31/07/2013
Nos fêtes sont plus belles que les vôtres - I/3.
Nos fêtes sont plus belles que les vôtres
Et nos deuils nous appartiennent
Haïti - Cuba
« J’ai besoin, vous dis-je, de me débarrasser de soixante mille hommes ! »
Napoléon Bonaparte à Leclerc, 1802.
« I ran Cuba from the sixth floor of the US embassy. Cubans’ job was to grow sugar and shut up ! »
Earl T. Smith, ambassadeur US.
Le 7 avril 1803, il y a 210 ans, mourait Toussaint Louverture, au Fort de Joux, dans le Jura, où l’avait enfermé le 1er Consul, pour le forcer à révéler où il avait caché un trésor qui n’existait pas.
Le 26 juillet 1953, il y a 60 ans, 135 jeunes Cubains, conduits par Fidel Castro, donnaient l’assaut à la caserne Moncada. Presque tous allaient mourir et les quelques survivants faire une révolution qui dure encore.
Le 28 juillet 1794 ou 10 Thermidor An II, il y a 219 ans, mouraient à Paris Maximilien Robespierre, Antoine Saint-Just, Georges Couthon et plus d’une centaine d’autres, dont un général sans-culotte liégeois du nom de Servais Boulanger, ancien ouvrier orfèvre émigré de Herstal.
On est le 31 ? On s’en fout, on n’est pas aux pièces.
Célébrons aujourd’hui, comme nous pouvons, les deux îles caraïbes, leurs grands malheurs et leurs grandes victoires. Votre indulgence pour nos lacunes. Vous n’aurez qu’à remplir les blancs.
C’est Amelia Duarte de la Rosa qui nous a donné l’idée de ce post, lorsqu’elle a fait paraître ce papier dans Granma, il y a une quinzaine de jours, après un an passé au milieu des Haïtiens et des décombres de leur catastrophe – une parmi d’autres - du 12 janvier 2010.
Haïti revisité
Granma, 13 juillet 2013
Amelia Duarte de la Rosa
Je suis restée 12 mois dans ce pays, et j’ai pu constater qu’un nouveau pays se redressait des ruines et des décombres du tremblement de terre...
Si quelqu’un décidait d’entreprendre un voyage en ignorant tout sur sa destination excepté le nombre de victimes d’un tremblement de terre ou d’une épidémie de choléra, avec pour tout bagage quelques livres de José Marti, d’Alejo Carpentier, d’Aimé Césaire et d’Enrique Vila Mata, quelques vieux vêtements, un appareil photo et une petite image de la Vierge de la Caridad del Cobre - pour se protéger des catastrophes - ; si pour comble cette personne décidait de miser sur l’optimisme et la curiosité à l’idée de partir à la recherche de la beauté dans les choses simples de la vie, sans doute vivrait-elle l’expérience que j’ai vécue à mon arrivée en Haïti.
J’atterris pour la première fois à Port-au-Prince par une journée torride d’un mois de décembre caribéen. Depuis deux ans, la situation du pays faisait la une de toutes les agences de presse, que ce soit à cause du séisme, de l’épidémie de choléra, ou du nombre de personnes qui mourraient quotidiennement pour une ou l’autre de ces raisons. Quelle qu’en soit la cause, les nouvelles d’Haïti étaient toujours désastreuses. Tout indiquait qu’une gigantesque fatalité, hors de contrôle, s’était emparée du pays pour briser tout signe d’espérance.
À Cuba en général, nous nous faisons une fausse idée de la réalité haïtienne. Déjà, en 1941, dans un article, intitulé Haïti, l’île enchaînée, publié par le journal Hoy, Nicolas Guillen, notre poète national, s’inquiétait de cette distance et de cette ignorance envers un pays si proche : « Pour l’ensemble des Cubains, Haïti est une terre ténébreuse, sans culture et sans esprit. Isolée par sa langue et par des préjugés raciaux, plus encore que par sa condition géographique, elle nous est étrangère, comme si elle ne se trouvait pas à quelques heures d’avion ou à plusieurs jours par mer de Cuba. »
Précédée par toutes ces lectures, ces informations et ces conseils, je suis montée dans l’avion, un peu effrayée à l’idée d’arriver dans le pays des ténèbres, dans l’enfer du monde – j’ai en effet parfois des visions très apocalyptiques et enfantines de ce monde. Pas un instant je n’ai pensé que sur la terre de Toussaint-Louverture, j’allais trouver autre chose que le désastre annoncé. Ma première image d’Haïti fut du ciel, et je me souviens très bien m’être dit alors : « Ça n’a pas l’air si mal ! »
J’ai alors tenté d’être pratique et objective. J’ai refusé de me laisser influencer par les a priori et je me suis efforcée de parler d’un Haïti différent, d’un pays qui ne serait pas seulement un pays accablé par le malheur et la misère. C’est alors que, progressivement, une infinité de choses merveilleuses et réelles se sont offertes à moi. Je sais aujourd’hui, après avoir vécu un an dans le premier pays à avoir conquis son indépendance en Amérique latine, que ces merveilles ont toujours existé : dans son Histoire, dans sa culture, dans sa population, dans son mode de vie, dans ses légendes et sa religion.
Je n’ai pas pour autant fui la réalité : Haïti est le pays le plus pauvre du continent, et il en porte les traces. Mais il ne souffre pas seulement de sa pauvreté, il souffre également de l’opportunisme sans pitié des grandes puissances, ainsi que de leur charité ; il souffre de ceux-là mêmes qui, historiquement, l’ont pratiquement dépouillé de tout. Haïti porte la marque des fers des gouvernements corrompus, des coups d’État, des interventions militaires, de l’oppression, du pillage, de l’agression, de la mesquinerie, du mépris, et du caractère parasitaire de l’impérialisme dominant et du capitalisme sous leurs formes les plus brutales.
Je suis restée 12 mois dans ce pays, et j’ai pu constater qu’un nouveau pays se redressait des ruines et des décombres du tremblement de terre. J’ai vécu dans le downtown, rue Saint Honoré, juste derrière les ruines du Palais présidentiel, en face de l’Hôpital militaire, près du Champs de Mars, du Panthéon national, de l’Avenue du Port, des vestiges de ce qui fut la Cathédrale et la Cité Soleil, la partie basse et la plus dangereuse de Port-au-Prince. Même ainsi, je me suis sentie satisfaite de mon sort.
Le downtown, l’un des quartiers les plus populaires de Port-au-Prince, est un lieu déconcertant. Submergé constamment d’une vapeur moribonde, c’est la zone des petits commerces - une vingtaine par quartier – qui restent ouverts 24h sur 24.
Le jour, les rues sont bondées : l’on perçoit parfois une énergie dévorante de bruits, de haut-parleurs diffusant de la musique, de motocyclettes, de voitures, de bars, de marchands et de vendeurs ambulants de médicaments, de chaussures, de vêtements et de tout ce qui peut être vendu. La nuit, le calme est apparent.
Peu de gens circulent dans la rue, peut-être à cause de la légende vaudou sur l’apparition nocturne de zombies. Le taux de délinquance et de violence est directement proportionnel à l’avancée de la nuit. Aux coins des rues, à la tombée du soleil, des jeunes filles, en majorité haïtiennes, viennent se prostituer ; les jeunes Dominicaines, en revanche, sont destinées aux maisons closes qui offrent un peu plus d’intimité.
Les lieux les plus riches sont situés au sommet des montagnes. Le statut d’une personne est d’autant plus important qu’elle réside sur un lieu élevé. À mesure que l’on monte l’avenue Delmas ou la Panaméricaine (ce n’est pas son vrai nom, mais c’est ainsi que tout le monde l’appelle), on aperçoit les différences sociales. En Haïti, il y a des endroits pour pauvres et d’autres pour les millionnaires, mais ce qui est caractéristique, c’est l’immense abîme qui sépare les uns des autres.
On trouve de nombreux commerces, des boutiques, des marchés énormes, propriété exclusive de Syriens qui offrent des produits de haute qualité, et surtout de la sécurité, que l’on doit payer très cher à notre époque. À Petion-Ville – l’un des quartiers les plus populaires – se trouvent les ambassades, les entreprises, les hôtels de luxe, et cette « autre vie » à laquelle beaucoup aspirent.
Même si Port-au-Prince fut le centre principal de toutes mes observations, j’ai eu l’occasion de parcourir le pays tout entier. Les médecins cubains sont répartis dans des communes, des localités, dans les montagnes et les zones les plus reculées des dix départements haïtiens. J’ai décidé d’aller à leur rencontre pour observer la qualité humaine de leur travail, ce que l’on ne peut estimer qu’en parcourant les couloirs d’un hôpital communautaire de référence (HCR), le seul endroit où la population a accès à des soins gratuits. Par ailleurs, à travers le dévouement et l’altruisme de la coopération cubaine, j’ai découvert des histoires intéressantes et différentes dans chaque lieu.
De là sont nés tous les témoignages et toutes les chroniques parus dans le journal Granma en 2012 ; Ils prétendaient plus que tout autre chose modifier certains points de vue sur la réalité haïtienne. Il y avait également des articles sur la présence de Cuba sur une terre si proche. Ce fut l’objectif essentiel de ce séjour qui se révéla fructueux et révélateur à bien des égards.
Parcourir Haïti, vivre parmi ses gens, parler en créole, français, anglais et parfois en espagnol, tenter de comprendre leurs raisons d’agir, connaître leur désespoir, leur pauvreté, les zones obscures, mais aussi leur sourire, leur reconnaissance, leur patience et la persévérance avec lesquelles ils font face aux problèmes, m’a permis de forger ce que j’appelle « mon point de vue haïtien de la réalité ».
D’aucuns penseront qu’il s’agit probablement d’une question de perspectives, et c’est vrai. Je ne le nie pas. Ma vision sur Haïti est très particulière, et il ne saurait en être autrement. C’est la meilleure façon que j’ai de remercier ce pays pour tout ce qui a marqué ma personnalité. Les expériences que j’y ai vécues m’ont amenée à faire face à des réalités inconnues, à sortir de ma coquille et à me retrouver moi-même, je dois l’avouer.
Je dédie cette compilation d’articles à ce pays où le temps n’existe pas, aux mouvements inattendus et aux choses invisibles, où tout est exacerbé et où les puissants contrastes ne permettent aucune comparaison.
Comme tant d’autres, je ne prétends que redonner sa place au cœur de la fierté latino-américaine à cet État qui a affirmé la lutte pour l’indépendance, qui s’est fait respecter, et qui a apporté un héritage inestimable sur la façon de faire les révolutions.
Amelia Duarte de la Rosa
La Havane. 4 Juillet 2013
Sources :
http://www.granma.cu/frances/notre-amerique/4jul-Haiti.html
http://www.legrandsoir.info/haiti-revisite-granma.html
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Malgré le silence total des merdias, ce n’est un secret pour personne que Cuba a apporté la plus rapide et la plus grande aide médicale à Haïti, après le tremblement de terre –
Ce n’est pas un secret non plus qu’après le débarquement de CNN, précédant immédiatement, comme toujours, un débarquement militaire (ah, ces scènes de pillage tournées à Hollywood et passées en boucle !), l’aide US annoncée n’a pas du tout tenu ses promesses, les promesses n’engageant jamais que ceux qui y croient.
L’aide US n’a pas tenu ses promesses (The Guardian) :
http://www.guardian.co.uk/global-development/2013/jun/28/us-aid-haiti
On sait aussi que Cuba est présente pour soigner ceux qui sont sans soins dans beaucoup de pays du Tiers-Monde (maintenant on dit « émergents »), principalement en matière de soins ophtalmologiques, spécialité dans laquelle l’île a pris, en dépit des criminels embargos auxquels nous participons, une avance considérable.
À l'hôpital de Jaguey Grande (Cuba) : formation constante de médecins ophtalmos :
À Haïti, dans les premières heures de l’après-séisme :
Des doctoresses du Bronx formées à Cuba… Une ONG Cubano-US (oui, oui)… et vogue la galère.
Le Dr. Melissa Barber et deux membres de son équipe.
Elles ont rejoint les 350 médecins cubains qui étaient déjà présents dans l’île avant le séisme pour y soigner les plus pauvres
« Certaines d’entre nous y ont mis des enfants au monde pour la première fois sans aide… »
et les équipes d’urgentistes envoyées de La Havane, dont la Brigade médicale d’urgence Henry Reeve
Une brigade médicale d’urgence doit pouvoir faire face à tout :
aux plaies,
aux fractures,
à la malnutrition,
au choléra,
fermer les yeux aux enfants qui en sont morts, etc.
Car « la vie d’un seul être humain vaut des millions de fois plus que tous les biens de l’homme le plus riche de la terre ».
Quand on a fini, on rentre chez soi. Quelquefois avec des fleurs. Pour aussitôt repartir ailleurs… Chili…Pakistan… refaire les mêmes gestes.
13 mars 2013 – Une brigade d’aide urgentiste rentre à Cuba.
OUPS ! Un autre genre de brigade. À Dublin, celle-là.
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Pendant qu’on y est…
L’embargo meurtrier contre Cuba (el bloqueo), qui dure depuis 51 ans, et l’absence forcée de consumérisme qui en résulte ont abouti à un résultat auquel n’avait pas pensé la canaille proche ou lointaine qui nous gouverne :
Cuba, paradis caché
D’après Cuba, le jardin d’Eden accidentel
documentaire de Doug Schulz
Cuba a pu être limité politiquement et économiquement pendant les 50 dernières années, mais ses frontières sont restées ouvertes pour la faune pour laquelle les îles sous-développées de Cuba sont un havre irrésistible. Alors que de nombreuses îles des Caraïbes ont empoisonné ou bétonné leurs richesses écologiques sur terre et dans la mer à la poursuite d’une industrie touristique en pleine expansion, les paysages sauvages de Cuba sont restés pratiquement intacts, résultant en la création d’un refuge pour animaux indigènes rares et fascinants, ainsi que pour des centaines d’espèces d’oiseaux migrateurs et de créatures marines. Les récifs coralliens en ont aussi bénéficié. Des recherches indépendantes ont montré que les coraux de Cuba font beaucoup mieux que d’autres à la fois dans les Caraïbes et dans le reste du monde.
Source : http://www.legrandsoir.info/cuba-le-jardin-d-eden-accidentel.html
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Haïti
De Toussaint Louverture à Jean-Bertrand Aristide
À la mémoire du jacobin noir, dont l’histoire devrait être connue de tous…
[ Oublions pour commencer l’historien à la noix qui en a fait un Napoléon des îles. Rien ne pourrait être plus faux ni plus insultant pour sa mémoire. ]
… quelques liens pour ne pas mourir idiots :
Sous « L’œil du jabiru ».
http://jabiru.blog.lemonde.fr/2007/04/07/a-la-memoire-dun-jacobin-noir/
Repères biographiques.
http://www.haitimedia.com/biographie.htm
C’est quoi, c’est où le château de Joux ?
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DES FILMS CONSACRÉS À TOUSSAINT
Celui de Gabriel Molina Franchossi, tourné pour marquer ce 210e anniversaire et présenté en avril dernier à La Havane. Un article du réalisateur :
Pour ceux qui ignorent encore Haïti
• Première à La Havane d’un film sur Toussaint-Louverture, le précurseur de l’indépendance haïtienne, à l’occasion du 210e anniversaire de son assassinat
• Le jacobin noir est réhabilité par le cinéma après l'hommage que lui rendit l'UNESCO en 2004 • Réalisé sous les auspices de l'Exposition itinérante de cinéma de la Caraïbe, le film se veut un rappel à ceux qui ignorent encore Haïti, le premier pays à s'être libéré du colonialisme et de l'esclavage en Amérique latine.
Source :
http://www.granma.cu/frances/notre-amerique/17abrPour%20ceux%20qui.html
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Toussaint Louverture, un leader noir sans complexe
(Arte)
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De Patrick Lozès ,
pour l’Université populaire du Quai Branly (CERIMES) :
Les grandes figures de la décolonisation : Toussaint Louverture
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Toussaint-Louverture, Haïti et la France
est un documentaire de Laurent Lutaud et Georges Nivoix, qui réunit Aimé Césaire, Franck-Etienne, Dominique Battraville, Claude Ribbe, Fabienne Pasquet, Marcel Dorigny, Kendy Verilus et… Christiane Taubira (personne n’est parfait).
http://www.filmsdocumentaires.com/portail/Toussaint_Louverture.html (DVD de 52 minutes)
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Jean-Bertrand Aristide
Président – déposé par la France et les États-Unis – de la République d’Haïti
La tragédie d’Haïti
Noam Chomsky
1. « La première nation libre d’hommes libres ».
« Plus que la deuxième plus ancienne république du Nouveau Monde, fait remarquer l’anthropologue Ira Lowenthal, plus même que la première république noire du monde moderne, Haïti fut la première nation libre d’hommes libres à apparaître dans la constellation naissante des colonies européennes d’Occident, tout en leur résistant. » Les deux siècles de relations entre les deux plus vieilles républiques du Nouveau Monde illustrent à nouveau la persistance des thèmes politiques fondamentaux, de leurs racines institutionnelles et des éléments culturels qui les accompagnent.
La république d’Haïti fut proclamée le premier janvier 1804, après qu’une révolte d’esclaves eut chassé les dirigeants coloniaux français et leurs alliés. Les chefs révolutionnaires abandonnèrent l’appellation française de « Saint-Domingue » en faveur du nom utilisé par le peuple qui avait accueilli Colomb en 1492, au moment où il arrivait pour créer la première colonie européenne du Nouveau Monde. Les descendants des premiers habitants ne purent pas fêter la libération. En moins de 50 ans, leur nombre avait été réduit à quelques centaines, à partir d’une population précolombienne dont l’évaluation varie de quelques centaines de milliers à huit millions d’âmes, selon la source. Il n’en restait plus un seul, d’après les savants français contemporains, lorsqu’en 1697, la France enleva à l’Espagne le tiers occidental d’Hispaniola, qui s’appelle à présent Haïti. Le chef de la révolte, Toussaint Louverture, ne put pas célébrer la victoire non plus. Il avait été capturé par fourberie et envoyé dans une prison française où il mourut « de mort lente de froid et de misère », pour reprendre les termes d’un historien français du XIXe siècle. L’anthropologue médical Paul Farmer fait remarquer qu’à notre époque, les écoliers haïtiens connaissent encore par cœur les dernières paroles qu’il prononça alors qu’on l’emmenait en prison : « En me renversant, vous n’avez fait qu’abattre l’arbre de la liberté à Saint-Domingue. Il repoussera grâce à ses racines, car elles sont nombreuses et profondes (1).
Source :
http://www.chomsky.fr/livres/an501_08.html
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Interview de Jean-Bertrand Aristide
par Claude Ribbe
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Sur Pressafrique , en 2006, retour et commentaires divers (dont celui de Noam Chomsky) sur le coup d’état qui a renversé le président Aristide
http://www.pressafrique.com/m495.html
Le nôtre : On sait à quel point M. Dominique de Villepin est bonapartiste. L’histoire aime décidément à se répéter.
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Témoignage et réflexions
Régis Debray en Bolivie et en Haïti
par Claude Ribbe
(Réseau Voltaire – 11 février 2010)
En 2004, la France se réconciliait avec les Etats-Unis en participant au renversement du président Jean-Bertrand Aristide. Côté français, le coup d’Etat était organisé par l’intellectuel pseudo-révolutionnaire Régis Debray. Témoin privilégié de ce drame, l’écrivain Claude Ribbe, qui fut membre de la Commission internationale d’experts sur la dette d’Haïti, relate ici le complot, la campagne de diffamation contre le président Aristide, son enlèvement et sa séquestration. Paris avait prévu de réinstaller au pouvoir l’ex-dictateur Jean-Claude Duvallier, mais les Etats-Unis imposèrent au dernier moment leurs hommes, Boniface Alexandre et Gérard Latortue.
Je le savais ! Je savais bien que le fumet des cadavres d’Haïti en décomposition ferait sortir Regis Debray, l’homme qui croit que Villepin, dont il a certainement accroché le portrait dans sa chambrette, juste au-dessus de son lit, sera couronné empereur des Français en mars 2012. Regis Debray rêve d’être ministre de la Culture de Napoléon IV. Il a raison. Donc toutes les occasions sont bonnes. Il n’aura pas fallu dix jours. Quel flair ! Après les conseils donnés par Villepin à Nicolas Sarkozy, Regis Debray monte au créneau en déclarant à France Inter qu’il faut mettre Haïti sous tutelle.
Source :
http://www.voltairenet.org/article164005.html
Le blog de Claude Ribbe : http://www.claude-ribbe.com/
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Deux liens pour les curieux :
La première agence d’information haïtienne, en français, en anglais, et un ouragan tropical nommé Chantal :
The Haitian blogger
http://thehaitianblogger.blogspot.be/2008/07/end-us-war-on-haiti.html
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Et pour finir :
Discours prononcé par le Président du Sénat Haïtien Simon Dieuseul Desras, à l’occasion du 14 juillet 2013.
Selon le Président du Sénat, « deux siècles et quelques années plus tard, les Haïtiens reconnaissants n’ont pas oublié Robespierre, Danton et Sonthonax ». Le Président du Sénat de la République Simon Dieuseul Desras souligne ainsi les points de convergence entre la révolution Française et celle d’Haïti à l’occasion des célébrations du 14 Juillet à l’Ambassade de France en Haïti.
Publié le dimanche 21 juillet 2013
M. Patrick Nicoloseau |
Ambassadeur de France |
M. le Premier Ministre |
Mesdames Messieurs les Membres du Gouvernement et du Parlement |
Mesdames Messieurs les Diplomates |
Mesdames Messieurs les Hauts cadres de l’Etat |
Mesdames Messieurs les Membres des Organisations internationales |
Mesdames Messieurs les Membres du personnel de l’Ambassade de France |
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Distingués invités,
La France nous réunit ce 14 juillet autour d’un ensemble d’idées fulgurantes et de hauts faits qui ont changé la face du monde. Nous vous souhaitons la bienvenue et une fructueuse mission en Haïti, Monsieur l’ambassadeur. Nous vous remercions de nous associer à cette célébration qui met en exergue la Prise de la Bastille, une action héroïque du peuple de Paris qui avait sonné le glas de l’absolutisme royal et d’un ordre mondial de domination, d’asservissement, d’exploitation et d’exclusion du peuple des roturiers… La déclaration des Droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 qui s’ensuivit, de portée universelle, prononcée par l’Assemblée Nationale Constituante, signifiait que désormais le pouvoir ne pouvait reposer sur le charisme, la puissance, la célébrité ou la naissance d’un homme mais sur la constitution, les principes et la loi… En voici quelques énoncés qui ont acquis la pérennité :
Art 1. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ; les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.
Art 2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme ; ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression…
Art 16. Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution.
Monsieur l’Ambassadeur,
Ces évènements qui chambardèrent la France au XVIIIe siècle eurent l’effet d’un séisme de grande magnitude sur le régime tortionnaire de Saint- Domingue dont nos ancêtres--- Le bois d’ébène du commerce triangulaire--- étaient les galériens… Dès le mois d’aout 1791, sous l’autorité de Boukman, puis de Toussaint Louverture, les esclaves, nos pères, avaient brisé leurs chaines et campé une armée révolutionnaire avant même que la Convention jacobine ait proclamé la République et aboli l’esclavage. Ce grand courant en faveur de la liberté, matérialisé par les Américains en 1776, par les Français en 1792, n’est devenu irréversible qu’en 1804, au triomphe de la révolution nègre, anticolonialiste et antiesclavagiste d’Haïti.
Deux siècles et quelques années plus tard, les Haïtiens reconnaissants n’ont pas oublié Robespierre, Danton et Sonthonax. Les Américains ne sauraient oublier l’action militaire de Savannah, ni la mission de La Fayette. Les Français, un peu tard, ont déposé les restes de Toussaint Louverture au Panthéon alors que l’Amérique latine ne cesse d’honorer Dessalines et Pétion comme l’Amérique anglo-saxonne vénère Jefferson et Lincoln au nom de la liberté et de l’égalité.
M. l’Ambassadeur, le monde libre dont le leadership haïtien a aidé à consolider les bases, n’a pas consenti, il me semble, le retour de balancier de la reconnaissance historique au titre de l’action méritoire… La Coopération française peut s’enorgueillir d’avoir concouru à l’instruction de la société haïtienne par le biais de l’École et L’Église mais a gardé ses distances vis-à-vis d’une histoire qualifiée d’impertinente. D’ailleurs, un seul Président français est venu, depuis 1804, visiter ce coin de terre qui fut « le plus beau fleuron de la couronne royale de France » à l’époque des colonies d’exploitation. Néanmoins, les Haïtiens et les Haïtiennes se sont longtemps amourachés de l’histoire, de la langue et de la littérature françaises. Ils ont fait leurs toutes les grandes idées politiques, sociales, culturelles véhiculées en France et susceptibles d’alimenter et de conforter leurs rêves de liberté et d’égalité.
Ils admirent les figures qui ont magnifié le siècle des lumières comme Montesquieu, le théoricien de la séparation des pouvoirs et de l’esprit des lois… Voltaire, le dilettante, second dans tous les genres et Rousseau le philosophe, qui s’est illustré dans l’éducation par « l’Émile », dans la recherche du bonheur par « la théorie du bon sauvage » et dans l’organisation socio- politique par « le Contrat social. »
Selon Rousseau : « L’homme est né libre et partout il est dans les fers… À l’injuste contrat où le fort a subjugué le faible, il faut substituer un nouveau contrat social qui assure à chaque citoyen la protection de la communauté et lui rende les avantages de la liberté et de l’égalité ». Les Haïtiens peuvent aisément disserter sur ces auteurs ainsi que sur Lamartine, Vigny et notamment Victor Hugo dont ils ressassent les strophes de Oceano NOX et celles des poèmes de la Légende des siècles. Pourtant, ils font la différence entre le littéraire et le politique dans leur appréciation de la présence française en Haïti. M. l’Ambassadeur, nous saluons le dynamisme de votre prédécesseur qui, dans une lettre de fin de mission, avait démontré sa maitrise de la réalité socio-politique haïtienne et esquissé les perspectives de l’action diplomatique de la France… dont le suivi vous échet si toutefois cette ligne sied à votre Mission.
Nous applaudissons, à travers l’Union Européenne, une coopération substantielle et une diplomatie policée et dextre qui honorent les pays au nom desquels elle agit… dont la France. Nous espérons, Monsieur l’Ambassadeur que vous allez promptement vous mettre à l’œuvre pour rendre la France présente, vivante, agissante en Haïti dans ce qu’elle représente le mieux pour nos compatriotes : l’Ordre républicain et les mécanismes de sa consolidation. La France, aux côtés des grands amis d’Haïti, supporteurs avérés de la démocratie, se positionnera, à coup sûr, pour que les élections sénatoriales et des collectivités territoriales soient réalisées, par le Pouvoir en place, avant la fin de l’année 2013, pour éviter le chaos institutionnel et décourager la tentation autoritaire.
Nous nous joignons, M. l’Ambassadeur, à tous ceux, toutes celles qui ont appris à connaitre et à apprécier la France, cette patrie des valeurs impérissables symbolisées par les lumières, les droits de l’homme, la démocratie, les savoirs et l’expertise, pour offrir un bouquet de fête, à l’image d’une flamme inextinguible, au Peuple Français et à ses Dirigeants. Nous saisissons l’aubaine que représente l’instant présent pour vous souhaiter, M. l’Ambassadeur, tout le bonheur possible dans cette ambiance de joie mythique qui éclaire la face immortelle de la France
BONNE FÊTE à tous et à toutes !
Simon Dieuseul Desras, Président du Sénat de la République.
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Mis en ligne par Marie le 31 juillet 2013.
22:57 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
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