01/03/2013

RIFIFI - SUITES

1. Vyacheslav Kalinin - Nef des fous .jpg

RIFIFI - SUITES

 

L’auteur nous avait promis quelques lignes supplémentaires pour accompagner son article. Nous pensions à tout sauf à… une suite non moins mouvementée. C’est pourtant de cela qu’il s’agit. D’où notre léger retard, puisqu’il nous a fallu traduire ces  aventures nouvelles, qui ne sont peut-être pas les dernières.



Des oligarques se castagnent en direct!

 

Un divertissement

 

par Israel Shamir

 

Qui a dit que les riches n'étaient bons à rien ? Leurs frasques sont follement divertissantes !  Les nouveaux riches ont de tout temps fourni de quoi alimenter la une des journaux, et la nouvelle moisson d'oligarques russes fait passer la génération précédente des requins de la finance pour de pâles amateurs. Les vieilles fortunes s'anémient, divisées et subdivisées par de scrupuleux juristes en un dédale de sociétés. Tandis que les fortunes toutes fraîches, elles, sont beaucoup plus drôles : elles font leurs cascades en public et n'y vont pas de main morte ! Ces nouveaux héros nationaux comblent le vide laissé par les cheikhs et les maharajas, d'une façon jamais atteinte par nos ternes bureaucrates ; ils paradent au volant de leurs jeeps Humvee à travers la foule moscovite, aussi fiers et sûrs d'eux que les rois indiens à l'époque où ils parcouraient la jungle, juchés sur leurs éléphants de guerre.

 

 

Ils sont plus puissants et moins réservés dans leurs actes que ne le furent jamais les parrains de mafias à la Scorsese . Brutaux, sans scrupules ni limites, de vrais personnages pour drames shakespeariens. Ils sont sans lois et piétinent allègrement les autres, jusqu'à ce que quelqu’un les piétine à leur tour. Un jour bandits sanguinaires, l'autre mécènes généreux ou les deux à la fois, le fait d'avoir choisi Londres pour terrain de règlement de leurs différends leur a donné une audience internationale.

Récemment, deux puissants magnats, Berezovsky et Abramovich, se sont affrontés dans un tribunal londonien pour des milliards – dévoilant ainsi au passage la façon dont ils ont dérobé au peuple russe ses biens les plus précieux sous le régime des privatisations de Boris Yelstine. Ces guerriers de salles d'audience n'ont d'ailleurs aucun scrupule à révéler l'origine de leurs crimes pour parvenir à la victoire; dans ce cas précis, un des mythes du néolibéralisme est tombé, et la lumière a été faite sur un des sombres chapitres de l'histoire russe.

Mais le pillage d'un pays, c’est du lourd, et le public avait plutôt envie d’une farce légère. C'est là que l’affaire Polonsky contre Lebedev a déboulé sous les feux de la rampe, bénéficiant d'une médiatisation internationale grâce au système judiciaire londonien. C'est l'histoire hilarante d'un nabab des médias et d'un baron de l'immobilier, qui se sont bigornés au cours d'une émission de télévision en direct. Seule la plume puissante de Nicolas Gogol, l'auteur russe du 19ème siècle qui a écrit La brouille des deux Ivan (voyez le texte ici) aurait pu rendre justice à l’incident. Il aurait pu l'intituler Comment Alexander Lebedevich tomba à bras raccourcis sur Sergei Polonovich, mais vous devrez vous contenter de mes humbles efforts.

 

BelleNews nous livre un compte-rendu coup par coup de la dérouillée à l'antenne.

 

1.  Devant un public médusé, Alexander Lebedev (le nabab russe) assène une série de coups sur la tête de Sergei Polonsky (le baron de l'immobilier), le faisant tomber de sa chaise. Ceci lors d'un débat télévisé sur la crise économique mondiale. 

2.  Les images de la scène postées sur Youtube montrent Lebedev hors de lui, dans une attitude menaçante à l'égard de Polonsky.

3.  Polonsky tente apparemment de le calmer et Lebedev retourne s'asseoir à nouveau. 

4.  Après quelques secondes, sans crier gare, alors que Polonsky lui tapote gentiment le bras, Lebedev sort à nouveau les poings.

5.  Lebedev frappe Polonsky plusieurs fois sur la tête, l'envoyant à terre.

6. Polonsky recule, sans moyen de se défendre, et les deux hommes se regardent rageusement dans les yeux tandis que les larbins du studio tentent de calmer le jeu. 

 

Note :  Alexander Lebedev est l'un des hommes les plus riches du monde; on estime sa fortune aux alentours de 3,1 milliards de dollars.


En fait, Polonsky et Lebedev sont deux magnats russes d'envergure moyenne; aucun d'eux ne pourrait acheter le Minnesota rubis sur l'ongle. Ils auraient pu devenir de super potes, se félicitant mutuellement de leurs succès respectifs, car tous deux sont des promoteurs immobiliers fiers de l’être, tous deux aiment nager, tous deux aiment s'habiller de façon décontractée plutôt que formelle, tous deux sont assez vains et tous deux sont confrontés à un brusque déclin de leur fortune. Mais, au lieu de cela, ils en sont venus aux coups, car leur destin est d’être des personnages qui s’opposent. Qui est le protagoniste? Qui est l’antagoniste ? Aucun des deux.

 

Sergei Polonsky a 40 ans et fait figure de jeune homme parmi les magnats de la première génération post-soviétique d’hommes d’affaires russes. Il est toujours grand et balaise, à l’image du commando de Bérets Bleus qu’il fut jadis, mais la vie tranquille qu’il mène depuis plusieurs années l’a privé de sa ceinture abdominale d’antan; aujourd’hui, il ressemble davantage à un dauphin joyeux et bien nourri. Sa compagne est elle-même une femme d’affaires connue et une championne de natation.

 

Alexander Lebedev a 12 ans de plus. Sa génération à lui est celle qui a privatisé l’URSS. C’est un caméléon; en quelques années, il est passé du look ex-homme du KGB, strict, ultra-musclé et portant des costumes, à celui de joueur de guitare métrosexuel à la séduisante coupe de cheveux, portant des jeans et des chemises légères. Il a troqué sa femme datant de l’ère soviétique contre une nouvelle qui passe beaucoup mieux devant les caméras.


2 - Lebedev.jpgLebedev a élu domicile, au centre-ville de Moscou, dans un ancien club de scouts bâti dans le plus pur style stalinien, avec colonnes et portiques, qu’il a transformé – après sa privatisation – en modeste manoir doté d’une piscine olympique dans laquelle il passe beaucoup de son temps. Chaque automne, il fuit la morosité moscovite pour sa villa de la Côte d’Azur ou son hôtel particulier de Londres.

 

Polonsky vit dans un luxueux appartement, perché comme le pont supérieur d’un bateau sur le toit avec vue à 360° d’un gratte-ciel surplombant Moscou. Architecte de formation et de profession, il a lui-même conçu et fait construire ledit gratte-ciel et son appartement. Il passe ses week-ends sur une péniche reconvertie, amarrée aux confins de la ville, en compagnie d’un raton laveur domestique, pratiquant le qi gong – technique de méditation chinoise - et dévorant des livres choisis au pif. En hiver, il conduit un traîneau high-tech tiré par des huskies blancs aux yeux bleus ; l’été, il parcourt les profondeurs marines en scooter des mers, ou bien pratique le deltaplane au-dessus de magnifiques paysages de collines.

  

Lebedev a bâti une station balnéaire en Crimée. Il a déversé sa générosité sur la ville en restaurant l’hitorique théâtre Tchekov), mais il préfère passer son temps à Londres, où il fraye avec la créatrice de Harry Potter, Mme Rowling, Sir Elton John et autres gens de qualité. Il joue de la guitare, et soutient DDT, un groupe de rock russe. Il possède également le journal britannique The Independentainsi qu’un tabloïd, l’Evening Standard, et la Novaya Gazetaen Russie.

 

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Polonsky, à l’inverse, s’est construit une forteresse de solitude, un palais de verre émergeant des vagues, sur une île au large des côtes de Sihanoukville, non loin de la maison d’Alain Delon, au Cambodge. Il y rencontre des professeurs de soufi, et reçoit l’enseignement de moines zen et d’adeptes du qi gong. Il est également épris d’ésotérisme et d’expériences mystiques.

 

Les deux hommes ont des origines très différentes. Lebedev a eu une enfance privilégiée; son père était professeur au sein de la prestigieuse Ecole des Services Diplomatiques. Jeune homme, il est entré au KGB et au Parti Communiste. Diplômé de l’école où enseignait son père, il a poursuivi ses études au collège du KGB,  puis est entré dans les services diplomatiques. Affecté à l’ambassade soviétique de Kensington, Londres , il avait pour mission d’endiguer les fuites de capitaux russes. En huit ans, il a eu le temps de bien apprendre les ficelles du métier, et avec la chute de l’URSS, le garde-chasse est devenu braconnier. 

 

Le lieutenant-colonel (KGB) Lebedev a quitté ses fonctions en 1992 et utilisé ses connaissances approfondies en matière de dettes soviétiques pour faire fortune et diriger l’argent fugitif vers des lieux sûrs. Peu de russes connaissaient le système bancaire aussi bien que lui. Et il y avait en effet beaucoup d’argent à se faire pour quelqu’un doté d’un bon réseau : il achetait des prêts à taux réduit pour se les faire rembourser à taux plein grâce à un ami employé au Trésor. Il a passé, avec Gazprom, un accord qui a rendu l’État russe plus pauvre de 200 millions et lui-même et ses collaborateurs plus riches d’autant. Il s’est lié d’amitié avec Victor Chernomyrdin, alors Premier ministre, et Chernomyrdin a obligeamment fait transiter les fonds d’Etat vers la banque que Lebedev venait de créer à Londres. Lebedev a usé de ses relations pour se faire adjuger des postes importants dans des entreprises subventionnées par l’état telles qu’Ilyushinet Aeroflot : les profits sont allés à Lebedev et les dépenses à l’Etat.

 

D’origine modeste Polonsky vient de Saint Petersbourg. Il  a grandi alors que l’URSS s’effondrait autour de lui. Il a étudié l’architecture, a travaillé dans le bâtiment et  la construction, a embauché des ouvriers ukrainiens à  l’époque où ils étaient encore peu chers, et est devenu un promoteur immobilier en bonne et due forme. Il est fier d’être un « self-made man » ; il n’a rien obtenu de l’État, et n’a jamais rien demandé à personne dit-il. Il n’a pas non plus privatisé d’usine d’État, préférant établir de bons rapports avec l’Hôtel de Ville de Moscou satisfaire les nouveaux riches moscovites. Il a l’air assez honnête pour qu’on lui achète une voiture d’occasion, bien que ceux qui sont à ce point dignes de confiance ne deviennent jamais milliardaires. Des sources bien informées disent qu’il a dû magouiller avec Mme Baturina, épouse du maire de Moscou et une des femmes les plus riches du monde : pas un seul bâtiment n’a été construit à Moscou sans un signe d’approbation de sa part.

 

Polonsky a essayé de se tenir à l’écart de la politique; il professe ne rien y connaître et ne pas s’y intéresser. Il se dit bâtisseur, pas plus. Il s’investit corps et âme dans d’énormes projets qui vont de Moscou à la Suisse, et de Londres à la Croatie. Il est démocrate à la russe, c'est à dire qu'il peut se mêler à des gens très ordinaires, mais il vaut mieux pour eux qu’ils obéissent à ses ordres, sinon… C’est un tyran au petit pied disent les employés qu’il a licenciés : il interdit l’envoi de textos pendant les réunions du conseil d’administration ! Les contrevenants voient leurs précieux iPhones fracassés contre un mur (fantasme que je n’ai pu moi-même jamais réaliser qu’en rêve...). Ses ambitions se situent dans la sphère spirituelle, et les affaires doivent souvent s'effacer devant sa quête de Dieu.

 

Lebedev a un penchant pour la politique. Il a essayé plusieurs factions, passant de l’ultra-nationaliste Rodina(Mère-Patrie) au socialiste SRet du SR au  parti actuellement au pouvoir Russie Unie, déchiré qu'il est entre ses ambitions politiques et l’envie se faire un dollar rapido-presto.  Parfois il fait les deux en même temps.

 

En 1996, pendant la période précédant les fatidiques élections présidentielles, Lebedev a soutenu Boris Yeltsin, président en exercice, mais surtout un alcoolique débauché qui a volé la richesse nationale russe pour engraisser les oligarques. Sous Yeltsin, la banque de Lebedev a été utilisée par le Trésor pour acheminer les fonds de l’État, en rouleaux de billets verts bien serrés, vers ceux qu’il fallait acheter. Ce sont des liquidités de Lebedev  qui ont été saisies par la Sécurité dans la tristement célèbre affaire de la Boîte Xerox, cette boîte à papier dans laquelle un militant a été pris en train d’emporter des millions de dollars pour la caisse à pots-de-vin de Yeltsin. Lebedev n’a pas nié les faits ; il en était assez fier, et a même payé le magazine à scandales Kompromat (« Affaires compromettantes ») pour qu’il sorte un numéro spécial contenant une version aseptisée de l’affaire, ainsi que d’autres exploits du même genre.

 

Les audacieux méfaits de Lebedev ont forcément attiré sur lui l’attention des autorités judiciaires, au point qu’en fin de compte, un acte d’accusation a été rédigé contre lui par le Procureur Général de l’Etat. Lebedev – c’est lui-même qui s’en vante - s’est débrouillé pour que le Procureur Général se retrouve avec deux filles faciles dans un sauna et que leurs ébats y soient filmés. Le film n’a plus eu alors qu’à être diffusé sur la chaîne de télévision privée d’un autre oligarque et le Procureur Général qu’à se démettre de ses fonctions.

 

Certains prétendent que Lebedev n’était pas le responsable de ce coup monté. Si c’est vrai, cela en dit long : M. Lebedev penserait-il qu’une mauvaise publicité vaut mieux que pas de publicité du tout ?  Les faits soutiennent la théorie. Lebedev a publié un livre sinistrement intitulé 666 ou La Bête est née, rempli d’attaques grossières contre presque toutes les personnalités publiques de Russie. Il s’y décrit modestement comme « le capitaliste idéal » et  il y revendique non seulement ces exploits criminels mais beaucoup d’autres.

 

Lebedev est toujours prompt à expliquer comment chacun de ses crimes était en fait une bonne action : c’était soit pour sauver la Russie des griffes des cocos – (il escamote ainsi commodément les titres de créance de son propre parti), soit pour sauver le monde du KGB. (là-encore, il se garde bien de rien dire de son propre passé au sein de cette organisation). Il n’a que mépris pour les origines prolétaires de Poutine et son accession au pouvoir. Cela l’irrite au plus haut point qu’ils aient eu tous deux le même grade au sein du KGB. Mais la vraie raison qui se cache derrière l’antagonisme de Lebedev, c’est que Poutine poursuit obstinément les oligarques. Ou devrait-on dire « les persécute » ?

 

Les oligarques souffrent en effet d’un complexe de persécution : à leurs yeux, toute interférence, si faible soit-elle, est profondément injuste. Ils se considèrent comme tout-puissants, alors qu’ils ne sont que puissants, et se hérissent à la moindre tentative de limitation de leur pouvoir.  Certes, leur argent leur a donné un pouvoir de vie et de mort, mais ce pouvoir compromet leur santé mentale. Ils se mettent à prendre au sérieux les flagorneries de leurs sycophantes. Ils rejettent les avis  de leurs conseillers les plus éprouvés. Ils finissent seuls et désacés, poursuivis par les lois. Trop de pouvoir corrompt, et les oligarques russes ont bien plus de pouvoir que n’en eut jamais aucun des satrapes du temps de Staline.

 

M. Poutine n’approuve pas que les oligarques se mêlent de politique. Il ne les punit pas de façon arbitraire ; il ne réécrit pas non plus les lois pour les viser directement. La Russie de Poutine permet à ces magnats de passer sans dommage au travers de beaucoup de choses, mais elle tire un trait devant la criminalité - parfois. C’est le grand sacrilège de Poutine de considérer que les oligarques sont comptables de leurs actes devant la loi. Un tel niveau d’indépendance à leur égard leur a causé un grand choc. Ils ont beaucoup de mal à se remettre de ce coup du lapin et à se faire à la nouvelle réalité, si différente de leur vie de bichons gâtés des années Yeltsine.

 

Les oligarques se souviennent avec mélancolie du temps où ils jouissaient impunément du droit de vie et de mort sur tout ce qui respire, tels les vice-rois des Indes au temps de Clive.

 

4 - Clive.jpg

Hélas, les ambitions politiques de M. Lebedev sont restées insatisfaites. Il a ramené ses hautes visées à un niveau plus accessible, et a décidé de devenir le maire de Moscou. Et a subi un échec. Inquiet, il s’est rabattu sur la mairie de Sochi (la Miami russe). Nouvel échec. Les squales, reniflant l’odeur du sang, se sont mis à tourner autour de lui et ses brillants exploits ont fini, quoique tardivement, par attirer sur lui l’attention des autorités.  En particulier, les 300 millions de $ de fonds publics de sauvetage qui lui ont été attribués pour, censément, renflouer sa banque. Il a accepté l’argent, mais il est très vite devenu évident que les coffres de ladite banque étaient vides, ou plutôt truffés de billets à ordres fictifs. Ses affaires dans l’industrie aéronautique ont également fait l’objet d’enquêtes et il semble que l’Etat, actionnaire principal, s’y soit fait escroquer de  main de maître.


En réponse à ces poursuites, l’astucieux Lebedev a fait marcher sa « police d’assurance » à long terme. S’il avait été juif, il aurait clamé être victime d’antisémites russes autoritaires, mais M. Lebedev n’est pas juif russe. Alors, il a prétendu être persécuté par des voyous du KGB, comme M. Poutine. Cette assurance l'a certes couvert mais lui a coûté très cher : pendant des années, il a été  obligé de financer plus que généreusement le journal anti-Poutine Novaya Gazeta, très lu dans le centre de Moscou et inconnu ailleurs. Pour influencer aussi le gratin international, il a acheté deux journaux britanniques, au moyen desquels il s’est ingénié à promouvoir une nouvelle image de lui comme d’une sorte de Khodorkovsky, autre pauvre homme riche victime des voyous poutiniens du KGB. Il a dit avoir été empoisonné comme Litvinenko, mais il a miraculeusement survécu... Les Britanniques n’ont été que trop contents de coopérer aux campagnes de propagande de Lebedev ; leur establishment était (et est toujours) prêt à soutenir tout et n’importe quoi qui s’en prenne à Poutine, y compris le mouvement des séparatistes tchétchènes.

 

C’est au cours de sa campagne pour la mairie de Moscou que M. Lebedev s’est aperçu de l’existence de M. Polonsky, lequel était en bons termes avec le maire en place. A cette époque, Polonsky était occupé à ériger les deux plus hauts gratte-ciel d’Europe : les Tours Fédération, joyaux de la ville de Moscou. Polonsky est donc devenu le nouvel objet de la haine de Lebedev : encore un de ces self-made men d’origine prolétaire; non, certainement rien d’un pukka sahib ! Or, c’était le moment opportun pour une mise à mort rapide et facile, car l’étoile de Polonsky était en train de dégringoler à toute vitesse.

 

En effet, Polonsky avait fini, lui aussi, par se retrouver dans les ennuis, comme c’est le cas, tôt ou tard, de tous les oligarques. Il n’avait pas été assez consciencieux, ni assez prudent. Il avait rejeté ses fidèles conseillers pour s’entourer de bénis oui-oui. Il s’était fié à ses intuition au lieu de calculer objectivement ses chances, et s’était ainsi engagé dans des affaires impliquant des millions sur une simple tape dans le dos. Ses partenaires ont pris le large avec des morceaux entiers de son empire et ses rêves d’honneur samouraï ont été mis en pièces par le pragmatisme de la nouvelle Russie des affaires.

 

Il a fait confiance à ses collaborateurs, qui l’ont volé comme dans un bois. Plus il leur a donné de pouvoir, plus vite ils se sont esbignés avec son argent. Son capital (estimé à plus de 3 milliards de dollars au sommet de sa prospérité) a commencé à rétrécir à vue d’oeil; il a eu des problèmes de liquidités et des difficultés à mener à terme ses projets les plus ambitieux. Les petites gens qui y avaient investi leurs économies en ont ressenti une colère justifiée.

 

C’est à ce moment-là que l’ingénieux Lebedev a dévoilé le tour qu’il avait imaginé pour détruire Polonsky. Le nabab des médias s’est tout simplement mis à propager la rumeur maligne (et apparemment fausse) que les fondations des Tours Fédération étaient fissurées. Polonsky était déjà sur la défensive, il avait le dos au mur. Il a eu beau inviter des journalistes de Moscou à venir vérifier par eux-mêmes, les laisser déambuler librement à 36 mètres sous terre pour essayer de localiser les fameuses fissures : ils ont refusé d’admettre qu’il n’y en avait pas. Il a même offert un million de roubles à quiconque pourrait en trouver une et personne n’a rien trouvé, mais la rumeur a persisté, alimentée par M. Lebedev et ses journaux.

 

Désormais seul et vacillant, Polonsky s’est mis à dire qu’il avait lui-même inventé cette histoire de fissures pour attirer l’attention du public sur son projet. Personne n’a gobé cette histoire. Ses projets ont continué à péricliter, les prédateurs ont continué à s’emparer de ses lotissements, ses amis ont continué à le piller. Cette histoire de fissures a fini par fissurer son empire.

 

Voici donc l’histoire qui se cache derrière la scène des coups de poings à la télévision. La rencontre devait avoir pour sujet l’économie mondiale. Ils n’avaient encore échangé que quelques mots lorsque M. Polonsky n’a pu s’empêcher d’évoquer le douloureux sujet des fissures. Le monde entier attendait la réponse de Lebedev. Il a regardé sa victime dans les yeux. Que pouvait-il ressentir à ce moment précis ? De l'orgueil ? De la haine ? Quoi qu’il en soit, seul et désaxé, il a envoyé quelques directs bien ajustés sur la mâchoire de Polonsky.  L’ex-commando assis s’est retrouvé par terre, prouvant ainsi la supériorité des méthodes d’entraînement du KGB sur celles des Parachutistes. Le programme télévisé a eu beaucoup de succès. Et après avoir ravi les spectateurs qui s’étaient préparés à un morne exposé sur la crise mondiale, il a fait un buzz sur YouTube

 

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Face à des millions de téléspectateurs qui venaient de voir l’agression en direct, Lebedev a nié avoir frappé Polonsky. Debout à l’extérieur des studios, il a répété avec entêtement, aux journalistes qui l'interrogeaient : « Je ne l’ai pas touché. C’est lui qui m’a attaqué, parce que je suis opposé à Poutine ! » Oui, Lebedev est incroyable ; il est prêt à nier n’importe quoi. Il y a des années, il s’est démené pour faire interdire les jeux de hasard à Saint-Petersbourg. Noble but s’il en fut. Quand il est devenu de notoriété publique que sa banque avait massivement investi dans les jeux de loterie (le principal concurrent des machines à sous), Lebedev a nié mordicus toute implication personnelle. Même après que le dirigeant de sa banque ait prouvé, sans l’ombre d’un doute, que cette stratégie était l’idée de Lebedev en personne,  il a continué à nier être au courant, sans battre un cil. Je me demande si James Bond serait capable d’en faire autant.   

 

Pendant la course à la mairie de Moscou, Lebedev a acheté un journal (le Moscow Correspondent). Il en a fait une machine de guerre. Laquelle a aussitôt fait courir une rumeur diffamatoire selon laquelle M. Poutine serait impliqué dans une affaire extra-conjugale. Lebedev ne s’attendait pas à la réaction de Poutine. D’ordinaire assez tolérant à l’égard des rumeurs, accusations et attaques diverses, le président russe a piqué une colère mémorable. Effrayé, Lebedev a fermé le journal, viré le rédacteur en chef et déclaré à l’antenne que cet article sans fondement était l’œuvre du maire de Moscou qui avait obtenu sa publication contre un pot-de-vin versé au rédacteur en chef. Ce mensonge éhonté a coûté au malheureux journaliste sa carrière : Lebedev ne s’est jamais rétracté.

 

Depuis l’agression télévisée, on a très souvent demandé à Lebedev pourquoi il s’était conduit de la sorte. Certaines de ses explications sont tellement délirantes qu’on a du mal à croire qu’il ait voulu les faire passer pour vraies. La palme revient certainement à : « Je pensais que j’allais devenir un héros populaire parce que j’avais mis à terre ce détestable oligarque. ».  N’est-ce pas merveilleux, venant de sa part ! Polonsky semble quant à lui sincèrement en peine d’explications. Non seulement Lebedev a refusé de s’excuser, mais il continue de nier ce qu’il a fait. Réclame-t-il l’irresponsabilité pénale pour troubles psychiques ? Il est plus probable qu’il réclame le droit primordial de son pouvoir oligarchique : l’impunité.

 

Polonsky n’a retiré aucun avantage de son humiliation publique. En réalité, cette affaire n’a fait que mettre encore plus à mal sa réputation d’homme d’affaires, déjà fragilisée, et un projet qu’il avait à Londres a capoté peu de temps après C’est pour cette raison qu’il a décidé de poursuivre Lebedev au civil devant un tribunal londonien, avant de se retirer dans son île cambodgienne, d’où il poste chaque jour sur Facebook ses prises de barracudas.

 

Presque une année s’est passée avant que les meules extrêmement lentes de la justice criminelle russe se mettent en branle à l 'encontre de M. Lebedev, mais en fin de compte, elle poursuit le baron des médias sous les inculpations de « hooliganisme » et de « voies de fait ». Les avocats de Lebedev prétendent que leur client s’est senti menacé et qu’il a dû se défendre. Lebedev (sans battre un cil) clame qu’il est persécuté par le foutu régime de Poutine à cause de son « amour pour la liberté ». Quelqu’un qui ment comme un arracheur de dents est toujours plus amusant qu’une ingénue, même de talent, et nous ne serons donc pas surpris si M. Lebedev s’en tire avec une petite tape sur les doigts. Tout ça pour dire que le régime de Poutine est bien clément avec les oligarques. Toutefois, cette affaire n’est pas terminée. Nous attendons l’élévation de M. Lebedev au rang de voix de laconscience russe. Avec l’aide de ses pisse-copies britanniques, cela ne devrait pas poser de problème.

 

L'auteur se trouve à Moscou. On peut lui écrire à l’adresse adam@israelshamir.net


 Traduction de Kahem

pour Les Grosses Orchades

Source :

http://www.israelshamir.net/English/Oligarch.htm

 

 

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Post Scriptum :  Polonsky en prison

 

Le protagoniste de cette histoire, Sergei Polonsky, est aujourd’hui dans une prison cambodgienne, dans la petite station balnéaire de Sihanoukville, où je suis allé lui rendre visite.

Le 30 décembre 2012, juste avant les fêtes de Nouvel An, sa vedette rapide a été arraisonnée après une course-poursuite et quelques salves de mitrailleuses en guise d’avertissement, par la Marine Royale Cambodgienne, et un remorquage jusqu’à une base navale, Polonsky a été arrêté et mis en garde à vue.

C’était la conclusion d’une assez terrible dizaine de jours de sa vie, qui venaient de couronner une année misérable. Après l’agression de Lebedev, Polonsky s’était mis à régresser. Cette correction publique n’avait pas déchiré que ses jeans mais quelque chose de plus important dans son âme. Il est reparti pour le Cambodge et sa demeure offshore, mais il n’a pas pu retrouver la paix de l’esprit, même sur son île minuscule – aussi minuscule que la planète du Petit Prince – en compagnie de deux gibbons et deux chats sauvages. Son entreprise, sans surveillance, a marché de travers ; les contrats qu’il avait signés n’ont pas été complètement respectés ; ses partenaires ne l’ont pas payé. Il a essayé de redémarrer à la manivelle son empire défaillant : il a loué au gouvernement un chapelet de petites îles et parlé avec éclat des plans qu’il avait d’y créer un super-refuge, pour la  fin des temps qui allait suivre l’effondrement de la civilisation. Dans les eaux du Golfe de Siam, grouillant de vie sous-marine, les réfugiés de Russie et de New-York trouveraient énergie et nourriture disait-il.

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Pendant ce temps, il vagabondait à travers l’archipel sur sa rapide et spacieuse vedette ex-de la Marine, séjournait et dormait sur les plages de ses îles inhabitées, jouant au marin abandonné. Vêtu seulement d’un sarong et un couteau sanglé à l’une de ses jambes, grand et pieds nus, bronzé et les cheveux décolorés par le soleil tropical, cet ex-commando ne manquait pas d’allure exotique, fin prêt pour tourner sans maquillage dans un film de pirates. Cette existence ne lui réussissait pas trop mal : il avait perdu du poids, retrouvé sa taille mince et ne faisait plus du tout ses quarante ans, l’air bien plus jeune, en fait, qu’un an auparavant. Mais il se conduisait bizarrement :

De personnage de Jack London, il était rapidement en train de devenir un personnage de Joseph Conrad, une espèce de Kurtz, d’Au cœur des ténèbres. Il ne pouvait plus se reposer, restait éveillé des jours et des nuits d’affilée, se précipitait sans cesse d’une île à l’autre ; ses manières – qui n’avaient jamais été très distinguées – devenaient grossières, même pour un Russe parvenu. Il en usait de façon carrément dictatoriale avec ses employés, leur donnant les ordres les plus délirants et exigeant d’eux une absolue docilité. Ainsi, il leur fit jeter ses chemises par-dessus bord, en offrande au dieu de la mer, et il leur fallut aussi tapisser le fond de cette mer de bouteilles du meilleur champagne.

Il est également devenu très soupçonneux ; s’alarmant du moindre bateau croisé, du moindre indigène, se mettant à dormir avec son couteau à la main, prêt à vendre chèrement sa vie. Un beau jour, il a décidé de déménager tout ce qu’il possédait sur une île solitaire et inhabitée : son personnel a reçu l’ordre de charger meubles, ordinateurs, vaisselle, argenterie, livres et peintures sur sa puissante vedette et de prendre la mer. Que comptait-il faire de tout cela sur une plage sauvage et déserte ? Il se conduisait exactement comme Mohammed ben Tughluq, le souverain indien du XIVe siècle qui avait ordonné à tous les habitants de Delhi d’aller à pied jusqu’à sa capitale Daulatabad, puis de refaire la même route en sens inverse.

Quoi qu’il en soit, ses gens n’ont jamais pu décharger sa cargaison : Polonsky n’arrivait pas à décider quelle île choisir. Ses ordres changeaient à chaque minute : tous devaient naviguer avec lui ; un peu plus tard, tous devaient s’en retourner. La nuit, il pensait qu’un bateau s’approchait d’eux – des pirates, sûrement ! – et il ordonnait à son équipage de lever l’ancre et de foncer en avant toutes.

L’équipage ne comprenait pas  ce qu’il voulait ni pourquoi il leur criait dessus. Les Khmers n’ont pas l’habitude qu’on leur crie dessus. Ils ne voyaient pas le vaisseau que leur patron redoutait, ou peut-être ne le pensaient-ils pas une source de danger. Le capitaine et le propriétaire n’avaient aucune langue en commun. Ils n’avaient pas d’interprète. Polonsky était dans un état de pure frénésie, convaincu que son bateau allait être capturé par des pirates. Enfin, il a ordonné à son équipage de sauter par-dessus bord et de nager jusqu’au rivage, distant de 20 à 50 mètres. Après quoi, il a mis les gaz avec deux de ses employés russes.

Le capitaine, pas content de cette éjection cavalière, a appelé la Marine. Après une chaude poursuite, Polonsky a été intercepté et arrêté. Il ne comprenait pas où était le problème : c’était son bateau ; son équipage refusait d’exécuter ses ordres ; il les avait virés sans mettre leur vie en danger et continué sa route. Il les avait soupçonnés de vouloir le braquer en haute mer. C’était un comportement anormal, certes, mais le milliardaire était loin d’être dans un état normal : la terrible tension des semaines précédentes l’avait rendu incontrôlable.

A première vue, il ne faisait que se conduire comme tant de riches Russes qui mettent à sac des restaurants parisiens ou cassent tout à bord de jets des Emirats. Mais ici, on a quelqu’un de plus grand que nature, un personnage sombre et tourmenté, qui transcende les normes de la civilisation. Je n’ai pas pu m’empêcher d’éprouver de la pitié pour un homme qui traversait une crise aussi terrible. Il est fait de la même étoffe que les souverains et les dictateurs, et on se sent rarement à l’aise en présence de cette sorte de gens.

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En prison, il s’est calmé. Pas tout de suite pourtant : il a d’abord refusé de s’excuser auprès de son équipage et a failli mettre la prison en pièces. Mais, en fin de compte, il a accepté de faire la paix. Il a pris les autres prisonniers sous son aile, dépensant sans compter ses ressources désormais limitées pour aider ceux qui sont dans le besoin. Il leur achète des médicaments et soudoie les gardiens pour alléger leur condition. Ses compagnons de détention le révèrent. En dépit des promesses, il est toujours sous les verrous plus de deux mois après les faits. Il s’est sans aucun doute mal conduit, mais n’a-t-il pas été assez puni ? C’est ce qu’on pense à Sihanoukville, où les gens espèrent qu’il sortira bientôt et qu’il viendra en aide aux habitants, après avoir reçu une leçon aussi dure.

Israël Adam Shamir

Traduction Catherine L.

 

 

 

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LIVRES


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Nikolaï GOGOL

La brouille des deux Ivan

Paris, Mille et une nuits, 1999

110 pages - Poche

 

 

 

 

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Nikolaï GOGOL

Comment Ivan Ivanovitch se brouilla avec Ivan Nikiforovitch

Préface de Dominique Fernandez

Paris, André Versailles, 2010

96 pages

 



LA BROUILLE DES DEUX IVAN, par Nicolas Vassilievitch Gogol Texte complet on-line.

http://www.livres-online.net/nouvelles-contes/865-la-brou...

 


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Photographies

 

Russie partout, même chez les photographes : Serguei P. Iron

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Twiggy revisited ? Allez, elles sont maigres mais elles ne manquent pas d’allure.

 

Source :

http://au-bout-de-la-route.blogspot.be/2013/02/voiles-de-...


 

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Astéroïdes

 

Les Japonais simulateurs de collision n’avaient pas tout faux finalement :

sur

 

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VIDÉO-PHOTOS.  Russie :  Une météorite crée la panique dans l’Oural (500 blessés, 6 villes atteintes)

 

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http://allainjules.com/2013/02/15/video-photos-russie-une...

Autres sources :

http://www.tv5.org/cms/chaine-francophone/info/Les-dossie...

Voir aussi :

http://zebrastationpolaire.over-blog.com/article-russie-m...

 

 

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En prime

Scandale à Londres : un hôpital responsable de la mort de 1.200 patients

http://www.legrandsoir.info/scandale-a-londres-un-hopital...

http://www.20minutes.fr/ledirect/1095599/scandale-hospita...

 

Mais qu’est-ce que font la City et M. Cameron de tous les milliards chouravés aux Russes ?

 

 

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CINEMA

En  cette période où les Oscars volent bas, il ne nous a pas semblé déplacé de dire tout le mal qu’on peut penser de deux films qui vont pourtant cartonner au box-office. Le premier a eu l’Oscar du meilleur film U.S., prix annoncé par dame Michelle Obama soi-même, depuis la Maison-Blanche ; le second ne l’a pas eu mais y a été cité cinq fois. La mission du premier est de fabriquer le consentement des foules yankees à une guerre d’invasion de l’Iran, comme d’habitude. Rosa Llorens, notre critique-fétiche, dit ce qu’il y a à en dire. Le second se veut, si nous avons bien compris, une dénonciation de l’esclavage. Il a provoqué l’enthousiasme de M. Georges Stanechy sur son blog ( http://stanechy.over-blog.com/article-mali-afrique-tarent... ) et de M. Claude Ribbe sur le sien ( http://www.claude-ribbe.com/index.php?option=com_content&... ), mais il est très loin de faire l’unanimité, y compris dans son pays d’origine où d’aucuns se sont même mis à le boycotter, à commencer par Spike Lee, qui trouve que l’esclavage de ses ancêtres fut une tragédie et non un sujet de western spaghetti. Par ailleurs, ledit western a fait faire à Madame Aline de Dieguez quelques réflexions pratiques, dont nous nous faisons ici l’écho.

 

 

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Argo ou Dark Tchador.

Rosa LLORENS

Argo vient une nouvelle fois illustrer la stratégie élaborée par Hollywood pour traiter l’histoire récente des Etats-Unis : certes, elle n’est pas occultée (les Etats-Unis ont plus souvent traité de la guerre du Viet-Nam que les Français de la guerre d’Algérie), mais ils la réécrivent à leur façon (selon Apocalypse now, les Américains n’ont perdu la guerre que parce qu’ils ont refusé de se montrer aussi cruels que les Viet-Namiens !).

Le but, ici, était de cicatriser les blessures laissées, sous le mandat du président Carter, par la crise des otages américains de Téhéran, faits prisonniers lors de l’attaque de l’ambassade des Etats-Unis : comment faire oublier cette longue humiliation de plus d’un an (de novembre 1979 à janvier 1981) ? D’une part par le choix d’un épisode bien ciblé, d’autre part en profitant du prestige de Hollywood.

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Hollywood et la politique américaine

A propos de "Django Unchained" de Quentin Tarantino.

Aline de Dieguez

 

Je ne voudrais pas trop doucher l'enthousiasme des cinéphiles, mais il me semble important de rappeler quelques vérités. Comme disait Malraux, "le cinéma est (aussi) une industrie". J'ajouterai que le cinéma est non seulement une industrie et un commerce, mais qu'il est surtout une arme politique plus efficace que le missile le plus meurtrier.

Avant de tourner le premier plan de son film, M. Tarantino s'est donc assuré de son financement par la Weinstein Company (TWC), fondée par MM. Robert et Harvey Weinstein. Une rapide recherche sur le capital de cette société vous fait rencontrer Colony Capital, Tutor-Saliba Corporation , Morgan Stanley , Qatar Investment Authority et notre grand ami le Sheikh Hamad bin Jassim bin Jaber Al Thani. Du beau monde, n'est-ce pas, pour lequel la valeur d'un film se mesure à la recette qu'il produit. (Petite parenthèse hors sujet, mais amusante: la vente des gladiateurs footballistiques parisiens par Colony Capital à Qatar Investment Authority est donc une petite opération entre amis.)

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Mis en ligne le1er mars 2013 par Catherine

20:25 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

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