11/01/2013

UBU EN TALONS AIGUILLES

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UBU EN TALONS AIGUILLES

 

« Je désire joindre mon patrimoine à celui de la Nation »

Saint-Just

Lettre à Robespierre – 19 août 1790

 

 

Vous l’avons-nous dit que Georges Stanechy a toujours raison ? Sinon, voilà qui est fait. Et surtout ne ratez pas les notes !

 

Jeudi 10 janvier 2013

 

"Exil Fiscal" ou "Fuite Fiscale" ?...

 

« Nous ne souhaitons pas vivre avec la réalité, mais elle existe. Autant la reconnaître. »

J. K. Galbraith (1)

 

Menhir ou Cassette ?

Et, fin 2012 : le ciel nous tomba sur la tête !…

2 - Doublons .jpgObélix, une de nos gloires nationales, menhir sur le dos, Idéfix sur les talons, claquant des dents, s’enfuyant de son village gaulois face aux légions fiscales armées jusqu’aux oreilles. Se réfugiant, apeuré, chez nos frères Belges. Beaucoup de ses concitoyens criant à la lâche trahison !

 

Pire ! Aux dernières nouvelles : terrorisé à l’idée qu’un drone, porteur des foudres fiscales, ne franchisse la frontière, traversant l’Europe, infatigable coureur des steppes, pour s’abriter à Saint-Pétersbourg. Comme le fit une grande partie de nos aristocrates refusant l’abolition de leurs privilèges par la Révolution Française…

Entre deux cueillettes de gui, druides et bardes officiels, prêcheurs de la Bonne Parole, “pensée unique” ou “prêt-à-penser”, se sont efforcés de calmer la fureur villageoise. Décuplant, foisonnant, apparitions et déclarations, pour justifier son errance affolée : Elie Semoun, Arthur, Gad Elmaleh, Enrico Macias

Aussi nombreux que dévoués… Notre peuplade a une chance rare d’être comblée par autant de talents et de vertus. Je suis encore ému par cet élan spontané de solidarité, la profondeur de la réflexion de cette élite de l’art et de l’éthique. Ils ont raison : Obélix a le droit de manger gratuitement son sanglier quotidien, arrosé de cervoise belge ou de vodka !

Et même d’avoir, comme eux, une collection de passeports ! Fut-il offert par les Russes ! Qui, hilares, dans une réponse du berger à la bergère, rééditent l'accueil précipité mais parfaitement organisé, bras ouverts et passeports à la main, par les politiciens français et surtout britanniques, des oligarques qui avaient pillé la Russie sous Eltsine. La rongeant jusqu’à l’os, pour le plus grand profit des occidentaux.

Pourquoi tout ce tintouin ?

Ce n’est pas le premier, et ce ne sera pas le dernier, à se désolidariser de la communauté qui les a fait vivre, éduqués, promus, enrichis…

Quelque temps avant lui, un rocker déglingué s’était réfugié chez nos cousins Helvètes. En fin de carrière, usé jusqu’à la corde de sa guitare désaccordée. Je pensais qu’il voulait se refaire une santé au milieu de vaches et chalets. Mais, non ! Il vient, chaque année, se produire en concert dans nos villes : n’y retournant qu’après avoir rempli sa cassette. Le marché local, où il est un quasi-inconnu, ne fournirait pas assez de “veaux payants”.

Restons équitables : les riches “artistes”, une minorité dans la communauté artistique, ne sont pas seuls à partager ces syndromes. Loin de là ! Capitaines d’industrie, et autres spéculateurs, forment le gros du troupeau.

L’un d’eux, aux milliards générés dans la reprise d’entreprises « en difficulté », ramassant à vil prix joyaux industriels et commerciaux, en cheville avec « banksters » et « cabinets ministériels », menace ainsi de quitter le village gaulois. Pour s’installer, lui aussi, en Belgique… Une des premières fortunes d’Europe ! Même des membres éminents de la fonction publique, posant en “serviteurs de l’Etat”, ont montré le chemin :

« Philippe Jaffré, l’ancien patron d’ELF, n’hésite pas, fortune faite, à s’exiler en Belgique pour fuir la fiscalité d’un Etat qui l’a formé et payé pendant ses études. » (2)

J’éprouve de la compassion pour ces « has been », « stars » en voie d’extinction… Du Business ou du Show Business, ce qui est du pareil au même. Incapables de se renouveler, gloires fanées aux ego en papier mâché, réduites à se croire uniques et indispensables. Leur panique à l’approche du terminus, devant la fin de ce dont ils pensaient jouir jusqu’à la fin des Temps, les rend avares au dernier degré. L’acte de posséder, la rétention, devenant pour eux gage de sécurité et même, en Faust halluciné, d’éternité.

Freud et Keynes (3), immergés pourtant dans deux disciplines apparemment éloignées, ont été les premiers à percevoir et analyser cette “pulsion de mort” liée au capitalisme sauvage, cette voracité implacable pétrie d’égoïsme aveugle. Dans un livre stimulant, Gilles Dostaler et Bernard Maris ont brillamment rapproché la correspondance de ces deux éminents penseurs sur le sujet. Faisant ressortir combien :

« … l’argent est un objet étrange qui à la fois calme l’angoisse – vous disposez d’un stock de précaution – et l’accroît.
[…] Il joue un rôle dominant dans les sociétés où les rapports de domination sont plus anonymes, il permet de ne plus regarder les hommes dans les  yeux… » (4)

Toutefois, ma commisération connaît des limites : l’impossibilité, en termes polis, de me vendre un grille-pain pour une imprimante laser…

 

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Courage fuyons ! 

Fuyards, déserteurs, traîtres, lâches, collabos, sont la contrepartie inévitable de l’héroïsme, de la générosité, de la solidarité, dans toute collectivité. Même Jésus et ses disciples ont eu leur Judas. Face au danger, crise, bouleversement, chaos, il est inévitable d’être confronté aux adeptes du « Courage ! Fuyons ! »…

Pourquoi pas ?... Ne jugeons pas. Libre à chacun d’assumer ses choix et ses actes. Mais, les transfigurer en victimes, dans un contexte romancé par des désinformateurs : non !

Le hasard me fit entendre les propos de Maurice Lévy, sur la course au trésor d’Obélix, lors d’un entretien avec la chaîne américaine CNBC (5), chaîne TV spécialisée dans l’information économique et boursière. En réalité, dans la spéculation et l’économie-casino.

Nullement surpris, je contemplais la vertigineuse cascade de clichés se déversant sur le journaliste américain béat de niaiserie. A tel point, que ce dernier demanda au PDG du groupe Publicis (6) s’il fallait que les « Français deviennent Américains »… Dans son esprit, évidemment : que les Français, hommes des cavernes, deviennent enfin civilisés, adeptes de la modernité, et dignes de vivre au XXI° siècle.

A entendre ce porte-parole de l’oligarchie de notre pays (7), "ruling elite" comme disent les anglophones, les Français détesteraient les riches, la réussite, le succès, le dynamisme, l’esprit d’entreprise, etc. A l’en croire, la France serait confrontée à une émigration massive de l’intelligence, du talent et du génie d’entreprendre. Tous les poncifs, mensonges et désinformations, cuits et recuits, que la propagande ultralibérale ne cesse de servir à la louche depuis des décennies. (8)

Toute cette logorrhée pour arriver à l’inévitable, obsessionnel, commandement, credo, axiome : « Cut spending » ! L’Etat doit « sabrer dans ses dépenses ». Pour ces esprits simplistes, parfaitement représenté par Maurice Lévy, le non paiement des impôts par ceux qui le doivent est à compenser par la diminution des dépenses publiques. Dans un impitoyable slogan : « Tout pour moi. Rien pour les autres ».

Je me suis toujours demandé comment Elizabeth Badinter, en tant qu’actionnaire principale du groupe Publicis, pouvait soutenir pareil paradoxe. Comment cette éminente philosophe, vigilante gardienne du temple de “L’Ethique” dans notre pays, s’accommode-t-elle d’un tel concentré de cynisme chez le dirigeant de son groupe ?... Personnage d’une incommensurable stupidité. (9) Il est vrai que dans les hiérarchies de la “pub” et de la “com”, journalisme hors concours, la densité au m² de la prétention imbécile est certainement une des plus élevées du monde de l’entreprise… (10)

Rien de surprenant à voir tous les médias, aussi bien français qu’étrangers, propriétés des praticiens de la spéculation boursière et des rentes de situation, se lancer dans une campagne de désinformation dénonçant “la chasse aux riches”. Style : « Touche pas à Mon Riche !… »

Sachant que l’application des 75% d’impôts au-dessus d’un seuil de revenus supérieurs à un million d’euros n’est qu’une mesure symbolique. A but essentiellement démagogique, pour endormir l’opinion publique quant aux sauvages mesures d’austérité qui vont accabler la majorité de la population.

Symbolique pour les privilégiés, tant il existe mille et un procédés "d’optimisation fiscale", ou "d’ingénierie fiscale", afin d’éviter d’entrer, en tout ou partie, dans cette catégorie. Mais, la France ne doit pas donner le mauvais exemple. Même au niveau cosmétique… La pression de la ploutocratie, apatride ou internationale, est énorme.

Dans son argumentaire, s’opposant par tous les moyens à toute fiscalité, on remarque chaque fois les mêmes vecteurs de propagande, démontrant une véritable pathologie. La voracité, le principe d’accumuler correspond à ce que des spécialistes appellent la « névrose libérale », pour reprendre le titre d’un ouvrage de Jean-Claude Liaudet (11). Dont je recommande la lecture, ayant déjà eu l’occasion de le citer dans un de mes précédents billets, Bouclier Fiscal : Ubu en talons aiguilles. (12)

Jean-Claude Liaudet, en décrit parfaitement les symptômes (13) :

 « … Les grands traits … constitutifs de la névrose collective libérale : mégalomanie et volonté de toute puissance ; refus de toute loi vécue comme contrainte, comme empêchement de “liberté” ; ignorance d’autrui ; sadisme ; goût pour la collection et le maniement des matières ; découverte de la propriété comme partie du corps (l’étron) … avec, en fond de tableau, l’équivalence merdre/monnaie... tout un programme, qui me paraît être celui du libéralisme. »

Et, les pratiques (14) :

« Le pervers moral est un malin qui sait manipuler autrui pour parvenir à ses fins.

Comme il est dépourvu de sens moral, il n’en exprime ou n’en ressent aucune culpabilité – du moins pas consciemment.  

[…] Il fait preuve d’habileté de raisonnement pour justifier sa conduite par des constructions apparemment théoriques. »

 

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Régression féodale

Emblématiques. Constructions, propos, raisonnements apparemment logiques, dans le chaudron de la propagande, forment une bouillie anesthésiante dont mensonge et mauvaise foi représentent les ingrédients fondamentaux. 

Sept vecteurs de désinformation reviennent en permanence :

i)  Confusion sémantique entre « exil » et « fuite »

Entretenir sciemment la confusion entre "exil" et "fuite" est le premier matraquage d’une bonne désinformation. Dans un habile renversement de perspective, « exil » pose celui qui choisit de s’enfuir en « victime ». D’une injustice, d’une oppression. Alors qu’il s’agit en réalité d’une "désertion", d’une "fuite". Acte d’autant plus grave, que le pays endure une crise, plus précisément : une guerre économique. Mais, il ne sera jamais qualifié de : « fuite fiscale ».

ii)  Partie visible de l’iceberg

Le “départ” d’Obélix ne serait que la partie visible de l’iceberg, d’une émigration massive de révoltés contre l’impôt, dixit Maurice Lévy… Manipulation classique des chiffres des "Français expatriés", ou installés à l’étranger, les assimilant à des "exilés fiscaux" pour illustrer une prétendue hémorragie causée par une fiscalité jugée excessive par les privilégiés.

Exemple, que je connais relativement bien : Londres. Une étude par le sérieux British Office for National Statistics estime que le nombre de Français habitant Londres, pour l’année 2010-2011, est de 70.000. Et, non pas 300.000 ou 400.000 comme l’assurent des médias de la propagande. (15)


De plus, très peu représentent des « fuyards fiscaux ». La plupart étant, dans le meilleur des cas, des cadres détachés par leurs entreprises ou des étudiants. On y rencontre plus souvent des Français fuyant le chômage en France, se retrouvant englués dans des petits boulots en concurrence avec Sri-lankais ou Polonais, de la restauration ou du commerce de détail notamment, exploités dans la précarité la plus totale : ni sécurité sociale, ni retraites, etc.

iii)   L’impôt ne sert qu’à engraisser paresseux et fraudeurs

Pour se donner bonne conscience, prétextant la mort de toute initiative et compétitivité pour l’économie nationale, la caste au pouvoir qualifie l’impôt de "calamité". Imposée par le diable : L’Etat. Oubliant que l’Etat n’est pas l’incarnation du Mal, mais la somme des citoyens qui le composent et le font vivre.

Rien à faire, martelant leur propagande : l’Etat gaspille la richesse nationale dans “le social” et les “services publics” ; ne servant qu’à engraisser paresseux et fraudeurs. Exigeant la diminution, voire l’arrêt, des “dépenses publiques”.

Autrement dit : éradiquer tout ce qui concerne l’entretien du pays et les services à la collectivité. Enseignement public, santé publique, retraites ?... Ecoles, universités, services d’urgence ?... Infrastructures, routières, portuaires, transports en commun ?... “L’élite du pays” ne veut pas en entendre parler. Aucune importance.

Sauf, évidemment, lorsqu’il s’agit par centaines de milliards de : renflouer les banques, pomper les subventions, engranger les marchés publics aux marges incontrôlées, gaver les groupes pharmaceutiques par la Sécurité Sociale en culpabilisant malades et professionnels de la santé, alimenter le colossal budget d’armement (en France, égal à la moitié de celui de la Chine : 1,6 milliard d’habitants, 18 fois la superficie de notre pays…), etc.

iv)  "Exil" de la créativité, du dynamisme et du génie d’entreprendre

Certainement, l’argument le plus risible de la “propagande antifiscale” : la France provoquerait l’exil de la créativité, du dynamisme et du génie d’entreprendre. Comme si la France regorgeait de Steve Jobs, aux idées et créations géniales !...

En réalité, ceux qui fuient l’impôt ne sont que des spéculateurs boursiers ou immobiliers, des capitaines d’industrie corrupteurs, des bénéficiaires de rentes de situation (licences bradées dans la téléphonie ou l’audiovisuel, privatisations “soldées” des services publics, marchés publics octroyés aux copains, chasses gardées en Afrique sous la protection de nos troupes coloniales, etc.) qui n’on jamais créé un seul produit, une seule innovation, révolutionnaires, de leur vie….

Les plus grandes fortunes édifiées en France, depuis la deuxième guerre mondiale sont indissociables des connivences entre politiciens et affairistes (16) :

« La sauvegarde de l’emploi transforme Boussac (textile) et La Chapelle Darblay (papeterie) en jackpots pour Bernard Arnault et François Pinault. Les biens publics sont bradés, l’argent distribué sans contrepartie : DSK et Lionel Jospin  offrent, par exemple, le contrôle d’EADS à Lagardère à un prix d’ami ».

Citons, aussi, dans l’édification de gigantesques fortunes : l’industrie de l’armement, tributaire des commandes de l’Etat ou de ses interventions diplomatiques à l’étranger.

Ou encore : la Grande Distribution. (17) Une des pires rentes de situation rongeant l’économie de notre pays, tuant le petit commerce et anéantissant des dizaines de milliers d’emplois. Ces gigantesques pompes à cash, transitant par des filiales financières, produisant l’essentiel des marges occultes de ces groupes tentaculaires. Aux immenses patrimoines fonciers, logés dans des holdings spécialisées, regroupant terrains et installations sur des zones bradées, là encore, et aménagées par les collectivités locales grâce aux impôts citoyens…

Mettez sur la banquise tous ces “génies de la créativité et du dynamisme”… Que vont-ils faire sans encadrement, ingénieurs, gestionnaires, techniciens, ouvriers spécialisés, et employés ? Sans clientèle ou sans public ? Sans l’Etat ?...

Rien.

Car, la richesse nationale n’a pas pour origine le “génie individuel”, mais le travail collectif.


v)   Les Français n’aiment pas le succès, le mérite…

Autre slogan menteur : les Français n’aiment pas le succès, le mérite, etc. Peut-être n’aiment-ils pas, tout simplement, que soit foulé aux pieds le Contrat Social les liant les uns aux autres ? Ce qu’on appelle “les valeurs de la république” : Liberté, Egalité, Fraternité. A défaut de fraternité, peut-être considèrent-ils que “la solidarité” est un devoir, une obligation, pour tous les citoyens ?

N’acceptant pas que ceux qui ont bénéficié de l’accès à la fortune refusent de contribuer à l’effort collectif. D’autant plus que les fortunes progressent plus vite “en temps de crise” que lors des périodes de développement économique, dites “normales”. A l’exemple de cette dépêche d’agence de presse (Bloomberg - 2 janvier 2013), établissant que les 100 personnes les plus riches du monde ont vu leur fortune progresser de 241 milliards de dollars en 2012, pour atteindre un cumul de près de 2.000 milliards de dollars…

Ce que n’aiment pas les Français, tout comme les autres peuples, c’est la volonté délibérée de leur ploutocratie de plonger la majorité de la population dans la paupérisation. (18) Au seul bénéfice, dans une régression féodale, du maintien de ses exorbitant privilèges, notamment : fiscaux.

Car les Français ne sont pas les seuls à mettre en cause leur oligarchie. La censure des médias, en Occident, dissimule les nombreuses manifestations se déroulant, depuis des mois, dans les principales villes des USA. Organisées autour du mouvement protestataire OWS (Occupy Wall Street), à l’exemple de ce qui se passe dans d’autres pays européens. Protestations de colère devant l’injustice économique et sociale, violemment réprimées dans la violence policière.

vi)  Riches et entreprises écrasés d’impôts

La propagande veut faire croire que l’impôt sur les revenus des “riches” et sur les sociétés est accablant, étranglant l’économie française, entravant sa compétitivité, et autres pathologies. En fait, le rendement de ces deux impôts est un des plus faibles du monde. L’essentiel du budget de l’Etat étant assuré par le prélèvement massif et quotidien des taxes sur la consommation (plus particulièrement la TVA, mais aussi la taxe sur les carburants) prélevées sur la majorité, modeste et aux faibles revenus, de la population.

Pour mémoire, je citerai quelques chiffres extraits de mon billet portant sur le Rapport Gallois (19), traitant de la compétitivité de l’industrie française : 

« Rappelons que les grands groupes industriels, commerciaux (Grande Distribution) et financiers, en France, ne payent pratiquement pas d’impôts sur leurs bénéfices “réels”. Grâce à de multiples exonérations, dégrèvements et astuces comptables. Le rendement de l’Impôt sur les Sociétés étant assuré, essentiellement,  par les PME-PMI et commerces.

Pas étonnant qu’à la lecture du “Budget de l’Etat voté pour 2011”, l’Impôt sur les Sociétés (IS = 44,837 Md€) ne représente que 17,59 % des recettes fiscales nettes. Montant et pourcentage encore plus ridicules que l’Impôt sur le Revenu (IR = 52,184 Md€), auquel échappe la plupart des grandes fortunes du pays, avec un 20,47 % ! Les recettes nettes de TVA (= 130,859 Md€) fournissant 51,34 % du budget de l’Etat. (20)

En clair : ce sont les français aux revenus les plus modestes qui paient le plus d’impôts, remplissant les caisses de l’Etat avec une TVA à 20%, par la masse de leurs achats quotidiens, y compris les SDF et les immigrés clandestins !… »

En fait, l’impôt sur le revenu (IR) et sur les sociétés (IS) devrait, chacun, atteindre celui de la TVA. Ainsi l’Etat, loin de se trouver dans l’obligation de contracter une “dette publique”, devrait bénéficier, chaque année, d’un budget “excédentaire”…

vii)  La "chasse aux riches"
La France, dans un délire collectif et moyenâgeux, serait en proie non pas à une “chasse aux sorcières”, mais à une “chasse aux riches”. Telle est l’image projetée par la propagande de l’oligarchie. Alors que c’est elle qui détient le pouvoir, fabrique lois et règlements sur-mesure pour protéger ses intérêts. Mais, se présenter en "victime" pour mieux arnaquer la collectivité est l’astuce grossière mise en scène par ces nouveaux aristocrates...

Jamais les privilèges de cette caste n’ont été, de toute l’histoire de notre pays, aussi colossaux. “L’évasion fiscale” devenant une pratique légale, grâce aux législations méticuleusement adaptées et actualisées. Dans une tuyauterie alambiquée, agencée en niches fiscales et écrans opaques. Depuis les droits de succession auxquels échappent les grandes fortunes par de multiples exonérations. Jusqu’à leurs châteaux déclarés "monuments historiques", bénéficiant même de subventions publiques pour les restaurer ou les entretenir.

Que dire des paradis fiscaux, dont l’usage est constant ? Les bénéfices réels étant soigneusement domiciliés dans ces lieux hors d’atteinte des investigations fiscales. Que ce soit pour les transactions financières et commerciales relevant des flux courants entre groupes et entreprises, ou pour les investissements et opérations d’ordre privé.

Un exemple : savez-vous qu’un des plus gros importateurs de bananes du monde est la minuscule île, et paradis fiscal, de Jersey, au large de Saint-Malo ? Qui ne voit jamais passer un container de bananes… La richesse mondiale, à hauteur d’un tiers, transite, se camoufle, dans les paradis fiscaux (21) :

« Cette richesse fait défaut au financement de l’éducation, de la santé, des programmes sociaux et au remboursement des dettes contractées pendant la crise. »

Chasse aux riches ?... Rions.

En France : il n’y a pas de “crise de l’endettement”, ni de “caisses vides”. Cinquième pays le plus riche de la planète, de la taille d’une petite sous-préfecture chinoise par sa superficie et sa population.

Il ne connaît qu’un seul problème : celui de la voracité et de la féroce obstination de sa nomenklatura corrompue. Refusant, par tous les moyens, la répartition de la richesse nationale. Au point de scier avec fureur la branche sur laquelle elle est assise. Que va-t-il rester, d’un pays, d’une économie nationale, à force de licencier à tour de bras, d'écraser en permanence le pouvoir d'achat de la majorité, de ne plus entretenir les infrastructures collectives ?...

Alors, entendre geindre ces privilégiés devant l’impôt qu’ils ne payent pas, gesticuler en pitoyables fuyards, me fait rire. C’est entendre le célèbre cri de L’Avare de Molière : « Ma cassette ! »…

Molière, pourfendeur des hypocrites et des avares. Qui en rirait encore avec nous, trois cent quarante cinq ans après avoir écrit cette comédie immortelle. (22) Tant l’acte IV, scène 7, mettant en scène le chagrin d’un riche "homme d’affaires" du XVII° siècle devant la perte d’une cassette enterrée dans son jardin, est toujours aussi saisissant de vérité :
« … Hélas ! Mon pauvre argent, mon pauvre argent, mon cher ami, on m'a privé de toi ; et, puisque tu m'es enlevé, j'ai perdu mon support, ma consolation, ma joie ; tout est fini pour moi, et je n'ai plus que faire au monde : sans toi, il m'est impossible de vivre… ».  


Notes

1.  J. K. Galbraith, Les Mensonges de l’Economie – Vérité pour notre temps (titre original : The Economics of Innocent Fraud – Truth for our time), Grasset, 2004.

2.  Olivier Toscer, Argent public, Fortunes privées – Histoire secrète du favoritisme d’Etat, Denoël, 2002, p. 60.

3.  Je recommande vivement la lecture, ou la relecture, de son livre traduit en français sous le titre : « La pauvreté dans l’abondance ». En fait, compilation de quatorze essais. Puissante réflexion qui remet en cause les principes absurdes, suicidaires, du “Radicalisme Libéral” imposé actuellement par les oligarchies au pouvoir, plongeant la majorité de leurs concitoyens dans une paupérisation croissante.
J.M.Keynes, La pauvreté dans l’abondance, Gallimard, 2002.

4.  Gilles Dostaler et Bernard Maris, Capitalisme et Pulsion de Mort, Albin Michel, 2009, p. 63.
5.  Entretien, en anglais, de Maurice Lévy du 27 décembre 2012 sur CNBC.

6.  Groupe fondé par le père d’Elizabeth Badinter, Marcel Bleustein-Blanchet, présent dans une centaine de pays avec 60.000 collaborateurs.

7.  Rémunération "officielle" en 2011 : 20 millions d’euros environ, 
http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2012/03/29/97002-20120329FILWWW00498-baroin-justifie-le-bonus-de-maurice-levy.php

8.  Bertrand Rothé et Gérard Mordillat, Il n’y a pas d’alternative – Trente ans de propagande économique, Seuil, 2011.

9.  Sans oublier l’extrémisme sioniste de ce natif d’Oujda, au Maroc. Au point d’être gratifié de l’International Leadership Award en 2008 par le puissant lobby sioniste Anti-Defamation League. Co-organisant, la même année, un méga-concert au Trocadéro à Paris, pour fêter les 60 ans de la création de l’Etat d’Israël. Ceci expliquant peut-être cela…

http://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_L%C3%A9vy_%28publicitaire%29

10.  Souvenons-nous de la Rolex de Séguéla, autre “grand patron” du milieu … 
http://www.lesmotsontunsens.com/seguela-rolex-rate-sa-vie-50-ans-video-3391

11.  Jean-Claude Liaudet, Le Complexe d’Ubu – ou la névrose libérale, Fayard, 2004.

12.  Bouclier Fiscal : Ubu en talons aiguilles,  lundi 3 mai 2010,

http://stanechy.over-blog.com/article-bouclier-fiscal-ubu-en-talons-aiguilles-49670108.html

13.  Jean-Claude Liaudet, Ubu et la Névrose Libérale ou de "Hayek avec Sade", entretien réalisé en mars 2004 par Frank Bellaiche, mercredi 15 novembre 2006, http://psythere.free.fr/article.php?id_article=34

14.  Jean-Claude Liaudet, Op. Cit., p. 67.

15.  Le recensement officiel britannique de 2001 dénombrait 38.130 Français à Londres…

16.  Argent public, Fortunes privées – Histoire secrète du favoritisme d’Etat, Op. Cit. p. 60.

17.  Cf. billet du 18 février 2008 : « La Grande Distribution : Le Sida Economique », 
http://stanechy.over-blog.com/article-16794434.html

18.  Denis Clerc, La Paupérisation des Français, Armand Colin, 2010.

19.  Rapport Gallois : Dévotion à Sainte Ploutocratie, mardi 20 novembre 2012, http://stanechy.over-blog.com/article-rapport-gallois-devotion-a-sainte-ploutocratie-112655173.html

20.  Budget de l’Etat voté pour 2011,

http://www.performance-publique.budget.gouv.fr/fileadmin/medias/documents/ressources/LFI2011/depliant_budget2011.pdf 

21.  Il n’y a pas d’alternative – Trente ans de propagande économique, Op. Cit., pp. 135-136.

22.  La comédie de Molière, L’Avare, a été représentée pour la première fois le 9 septembre 1668 au Théâtre du Palais-Royal.

Illustrations : si vous aimez cassettes, malles, coffres anciens ou de bateaux, convoités par les pirates pour leur contenu d’or et de bijoux sur les galions, un site :

http://www.thepirateslair.com/authentic-nautical-furniture-nautical-home-furnishings.html

 

*

Et nous, on vous reparle de pirates d’ici peu.

Quant à Obélix-Ubu, ce ne sont pas seulement ses compatriotes « en masse » dont il se désolidarise en allant planquer au fond du jardin le magot qu’il n’arrivera jamais à tout manger, ce sont surtout les amis de sa jeunesse, vous savez, ceux qui lui ont mis le pied à l’étrier : les Romain Bouteille et les Coluche… et le Gégé de cette époque-là, Gérard Lefèvre, qui, avec les autres membres fondateurs du Café de la Gare, versait au pot commun ses modestes cachets.

Pour ce qui est de la créativité, du dynamisme et du génie d’entreprendre, voire du simple talent, on continuera à les lui préférer.

 

*

Un point de vue russe.

sur Réseau Voltaire

Depardieu est devenu Russe : pas si fous ces Gaulois !

par Alexandre Latsa

Le 3 janvier 2013 est apparu un texte assez surprenant sur le site du Kremlin, annonçant que le président Poutine attribuait la nationalité russe à l’acteur français Gérard Depardieu [1].

Ce décret présidentiel vient après une polémique entre l’acteur et les autorités françaises suite à l’adoption d’un projet de loi pour taxer à hauteur de 75% les très hauts revenus dans l’Hexagone. L’acteur avait alors fermement critiqué ce projet de loi, avant de choisir d’émigrer en Belgique, puis de rendre son passeport pour avoir vu son acte qualifié de « minable » par le premier ministre français Jean-Marc Ayrault.

Lire la suite...

Nous, on n’aime pas trop la phrase :

« La triste vérité est que la France est devenue un pays fiscalement étouffant et aussi un pays à l’économie ralentie avec plus de 9 millions de personnes ne travaillant pas à temps plein, soit 30% de la population active  et que Depardieu ne fait que rejoindre les quelques millions de Français déjà présents à l’étranger. Celui-ci n’est sans doute pas du reste parti pour des raisons uniquement fiscales, mais aussi pour fuir un climat politique et moral simplement détestable , et ne parlons pas du climat médiatique.»

Et vous ?

Il prêche pour qui, là, Latsa (chez Meyssan !) ?

Quant aux pauvre petits Harpagons qui partent « pour fuir un climat politique et moral détestable »… Ouh la la, trouvez-nous vite un drap de lit, nos mouchoirs ne seront pas assez grands.

Et vive Poutine,  qui a mis Kodorkhovski au gnouf !


*

Ils inventent pire que l’esclavage 

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Pret-a-manger (en français dans le texte, mais sans les accents svpl.), boîte à fast food angaise (sandwiches à emporter style Marks & Spencer), dont il y a pléthore aux USA et à Hong Kong, 220 au Royaume Uni et, depuis 2012, au moins quatre en France (Paris, Puteaux & Levallois Perret) a eu, cette semaine, les honneurs d’un article dans la London Review of Books. Motif, Andrej Stopa, étudiant tchèque et un de ses employés, vient de se faire virer, au prétexte qu’il aurait tenu, il y a deux ans, des propos homophobes sur un de ses collègues. En réalité, parce que les Hilotes de «Pret» (c’est comme ça qu’on dit) viennent de s’organiser en syndicat et que Stopa en a été nommé responsable.

C’est en anglais. Nos excuses :

 

Short Cuts

Paul Myerscough

Andrej Stopa, a finance student from the Czech Republic, was fired from his job at the branch of the fast-food chain Pret A Manger in York Way, by St Pancras Station, in the middle of September. He had been working there for two years.

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Source : http://www.lrb.co.uk/v35/n01/paul-myerscough/short-cuts


On vous explique :

Ce qu’ils veulent, chez « Pret », c’est du personnel heu-reux !

Mais attention : il n’est pas question de faire semblant. Il faut l’être et que cela se voie. D’ailleurs, vos collègues sont là pour vous surveiller, vous noter et faire rapport sur vous en fin de journée .

« Je peux presque prédire les ventes rien qu’au langage des corps », dit un des brillants stratèges de la boîte. Oui, car ce que Pret a compris avant la concurrence , c’est combien d’argent on peut faire avec ce que les théoriciens de la gauche radicale appellent, depuis les années 70, le « travail affectif ».

 

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Pour ce capitalisme essoufflé mais dont la poche à venin n’est pas vide, vous ne devez pas seulement produire des choses, vous devez aussi laisser siphonner vos énergies, tant émotionnelles que physiques, par la clientèle qui a bon dos. Ce n’est pas uniquement ce que vous faites qu’on veut de vous, c’est aussi comment vous le faites et que vous montriez votre enthousiasme nondedieu !

Ergo, si vous êtes un battant et que vous sachiez le faire voir, votre salaire, à Londres, sera de £ 6,25 (le salaire minimum étant, en Grande Bretagne, de £ 6,19), mais si vous allez « encore plus loin » que ce qu’on exige de vous, il n’est pas impossible que vous ayez des primes.

Pour l’auteur de l’article, l’implication exigée par Pret est bien connue des mères, des infirmières et des prostituées. C’est vrai. Mais elles n’ont pas, que l’on sache, coutume de dénoncer celles qui ne sautent pas de joie en donnant le sein, en vous passant  la panne ou en subissant les ahannements des peine-à-jouir.

Il y a bien eu, dans les camps nazis, des prisonniers qui obtenaient des faveurs pour pousser les autres dans la fosse, mais l’histoire n’a jamais dit qu’ils ou elles devaient en le faisant chanter Lili Marlène et sauter à cloche-pied. La variante Pret, c’est le progrès qu’on n’arrête pas.

Et la mise en condition n’est pas réservée aux esclaves qu’on paie mais aussi aux esclaves qui paient : « L'idéologie de la compagnie est rappelée plusieurs fois aux consommateurs (sur les murs, les emballages ou sur le site web), sous forme de différents messages numérotés. Cette chaîne de restaurants a choisi de ne pas apposer sur ses sandwiches la liste complète des ingrédients utilisés, elle ne se limite qu'aux ingrédients principaux de la recette.» (Wikipedia)

 

L’Esprit Pret-a-manger

 

« Aussi rémunérons-nous nos employés à leur juste valeur plutôt qu’au minimum»

 

Si vous voulez travailler chez Pret-a-manger pour la moitié du SMIC, voici ce que votre employeur attend de vous :


http://www.pret.com/fr/carrieres/lesprit_pret_a_manger.htm

 

Au moins, quand on était condamné aux mines de sel, dans feu l’empire romain, pouvait-on pleurer, râler, compter les houris que Dionysos ou Mithra vous avait promises ou rêver que vous sodomisiez l’empereur avec le manche de votre pioche.

John Cowper Powys (notre post précédent) prétendait que, dans le pire des esclavages, on peut toujours être libre à l’intérieur de soi, rester « seul avec son âme ». Eh bien, pas chez Pret.

[On ne sait pas vous, mais nous, quand on nous supprime les accents, on a l’impression qu’on nous brûle Etienne Dolet une deuxième fois. ]

 

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Et ça, il ne vous l'a pas dit, Coluche, que vous pouviez vous abstenir ?


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Mis en lmigne par Catherine, le 11.1.2013

21:53 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

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