasciste de la jeunesse). Doué de capacités intellectuelles et sexuelles hors du commun, éduqué dans la haine du communisme et le culte du Duce, l’enfant adhère aveuglément à ces préceptes, sans déceler l’hypocrisie et les contradictions qui sous-tendent la rhétorique des adultes.
Dans une mise en scène magistrale et grotesque de la violence faite au corps et à la conscience d’un enfant victime de l’endoctrinement fasciste, Andrea Camilleri dénonce ici le fanatisme et fait le procès de toutes les hypocrisies sociales et idéologiques.
Un mot en courant vite sur l’osmose qui fait de Camilleri et de son traducteur français, Serge Quadruppani, presque un auteur à deux têtes. Miracles qui se produisent quelquefois.
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La vie et la mort de Nikos Beloyannis ont inspiré un film, réalisé en 1980 par Tzimas Nikos : L’homme à l’œillet, qui a collectionné les distinctions partout où il est passé, mais dont nous n’avons trouvé ni DVD, ni trailer ni même une bête petite vidéo, ne fût-ce que pour la musique originale de Mikis Théodorakis !
Juste un lien, et encore, en anglais :
http://www.tainiothiki.gr/v2/lang_en/filmography/view/1/2...
Misère de la culture en déclin de l’Occident.
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Avouons notre ignorance crasse en matière de cinéma grec, mis à part les films de Cacoyannis qui ont enchanté notre jeunesse. On vous aurait bien mis en ligne une video d’Electre, par exemple. Qui ne se souvient de la belle Irene Papas ? Sauf que… cela n’existe plus (ou pas ?) en français. On les trouve en grec, sous-titrées en anglais, en espagnol, en italien… En français, non. Rien.
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Aurons-nous plus de chance avec l’incontournable Theo Angelopoulos ?
Brèvissime bio :
Theódoros Angelópoulos estné à Athènes, en 1935. C’est en tournant une trilogie sur la crise grecque, au Pirée, qu’il meurt, renversé accidentellement par un motard de la police, le 24 janvier 2012.
Carrière : Études de droit à Athènes. Puis à Paris, depuis 1961 (Sorbonne - philosophie, filmologie, anthropologie - Levi Strauss). Viré de l’IDHEC au bout d’un an pour non-conformisme. Ce sont des choses qui comptent.
Ce manque d’atomes crochus avec l’intelligentsia française (ou l’establishment merdiatico-commercial ?) le poursuivra, puisque La poussière du temps, tourné en 2008, malgré sa réputation internationale, sa Palme d’Or pour L’éternité et un jour et une distribution en or massif (Michel Piccoli, Bruno Ganz, Willem Dafoe et Irène Jacob), ne sera distribué en France qu’en 2013, alors qu’il avait été projeté en ouverture de la Berlinale en février 2009.
À notre minuscule niveau, comment illustrer, en deux ou trois lignes, l’histoire de la Grèce, de ses crises, de son cinéma et des Balkans ? Cela, justement, se trouve réuni dans un film d’Angelopoulos :
Le regard d’Ulysse
1995
Un cinéaste grec exilé revient dans son pays (dans le nord de la Grèce, vers Thessalonique), à la recherche des bobines originales du premier film réalisé dans les Balkans par les frères Manákis au début du XXe siècle. Cette quête va le mener au travers de différents pays des Balkans, après la chute du communisme, de la Bulgarie à la République de Macédoine naissante, pour finir son périple à Sarajevo durant guerre de Bosnie-Herzegovine, dans une Yougoslavie en cours de désintégration. Il arrive finalement sous les balles durant le siège de Sarajevo, où il découvre les précieuses bobines conservées par un vieil homme, projectionniste de cinéma, qui tente tant bien que mal de préserver le patrimoine cinématographique de son pays en pleine explosion.
Deux extraits :
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Quelques images de superbes films :
Marcello Mastroianni, dans L’Apiculteur, 1986
http://www.theguardian.com/film/gallery/2012/jan/26/theo-angelopoulos-best-films-in-pictures
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Quant aux livres, nous avons épinglé deux auteurs (arbitraire et n’importe quoi) :
Nicos Poulantzas
La crise des dictatures – Portugal, Grèce, Espagne
Paris, Seuil, 1976
188 pages
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Dido Sotiriou
d’un jardin d’Anatolie
Les éditeurs français réunis – 1965
259 pages
On en conseille la lecture à ceux qui rêvent de renvoyer des immigrés dans leurs pays d’origine. Cela s’est fait - le saviez-vous ? - dans les années 20, à grande échelle…
Dido Sotiriou
Née en 1909 (en Asie mineure) et morte en 2004 à Athènes, Dido Sotiriou fut une femme de lettres et une journaliste grecque. Elle fut surtout un large pan d’histoire grecque à elle toute seule.
Durant l'occupation de la Grèce, pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a adhèré au Parti communiste et est entrée dans la résistance. Avant cela, elle avait étudié la littérature à la Sorbonne, connu Aragon, Gide et Malraux.
Elle allait publier son premier roman, Les morts attendent, en 1959, qui serait suivi d’Électre en 1961, et de son chef-d'œuvre D'un jardin d'Anatolie, également connu sous le titre Terres de sang, paru en 1962, réédité soixante-cinq fois en Grèce et traduit en six langues.
Lorsqu’elle est morte, âgée de 95 ans, on a retrouvé chez elle 600 manuscrits et, dans un coffre, à la banque, un roman presque achevé, qui avait pour titre Les enfants de Spartacus. Ce livre lui avait été inspiré par les histoires que lui racontait sa sœur, Eli Pappa, lorsqu’elle allait la voir en prison à la fin des années 50. Il y était question de femmes de Thrace, prisonnières politiques.
Le roman se passe en Thrace, dans les deux premières décades du XXe siècle, et à Athènes, dans l’immédiat après « Guerre Civile », et il traite des activités syndicales et de résistance de ses héros, eux-mêmes inspirés par l’histoire du Spartacus historique et des autres esclaves thraces. Elle avait commencé à l’écrire en 1963 et, chaque fois qu’elle avait terminé un chapitre, elle prenait le bus pour aller l’enfermer dans un coffre qu’elle avait loué à la Banque Nationale de Grèce, place Syntagma, pour le soustraire aux attentions de la police politique. C’est là qu’on l’a trouvé. Et il a été, tel quel, publié par les soins de Nikos Beloyannis le Jeune (fils de l’autre, l’homme à l’œillet).
Même morte, Dido Sotiriou gêne encore les fascistes et les nazillons, qui l’étripent à l’envi sur leurs sites. N'est-ce pas plus glorieux qu’une légion d’honneur ?
ta paidia tou spartakou / τα παιδιά του σπάρτακου
(Les enfants de Spartacus)
Kedros – 2006 – (Grec)
Inédit en français
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Et pour finir, puisqu’on n’a pas trouvé le film dont il avait fait la musique :
Athènes, 1995
Mikis Theodorakis
Lors d’un concert donné en son honneur par le Metrople Orkest de Hilversum (Hollande), il monte sur scène et chante avec Georges Dalaras : O Kaimos (Le chagrin)
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On ne le savait pas
Wir waren immer dabei
On vient de l’apprendre après avoir fermé cette mise en ligne : Günther Grass est mort aujourd’hui, dans une clinique de Lübeck, dans sa 88e année.
Le temps nous manque pour dire quelle importance énorme il avait pour nous, pourquoi il était et restera un de nos auteurs de chevet. Pourquoi ses Pelures d’oignon n’en finiront pas de nous rappeler notre propre enfance, si près et dans le camp adverse. Puisque la source est tarie, on chérira encore plus qu’avant notre préféré Rencontre en Westphalie et on repensera souvent au sculpteur qu’il fut d’abord et qui a son musée à Lübeck. Une chose aussi est sûre : on ne lira pas ce que les merdias vont en dire, à quoi bon.
L’honnête hommage que lui rend, dans Le Grand Soir, Eugénie Barbezat nous convient tout à fait.
Günter Grass a cassé son tambour
Eugénie BARBEZAT – LGS – 13 avril 2015
L’éditeur du prix Nobel de Littérature 1999 vient d’annoncer son décès. L’écrivain allemand était âgé de 87 ans.
L’écrivain, père de quatre enfants, qui vivait à Lübeck s’impose comme l’un des auteurs majeurs de l’après-guerre. Il était l’écrivain allemand de la seconde moitié du XXe siècle le plus connu à l’étranger.
Depuis la publication en 1959 de son chef-d’œuvre, Le tambour", un succès planétaire adapté au cinéma par Volker Schloendorff, qui reçut la Palme d’Or à Cannes et l’Oscar du meilleur film, ce fumeur de pipe moustachu aux épaisses lunettes n’a eu de cesse de confronter son pays à son passé nazi, avec sa mauvaise conscience.
Source : http://www.legrandsoir.info/gunter-grass-a-casse-son-tamb...
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Mis en ligne le 13 avril 2015.
15:57 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
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