23/03/2015
RÉSISTANCE DE QUI ET À QUOI ?
Résistance de qui et à quoi ?
On ne présente plus le Cercle des Volontaires. Nous lui empruntons aujourd’hui son dernier post.
Christophe Oberlin, à propos des plaintes en cours contre Israël auprès de la Cour Pénale Internationale
20 mars 2015
Chirurgien, auteur, et médecin humanitaire, Christophe Oberlin a écrit « Le Chemin de la Cour – Les dirigeant israéliens devant la Cour Pénale Internationale », publié en 2014 aux éditions Erick Bonnier. Le Cercle des Volontaires a souhaité interroger M. Oberlin pour mieux comprendre le fonctionnement de la CPI, et faire le point sur les plaintes déposées récemment contre Israël par les palestiniens et, plus inattendu, par les Comores.
Raphaël Berland
Sujets abordés :
– (00’12) la CPI : la CPI - histoire et fonctionnement général
– (03’39) Les Etats-Unis et la CPI
– (05’20) Signature et ratification des status de la CPI par Mahmoud Abas pour la Palestine, le 31 décembre 2014
– (08’00) Deuxième plainte, initiée en juillet 2014 par le Ministre de la Justice palestinien et le Procureur Général de Gaza
– (14’11) Plainte initiée par les Comores, suite à l’attaque par l’armée israélienne du Mavi Marmara dans les eaux internationales, bateau battant pavillon comorien
– (17’55) A propos des difficultés à se rendre à Gaza pour un médecin humanitaire
– (21’21) Le Hamas
- (26’40) Critiques et prospectives de la CPI
*
Par ailleurs, nous avons reçu ceci :
« Le Saker en plein délire
Solzhenitsyn and Sakharov in the USSR – Soral and Dieudonne in France
Et Zemmour est Einstein ? »
Nous sommes donc allés voir pour voir…
Solzhenitsyn and Sakharov in the USSR – Soral and Dieudonne in France
March 21, 2015 – The Saker
A minor but oh-so-telling example of the power of the Zionist regime in France :
French comedian Dieudonne was sentenced to a two months suspended sentence for “condoning terrorism” because he posted on FB: “I feel like Charlie Coulibaly”.
French comedian Nicolas Bedos was cleared from any wrongdoings even though he had called Marine LePen a “Fascist bitch“.
Source : http://thesaker.is/solzhenitsyn-and-sakharov-in-the-ussr-...
Pour la traduction française, voir, sans doute sous peu, chez le Saker francophone : http://lesakerfrancophone.net/
Grain de sel des Grosses Orchades
Soljénitzine et Sakharov, rien que ça !...
Le cher Saker prend Alain Soral pour un philosophe. Bon. Il le prend aussi pour l’âme de la Résistance à l’Empire-déguisé-en-gouvernement-français, voire pour son chef. Faut-il lui enlever ses illusions ? À quoi bon ? Il n’y verrait que méchanceté (jalousie ?) de notre part et ne nous croirait pas.
Le Saker maîtrise parfaitement le français mais ne connaît pas vraiment la France, et moins encore les Français. Il ignore que, depuis des siècles, la moitié de la France s'acharne à imposer sa loi à l’autre, et que l’autre, depuis des siècles, refuse de se laisser faire. Avec des hauts et des bas.
Il s’indigne de récentes condamnations injustes et semble n’avoir jamais entendu parler, entre autres, de la persécution que subit pour ses convictions historiques le Pr. Faurisson, et ce, depuis des paires de lustres. Il n’a sans doute jamais entendu parler des chapelets de condamnations de ce genre qui ont frappé en son temps feu Jean-Edern Hallier. Les déboires de Zeynel Cekici, dans une indifférence quasi générale, ne l’ont pas frappé plus que le quidam de base. Et ne parlons pas des sentences qui s'abattent, sans faire les vagues qu’elles devraient, sur les partisans des BDS (« Boycott-Désinvestissements-Sanctions ») à l’encontre d’Israël. Tous ces gens (Faurisson, Zeynel et les BDS) ne brassent pas d’air pour se faire une clientèle. Ils résistent.
Le gouvernement de Manuel Valls, comme ses prédécesseurs et sans doute ses successeurs, se conduit-il mal envers Soral et Dieudonné ? Oui, certes. Et envers beaucoup d’autres. Cela fait-il de ces deux derniers des exemples ? Jamais de la vie. Et on le regrette bien (surtout pour Dieudonné).
À notre humble avis, ce n’est pas Soral ni Dieudonné qui auront raison (surtout ensemble) de ce gouvernement ni du (ou des) suivant(s). Non plus que du lobby sioniste. Il y faudra d’autres carrures. Par exemple (l’ordre est alphabétique) :
De l’espèce François Asselineau
De l’espèce Raphaël Berland
De l’espèce Zeynel Cekici
De l’espèce Jacques Cheminade
De l’espèce Étienne Chouard
De l’espèce Aline et Manuel de Dieguez.
De l’espèce Eric Hazan.
De l’espèce Annie Lacroix-Riz
De l’espèce Leon Landini
De l’espèce Thierry Meyssan
De l’espèce Jonathan Moadab
De l’espèce Christophe Oberlin, tiens, justement.
De l’espèce Ginette Hess Skandrani
De l’espèce Maria Poumier
De l’espèce Georges Stanechy
De l’espèce Serge Uleski
De l’espèce Olivia Zemor.
Sans compter les autres valeureux du Cercle des Volontaires, du Grand Soir, de Réseau International, du Réseau Voltaire, de Sayed7Hasan, de Résistantce71, de Tlaxcala, du blog de Jacques-Marie Bourget, de l’Agence Info-Libre, des Moutons enragés, etc. etc. La liste n’est pas exhaustive. Que les absents nous excusent. Ils ne sont pas tous les meilleurs amis du monde. Tous, pourtant, s’efforcent de tirer la charrette dans la même direction, qui n’est pas celle du fascisme.
Mais les Soral, les Marine et les Jean-Marie, les Chauprade, Aliot, Villiers, Dupont-Aignan, de Benoist, Ménard, Philipot, Maréchal-nous-voilà-Le-Pen, Camus, Gollnisch, Mégret & C°, mais les GUD, les « monarchistes-démocrates » à la E&R, les Blocs – et-les-Jeunesses - Identitaires, les Troisièmes Voies, les faux anars antifas-mais-vrais-pro-nazis, les contre-révolutionnaires, les pétainistes, les OAS et autres Puy du Fou ? NON, MERCI !
Et Dieudonné ? Hélas… Elle ne dit rien, elle laisse faire, Madame M’Bala M’Bala ?
Ceci ne nous rajeunit pas, mais n’est-ce pas toujours valable ?…
*
Sortons de l’Hexagone…
Une lettre remarquable, qui nous vient d’un Chinois étatsunien de Kiev, via le blog (US) de Dmitry Orlov, traduite en français par le Saker Francophone :
La rage des élites culturelles
par Yu Shan– correspondant du Club Orlov à Kiev – 17 mars 2015
Un incident malheureux est arrivé à ma tante, l’été de 1966. La Révolution culturelle – un mouvement politique lancé par Mao Zedong – commençait alors à embraser le pays. La même année, de nombreux lycéens américains protestaient contre la guerre du Vietnam et Leonid Brejnev gardait au chaud son siège de Secrétaire général du Parti communiste d’Union soviétique (PCUS), ayant remplacé, deux ans plus tôt, le quelque peu instable Nikita Khrouchtchev. Ma tante était alors étudiante de première année en littérature à l’université Fudan de Shanghaï.
Jeune femme sensible et quelque peu rêveuse, elle répugnait, pour son malheur, à renoncer à certains goûts musicaux devenus, en ce temps-là, en Chine, politiquement incorrects, et qui se voyaient qualifier, selon le jargon idéologique en vogue à l’époque, d’esthétique bourgeoise décadente et révisionniste. Entre autres, ma tante avait conservé dans sa collection de disques une version du Sorbier de l’Oural (Уральская Рябинушка), chanson folklorique russe dans laquelle une jeune fille rencontre deux beaux garçons sous un sorbier de montagne et doit choisir entre eux, interprétée par le Chœur national de la République socialiste soviétique d’Ukraine. C’était un vieux disque 78 tours. Il était frappé au centre d’un emblème rouge portant
l’inscription CCCP.
Une des colocataires de ma tante, qui l’avait probablement toujours détestée pour une raison ou une autre, a découvert le disque et l’a dénoncée aux autorités. Pour cette infraction assez grave, des étudiants membres des Gardes rouges ont contraint ma tante à briser publiquement son précieux disque, puis à s’agenouiller sur les morceaux et à réciter des excuses au président Mao pendant que les camarades étudiants lui jetaient les déchets au visage en hurlant A bas les révisionnistes soviétiques ! Les Chinois de cette génération, qui, jeunes, ont porté l’uniforme des Gardes rouges, battu les gens dans tout le pays et détruit toutes sortes d’objets culturels, vivent aujourd’hui, pour la plupart, de retraites du gouvernement ou retirent de maigres bénéfices de petites entreprises familiales ; mais quelques-uns ont prospéré et on peut les trouver parmi la couche supérieure des élites chinoises dans les affaires, la culture et la politique [Toute ressemblance avec les soixante-huitards serait purement fortuite, Note du Saker Fr]
Cet épisode m’est revenu à l’esprit lorsque, à l’été 2014, je suis tombé sur des clips vidéo d’activistes ukrainiens déboulant dans des auditoires universitaires au milieu des cours et ordonnant à tout le monde de se lever et d’entonner l’hymne national ukrainien, puis forçant le professeur à s’excuser pour son enseignement pas assez patriotique. Il y avait aussi des spectacles effroyables d’ennemis du peuple (coupables seulement d’avoir servi sous le président renversé Ianoukovitch) promenés dans des poubelles. Dans les écoles ukrainiennes, on veillait à ce que les enfants sautent de joie en disant « Celui qui ne saute pas est un Moscal » (terme péjoratif pour russe).
Ajoutez à cela la destruction des monuments publics commémorant la Seconde Guerre mondiale et la grotesque réécriture de l’Histoire (selon laquelle, pendant la Seconde Guerre mondiale, c’est l’Allemagne qui a libéré l’Ukraine, mais qu’ensuite la Russie a envahi et occupé l’Allemagne !) et vous aurez une image complète : le mouvement ukrainien du Maïdan est une sorte de révolution culturelle. Le nouveau terme à la mode, qu’on vous jette partout au visage, est tournant civilisationnel, mais celui-ci et la vieille révolution culturelle peuvent être compris comme des synonymes approximatifs, partageant le besoin de spectacles frénétiques d’humiliation et de destruction de masse.
En 1971, la guerre du Vietnam entamait son agonie et se dirigeait, du point de vue du gouvernement américain, vers une conclusion hautement insatisfaisante. Cette même année, le Dr. Henry Kissinger fit un voyage secret à Pékin, s’envolant d’un aéroport militaire au Pakistan. Ce fut suivi du sommet conjoint Nixon-Kissinger de 1972, qui culmina dans la poignée de main historique de Nixon à Mao Zedong, achevant par là le pivotement civilisationnel de la Chine, qui s’écartait de l’URSS pour se tourner vers l’Occident. Avec le recul, cette ouverture dramatique n’a pu être correctement caractérisée que comme un coup de poignard dans le dos de l’URSS, à la fois géopolitique et idéologique. Le corps rigide et en décomposition de l’URSS ne s’est jamais remis de cette blessure, conduisant à son effondrement final, dû à une multitude de causes internes et externes, deux décennies plus tard.
A la fin de février 2014, juste au moment où l’Ukraine tentait de s’écarter de la Russie pour se tourner vers l’Occident, j’ai interviewé un capitaine important du Secteur Droit, groupe ukrainien national-extrémiste de style néo-nazi. L’homme, robuste, avait l’air agressif dans sa tenue paramilitaire, il était arrivé avec des gardes du corps mais s’est montré ensuite assez aimable. Il était particulièrement heureux de me voir parce que j’ai l’air d’un Chinois. Il parlait le russe, à contrecœur, après avoir annoncé qu’il en avait honte. (C’est typique ; les Ukrainiens utilisent l’ukrainien pour débiter leurs balivernes chauvines, mais lorsqu’ils ont besoin de donner du sens à ce qu’ils disent, ils parlent russe.) Il a dit qu’il avait servi dans l’Armée rouge et qu’il avait été affecté en Extrême-Orient, sur la frontière chinoise. Il a exprimé son espoir que la Chine ferait bientôt quelque chose de très gros en Sibérie.
Cela a été mon unique rencontre avec l’homme du Secteur Droit. On peut donc parier que la récente étreinte russo-chinoise a anéanti ses espoirs concernant la Sibérie. Chacun a pu noter la ferme expression de solidarité envers la Russie de la part du gouvernement chinois depuis mars 2014. Mais il aurait été beaucoup moins troublé, et les nombreux soutiens internationaux de la Russie beaucoup plus découragés, s’il avait été en mesure de lire les commentaires publiés sur de nombreux sites et médias sociaux populaires en Chine, des slogans du genre « La Crimée à Poutine, la Sibérie à la Chine ! » ou « Poutler [Poutine-Hitler] à la lanterne ! » ou encore « Gloire à l’Ukraine ! La Chine aux côtés du monde civilisé ! »
Pour expliquer ce qui se cache derrière ce phénomène qui affecte certains internautes chinois, jeunes et vieux, nous avons besoin d’introduire un néologisme chinois : Gong Zhi (公知). Littéralement, ce terme signifie intellectuel public, mais il est utilisé de manière sarcastique et parfois même péjorative. Il désigne un individu malin, qui a du succès, qui est populaire, branché, souvent impliqué dans les médias de masse et qui, pour diverses raisons, a des millions de followers sur Twitter et divers sites de réseaux sociaux. De tels individus font quotidiennement, parfois toutes les heures, des remarques spirituelles et mordantes sur une vaste gamme de sujets politiques et, pour ajouter de l’intérêt humain, sur le kaléidoscope de leurs propres états émotionnels.
Dans un cadre russe/ukrainien, on peut trouver des figures plus ou moins semblables dans les personnages publics de Ksenya Sobchak, Irina Khakamada, Masha Gessen, Lesha Navalny, et le défunt Boris Nemtsov. L’audience de base de ces gens consiste en ce qu’il est convenu d’appeler la classe créative, ou creacl (креакл) en abrégé. En Chine, un tel terme n’existe pas encore, mais un groupe social très semblable existe très certainement dans la réalité et, dans leur écrasante majorité, ils sont enclins à suivre et à adorer les Gong Zhi. Nombre d’entre eux, en dépit du fait qu’ils entretiennent soigneusement leur apparence juvénile, sont dans leur cinquantaine tardive ou leur jeune soixantaine – en d’autres termes, ce sont d’anciens Gardes rouges qui s’en sont bien tirés financièrement en devenant des porte-parole informels de ce qu’ils considèrent comme une idéologie nouvelle et branchée, en s’essayant à un nouveau tournant civilisationnel soutenu par la technologie.
La branchitude de ladite idéologie provient de l’usage d’un ensemble d’éléments incluant des mots et des phrases canoniques à partir desquels des récits clichés peuvent être générés sans effort. Cela comprend : construction institutionnelle, société civile, état de droit, renforcement de la démocratie, accroissement de la transparence, croissance économique, entrepreneuriat, innovation, privatisation, bonne gouvernance, expertise occidentale, valeurs humaines, droits humains, droits des femmes, droits des minorités. Il y a aussi un mantra ; au lieu de OMer [se livrer à la méditation orgasmique ou slow sex, NdT], ils s’OCcidentent : l’Ouest, l’Ouest, l’Ouest, les valeurs occidentales, la civilisation occidentale, ouest ouest, ouest, ouest. Qu’importe que cette boîte à outils échoue partout dans la pratique ; ce sont des articles de foi, pas de la raison.
Et l’opposé, le repoussoir de tout ce merveilleux occidentalisme, c’est l’horrible, l’innommable orientalisme de la Russie. Ici, nous avons un autre ensemble d’éléments, à partir duquel on peut façonner un grand nombre de diatribes russophobes : Poutine/Staline, tyrannie, goulag, faible taux de natalité, alcoolisme, mafia, corruption, stagnation, agression, invasion, menace nucléaire, répression politique, la nation qui crève. Qu’importe que ces pièces détachées n’aient rien à voir avec la réalité ; de nouveau, ce sont des articles de foi, rien de rationnel. Et la cause du caractère si horrible de la Russie, c’est bien sûr le peuple russe. Quand le peuple russe se réveillera-t-il ? Réussiront-ils un jour à se soulever et à renverser leur dictateur, leur tyran ? Deviendront-ils jamais des gens civilisés, cool, heureux, normaux, OCCIDENTAUX… comme nous le sommes déjà ou, du moins, comme nous le serons… un jour… si les gens en Occident viennent nous chercher, nous emmènent chez eux et nous font l’amour…
Le but, en gros, de ce travestissement civilisationnel est une tentative de transformation personnelle, de changement d’image personnel : «Si nous avons l’air occidentaux et si nous bavassons en pidgin occidental, alors nous DEVIENDRONS occidentaux, nous deviendrons cool, acceptés, riches, prospères et civilisés. Et ce qui nous empêche d’y arriver, ce qui nous freine, c’est ce pays et ces gens, qui sont si peu cools, si peu tendance, si peu occidentaux. Beurk ! Il n’y a rien à espérer d’eux, contentons-nous donc d’accepter l’argent des généreux donateurs occidentaux qui veulent déstabiliser la Russie, et, oui, bien sûr, dépensons cet argent à organiser des partis d’opposition virtuels, comme les petites filles organisent des goûters pour leurs poupées. On parle énormément de nous – et en bien ! - dans la presse occidentale, n’est-ce pas la preuve que nous faisons du bon boulot ! »
Ce genre d’événements, de tendances et de mouvements ont surgi à différentes périodes historiques et dans des endroits éloignés et non contigus du monde, mais ils partagent les mêmes accents émotionnels et s’orientent vers un seul et même objectif : abattre la Russie, en paroles sinon en actes.
Et puis il y a la réalité.
Il est très difficile de distinguer les Ukrainiens des Russes. Près de 90% de la conversation qu’on entend dans le métro de Kiev est et probablement restera en russe. Certains le parlent avec un accent, d’autres pratiquement sans accent du tout. Un homme ou une femme de Iaroslavl (où feu Boris Nemtsov avait conservé un siège régional), circulant dans le métro de Kiev, peut se fondre sans effort dans la foule. Mais si un Russe ou un Ukrainien voyage dans le métro de Pékin, il sera très facile de le distinguer des autres.
Dans le métro de Kiev aussi, il est très facile de distinguer des autres voyageurs un touriste américain, un journaliste, un représentant d’ONG, ou un qui vient se chercher une femme ukrainienne. Les signes sont sans équivoque : le comportement, la manière de parler et l’expression du visage les font repérer, sans nul besoin de traits ethniques ou de race. Mais la plupart des jeunes étudiants ukrainiens qu’on a vus crâner et sauter sur la place Maïdan sont également très fiers d’exhiber leurs compétences, réelles ou supposées, en anglais, et qu’on les voie traîner avec des Américains. Pourquoi diable les Ukrainiens sont-ils si désireux de sortir de leurs peaux russes et de se faire passer pour des Américains ?
De leur côté, les Américains, par quelque bizarrerie collective d’essence mystique, sont-ils spontanément anti-russes ? Sommes-nous - les Américains avec lesquels j’ai vécu, étudié et travaillé pendant des années et moi-même - anti-russes ? Soyons sérieux, bien sûr que non ! Mais nous sommes assurément anti-quelque-chose-d’autre ! Prenez quelques instants pour regarder le visage de Victoria Nuland, de Jan Psaki, de Samantha Powers et d’Hillary Clinton. Ces visages ne rappellent-ils pas à tout le monde – c’est à dire à nous les gars américains normaux et peu importe nos origines – cette quintessence de « foule cool » que nous avons dû nous farcir pendant nos années d’études ? Ne sont-elles pas toutes ces mégères arrogantes et coincées, dont le féminisme réactionnaire a fait, jadis, de nos jours de lycée frais, verts et naïfs, un enfer sur la terre ? Eh bien, maintenant que nous ne sommes plus aussi triqueurs et stupides, et qu’elles sont toutes ridées et avachies (ou reliftées et botoxées à mort), n’avons-nous pas la plus grande envie de tomber, métaphoriquement) à genoux et de remercier Jésus,Yahwé ou Allah ou qui que ce soit d’autre, de nous avoir fait échapper au mariage avec une de ces harpies ?
Mais notre pays, l’ancienne « terre des libres et des brave » a sombré. Nous le savons, au fond de nos cœurs, n’est-ce pas ? L’armée de clones de Victoria Nuland, tel un cauchemar insidieux, malfaisant, sadique, ou le reflet d’une face de sorcière dans une rivière polluée, s’est étalée partout, a pénétré dans tous les interstices, les moindres recoins de ce pays, en haut, en bas, et au-delà. Où que nous allions, nous rencontrons ses avatars et ses sosies – à Hollywood, dans les maisons d’édition, les universités, les commissions scolaires, les jardins d’enfants, dans les ascenseurs qui mènent à nos bureaux, et bien sûr, dans les pages du Washington Post et du New York Times.
L’âme américaine curieuse de tout, conquérante, originale, intrépide, rebelle, indisciplinée et individualiste expire sur son lit de mort climatisé. L’Amérique n’est plus du tout un endroit intéressant. Quand avons-nous entendu pour la dernière fois entendu un nouveau chanteur comparable à Tom Waits ou à Suzanne Vega ? Lequel d’entre vous, hip-hopeurs en pantalons larges, a-t-il jamais entendu parler de Robert Altman, de Wim Wenders, de Gore Vidal, de John Cassavetes ? Tous ces gens-là sont en train de disparaître, de mourir, de s’éteindre, et la chose a commencé à peu près à l’époque où les copies carbone et les perroquets de Victoria Nuland ont envahi en masse les universités américaines.
Trente ans, c’est la portion de ma vie que le destin avait accordé à l’Amérique. En tant que non-philosophe, non-psychologue et non-historien de la culture, j’atteste, par la perte irrémédiable de ma jeunesse, que le déclin sans précédent et inexpliqué de l’Amérique, sur le plan spirituel, intellectuel, culturel, romantique, littéraire, linguistique et politique, est arrivé mystérieusement et bibliquement au cours de cette période-là.
Pendant ces mêmes trente années, le monde a aussi assisté à la miraculeuse émergence de l’économie chinoise, dont j’ai largement raté les profits spéculatifs et les aubaines. Mais observer l’amère maladie mortelle en phase terminale de l’Amérique m’a fait réfléchir à des choses. Par exemple, quand les gens disent de la Chine qu’elle est la prochaine Amérique, la question que je me pose est la suivante : les 1,4 milliards de Chinois feront-ils de bons voisins et leur compagnie sera-t-elle intéressante ? Seront-ils aimés et aimables, ou beaucoup seront-ils regardés eux aussi comme des rustres impudents et agressifs, des rapaces, des égoïstes, bref comme d’ingénieux salauds et d’insupportables garces ?
Si je considère ma patrie d’origine et mon propre peuple, j’éprouve des sentiments mêlés. Les premiers signes ne sont pas prometteurs. Les contrastes radicaux et déprimants entre le comportement du touriste chinois typique et celui des habitants doux et tranquilles de Hong Kong, Tokyo, Taïwan, Singapour, en fait de toute l’Asie de l’Est, ne sont pas de bon augure. En 2014, les élans d’hostilité hystérique et grotesque à l’égard de la Russie de la part de la classe créative chinoise mal informée, et les mobilisations par internet qui les ont suivies doivent être un autre signe important. Ceux qui nourrissent de grands espoirs pour l’alliance géopolitique de la Russie et de la Chine feraient bien de s’en souvenir.
Mais se souvenir de quoi exactement ? Ce dont nous devons nous souvenir, c’est la pathologie psycho-mentale habituellement cachée des populations, qui est souvent incorporée dans des tendances intellectuelles erratiques et destructrices, et qui est confirmée par leurs élites culturelles névrotiques et doutant d’elles-mêmes. Cette pathologie a quelque chose à voir avec l’identité individuelle.
Pour les classes créatives chinoises et russes/ukrainiennes, l’Amérique représente l’ultime endroit cool, l’Olympe de la coolitude, auquel il faut aspirer intellectuellement, culturellement et émotionnellement, si pas toujours physiquement. Parce que, pour elles, l’Amérique ne représente pas seulement une théorie ou une ligne argumentaire, mais une source profonde d’auto-identification émotionnelle on voit s’élever en eux la furie et la rage lorsque quelqu’un les empêche de se prélasser dans le rêve de leur auto-identification. Ils deviennent alors comme des adolescents qui ont mis des vêtements cool et veulent aller danser sur de la musique cool, mais auxquels on demande de ne pas porter ces vêtements ni de danser sur cette musique. Pourquoi ? Parce qu’ils ne sont pas aussi cool qu’ils le pensent et parce que ces jeunes cool se fichent de vous et ne veulent pas de vous comme amis.
Les vrais problèmes politiques, économiques et sociaux sont d’importance tout à fait secondaire. Ce qui est de la plus haute importance pour eux – l’élite culturelle, la classe créative, les djeunes cool qui se considèrent eux mêmes comme plus cools que le reste – c’est qu’ils se sentent insultés et privés du respect d’eux-mêmes. Ils sont furieux que la vie réelle en Russie, en Ukraine ou en Chine ne sauvegarde pas une certaine conception de leur propre coolitude tant désirée. La Russie est une cible privilégiée de ce type de discours, ou de récit culturel : elle est l’ultime bousilleur de la coolitude. Même avant le mois de février 2014, l’Ukraine de l’est était toujours renvoyée à un degré zéro de Sovok, le pays de l’ère soviétique rétrograde et qui retourne en arrière, des esclaves à l’esprit lent qui ont retenu la jolie Ukraine cool loin de sa coolitude occidentale bien méritée.
Je n’oublierai jamais la vue des membres arrachés d’une petite fille de cinq ans dans le Donbass, ni les morceaux de châle imbibés de sang et le corps mutilé d’une femme en âge d’être grand-mère dispersés sur le sol. Qu’ont-ils fait – et des dizaines de milliers comme eux – pour mériter cette fin ? Dans le métro de Kiev, la plupart des gens paraissent modestes, polis, humbles, gentils, à l’occasion, même, très gentils. Au cours de l’année dernière, beaucoup d’entre eux ont aussi paru fatigués, soucieux, engourdis et épuisés. Mais je ne pouvais pas détecter un iota de disparité dans les traits, la couleur de la peau, la structure osseuse, et le style encore modeste mais vivant d’habillement entre ces voyageurs dans le métro de Kiev et la fille morte ou la grand-mère morte dans le Donbass. Est-ce que tout cela c’est à cause de quelques-uns de ceux qui veulent être cools, et qui piquent une crise de rage parce qu’ils ne sont pas parvenus à se sentir cool comme ils le voulaient ?
Retourné en Amérique, le supposé Olympe de la coolitude, arpentant les trottoirs parsemés d’ordures du Queens, marchant péniblement le long des interminables rues de Brooklyn, montant dans un ascenseur mal éclairé dans un bureau de Manhattan et m’y étant emplafonné dans un autre sosie de Victoria Nuland, j’ai commencé à comprendre. L’année 2014 a été l’année fatale – apocalyptique – au cours de laquelle a été dévoilé qui est qui et ce qui est quoi, comme si un couteau mortellement affûté avait tranché un vieux rideau moisi et poussiéreux. Ne pensez pas à des conspirations ni à de sombres complots géopolitiques, sinistre et complexes. Ceux-là relevaient d’une génération différente, d’un temps où les gens, même avides et cruels, avaient encore la capacité de distinguer la réalité de la fiction. C’était l’époque de l’impérialisme occidental, qui est mort depuis longtemps. Churchill et Roosevelt et Nixon sont tous morts ; Kissinger est nonagénaire. Ceux qui leur ont succédé ne pensent pas en termes de realpolitik ; ils pensent en termes d’optique, et vaquent dans une salle des miroirs, conçue pour créer une illusion optique de leur grandeur hallucinée.
Ne pensez pas à la réalité ; pensez plutôt à la névrose, à l’obsession, au délire, à une perpétuelle adolescence psychique (l’adolescence réelle est passée depuis longtemps et jusqu'à la ménopause, sans qu’on s’en soit même aperçus). Et au milieu de tout ça, surgit une rage chauffée à blanc, si féroce et si désordonnée que Nietzsche ou Sartre, dans leurs révélations existentielles les plus diaboliques, ne l’ont jamais imaginée. Ainsi en es-il du nouveau Zeitgeist [esprit du temps, NdT], à ce stade avancé de décomposition de la conscience collective de l’élite politique et culturelle de l’Amérique et de ses groupies d'outremer. Cela explique leur histoire d’amour dangereuse et maniaque avec le Maïdan ukrainien, leur rage re-tisonnée mais aujourd’hui impuissante contre la Russie, et leur indifférence narcissique, méprisable, pour la tragédie que vit la population en Ukraine.
[Rapporté par le correspondant spécial du Club Orlov à Kiev, Yu Shan.]
Traduit par Diane, relu par jj pour le Saker Francophone. Adapté pour les GO. Par c.l.
Source : http ://lesakerfrancophone.net/narcissisme-et-realit...
Source d’origine : http ://cluborlov.blogspot.be/2015/03/the-rage-of-cu...
*
Après les Chinois, les Russes déconstruisent la révolution colorée qu’ils ont fait avorter
On se souviendra que nous avions mis en ligne, sous-titrée en anglais, une vidéo où les Chinois analysaient le processus de mise en place des révolutions colorées chères aux stratèges Américains, dont ils venaient de mettre en échec, à Hong Kong, la plus récente intitulée, cette fois-là, « Révolution des parapluies ».
Lénine, qui a dit et fait beaucoup de choses, estimait que la Révolution française était « exemplaire en tout » ; qu’il suffisait de la bien connaître pour posséder la grille propre à décrypter – et si possible prévoir - toutes les situations futures. Les Chinois, et les Russes avant eux, ont potassé Lénine ET la Révolution française, comme peu l’ont fait en France. Or, la République avait, en son temps, eu à se colleter avec semblable entreprise, déjà bien maîtrisée par le cabinet de Saint-James.
Ce que raconte, dans la vidéo qui suit, Evgeny Fedorov, député à la Douma, c’est comment ses compatriotes, après les Chinois, ont pu déjouer les plans US, issue qui n’était pas gagnée à coup sûr, car il entre dans ces choses autant d’imprévisible que d’impondérables.
Étincelante leçon politique :
(Sous-titrée en anglais comme d’habitude – Sayed Hasan ne peut pas tout faire seul.)
Nemtsov Maïdan failed
*
À propos des merdias US :
Tom Feeley, sur son site Information Clearing House (ICH), publie une information qui se passe de commentaire. La voilà :
À qui appartiennent TOUS les médias US ? À SIX compagnies.
Ces six compagnies sont :
232 directeurs de médias contrôlent l’information de 277 millions d’Américains
Cela fait 1 patron de presse pour 850.000 « informés »
(soit la population de San Francisco)
Revenu des six compagnies pour 2010 :
275.9 milliards de dollars
*
Puisqu’on parlait Vendée (ou plutôt puisque le Saker, à propos de Soral & C°, n’en parle pas) :
Nous est tombé cette semaine entre les mains …
Umberto ECO
Construire l’ennemi… et autres écrits occasionnels
Grasset – 2014
304 pages
Extrait de l’Introduction
Le véritable titre de ce recueil aurait dû être son sous-titre : «Écrits occasionnels». Seul le souci de mon éditeur qu'un titre si pompeusement modeste pût ne pas attirer l'attention du lecteur, tandis que celui du premier essai présente quelque motif de curiosité, a fait pencher pour le choix final.
Ce qu’en dit l’éditeur
Suite à une conversation dans un taxi new-yorkais avec un chauffeur pakistanais qui ne comprend pas qu’un pays puisse exister sans ennemis, Umberto Eco s’interroge. Après avoir constaté les ravages d’idéologies totalitaires telles que le nazisme ou le fascisme, la société actuelle ressent-elle la nécessité de se définir par rapport à un ennemi et de le diaboliser ? Les États renonceraient-ils, aujourd’hui, à l’opportunité de créer de nouveaux boucs émissaires pour renforcer le sentiment d’identité nationale et leur pouvoir ?
Puis, à l’occasion de conférences ou d’essais à thèmes qui amusent autant celui qui parle que celui qui écoute, et qui sont, en somme, des exercices de rhétorique baroque, l’auteur aborde avec jubilation des sujets variés : l’idée de l’absolu, la tragédie d’Anna Karenine, la poétique de l’excès chez Victor Hugo, les divertissements inspirés par les almanachs, « Parlez-moi d’amour », etc.
Le grand érudit qu’est Umberto Eco traite dans ces « écrits occasionnels » de questions qui l’intriguent et le passionnent, sans jamais oublier d’amuser son lecteur.
Bref, Umberto Eco publie ses fonds de tiroirs. Qui sont bien intéressants. À des titres divers selon ceux qui les lisent. Nous les avons lus non seulement tous avec intérêt, mais deux au moins avec grand plaisir.
D’abord, celui qui donne son titre au livre et qui est tiré d’un Éloge de la politique publié en 2009, où l’ébahissement du chauffeur de taxi pakistanais provoque les passionnantes réflexions du maître sur le besoin d’ennemi qui lui semble caractériser l’espèce humaine. À l’exception de l’Italie, qui n’en a pas besoin, parce qu’elle a déjà tous les Italiens.
Ensuite, l’époustouflant « Hugo, hélas ! », qui, partant de la célèbre exclamation de Gide et d’une réflexion de Cocteau, disserte avec une grande justesse de vues sur « La poétique de l’excès ». S’agissant d’Hugo, cela s’imposait, mais encore fallait-il le faire avec autant d’empathie que de lucidité.
Une partie de l’essai traite de Quatre-vingt-treize, qui est, comme chacun sait ou devrait savoir, la guerre de Vendée telle que Victor l’a vue, c’est-à-dire imaginée. On y trouve des choses comme celle-ci : « Hugo, pour comprendre la Commune, devait justifier la Terreur »
Et ceci :
« Mais dans Quatre-vingt-treize, la guillotine, qui tuera pourtant le plus pur des héros de la Révolution, passe du côté de la mort à celui de la vie et, en tout cas, elle se dresse comme symbole du futur contre le plus sombre des symboles du passé. Elle est désormais dressée devant la Tourgue, la tour où était assiégé Lantenac. Dans cette tour sont condensés mille cinq cents ans de péchés féodaux, elle représente un nœud entremêlé à dénouer, la guillotine lui fait face avec la pureté d’une lame qui tranchera le nœud. Elle n’est pas née du néant, elle a été fécondée par le sang qui a coulé pendant quinze siècles sur cette même terre, et du plus profond de la terre, elle s’élève, inconnue vengeresse, et elle dit à la tour : “Je suis ta fille ”. Et la tour sent que sa fin approche. »
Presque du Victor Hugo…
Ce qu’Umberto Eco ne sait pas (mais peut-être après tout le sait-il, car peu de choses lui échappent), c’est que Victor Hugo avait lui-même enlevé, de Quatre-vingt-treize, ce passage où il parlait de Marat :
« Marat n’appartient pas spécialement à la révolution française ; Marat est un type antérieur, profond et terrible. Marat c’est le vieux spectre immense. Si vous voulez savoir son vrai nom, criez dans l’abîme ce mot : Marat, l’écho du fond de l’infini, vous répondra : Misère !... Les apocalypses révolutionnaires sont des palingénésies. Dans toutes les époques qui sont des résultantes, toutes les incarnations sont requises par le besoin des événements : la nuée est profonde, les langues de feu du gouffre volent, des âmes redoutables cherchant des corps errent au-dessus des multitudes, ces âmes sont des idées, elles flottent dans l’ombre, puis tout à coup tombent sur une tête, s’abattent sur un passant, emplissent un homme, oblitérant sa conscience, remplaçant le moi de cet homme par le moi mystérieux des foules, allument sous ce crâne une hydre de passion, et alors c’est formidable, on entend un rugissement surhumain qui est aussi un gémissement : un inconnu, inconnu à lui-même, se dresse, les foudres blémissent une face dans les ténèbres, et tout l’immense abîme est subitement éclairé par cette apparition : Marat.
Ces hommes plus ou moins qu’hommes sont des fonctionnaires de la ruine : ils ont une mission qui est l’écroulement. L’horreur les environne et les enveloppe, et les garde jusqu’à ce qu’elle les tue. Un matin, l’horreur publique se fait femme, prend un couteau, entre dans leur chambre, et les poignarde dans leur baignoire. On guillotine Charlotte Corday, Bruto major, et l’on dit : « Marat est mort. » Non, Marat n’est pas mort. Mettez-le au Panthéon, ou jetez-le à l’égout, qu’importe, il renaît le lendemain.
Il renaît dans l’homme qui n’a pas de travail, dans la femme qui n’a pas de pain, dans la fille qui se prostitue, dans l’enfant qui n’apprend pas à lire, il renaît dans les greniers de Rouen, il renaît dans les caves de Lille ; il renaît, dans le chômage, dans le prolétariat, dans la mansarde sans feu, dans le grabat sans couverture, dans le lupanar, dans le bagne, dans vos codes qui sont sans pitié, dans vos écoles sans horizon, et il se reforme de tout ce qui est ignorance, et il se recompose de tout ce qui est la nuit. Ah ! que la société humaine y prenne garde, on ne tuera Marat qu’en tuant la misère ; Charlotte Corday n’a rien fait, tant qu’il y aura des misérables, il y aura sur l’horizon un nuage qui peut devenir un fantôme, et un fantôme qui peut devenir Marat. » (Fragment destiné à Quatre-vingt-treize, et éliminé ensuite, éd. nat., pp. 405-406.)
Mais éliminé pourquoi ? Peur d’afficher trop de sympathie à l’égard de la chèvre expiatoire ? Honte de la témérité d’« oblitérant sa conscience » ?...
La preuve qu’il n’est pas mort, c’est qu’il sévit encore (à en croire du moins l’opposition vénézuélienne) :
Pobre Venezuela, en su tragedia orwelliana, las victimas, son transformadas en victimarios, por las gestapos tropicales del régimen.
La oposición vive aterrorizada por los verdugos del régimen, quienes utilizando la magia de un Robespierre, Marat o Danton criollo, convierten a las victimas en victimarios y a los victimarios en victimas.
Es tal el cinismo de estos clones de Fidel Castro, que el presente estado de anomia, o de continuas tropelías que viven los medios, es invisible para todos los alatés que conforman este inefable régimen, por cuanto no pierden oportunidad para gritar a los cuatro vientos, la existencia plena de una supuesta libertad de prensa. Etc etc. etc.
(Pour la totalité du poulet, voir : http://falsademocracia.blogspot.be/2006/02/pobre-venezuel... )
C’était en 2006. Et rien n’a changé. Marat plus vital que jamais !
*
Scandale à la bibliothèque de Liège
Laquelle, sous le nom de Chiroux, devenue provinciale après avoir été près de mille ans principautaire, abrite depuis quelque temps, dans sa salle de libre-accès, une exposition (avec panneaux, matériel didactique, livres sous verre, et tout et tout) sur le thème de :
« La Censure ».
On aura compris qu’ils sont Charlie…
À tant faire que se vautrer, ils n’ont pas fait dans la dentelle.
C’est ainsi qu’on peut voir l’immense Étienne Dolet - brûlé vif avec ses livres le jour de son anniversaire, après quatre ans de cul de basse-fosse et sans qu’on ait pu produire à son encontre le moindre chef d’accusation - épinglé par-dessus de déshonorants mickeys entre Charb et Cabu, comme le Christ entre les deux larrons, dont un au moins s’était repenti, paraît-il, les temps changent.
Avoir été, au début du XIVe siècle, la bibliothèque la plus riche d’Europe, pour tomber si bas au XXIe ! C’était bien la peine, vraiment. Et on voudrait que les empires ne meurent pas ?!
Étienne Dolet, un des plus grands éditeurs français de tous les temps.
Sa statue de la place Maubert, œuvre du sculpteur Ernest Guilbert a été mise à la casse en 1942 (offerte par le Maréchal Pétain aux Nazis, en soutien de l’effort de guerre contre la Russie, oui, déjà) et jamais remplacée.
*
Dernière minute !
Nous recevons, avant de poster, un message particulièrement intéressant de Slobodan Despot (Une plume dans les rouages) :
Les étranges répercussions d’un débat télévisé
Note préliminaire. Ceci est la première lettre que je vous adresse via un nouveau service de diffusion. Je vous prie de bien vouloir excuser les éventuelles erreurs de transcription ou d’adressage.
Chers amis,
Comme lorsque j'avais publié mon essai sur l'ignorance délibérée au sujet de la Russie, mon intervention à l'émission de Frédéric Taddéi consacrée à Vladimir Poutine m'a valu des réactions anormalement nombreuses sur tous les canaux: réseaux sociaux, courriers personnels, téléphones, et même interpellations dans la rue.
A de très rares exceptions près, ces réactions étaient chaleureuses, et même plus que cela. Elles témoignaient d'un profond ras-le-bol à l'égard du lavage de cerveaux ambiant au sujet de la Russie. Mais également, et c'est nouveau, d'une certaine angoisse vis-à-vis de la dérive belliciste du système politico-médiatique où nous vivons en Occident.
J'ai donc publié quelques réflexions consécutives à cette émission, significative à bien des égards.
Puis, quelques jours plus tard, on m'a signalé une anomalie véritablement choquante dans les résumés d'informations qui émaillaient le débat.
Dernière précision au sujet de ce débat qui semble avoir marqué les esprits: la vidéo n'est plus disponible in extenso sur le site de l'émission, mais on peut la regarder sur Youtube.
Bonnes lectures !
Slobodan Despot
PS 1 Floret silva nobilis. Fleurit la noble forêt ! Un peu de Carmina Burana pour accueillir le printemps.
PS 2 Nous venons de rééditer le grand essai d'Eric Werner L'Avant-guerre civile. J'y reviendrai dans un prochain message.
Suivent les deux articles annoncés et leurs vidéos respectives.
*
Ce Soir ou Jamais du 13.3.2015 - vidéo et remarques
On ne le répétera jamais assez: l'émission de Frédéric Taddéi Ce soir ou jamais sur France2 est un surprenant îlot de discussion libre dans le paysage audiovisuel français. Merci à Frédéric d’avoir maintenu cette «zone autonome temporaire» (comme aurait dit Hakim Bey) depuis tant d’années !
L’édition du 13 mars 2015 était consacrée à Vladimir Poutine et sous-tendue par la question du retour à la guerre, chaude ou froide.
J'ai été heureux de pouvoir y livrer mon sentiment sur les rapports de l’Occident avec la Russie, même si l’angle adopté par l’émission me paraissait biaisé d’emblée. Je m’en suis du reste expliqué sur le plateau: la focalisation sur la personnalité, les idées et les intentions du seul président russe met sous le boisseau toutes les autres dimensions clefs de la crise, de la politique d’encerclement de l’OTAN au fonctionnement de l’État et de la société russes dans leur ensemble.
On avait placé du côté des «défenseurs de la Russie» Hubert Védrine, diplomate machiavélien, Frédéric Pons, biographe de Poutine, factuel et argumenté, et moi-même; dans le «camp d’en face» Andreï Gratchev, le conseiller de Gorbatchev, scrupuleux, cultivé et ouvert comme tous ces Russes de l’après-URSS qui allaient amèrement déchanter, la journaliste Manon Loizeau, courageuse et orientée, et le lobbyiste Raphaël Glucksmann, fils du «nouveau philosophe» André Glucksmann.
Il est vrai, comme beaucoup l’ont observé, que la discussion a nettement tourné au désavantage des «poutinophobes», essentiellement à cause de la défection de Gratchev. Malgré son hostilité à Poutine attestée par ses livres, l’ancien ministre a dépeint avec finesse la situation de la Russie et légitimé ses réactions. Mais il apparaît aussi très nettement que le réalisme n’était pas de ce côté-là de la table.
Une autre raison de leur défaite tient en la révélation d’un conflit d’intérêt majeur impliquant l'épouse de M. Glucksmann. Il s'est avéré que celui-ci n'était pas seulement le fils de son père, mais, dans le dossier qui nous occupait, le mari de sa femme, vice-ministre de l'Intérieur ukrainienne (en réalité géorgienne naturalisée à la hâte), et donc travaillant à la répression de l'insurrection du Donbass. Il est regrettable que ce détail de poids ait dû être signalé par un invité sur le plateau et non par l'intéressé lui-même avant l'émission.
Source : http://blog.despot.ch/post/ce-soir-ou-jamais-du-13-3-2015...
*
Des symboles nazis sur les télés françaises
22.3.2015
Suite au débat sur la Russie du 13 mars dernier à Ce soir ou jamais, une téléspectatrice a attiré mon attention sur un « détail » colossal dont je regrette de ne m’être pas rendu compte sur le plateau en direct. Avec sa permission, je reproduis ici son message in extenso.
« Voyant le résumé d'actualités dans l'émission du 13 mars, qui était soit dit en passant très tendancieux, j'ai aperçu une séquence de LCI montrant des "chars russes en Ukraine orientale" sans préciser la source de l'information. Cette information tendancieuse provient en fait de Kiev. En regardant bien, on voit dans l'angle droit l'insigne d'Azov avec une croix gammée stylisée! J'ai vu un résumé vidéo identique sur BFM TV qui diffuse des brèves comme LCI. J'ai revu cette séquence 2-3 fois au cours de la journée. J'ai appelé directement BFMTV en demandant le rédacteur en chef. Etonnamment, il n'était pas là. Etonnamment, il n y avait aucun responsable sur BFM! Je leur ai dit que s'ils n'ôtaient pas cette séquence de leurs programmes je porterais plainte pour "apologie des idées nazies". Ils ont donc supprimé la séquence. Je vois à présent que LCI fait la même chose, ce qui ne me surprend pas, car les journalistes sont notoirement des ignares superficiels, et prennent leurs informations, à de rares exceptions près, toujours dans la même cuisine, c.à.d. les agences de presse de préférence américaines ou britanniques. Je m'étonne que Frédéric Taddéi ait laissé passer cela. » (V. B.)
L’apparition visée apparaît à 5:57 sur la vidéo intégrale de l’émission du 13 mars visible sur [Youtube] ( https://youtu.be/VpjwZH7O0sk ).
Source :
http://blog.despot.ch/post/des-symboles-nazis-envahissent-les-teles-francaises
Ce symbole, décidément, nous poursuit.
Commentant une étonnante opération de « relations publiques » au profit du bataillon Azov parue dans le quotidien suisse Le Matin du 24 juin 2014, je rappelais sur mon blog quelques faits historiques élémentaires :
L'emblème du bataillon Azov, une rune allemande appelée « crochet de loup » (Wolfsangel), est le même que celui de la division SS Das Reich, connue « pour sa brutalité, ses nombreuses exactions et crimes de guerre en Europe de l'Est et en France ». Son utilisation est interdite en Allemagne - n'y font exception que les armoiries municipales et écussons militaires historiques.
La nonchalance des médias francophones et occidentaux vis-à-vis de cette résurgence incontestable du national-socialisme — on se souvient de la jeune nazie mise en vedette par Elle — contraste violemment avec la vigilance quasi paranoïaque de ces mêmes médias vis-à-vis des soupçons d’apologie du nazisme en Europe de l’Ouest.
Le témoignage de V. B. corrobore mes propres expériences et me porte à conclure que les médias occidentaux se fichent complètement du nazisme tant qu’il agit dans leur camp. A ceux qui étudient les techniques de la manipulation des masses, la présence discrète mais fréquente du symbole d’Azov dans les médias audiovisuels pourrait suggérer le soupçon d’une opération de désensibilisation subliminale délibérée.
*
Mis en ligne le 23 mars 2015
18:07 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
Les commentaires sont fermés.