18/07/2013

HENRI ALLEG EST MORT

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 Henri ALLEG est mort

 

Nous empruntons à notre ami Djamal Benmerad sa réaction à chaud.

Le coeur d'un seigneur, il s'appelle - nous répugnons à parler de lui au passé -  Henri Alleg, a cessé battre, tout comme le nôtre s'est arrêté un instant en apprenant cette nouvelle.

Après le décès de son épouse Gilberte, que dire, sinon renouveler à ses (rares) camarades notre humble recueillement et souhaiter qu'il y ait d'autres Henri Alleg.

En guise d'oraison funèbre, nous republions ce que nous disions de lui à l'occasion de la commémoration du l'Indépendance de l'Algérie, où nous l'avions invité (à Bruxelles) en ce 5 mai 2007.

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Henri Alleg, le plus algérien des Français
Par Djamal Benmerad

J’ai titré ainsi mon propos par pure coquetterie intellectuelle, car Henri Alleg n’est ni tout à fait Algérien ni tout à fait Français : il est internationaliste, bien que nous, Algériens, ayons tendance à nous l’approprier.

Il m’échoit, ce soir (samedi 5 mai 2007), deux tâches en une.

La première tâche, ingrate celle-là, vise à présenter Harry Salem, plus connu sous son nom de guerre d’Henri Alleg, à une partie du public déjà convaincu et connaisseur de ce dernier, tant la valeur de cet homme a fait le tour des cinq continents.

La seconde tâche consiste en le redoutable privilège de faire connaître Henri Alleg à cette autre partie du public qu’est la jeunesse et qui, peut-être, connaît imparfaitement cet homme. Je le ferai donc en vertu de deux affinités subjectives qui me lient à Henry Alleg : notre idéal commun et l’honneur d’avoir travaillé à Alger républicain en qualité de grand reporter quelques dizaines d’années après lui (ce qui ne rajeunit pas Henri !) A ce propos, il faut dire, en passant, que lors de notre intégration à ce journal, chaque jeune journaliste subissait un long speech sur Henri Alleg, par notre directeur de journal aujourd’hui hélas décédé, Abdelhamid Benzine, qui lui aussi connut pendant la guerre la torture et les camps de concentration. Ainsi nous, dont La question figurait parmi nos livres de chevet, nous connaissions Henri avant même de l’avoir rencontré. Il était devenu un mythe pour les Maghrébins que nous sommes, raffolant de mythes et de légendes. Mais cet inconnu devint aussi pour nous une référence en matière de journalisme.

Nous apprîmes donc que ce natif de Londres a tôt commencé le journalisme, avant de s’installer dans l’Algérie coloniale des années quarante. A l’âge de 19 ans il adhère au Parti Communiste Algérien. La direction de ce Parti, assimilant mal les enseignements de Lénine concernant la question coloniale, était majoritairement composée de pieds noirs, c’est-à-dire de Français nés en Algérie, ce Parti donc bégayait à l’époque entre la revendication d’une assimilation des Algériens aux Français et sa demande de promotion des classes ouvrières des deux pays. L’idée de l’indépendance de l’Algérie ne l’effleurait même pas. Il était en somme une annexe du Parti Communiste Français. Mais passons sur cette digression qui risque de réveiller de vieilles polémiques.

En 1951, Henri Alleg se voit offrir la direction du journal progressiste Alger républicain. Il renforce sa ligne résolument anticapitaliste. Peu à peu, la ligne de ce journal devient plus radicale et se rapproche des thèses nationalistes, tant le colonialisme est le fils cadet du capitalisme. Le fils benjamin du capitalisme étant l’impérialisme.

1954 : l’insurrection armée algérienne éclate. Le Parti Communiste Algérien, censé être un parti d’avant-garde est pris au dépourvu. Nombre de militants le quitteront pour rejoindre les Algériens patriotes

Quelques mois plus tard, Alger républicain est interdit par les autorités coloniales. Apprenant qu’il était recherché, Henri Alleg plonge dans la clandestinité pendant que nombre de communistes créent des cellules armées combattantes dénommées « Les maquis rouges », dont le moins méritant n’est pas Fernand Yveton qui sera condamné à la guillotine et exécuté. Il venait à peine d’avoir 20 ans. Les communistes combattront sous le vocable de « Maquis rouges » jusqu’en 1956, année où ils vont s’auto-dissoudre pour rejoindre l’Armée de Libération Nationale.

Après deux ans de clandestinité, Henri est soudain découvert et arrêté le 12 juin 1957 par la sinistre 10eme division de parachutistes du non moins sinistre général Massu. Il est immédiatement transféré dans une villa des hauteurs d’Alger. Il s’agissait de la villa Susini de triste mémoire. Là, Henri connaîtra dans sa chair les morsures de « la bête immonde. » Il y subira ses tortures des plus grossières aux plus raffinées. Il fera connaissance avec « le torchon mouillé », la « gégène », « la baignoire » et autres joyeusetés les unes pires que les autres. Aujourd’hui, cinquante ans plus tard, à l’heure où la torture sévit à Abou Ghraïeb (en Irak), en Palestine, en Colombie et ailleurs, relisons Henri Alleg :

Extrait de La Question d’Henri Alleg

« Jacquet, toujours souriant, agita d’abord devant mes yeux les pinces qui terminaient les électrodes. Des petites pinces d’acier brillant, allongées et dentelées. Des pinces « crocodiles », disent les ouvriers des lignes téléphoniques qui les utilisent. Il m’en fixa une au lobe de l’oreille droite, l’autre au doigt du même côté.D’un seul coup, je bondis dans mes liens et hurlai de toute ma voix. Charbonnier venait de m’envoyer dans le corps la première décharge électrique. Près de mon oreille avait jailli une longue étincelle et je sentis dans ma poitrine mon coeur s’emballer.

Je me tordais en hurlant et me raidissais à me blesser, tandis que les secousses commandées par Charbonnier, magnéto en mains, se succédaient sans arrêt. Sur le même rythme, Charbonnier scandait une seule question en martelant les syllabes « Où es-tu hébergé ? » Entre deux secousses, je me tournai vers lui pour lui dire : « Vous avez tort, vous vous en repentirez ! » Furieux, Charbonnier tourna à fond le rhéostat de sa magnéto : « Chaque fois que tu me feras la morale, je t’enverrai une giclée ! » et tandis que je continuais à crier, il dit à Jacquet : « Bon Dieu, qu’il est gueulard ! Foutez-lui un bâillon ! » Roulant ma chemise en boule, Jacquet me l’enfonça dans la bouche et le supplice recommença. Je serrai de toutes mes forces le tissu entre mes dents et j’y trouvai presque un soulagement »

Fin de citation.

Après un mois de sévices ignobles, un mois qui a dû durer pour lui un siècle, Henri est transféré en divers lieux de détention pour, finalement, aboutir à la prison algéroise Barberousse. C’est dans cette prison qu’Henri Alleg entreprend de relater son supplice afin que nul ne dise « je ne savais pas. » À mesure qu’il rédige fébrilement « La question », il en fera sortir un par un les feuillets à l’insu de ses gardiens, par l’intermédiaire de ses avocats qui étaient aussi ses « complices » à l’instar de Leo Mataresso.

Une fois le livre achevé et évacué hors de prison, un homme de bonne volonté et de grand courage entreprit de l’éditer. Il s’agissait de Jérôme Lindon, directeur des Éditions de Minuit. Pendant que son auteur est en prison, La question est publié. Les autorités françaises interdisent le livre mais des centaines d’exemplaires sont déjà répandus sur le territoire. C’est ainsi qu’en quelques jours, avec l’aide de La Cité, une maison d’éditions suisse, les Français apprennent avec émoi que l’on torture en Algérie et qui plus est, que l’on torture même des Français ! Des intellectuels et autres personnalités tels que Jean-Paul Sartre, Malraux, François Mauriac et tant d’autres protestent vigoureusement auprès de leur gouvernement.

Pour l’Algérie maquisarde, la publication du livre fut d’un apport extraordinaire. « Ce fut pour nous l’équivalent d’un bataillon » me dira, il y a quelques années, le commandant Azzedine, un des anciens dirigeants de l’Armée de Libération Nationale.

Après trois années de détention à la prison Barberousse, Henri est transféré en France, dans la prison de Rennes, d’où il s’évadera peu après, aidé en cela par un réseau communiste qui lui fera rejoindre la Tchécoslovaquie. Il y restera jusqu’en 1962, lors du cessez-le feu conclu entre l’Algérie combattante et la France colonialiste. Il revient dans l’Algérie indépendante pour organiser la reparution d’Alger républicain.

Je termine en rappelant que contrairement aux Occidentaux, nous, Maghrébins, avons le culte des héros. Henri Alleg est de ceux-là.

Dj. B.


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Puisque nous sommes en ligne pour rendre hommage à un personnage de légende, qui reste pour nous synonyme de lucidité et de courage, il ne nous semble pas déplacé de faire suivre cet hommage d’une déclaration non moins lucide et courageuse que vient de faire un vivant. Nous voulons parler du cheik Hassan Rohani, nouveau président de la République Islamique d’Iran, proclamé « modéré » par nos augures otanesques adeptes de la méthode Coué, qui n’entrera officiellement en fonctions que dans un mois. Ceci fait écho à l’article de Georges Stanechy « Iran : Le triomphe du vilain canard » et en constitue évidemment la suite naturelle.

Rohani raille Israël et salue Assad et Nasrallah

Al Manar.com (L'équipe du site)

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Le nouveau président iranien cheikh Hassan Rohani a qualifié de « risibles » les menaces d'attaques militaires proférées par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, et de « pays misérable » l’entité sioniste, ont rapporté mercredi les médias iraniens.

« Lorsque certains (États-Unis et Israël, ndlr) disent que toutes les options sont sur la table et qu'un pays misérable de la région (Israël, ndlr) dit des choses, cela vous fait rire », a déclaré M. Rohani devant un parterre d'anciens combattants de la guerre Iran-Irak (1980-88).

« Qui sont les sionistes pour nous menacer? », a-t-il ajouté, faisant valoir que la réaction promise par les Iraniens empêchait Israël de mettre ses menaces en pratique.

Dimanche, M. Netanyahu avait répété qu'Israël pourrait intervenir militairement avant les États-Unis pour tenter de contrer le programme nucléaire iranien, qualifiant M. Rohani de « loup déguisé en mouton ». 

« Nous sommes plus proches (de l'Iran) que les États-Unis. Nous sommes plus vulnérables. Et nous devrons donc aborder cette question de comment arrêter l'Iran, peut-être avant les États-Unis », avait averti M. Netanyahu dans un entretien à la chaîne CBS.

 « Ils se rapprochent de la ligne rouge. Ils ne l'ont pas encore franchie », a une nouvelle fois affirmé le Premier ministre, en référence au seuil à partir duquel l'Iran sera selon lui capable de fabriquer sa première arme nucléaire. « Et il faut leur dire sans aucune ambiguïté que cela ne sera pas permis ».

Le peuple syrien surmontera la crise

S’adressant au président syrien M. Bachar El Assad, cheikh Rohani s'est dit certain qu’il parviendra à surmonter la crise dans son pays avec l'aide de « forces pacifiques ». 

« Avec les efforts de forces bénévoles et pacifiques, la grande nation syrienne qui résiste sera à même de surmonter complètement la situation actuelle », a-t-il ajouté, selon l'agence Isna, précisant qu'il répondait aux félicitations de M. Assad pour son élection.

« Les liens étroits et solides entre l'Iran et la Syrie sont la preuve que les deux peuples ont la volonté de coopérer ensemble dans tous les domaines politiques et économiques, et de faire face aux complots des ennemis de la région, y compris le régime sioniste », a-t-il ajouté, selon l'agence iranienne Mehr News. 

Soutien aux deux résistances 

Dans un autre message adressé au secrétaire général du Hezbollah, Sayed Hassan Nasrallah, M. Rohani a affirmé que son pays reste attaché à son soutien aux deux peuples résistants Palestinien et Libanais .

Le président Rohani avait déclaré après son élection en juin que son gouvernement allait développer les relations entre l'Iran et l'Arabie saoudite, relations qui se sont détériorées ces dernières années, à cause notamment du conflit en Syrie.

Source : http://www.almanar.com.lb/french/adetails.php?fromval=1&cid=86&frid=86&eid=121108

 

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Enfin, qu’on nous pardonne de faire beaucoup dans la célébration de défunts ces temps-ci, mais nous ne pouvions laisser passer ce 14 juillet 2013 sans rappeler que c’est un 14 juillet que Léo Ferré – qui jamais, de sa vie, ne fut sifflé - nous a quittés.

Nous empruntons à André Uleski, en vrac, son hommage ému et les paroles d’une des plus belles chansons de Léo :

 

14/07/2013

Quand Léo Ferré est sans égal ni rival...

Un hommage à Léo Ferré qui nous a quitté un 14 juillet, il y a tout juste vingt ans.

André Uleski

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Il n'écrivait et ne parlait qu'une seule langue : le Français... mais il parlait tous les langages et écrivait dans toutes les musiques : il est à lui seul près d'un siècle et demi de poésie et de littérature.

De Baudelaire à René Char en passant par Hugo, Bruant, Carco, Queneau, il a traversé toutes les écoles d'écriture - même automatique  ! Du langage insaisissable de la rue aux modes langagières éphémères, du franglais à l'argot, à la fois virtuose et vertigineux, il pouvait dans un même texte aux néologismes sans nombre, dans un même vers, dans une même phrase les réconcilier tous.

Grand mélodiste, auteur, compositeur, orchestrateur et chef d'orchestre, il était son meilleur interprète. Ironique, moqueur, cruel et tendre, toujours en colère, il aura été le premier slameur et sans doute aussi, le premier rappeur. 

Des millions d'hommes et de femmes ont découvert nos poètes des XIXe et XXe siècles ainsi que la musique symphonique au contact de son oeuvre. De Beethoven à Berlioz au carton perforé de l'orgue de barbarie, du piano à bretelles au rock psychédélique du groupe ZOO.

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Source :  http://sergeuleski.blogs.nouvelobs.com/archive/2009/12/02...

 



 

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 Mis en ligne par Marie Mouillé, le 18 juillet 2013

23:35 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

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