13/12/2012

Chroniques de la Palestine occupée

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Chroniques de la Palestine occupée

Pendant que nous étions hors-jeu, il s’en est passé des choses dans le monde. Généralement hideuses.

Pour nous en tenir à la Palestine, il s’en est passé trois, qui méritent qu’on y revienne, même avec quelques jours de retard.

La première et la principale est, bien entendu, l’attaque à froid, d’ailleurs annoncée avec le plus grand cynisme, de l’armée la plus immorale du monde (et dieusait que les autres ne sont pas belles) sur la population civile, désarmée et surexposée, de Gaza. Attaque intitulée « Pilier de défense » (défense de rire), qui a duré huit jours pleins : du 14 au 21 novembre, et s’est terminée sur un cessez-le-feu quémandé par Israël et accordé par la Résistance palestinienne, apparemment à ses conditions.

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La deuxième fut, bien sûr, la reconnaissance de la Palestine comme « Etat non membre obervateur des Nations Unies » à côté du Vatican.


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La troisième, enfin, fut le discours de Khaled Mechaal, futur ex-chef en exil de la branche politique du Hamas, en visite à Gaza, pour la célébration du 25e anniversaire du Hamas.

 

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C’est à l’occasion de l’opération « Pilier de défense » que le quotidien Algérie patriotique a sollicité et obtenu de la philosophe française Mme Aline de Dieguez l’interview qui suit.

Celle-ci a paru en trois fois, les 5, 6 et 7 décembre, dans les colonnes du journal. Nous vous la proposons ici, puisqu’en retard,  d’un seul tenant.


 

 

Aline de Dieguez

Chroniques de la Palestine occupée

 

Israël vit dans les vapeurs d’un rêve messianique

 

Interview réalisée par Mohamed El-Ghazi pour Algérie patriotique


Avant-propos

Avant de répondre à vos questions, je veux mettre l'ensemble de mes réponses sous le signe du général SUN-TZU. Dans son Art de la guerre ( VIe siècle avant notre ère), le grand stratège chinois avait compris que l'intelligence du chef est la clé du succès: "La règle, c'est que le Général qui triomphe est celui qui est le mieux informé", écrivait-il, car "tout l'art de la guerre est basé sur la duperie". Mais la connaissance ne doit pas se limiter au terrain ou à l'armement de son adversaire: "Connais l'adversaire et surtout connais-toi toi-même et tu seras invincible", écrivait-il.

Or les Palestiniens sont en guerre depuis un siècle contre un ennemi implacable qui a pour objectif de les déposséder de leur territoire, de leur identité et de leur nation ; et depuis un siècle, ils ont perdu toutes les batailles. Ce n'est évidemment pas par hasard.

Quelles sont les armes qu'ils n'ont pas eues, celles qu'ils n'ont pas vues et quelles sont celles qu’ils n’ont pu utiliser ?


 

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1« Israël vit dans les vapeurs d'un rêve messianique", 5 décembre 2012

 

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Question I - En dépit de la réprobation de la communauté internationale, Israël s'est encore une fois arrogé le droit d'attaquer le peuple palestinien, violant délibérément la résolution 242 du Conseil de sécurité de l'ONU. Pourquoi cette impunité dure-t-elle depuis que l'Etat hébreu existe?

Avant de parler des résolutions de l'ONU, je voudrais revenir en arrière et rappeler que l'article 22 du Pacte de la Société des Nations créée par le Traité de Versailles de 1919 - et qui reprenait le 14e point des propositions américaines rédigées d'avance et que le très sioniste Colonel House, représentant du Président Wilson, a imposées aux Européens [1] - que ce 14e point posait les principes généraux du régime du mandat. Il concernait les peuples des territoires encore "incapables de se diriger eux-mêmes dans les conditions particulièrement difficiles du monde moderne".

Cet article paternaliste et conforme à l'esprit du colonialisme de l'époque, confiait la tâche d'assurer le bien-être et le développement - tâches constitutives d'une "mission sacrée de civilisation" - à des pays tuteurs, c'est-à-dire à "des nations développées, qui, en raison de leurs ressources, de leur expérience ou de leur position géographique, sont le mieux à même d'assumer cette responsabilité et consentent à l'accepter".

L' article 22 du Pacte définissait donc avec précision le périmètre des droits et des devoirs du mandataire et du mandaté, exercés sous le contrôle de la S.D.N.

Or, le paragraphe 2 de cet article 22 du Pacte de la S.D.N. prévoyait une hiérarchie de la tutelle en fonction du "degré de développement des peuples considérés". La Palestine figurait dans la catégorie A, aux côtés de la Syrie, du Liban, de l'Iraq et de la Transjordanie, catégorie qui concernait les territoires dont le niveau de développement était tel qu'il était possible de les considérer comme des nations indépendantes, sous la seule réserve de l'application du mandat. Le mandataire n'était donc qu'un guide et un conseil dans la gestion de l'administration du territoire.

Le mandat n'était pas la colonisation, puisque l'indépendance des nations était proclamée, mais une simple aide à une gestion administrative temporaire.

C'est donc depuis 1919 que la Palestine jouit du statut de nation indépendante sous mandat anglais et la fin de la tutelle du mandataire en 1946 lui donnait pleinement droit à l'indépendance sur la totalité du territoire de la Palestine.

Alors que les Israéliens ne cessent d'invoquer la fameuse déclaration Balfour qui date de 1917, qui n'est qu'une lettre privée, manuscrite , dépourvue de toute valeur en droit international, quels sont les dirigeants Palestiniens qui aient jamais invoqué l'argument de la légitimité internationale et du statut officiel de nation indépendante dont la Palestine jouit depuis 1919 sur la totalité de son territoire?

Aucun.

J'en viens aux résolutions de l'Onu.

Vous invoquez une certaine résolution de l'ONU parmi les dizaines d'autres qu'Israël n'a pas respectées. Or, près de quatre-vingts - je dis bien quatre-vingts - résolutions de l'ONU votées, non point l'Assemblée générale des Nations Unies, mais par le Conseil de Sécurité - et sont donc d'application impérative... pour les autres Etats - condamnent expressément l'Etat hébreu et trente neuf autres, tout aussi sévères, stigmatisent des comportements violents, illégaux et même sauvages, des violations patentes du droit et des conventions internationales, injustement et arbitrairement bloquées par un veto des USA dont on ne sait s'ils sont la tête ou la queue du binôme monstrueux qu'ils forment avec Israël. [Voir la liste en note]

Alors qu'une seule résolution du Conseil de sécurité a suffi pour provoquer le bombardement de la Lybie et l'élimination de son dirigeant, pas une seule des cent vingt résolutions condamnant Israël n'a trouvé le plus petit commencement d'application et jamais aucune mesure de rétorsion n'a été prise à l'encontre du coupable. L'Etat sioniste poursuit donc tranquillement son travail de harassement d'un autre peuple, viole les lois et les conventions internationales, légalise la torture, y compris la torture des enfants, n'hésite pas à prendre en otage des familles entières sous prétexte qu'un de ses membres est soupçonné du méfait de résistance ou d'appartenance au Hamas, pratique ouvertement des assassinats collectifs ou qualifiés de "ciblés", des arrestations arbitraires et des exécutions extra-judiciaires. Comme il n'y a jamais eu de réaction internationale sérieuse après les nettoyages ethniques de masse de 1948 ou de 1967, cette politique se poursuit inexorablement depuis soixante ans et progresse d'année en année en intensité et en monstruosité.

Il faut avoir entendu l'ambassadeur Israël à Paris de l'époque - M. Elie Barnavi - balayer d'un revers de la main et sur un ton méprisant l'une des condamnations en la qualifiant de "rituelle" pour mesurer leur effet sur les politiciens d'un Etat qui défie le monde entier et poursuit tranquillement les vols de terre et la colonisation.

Cette obstination dans la violence et l'arrogance possède sa propre motivation interne. Les Palestiniens n'ont pas compris que le cerveau de leurs bourreaux fonctionne sur un autre mode que celui du reste de la planète et que l'Etat qu'ils essaient d'imposer est une mythologie qui a cru pouvoir se réincarner dans l'histoire. Face à cette réalité mythique, les arguments de politique rationnelle sont de peu de poids.

Les autres Etats de la planète non plus n'ont pas intégré cette réalité anthropologique.

Ayant vécu dans les vapeurs d'un rêve messianique durant des siècles, cet Etat projette sur le monde qui l'entoure la géographie mentale qu'il porte dans sa cervelle depuis deux mille ans et il prétend non seulement substituer sa réalité mythologique au monde dans lequel il a débarqué armé jusqu'aux dents et fort du soutien militaire et financier des banquiers anglo-saxons, mais imposer ses phantasmes théologiques à la planète entière.

C'est ainsi qu'aujourd'hui même, dans les pseudo "négociations" auxquelles se prête rituellement le gouvernement israélien afin de gagner du temps et en profiter pour grignoter du terrain, il affirme tranquillement que "le droit international n'a rien à voir" avec la guerre qu'il mène contre le peuple palestinien, parce qu'il possède "un titre de propriété sur Eretz Israël" (la terre d'Israël). Il ne s'agit donc pas pour lui de "rendre des territoires", mais de consentir généreusement à "en donner".

Seuls les ignorants de la psychologie messianique des dirigeants et de la masse de la population israélienne peuvent s'étonner de la réponse méprisante de Benjamin Netanyahou à la suite de la menace de la France et de l'Angleterre de convoquer les ambassadeurs israéliens après la décision de l'Etat hébreu de construire une nouvelle colonie en Cisjordanie forte de trois mille logements ...pour commencer, à la suite de la démarche de la Palestine à l'ONU.

Il en résulte que les Palestiniens sont aujourd'hui les victimes collatérales de la rédaction d'un vieux code de théologie et de morale rédigé il y a plus de vingt-cinq siècles par les prêtres héréditaires d'une petite tribu de nomades du sud de l'actuelle Palestine.

Or le droit international ne connaît pas d'Etat dont la définition se fonderait sur la religion ou la race. Le droit international public s'appelle également le "droit des gens" - le jus gentium, au sens latin de gens, la nation, le peuple. La Palestine étant une nation reconnue depuis 1919, aucun organisme international ne possédait le pouvoir de la priver du droit universel des peuples à disposer d'eux-mêmes et ce droit est inaliénable.

Ni la résolution 181, ni la reconnaissance d'Israël en tant qu'Etat à laquelle Yasser Arafat s'est résigné 1988 n'ont aucun fondement en droit international public, car aucun peuple ne dispose du pouvoir absurde de parapher son propre auto-anéantissement.

C'est ainsi que la Déclaration de 1988 d'Arafat est simplement "nulle et non avenue".

Certes, une guerre et un traité de paix peuvent se conclure par le rapt d'une portion du sol d'un Etat à son propriétaire; mais ce coup de force n'est jamais légitimable en droit pur et demeure toujours récusable. C'est ainsi que la France a reconquis l'Alsace et la Lorraine par la force des armes en 1918. De même, la plus grande partie de la Palestine a été conquise par des colons, c'est-à-dire par des populations étrangères à cette terre. Mais les territoire perdus peuvent être reconquis et revenir à leurs légitimes propriétaires.



Question II - Le gouvernement israélien accuse le Hamas d'être le principal coupable dans cette guerre, tandis que les Occidentaux l'assimilent - à demi mot - à une organisation terroriste. Que représente le Hamas pour vous qui militez aux côtés des Palestiniens ? 

La politique ne connaît qu'un certain type de force, celui que les physiciens appellent la "force résistante". L'expansion impériale ne s'arrête que lorsqu'elle rencontre un mur - c'est-à- dire une résistance - ou qu'elle déraille - c'est-à-dire qu'elle s'auto-détruit.

La première et la plus classique de ces forces est la résistance des peuples envahis ou conquis, mais ce n'est pas la seule. Ainsi, grâce à ses petites roquettes artisanales qui ne font pas de gros dégâts, mais créaient la panique dans les localités frontalières, Gaza la vaillante et la résistante tient tête à un occupant monstrueusement armé. Lors de la dernière ruée de l'armée des occupants, les résistants de Gaza ont même réussi à envoyer une bonne partie de la population israélienne, y compris le gouvernement tout entier, se terrer dans des abris ou des canalisations.

Malgré les tentatives de l'occupant de l'affamer , de l'empoisonner ou de la terroriser, de la bombarder cruellement d'une manière répétitive, les mouvements de résistance à Gaza viennent de réussir à imposer un cessez-le-feu, plus ou moins à leurs conditions, ce qui, dans ce type de rapport de forces constitue une victoire.

J'ajoute que les dirigeants de Gaza ont été très légitimement élus et dans des élections unanimement reconnues comme démocratiques. Il se trouve que le Hamas est arrivé en tête. C'est ainsi. Faut-il ne respecter le résultat d'un vote démocratique, donc issu de la volonté du peuple, que s'il répond aux vœux de tel ou tel Etat étranger?

Mais le Hamas n'est pas le seul mouvement de la résistance palestinienne et ce n'est pas, militairement parlant, le plus actif. La loi internationale reconnaît à un peuple occupé le droit de se défendre par tous les moyens, y compris par la force. La résistance palestinienne est donc parfaitement légitime. Les déclarations de l'occupant sont sans valeur aucune. D'ailleurs, les sionistes sont les inventeurs du terrorisme politique qu'ils exercèrent d'abord contre l'empire tsariste, puis lors de la conquête de la Palestine contre les Britanniques et les autochtones. Hachomer, Haganah, Irgoun, Lehi, Palmach, Mapam et autres tueurs et tueuses du Mossad et de Tsahal , autant d'organisations dont les crimes se comptent par milliers. Un grand nombre des dirigeants de ces groupes terroristes sont devenus premiers ministres de l'Etat d'Israël.

Les colons européens ont bafoué tous les traités qu'ils ont signés avec les Indiens d'Amérique du Nord et du Sud et ont fini par exterminer l'immense majorité des autochtones amérindiens, puis à parquer les survivants dans des enclos appelés "réserves". Voilà un bel exploit de la fameuse "mission sacrée de la civilisation" dont on n'hésitait pas à se gargariser en 1919. Israël s'inspire du même modèle et il croit que ses mesures coercitives de plus en plus violentes finiront pas dompter la résistance de ceux en lesquels il voit ses propres indigènes.

 

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«Le sionisme puise sa puissance dans les banques anglo-saxonnes» , 6 décembre 2012

 

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Question III - Comment qualifieriez-vous la réaction des pays arabes - et de la Ligue qui les regroupe - face aux agressions répétées d'Israël contre le peuple palestinien?

Bla bla bla. Réunionite aiguë à effet nul pour les Palestiniens. La ligue arabe est le lieu de toutes les machinations et de tous les complots d'initiative américano-sioniste comme on vient encore de le voir à propos de la Syrie, avec pour chef et grand dispensateur de sacs bourrés jusqu'à la gueule de billets verts, l'inénarrable, l'incontournable, le virevoltant, l'omniprésent et omnipuissant Cheikh Hamad bin Jassim bin Jaber al-Thani, dont la carrure est inversement proportionnelle à celle de son confetti d'Etat gazier et aux ambitions géopolitiques dignes de la fable sur la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf.

 

Question IV - Les Israéliens s'apprêtent à voter le 22 janvier prochain, dans le cadre des législatives anticipées décidées par le Likoud. Ce parti préside par Netanyahou est donné favori par les sondages locaux. Pensez-vous que l'agression contre Ghaza entre dans ce contexte électoral ou vise-t-elle plutôt à saboter le projet de résolution qui conférerait à la Palestine le statut d'Etat observateur à l'ONU?

Oui certainement, Benjamin Netanyahou espérait qu'en montrant ses muscles, il récolterait un surcroît de popularité en vue des élections à venir. Il comptait offrir à ses électeurs un plat dont ils sont friands de destructions spectaculaires, de ruines fumantes, de cadavres et d'enfants ensanglantés. En dessert, il se serait vanté d' assassinats "ciblés" réussis de redoutables "terroristes. Apparemment les images sanguinolentes d'enfants massacrés ont jusqu'à présent représenté un efficace dopant électoral. Afin de leur ouvrir l'appétit, je leur recommande les images tournées le 14 novembre 2012 par une équipe indonésienne lors des dernières agapes de sang auxquelles s'est livrée à Gaza l'armée la plus immorale du monde.

Ce que les assassins sionistes interdisent que vous voyiez à la télévision  sur Gaza : 



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(Nous nous permettons d’insérer dans le corps de l’interview de Madame de Dieguez, ces derniers instants d’un bébé arrosé au phosphore blanc, qui aurait bien tort de se plaindre puisqu’il échappe aux chambres à gaz. - N.d.LGO)

http://www.alterinfo.net/Le-dernier-souffle-d-un-bebe-palestinien-massacre-par-le-gouvernement-israelien-video_a83752.html

 

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Benjamin Netanyahou tablait probablement sur le fait que la "communauté internationale" clamerait comme d'habitude que sa réaction est "disproportionnée" et qu'on en resterait là, toujours comme d'habitude. Souvenez-vous du festin de cannibales des dirigeants européens invités par Ehud Olmert au beau milieu du précédent massacre à Gaza en 2008.

En effet, dans un régime qui se proclame "démocratique", la ligne d'un gouvernement est, globalement, le reflet du sentiment général des électeurs. On sait qu'en Israël, la violence de l'armée à l'encontre des Palestiniens est aapprouvée par la société tout entière. La violence militaire n'est donc que le reflet de la violence des sentiments de la population. Non seulement, et à une immense majorité, les Israéliens applaudissent les bombardements de civils, mais ils en redemandent, comme le montraient les signatures et les mots doux des fillettes israéliennes sur les missiles qui allaient pulvériser des fillettes libanaises en 2006, ou les cohortes de voyeurs contemplant à la jumelle les missiles tombant sur Gaza. Les emprisonnements arbitraires les tortures que subissent des milliers de détenus qui croupissent dans leurs geôles - y compris des femmes et des enfants - les humiliations, les spoliations, les assassinats, les tortures loin de provoquer une indignation ou au moins une empathie spontanée envers des victimes carbonisées par des bombes au phosphore, étaient, jusqu'à la dernière expédition meurtrière à Gaza, accueillis par des hourrah et des danses. A part quelques pétards dans les terrains vagues autour de Sderoth, les Israéliens étaient tranquilles comme baptiste et pouvaient se contenter de contempler le spectacle et de compter les bombes au phosphore qui illuminaient le ciel de Gaza. Une sorte de 14 juillet à la sauce israélienne.

Benjamin Netanyahou était donc fondé à tabler sur une popularité accrue et un gain électoral.

De plus, il semble que le héros de "Plomb durci", Ehud Olmert, venait de se débarrasser des accusations de magouilles financières qui semblent avoir glissé sur sa carrière politique comme l'eau sur les plumes d'un canard. Il était en train de se lancer dans l'arène électorale. Il s'agissait donc de prendre de vitesse un rival qui avait fait ses preuves en matière de barbarie.

Un troisième argument en faveur de l'intervention consistait à obliger un Barack Obama, dont l'animosité à l'égard de Benjamin Netanyahou est notoire, à proclamer publiquement son soutien indéfectible à l'Etat sioniste et à accuser, selon un rituel classique, "le Hamas et toutes les organisations terroristes" palestiniennes d'exercer une "violence injustifiable" contre "le peuple d'Israël" et de menacer sa "sécurité", ce que son porte-parole s'est empressé de clamer.

… sauf que les nouveaux missiles à plus longue portée de la résistance ont changé la donne sur le terrain, car cette dernière expédition guerrière de l'Etat israélien a réservé quelques surprises à ses concepteurs, obligés, pour la première fois, de courir aux abris.

De plus, les images de ces nouveaux massacres et des destructions massives d'infrastructures civiles, alors que la reconstruction n'était pas achevée après les dévastations de Plomb durci en 2008, ont soulevé une indignation mondiale qu'Israël n'avait pas anticipée, si bien que des Etats hésitants - la France, l'Espagne, la Belgique, entre autres - n'ont pas osé aller contre les sentiments de la majorité de leurs populations respectives.

Leur vote positif a provoqué la stupeur et la fureur des groupes de pression sionistes habituels dans les Etats concernés.

 

Question V - Les Etats-Unis soutiennent l'Etat sioniste et le protègent envers et contre tous. Comment expliquez-vous ce soutien acharné? Est-ce seulement une affaire de lobby sioniste ou y a-t-il d'autres raisons inconnues ?

J'ai traité ce sujet en détail dans mon dernier texte. [2] Les lobbies sionistes sont certes nombreux et puissants aux Etats-Unis et il existe également un courant, plus nombreux encore, même s'ils sont moins fortunés, de protestants fondamentalistes, plus virulents et plus fanatiques que les Juifs et qui soutiennent l'Etat sioniste pour des motifs théologiques. Ils sont appelés "chrétiens sionistes". Ils professent que la judaïsation de toute la Palestine est une étape nécessaire avant le retour du Messie, lequel triomphera définitivement du mal sur la terre et convertira les Juifs au christianisme. On devine que cette dernière perspective est loin de plaire aux Israéliens mais, en attendant cet avenir lointain, leur soutien bruyant est précieux.

Mais il s'agit là de la partie émergée de l'iceberg . C'est dans les grandes banques anglo-saxonnes et les puissantes multinationales d'outre-Atlantique qu'il faut chercher la source jaillissante de ce qui devint le puissant fleuve sioniste. C'est grâce à une manne financière, quasiment sans limites que cette idéologie messianico-colonialiste a trouvé la force de concrétiser son rêve. Des hommes comme le rabbin Stephen S. Wise, premier président du congrès juif américain, puis mondial ou le Colonel House évoqué ci-dessus et éminence grise farouchement pro-sioniste du président Woodrow Wilson, ont joué un rôle déterminant dans la concrétisation de ce fantasme à partir du début du XXe siècle, puis durant les préparatifs des deux guerres mondiales. D'ailleurs, dans son gros ouvrage intitulé Les Juifs, le monde et l'argent, Jacques Attali se glorifie de la puissance que les institutions bancaires ont donnée et continuent de donner à ses co-religionnaires.

Certes, le rêve sioniste d'inspiration proprement biblique a germé dans les plaines de Russie, d'Ukraine et de Pologne et y a été préparé de longue main. Cependant, c'est grâce à la fabuleuse manne financière de groupes puissamment organisés et agissants dans les coulisses des pouvoirs politiques et qui sont parvenus à tordre, dès l'origine, la politique de l'Angleterre et des Etats-Unis dans le sens des intérêts sionistes, que cette idéologie a pu se concrétiser. Les intérêts de l'idéologie sioniste et ceux de l'empire américain naissant ont donc, dans les débuts, semblé coïncider parfaitement.

Les groupes financiers, économiques et médiatiques qui venaient de se constituer outre-Atlantique grâce à des méthodes qu'on peut qualifier de maffieuses - leurs richissimes propriétaires sont désormais désignés sous le nom de "barons voleurs" - étaient, pour un très grand nombre d'entre eux, entre les mains de mouvements favorables à l'idéologie sioniste quand ils n'en étaient pas des membres agissants. Ils ont accompagné et favorisé la montée en force du nouvel empire qui allait, comme tous les empires qui l'avaient précédé, s'emparer progressivement des rênes du pouvoir mondial, faire main basse sur les richesses de la planète et devenir ouvertement et le plus naturellement du monde, le protecteur et le financier de l'idéologie sioniste, source principale du chaos mondial depuis le début du XXe siècle.

La réussite du colonialisme politico-religieux sioniste est incompréhensible si l'on ne voit pas qu'il est l'enfant et la projection au Moyen Orient du colonialisme économique souterrain des puissances financières anglo-saxonnes sur la planète entière, une sorte de pseudopode géographiquement délocalisé de l'Occident colonisateur, une tête de pont placée dès l'origine sous la protection de la City et de Wall Street - et notamment du très efficace banquier états-unien Bernard Baruch ainsi que de la Maison Rothschild anglaise et de ses filiales Sans la domination financière de la City sur la planète jusqu'à la deuxième guerre mondiale et la création de sa monnaie privée le 23 décembre 1913 - le dollar - par les soins de ses filiales dans le Nouveau Monde, le sionisme serait resté une excroissance nationaliste hérétique, demeurée localisée en Europe de l'Est, d'un judaïsme principalement pharisaïque et d'influence talmudique.

Sans cette domination-là , l'Etat d' Israël n'aurait pas pu voir le jour et les fidèles du dieu Jahvé auraient continué à vivre entre eux dans les multiples Etats dont ils étaient devenus nominalement les citoyens, selon les préceptes ségrégationnistes d'Esdras pour la majorité d'entre eux, se seraient convertis à un judaïsme spirituel qui, sautant à pieds joints par-dessus les principes du Talmud, trouve sa source chez ses grands prophètes bibliques, ou se seraient intégrés aux Etats-nations dans lesquels ils vivaient. Un judaïsme spirituel survit aujourd'hui dans le petit groupe des Naturei Karta , mais leur nombre est infime et l'a d'ailleurs toujours été.

La deuxième guerre mondiale a rebattu les cartes et le centre du pouvoir s'est déplacé de la City de Londres à Wall Street. De plus, les persécutions dont les juifs furent victimes de la part de l'Allemagne nazie et dans une grande partie de l'Europe ont fourni des arguments nouveaux au mouvement sioniste. Ils ont permis, dans la foulée, son officialisation au mépris du principe fondateur de toute légalité internationale, à savoir le droit des peuples à disposer d'eux- mêmes.

 

Question VI - Qu'est-ce qui fait que les puissances mondiales se sentent obligées de courber l'échine devant l'arrogance d'un Etat aussi petit qu'Israël ?

Les "puissances mondiales" comme vous dites, sont reliées à leurs moyens de communication par un cordon ombilical invisible, mais omnipuissant. Politique et communication se superposent.

Or, dans un monde qui papillonne d'une image à l'autre, d'une interview à l'autre et où la vérité et la réalité ont peu de poids face à des bouffées émotives, à une savante mise en scène ou en ondes, aux raisonnements astucieusement agencés, aux manipulations émanant de groupes de pression et à la complicité de tous les médias occidentaux, des années-lumière d'habileté, d'efficacité et de professionnalisme séparent les Palestiniens et les Israéliens.

Outre le handicap de se trouver face à une puissante cohorte de lobbyistes affichés ou masqués d'Israël, il existe des raisons culturelles, linguistique, politiques et psychologiques propres aux Palestiniens eux-mêmes et qui expliquent leur sidérale faiblesse face aux médias du monde entier. Un locuteur qui s'exprime dans un anglais élémentaire ou un français hésitant ne fait, hélas, pas le poids dans le théâtre médiatique. Ainsi, depuis que Mme Leila Shahid n'est plus à Paris, la Palestine a pratiquement disparu des médias français.

Il est urgent que les Palestiniens envoient dans toutes les grandes capitales du monde des représentants qui soient de grands intellectuels familiers du style d'argumentation des médias occidentaux et capables de s'exprimer dans la langue du pays. Constamment aux aguets, ils devraient exiger des droits de réponse face à l'omniprésence et à la variété des représentants de la thèse israélienne. Ceux-ci sont innombrables tous parfaitement francophones. Et la liste s'allonge avec les partisans déclarés ou crypto-sympathisants, à laquelle s'ajoute toute une brochette de journalistes qui présentent volontairement ou par ignorance une information tellement biaisée qu'elle s'apparente à un lavage de cerveau.

A la faiblesse des Palestiniens sur le terrain médiatique s'ajoute la paralysie de l'Allemagne et de tous les pays européens qui ont été peu ou prou occupés par les troupes nazies et qui ont participé à la persécution de leur population juive durant la dernière guerre. Des armées de vigilantes vigies veillent, l'épée de l'antisémitisme sortie du fourreau et prête à s'abattre sur tous les commentateurs et géopoliticiens audacieux qui s'écarteraient de la doxa officielle. Souvenez-vous de la violence de la réaction des sionistes européens et israéliens à la suite de la publication par Günter Grass de son poème sur la Palestine, Ce qui doit être dit, dans un quotidien allemand.

 

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«Le boom démographique palestinien affole les Israéliens», 7 décembre 2012

 

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Question VII - Dans votre analyse intitulée "La légende dorée du sionisme", vous avez prédit la chute de l'Etat sioniste, comme toute idéologie politique ou religieuse, à travers le monde. Quelle sont les indicateurs qui confirmeraient le déclin de cette entité aujourd'hui hégémonique ?

L'histoire enseigne que seul l'échec de son entreprise bloque l'expansion impérialiste naturelle des peuples. Louis XIV a fini par perdre les provinces conquises en Helvétie et en Wallonie, Napoléon a terminé sa vie sur l'îlot de Sainte-Hélène, la révolte de son armée a mis fin à l'extraordinaire épopée d'Alexandre en Asie, l'empire Ottoman n'existe plus, le royaume chrétien de Jérusalem n'est plus qu'un souvenir dans les livres d'histoire, il ne reste rien de l'empire de Charles Quint, le IIIe Reich est mort, le marxisme s'est écroulé comme un château de cartes . Après l'échec de la guerre du Vietnam, l'Amérique est en passe de devoir admettre qu'elle subit le même type de déroute en Irak et en Afghanistan et que son rêve de "remodeler le grand Moyen Orient" est à ranger dans le magasin des accessoires.

Le rêve d'un empire sioniste rejoindra le grand cimetière des éléphants politiques. Le mythe est le destin de l'actuel Etat d'Israël et sa carapace mentale, mais il est également son talon d'Achille.

La véritable arme de destruction massive, la plus sophistiquée et la plus meurtrière d'une colonie de peuplement qui se veut en expansion est l'arme des pauvres, l'arme qu'aucune bombe n'arrêtera, l'arme qui explosera dans les statistiques et dans les rues: la multiplication des bébés. C'est la botte secrète des Palestiniens. A Gaza, la moitié de la population a moins de 18 ans. La démographie a toujours été la clé de la survie d'une nation et la condition de son développement.

Le boom démographique palestinien affole Israël. Il s'amplifie malgré ses tentatives les plus sadiques de nuire à la santé des mères, de les empêcher de se soigner et même d'accoucher dignement en les bloquant volontairement à des barrages barbares. Le ventre des femmes, voilà l'ennemi, l'usine à fabriquer des "terroristes". Les appels à l'immigration ne sont plus entendus. Les derniers missiles partis de Gaza seront encore plus dissuasifs sur les candidats potentiels.

Israël ne sait pas comment désamorcer la bombe démographique palestinienne. C'est pourquoi l'apparente phase ascendante de l'expansion impériale d'Israël est trompeuse. Comme la locomotive de la Bête humaine, le train du grand rêve sioniste est lancé dans une fuite en avant désespérée.

 

Question VIII - Verrons-nous un jour les deux peuples palestinien et israélien vivre côte à côte, en paix et en toute sécurité ?


Comment croire que l'Etat-bourreau qui, depuis qu'il a acquis une existence officielle, met la corde au cou à tout un peuple l'affame, l'assoiffe, le pilonne, l'empêche de se soigner, de se déplacer, martyrise, terrorise ses enfants et les empêche d'étudier, l'emmure, vole l'argent de ses impôts, le soumet à l'arbitraire de colons féroces, armés et casqués comme des martiens et de policiers brutaux et sadiques aux checkpoints, blesse, humilie et assassine, l'Etat qui bombarde la seule centrale électrique de la région, qui déracine les merveilleux oliviers centenaires pour édifier sa muraille, l'Etat qui dévaste les vergers et les cultures d'un peuple colonisé et emprisonné, qui vole ses terres, son eau, ses ressources, qui poursuit la colonisation avec une obstination de crabe dépourvu de coeur et de cerveau, un Etat qui écrase les maisons au bulldozer, empêche les agriculteurs de travailler, défonce les routes, détruit les infrastructures, les récoltes, ravage le port, l'aéroport , les terrains de sport et les aires de jeu, bombarde la plage, les bateaux de pêche, pilonne même les hôpitaux, les écoles et les ambulances, laisse le champ libre à ses snipers assassins, empoisonne la population de Cisjordanie à petit feu en se débarrassant de ses déchets toxiques dans les territoires palestiniens au mépris de la protection de l'environnement et des nappes phréatiques, invente chaque jour de nouvelles brimades et de nouvelles humiliations, que cet Etat-là, qui continue à voler la terre jour après jour et qui qualifie la résistance héroïque de "terrorisme" puisse un jour se métamorphoser en un voisin normal capable d'accepter gentiment à ses côtés un autre Etat et une population qu'il déteste et méprise et qu'il rêve de voir s'évaporer ou disparaître sous terre? Qui peut croire à un miracle d'une taille aussi gigantesque? C'est ne pas connaître la nature humaine .

 

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La seule existence des Palestiniens constitue un obstacle infranchissable au rêve de conquête d'un empire sioniste messianique qui incluerait la totalité de la Palestine, le Liban, l'Irak, une partie de l'Egypte et même davantage encore et que les dirigeants actuels de plus en plus métamorphosés en zélotes poursuivent secrètement et inlassablement.

Israël a donc tenté - et partiellement réussi pendant un certain temps - à occulter les circonstances de son installation et les massacres qui l'ont accompagnée: Deir Yassine, Haïfa, Jaffa, Acre, Oum Al Fahem, AL-Ramla, Al-Daouayma, Abou Shousha, Jénine, Gaza et tant d'autres ont crié dans le désert .

Alors qu'Israël se proclame menacé par des forces obscures et féroces qui voudraient "rejeter sa population à la mer", comme il le clame, on voit jour après jour se produire exactement le contraire : à savoir le bulldozer israélien comprimer la population palestinienne dans un espace de plus en plus resserré et multiplier les colonies selon un plan longtemps mûri à l'avance.

Ainsi, les plans des trois mille logements dont Benjamin Netanyahou annonce la construction en représailles à la récente reconnaissance par l'ONU du statut d'un Etat observateur non membre à la Palestine ne sont pas sortis d'un tiroir durant la nuit. Ils étaient prêts depuis longtemps et le gouvernement attendait une occasion pour les annoncer. D'autres projets de ce genre existent évidemment déjà et n'attendent que l'occasion d'être sortis des tiroirs.

Les Palestiniens sont le miroir dans lequel Israël voit son péché. Jamais Israël ne pardonnera aux Palestiniens les meurtres qu'il commet sur eux et tous ceux qu'il rêve de commettre. La laideur de l'image que le miroir lui renvoie révolte la "belle âme" victimaire israélienne, et la pousse, tel le Dorian Gray d'Oscar Wilde, à vouloir briser ce miroir.

Mais comment réussir à tuer discrètement quatre millions d'individus sans susciter un scandale international et passer du stade officiel de victime à celui de bourreau monstrueux alors que le statut de victime est si confortable et si rentable! Les gouvernements israéliens successifs sont taraudés par une seule obsession : COMMENT SE DEBARRASSER DES PALESTINIENS?

Dans l'immédiat, ils rêvent non pas de vivre à côté d'eux ou de partager un même Etat, mais de les exporter tous en Jordanie avec l'aide du grand démocratiseur prosioniste du Moyen Orient, dont les pieds ne touchent plus terre: l'omniprésent le Cheikh du Qatar qui vient de démontrer ses qualités de démocrate et de connaisseur littéraire en faisant embastiller jusqu'à sa mort le poète Mohammed al-Ajami dont les vers lui ont déplu!

Tant qu'Israël sera relié au cordon ombilical nourricier des dollars qui coulent à flot des banques dorées américaines, son obstination et son arrogance continueront comme devant et ce ne sont pas les couinements de Paris, de Londres, de l'Union européenne et même d'un gouvernement américain quelque peu gêné de voir ridiculisés les principes "démocratiques" qu'il brandit à tout instant, qui bouleverseront les projets d'un Benjamin Netanyahou qui proclame fièrement que la décision de l'ONU est une "attaque contre le sionisme et contre l'Etat d'Israël qui doit nous conduire à augmenter et accélérer la mise en œuvre des plans de construction dans toutes les zones où le gouvernement a décidé de bâtir."

 

Question IX - Quelles sont, à votre avis, les conséquences du vote du 29 novembre ?

 Il est toujours bon d'emmagasiner un avantage. Cependant l'importance majeure de ce vote réside dans la défaite diplomatique d'Israël, qui a entraîné à sa suite une défaite diplomatique des Etats-Unis. Ces deux Etats se sont tout à coup trouvés isolés sur la scène mondiale. Un seul petit Etat européen a rejoint le camp américano-sioniste. Les microscopiques îlots du Pacifique totalement entre les mains de l'oncle Sam ne sont là que pour donner automatiquement cinq voix assurées à la position des Etats-Unis.

Malgré un forcing acharné des ambassadeurs en poste dans toutes les capitales, le vote des Etats européens a stupéfié et déçu les pro-israéliens. "Nous avons perdu l'Europe", se lamentait le CRIF français.

"C'est toujours bon à prendre, mais ce n'est pas ça qui mettra fin à l'occupation", tel était le sentiment général des Palestiniens, échaudés par les dizaines de textes sortis des imprimeries de l'ONU et demeurés sans le moindre effet sur le terrain. Ce nouveau statut ouvre aux Palestiniens des droits nouveaux, encore faudrait-il qu'ils les revendiquent. La seule arme sérieuse des Palestiniens serait de ratifier le Statut de Rome et d'accéder ainsi au droit de porter plainte contre les Israéliens devant la Cour Pénale Internationale pour des crimes de guerre commis à Gaza, pour la construction illégale de colonies en Cisjordanie occupée ou pour le mur monstrueux édifié sur leurs terres.

Mais Mahmoud Abbas a déjà annoncé qu'il n'utiliserait cette arme que pour les crimes à venir et François Hollande essaie d'atténuer le vote positif de la France en demandant aux Palestiniens de retourner à la fameuse "table" des négociations sans conditions. Le nouveau statut est donc une victoire symbolique pour la Palestine et les symboles sont importants.

En même temps, elle remet Mahmoud Abbas en selle alors qu'il était au fond du gouffre après ses déclarations sur le non-retour des réfugiés à la télévision israélienne. Ce n'est pas forcément une bonne nouvelle pour la cause palestinienne.

On peut espérer sans trop y croire qu'il saura utiliser ce succès pour aider à rompre le criminel blocus de Gaza et parvenir enfin à une unification de tous les mouvements palestiniens. Espérons aussi - mais, là encore sans y croire - qu'il dissoudra enfin sa milice au service de l'occupant qui traque, maltraite et emprisonne les résistants de Cisjordanie.

Espérons également qu'un nouveau cycle de vingt ans de vaines "négociations" n'est pas au bout de la route. Si telle était l'intention de M. Abbas, les résistants de Gaza qui viennent de payer un lourd tribut à la barbarie de l'Etat israélien, et pour la deuxième fois en quatre ans, sauront d'autant mieux faire entendre leur voix.

D'ailleurs un changement d'esprit semble se dessiner au sein du parti qui tient en main la Cisjordanie. Mme Leïla Shahid, déléguée générale de l'Autorité palestinienne auprès de l'Union européenne, et devenue ambassadrice de Palestine depuis le 29 novembre, a déclaré, lors d'un entretien à la RTBF que "la stratégie de la négociation avec Israël est un échec ". " Nous avons commencé à négocier à Madrid en 1990, (...) on a arrêté la lutte armée, (...) et Israël nous a donné une claque. (...) Dites-moi à quoi ont servi les négociations pendant vingt ans?"

Si une partie d'un Fatah de Cisjordanie jusqu'alors amorphe et collaborationniste se joint aux résistants de Gaza, l'espoir renaîtra en Palestine.

Je termine ce dialogue comme je l'ai commencé avec un conseil du grand stratège chinois SUN-TZU : " La prudence et la fermeté d'un petit nombre de gens peuvent venir à bout et dompter même une nombreuse armée."

Aline de Diéguez .

 

Notes

[1] -Du Système de la Réserve fédérale au camp de concentration de Gaza : Le rôle d'une éminence grise: le Colonel House

[2] -22 - Pourquoi l'Amérique soutient l'Etat sioniste envers et contre tout

Liste des résolutions et des votes : Ils ont crucifié Marianne... Les nouveaux exploits de Tartuffe en Palestine . (Voir à la fin de cet article le tableau en deux parties : Résolutions de l’ONU à gauche – Vetos U.S. à droite)

 

Sources :

http://aline.dedieguez.pagesperso-orange.fr/mariali/palestine/interviews/interview.htm

http://www.algeriepatriotique.com/article/aline-de-diegue...

 http://www.algeriepatriotique.com/article/aline-de-diegue...

 http://algeriepatriotique.com/article/aline-de-dieguez-le...



 *


Sans commentaire :


«Cher Président Obama,

Au nom du peuple d'Israël, en tant qu'amis et parents, nous nous tenons à vos côtés aujourd'hui dans le recueillement et la douleur suite à l'atroce et incompréhensible massacre de 20 enfants et six adultes - éducateurs - à l'école primaire Sandy Hook.

Aucune expérience de la mort ne peut être comparée à celle de la perte d'un enfant pour des parents. Aucun crime n'est plus odieux que le meurtre d'un enfant.

Nos coeurs sont avec les familles des victimes endeuillées, la communauté endeuillée de Newtown, le Connecticut et le peuple des États-Unis d'Amérique.

Nos pensées et nos prières vous accompagnent.

Shimon Pérès

Président de l'Etat d'Israël»


Ajouté le 18 décembre 2012.


 

*


Discours de Khaled MECHAAL à Gaza

25 ans du Hamas – 08/12/2012

 

(sous-titré en français -

traduction : Collectif Cheikh Yassine)

 

 

Ne reste plus qu’à transformer toutes ces déclarations de principe en réalités.

Que penser de ce discours plein de flou, de zones d’ombre et de non-dits, sous les affirmations apparemment sans équivoque ?

Discours à la Danton ? (D’autant plus tonitruant – « De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace ! » - qu’on est en train de traiter en sous-main avec ceux que l’on paraît défier.)

Discours à la Mélenchon ? (Disons au peuple ce qu’il a envie d’entendre et vogue la galère. Pour les actes, on verra plus tard.)

Discours « Mechaal à Canossa » ? On n’ose dire « sur le chemin de Damas »… (Oui, frères, ceci est mon autocritique mais soyez généreux avec le pécheur.)

Ou ?... ou ?...  ou ?...

Mais à vrai dire, ce qui nous a le plus frappé, dans ce discours, c’est le masque de pierre d’Ismail Haniyeh, qui n’a pas montré l’ombre d’un  signe de vie pendant les  57 minutes et quelques qu’a duré toute la harangue.

Comment l’interpréter ?

Car n’est-ce pas lui qui aurait dû la prononcer? Lui qui est au four et au moulin, jour et nuit, à exposer sa vie depuis tant d’années ? Lui qui vient de vaincre les Israéliens pour la première fois en plus de soixante ans. Lui qui n’a jamais varié, jamais changé d’alliances. La Résistance en armes, après tout, c’est lui, pas Méchaal, même s’ils appartiennent à une seule organisation.

Alors, ce masque énigmatique, c’est quoi ?

Celui d’un vaincu ? Mais dans ce cas par qui et comment ?

Celui de qui n’est pas d’accord mais n’est pas en état de le faire savoir ? Mais pas d’accord avec qui ou avec quoi ?

Celui de qui vient de trahir, contraint et forcé, les siens et ses plus fidèles alliés, et qui n’en est pas fier ?

Car le mot qui court en filigrane de ces événements chaotiques et de ces paroles apparemment victorieuses et festives, n’est-ce pas le mot « Trahison » ?

Pourquoi, devant cette foule si pleine de deuil et d’élan, se prend-on à penser :

Pauvres Palestiniens….

Pauvres Syriens...

Pauvres Iraniens…

et sans sdoute, bientôt pauvres Libanais…,

il va vous en falloir du courage, pour affronter à la fois la coalition armée la plus meurtrière de tous les temps ET les poignards de vos frères dans le dos !

Bref, sommes-nous en train d’assister à la mise en place d’un empire islamiste intégriste, en parfaite complicité avec des oligarchies occidentales aussi nazies qu’on peut l’être, Israël-pays-d’Europe-inclus, sur le dos des Palestiniens, des Syriens, et des Iraniens, qui seront priés de se laisser écraser sans faire d’histoires, au nom d'Allah ?

Ismail Haniyeh, comme frappé par la foudre, vient-il de se rendre compte qu’il a toujours été manipulé, et que tant de sang, tant de larmes, tant de martyrs n’ont servi qu’à tirer les marrons du feu pour de froids ambitieux ? Froids ambitieux dont il commence seulement à découvrir le vrai visage, peut-être, sous celui, brandi, du Prophète ?

Fassent le Ciel, tous les dieux et tous les diables, que nous nous trompions et que nos sinistres pressentiments ne soient rien d’autre que l’effet de notre paranoia. Amen !

Ce qui est sûr, c’est que l’Islam ne fera pas l’économie des deux siècles et demi de déchirements sanglants qu’a connus l’Occident sous le nom si profondément abusif de « guerres de religion », toutes les guerres – toutes, sans exception - n’ayant jamais eu d’autre motivation que l’appétit de pouvoir et la soif de richesses.

Dans ce kriegspiel où la trahison est partout, que pourra et que voudra Vladimir Poutine, avec son million de Khazars à rapatrier ? Comment pourrait-on l’imaginer mettre échec et mat un pareil nid de scorpions ? Il le faudrait pourtant.

 

 

*

 

Une réaction sceptique :

 

Le soudain changement de bord de Khaled Mechaal

 

Lahcen SENHAJI


Le futur ex-chef en exil de la branche politique du Hamas, qui selon toute vraisemblance ne devrait pas se représenter aux élections internes imminentes du mouvement, était ces derniers jours à Gaza en célébration du 25ème anniversaire de la fondation du Hamas. Un retour sans précédent sur les territoires palestiniens depuis qu’il les a quittés en 1967, prenant le chemin de l’exil en se réfugiant au Koweït, en Jordanie puis en Syrie, d’où il dirigeait le bureau politique de l’organisation depuis 2001.

 

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 Source :

 http://www.legrandsoir.info/le-soudain-changement-de-bord-de-khaled-mechaal.html


 

Une analyse des trois événements évoqués plus haut et de quelques autres,

que nous craignons, hélas, pertinente

 

La tragédie de Gaza à l’aune du printemps arabe

 

Ahmed BENSAADA

 

Il s’agit d’un nouveau rite israélien. Entre l’« Election Day » et l’« Inauguration Day », dates phares de la démocratie étasunienne, Israël marque cette période et prépare ses propres élections en bombardant sans vergogne Gaza et ses habitants. Tel un chasseur godiche canardant au gros calibre tout ce qui bouge dans une volière sous prétexte qu’un volatile l’a malencontreusement becqueté, l’état hébreu extermine hommes, femmes et enfants de Gaza, cette Terre palestinienne volontairement transformée en prison à ciel ouvert. Et cela ne l’empêche pas de se bomber le torse et de se vanter de ses « hauts faits d’armes » sous les regards approbateurs de pays occidentaux qui ne voient, dans l’utilisation des canardières, que l’équivalent de coups de becs.

 

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Source : 

http://www.legrandsoir.info/la-tragedie-de-gaza-a-l-aune-...

 

Et parce que nous sommes d’indécrottables rétifs à la défaite, terminons cet état des lieux par le dernier billet de Thierry Meyssan. Que le Ciel l’entende, et l’Enfer si nécessaire, ne négligeons aucune protection.

 

Israël n’est plus qu’un tigre de papier.

 par Thierry MEYSSAN

 Réseau Voltaire – 10 décembre 2012

 

La célébration du 25ème anniversaire du Hamas correspondait à la célébration de la victoire après la récente attaque israélienne. Or, cette brève guerre a profondément modifié la situation stratégique de l’État hébreu et a ressoudé une partie des combattants palestiniens.

 

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Source :

http://www.voltairenet.org/article176898.html

 

 

 

*

BELGIKISTAN ÜBER ALLES

 

8. Les vautours en toge 1640069733.png

 

A quoi joue Monsieur le Procureur ?

 

Nous avons posté, il y a peu, sur un procès qui allait s’ouvrir le 11  de ce mois au Palais de Justice de Bruxelles.

Ce n’était pas la première fois qu’un appel à soutien était lancé, à propos de procès programmés par le même procureur du roi et reportés par lui à l’ultime seconde avec la plus parfaite et grossière désinvolture.

Les autres fois, l’audience était reportée à une date ultérieure, qui était précisée. L’avant-dernière fois, ce fut sous le prétexte d’une traduction des procédures italiennes prétendûment réclamée par les avocats de la défense… qui n’étaient pas au courant.

Cette fois-ci : report sine die. C’est-à-dire à n’importe quand, de la semaine prochaine à dans dix-huit ans, au bon (haha) vouloir de Monsieur le Procureur. Des rumeurs disent que Monsieur le Procureur était en voyage à l’étranger et que, bon, bref, ses propres dates ne l’arrangeaient plus. (Et pourquoi ses souffre-douleurs n’en feraient-ils pas autant et ne s’en iraient-ils pas à Torre Molinos la veille de ses audiences ?)

Quoi qu’il en soit et bien qu’il ne paraisse pas se soucier le moins du monde de ce que pensent de ses palinodies les citoyens-contribuables belges qui paient son salaire, nous allons jouer les go-between et le lui dire ici de leur part :

Soit Monsieur le Procureur a des arguments pour étayer son appel du jugement précédemment rendu (et solidement argumenté, lui), et dans ce cas, qu’il les dise, qu’il les mette sur la table sans tant tergiverser ; que le tribunal, que les avocats, que le public puissent se faire une opinion sur leur bien-fondé,

Soit il n’en a pas, et dans ce cas, qu’il dégage.

Livrer ses nationaux à l’étranger sur simple demande ou les persécuter at home pour dieusait quels trente deniers semble être devenu le dernier sport à la mode chez les « élites » belges.

Après Bahar KIMYONGÜR et Ali AARRASS, maintenant quatre autres. Et après ?

Monsieur le Procureur déshonore sa fonction. Et le reste de la magistrature se déshonore en ne le sanctionnant pas, depuis le temps qu’il ridiculise effrontément ce qu’il devrait faire respecter.

Il est infiniment regrettable que le reste de la magistrature soit davantage préoccupée par le maintien de ses petits rituels corporatistes que par celui des lois et des institutions nationales.

Que reste-t-il, dès lors, au public belge en guise de protection contre la colonisation étrangère et l’arbitraire des Kollaborateurs ? RIEN.

Qu’en pensent les avocats de la défense ? Et ont-ils conscience, oui ou non, de participer à un jeu truqué ?

 

 

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*

 

Mis en ligne par Théroigne, le 13.12.2012

 

01/11/2012

Il était une fois un paradis...

 

 

1 - MAGRITTE - Les merveilles de la nature - 1953. jpg.jpg

 

« Il était une fois un paradis…


dont la construction remontait au temps où l'esprit planait sur les eaux. L'eau a fini par s'évaporer. C'est pourquoi les anges ont des ailes, sinon ils auraient des nageoires. »

Dans son Interlude n°2, Aline de Dieguez, avant de continuer sa remontée aux sources de tant de misères actuelles, livre à ceux que l’humour n’a pas déserté, sa version personnelle de la création du monde.

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Le véridique récit de la Genèse

Aline de Dieguez

 

Une terre est alors apparue.

Les plantes et les animaux y prospéraient dans une harmonie qui réjouissait la vue et la logique: petits soleils terrestres, melons mamelus et potirons bien ronds s'arrimaient au sol par de mignonnes vrilles, tandis que les prunes et les cerises se balançaient dans les hauteurs et piquetaient l'azur de taches écarlates. Tous les animaux cohabitaient fraternellement : la souris tirait les moustaches du chat, le loup et l'agneau se désaltéraient côte à côte le long d'une onde claire et l'éléphant soulevait très haut ses grosses pattes afin que les lézards qui paressaient au soleil eussent le temps de se réveiller et de se mettre à l'abri.

 Un jour, l'esprit chagrin et pisse-vinaigre qui administrait le verger décida de mettre de l'ordre dans cette luxuriance brouillonne et bon enfant. Ce coquin tendit un piège à deux bêtas qui baguenaudaient dans la clairière.

Lire la suite…

 

 

*

 

En guise de respiration entre l’interlude et la « pièce de résistance », plus tellement humoristique, nous vous offrons une petite Histoire de Yahvé en BD :

 

http://enutil.canalblog.com/archives/2011/04/25/20975707.html

 

Il semble que le dessinateur ait eu comme une prémonition de la suite.

 

*

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Aline de Dieguez


AUX SOURCES DU CHAOS MONDIAL ACTUEL

 

" La chose la plus difficile au monde est de suivre à la trace n'importe quelle idée jusqu'à sa source. " ( Edward Mandell HOUSE )

 

*

2ème Partie

Aux sources du sionisme

 

XIV – La guerre des dieux


A - L'enjeu du conflit

 S'il est avéré que les hommes marchentsur la terre, il n'est pas moins vrai qu'ils habitentdans la moyenne région de l'air. Est-ce en leur corps, est-ce hors de leur corps, ils ne savent? Dans un espace flottant, ni sur la terre ferme, ni dans l'infini, ils sont persuadés qu'ils cohabitent avec des personnages ni entièrement vaporeux, ni entièrement corporels et qu'ils appellent des dieux. Or, ces personnages aussi mystérieux qu'insaisissables sont les véritables maîtres de leur destin terrestre et, croient-ils, extra, infra et supra terrestre.

Longtemps, bien longtemps avant la célèbre "Guerre des deux roses" que connut l'Angleterre au XVe siècle, la Palestine, puis le monde occidental tout entier furent déchirés par une guerre autrement plus féroce et plus durable que le conflit qui opposa les partisans de deux prétendants au trône de nos voisins Grands Bretons et plus fertile en rebondissements que l'illustre "Guerre des fouaces" qui opposa, nous raconte François Rabelais dans son Gargantua,Picrochole à Grandgousier.

 Quant à la Guerre de cent ans, elle fait figure d'aimable plaisanterie à côté de la conflagration qui embrasa la planète durant deux millénaires. Je veux parler de la fabuleuse « Guerre des deux Célestes »

 

3 - Miniature-Mont-Athos-Jesus-priant-son-Pere.jpg

Jésus priant son Père – Miniature du Mont Athos

 

Lire la suite…

 

Où l’on apprendra que la tant vantée consubstantialité des « trois qui n’en font qu’un » fut surtout une guerre au finish entre un père et un fils, tous deux bien décidés à régner seuls.

 

 

*


Ah, si le « vieux barbu avec sa casserole sur la tête » (Vallès dixit), avait eu le sourire de Giuseppe !

 

Giuseppe - Les ailes du paradis

 


*

 Et dans le monde d’ici-bas, celui des infidèles et des sans-dieu, que se passe-t-il ?

 

Humanisme...

Droits de l'homme...

Droit de grève...

Justice...

Fariboles...

... mais les mineurs de fond sont-ils vraiment des hommes ?

Lu dans les gazettes :

 

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L'histoire se passe en 1948. Oui, je sais, c'est vieux, il y avait encore des mines en activité (se reporter pour info à l'article « Chiens écrasés » de Marcel Aymé dans notre post précédent). Les mineurs du Nord-Pas-de-Calais s'étaient mis en grève. Une grande grève. Pas pour de rire. Et pas sans de fortes raisons.

Le gouvernement de l'époque – du rad-soc Henri Queuille - dont le ministre de l'Intérieur, le Manuel Valls du temps, était le socialiste Jules Moch, décide de quoi ? De tirer dans le tas. Fusils, matraques, trois mille arrestations. Histoire de les mater. (Cela se passe deux ans avant que le socialiste belge Paul-Henri Spaak fasse tourner les canons contre ses propres électeurs et décrète que « la Belgique a besoin de monarchie comme de pain », ce qu'approuve des deux mains le généralissime Franco. Pardon, c'était une parenthèse.)

 Des centaines de grévistes, dont d'authentiques héros de la Résistance, sont condamnés à de la prison ferme « pour entrave à la liberté du travail », alors que le droit de grève est reconnu par une loi, mais bast ! Les Houillères du Nord-Pas-de-Calais s'empressent de les virer. Des gens à casier chez nous ? Ouak beurk, pas de ça Lisette ! Dans les conditions de cet immédiat après-guerre, être licencié de la sorte signifie plus de logement, plus de remboursements médicaux, plus d'école pour les gosses. Que faire ? S'expatrier ou crever la dèche pendant des années... dans une autre région de France, où on peut se joindre aux immigrés sous-payés qui arrivent d'Italie, de Pologne, etc. Et même là : liste noire. Car les « Houillères » ont le bras long.

Les années passent et, un beau jour, la retraite finit quand même par arriver. L'un de ces anciens condamnés – il s'appelle Georges Carbonnier - occupe ses loisirs à mettre à jour ses vieux papiers et une idée lui vient. Avec 17 de ses camarades, ils va voir Tiennot Grumbach, avocat réputé de la cause ouvrière et lui raconte leur calvaire.

Il y avait évidemment prescription (selon que vous serez puissant ou misérable, les prescriptions vous favoriseront tôt ou pas, et on ne vous dit rien des amnisties-demandez-aux-généraux-félons-de-l'OAS). L'avocat réussit à faire révoquer la prescription et réclame réparation à la justice. Motifs : licenciements abusifs et terrorisme d'Etat.

6 - Norbert gilmez - article_1610-LIL03-GILMEZ.jpgLa justice n'est pas pressée. Georges Carbonnier meurt en 2006. C'est un des autres qui doit se présenter à sa place à l'audience enfin fixée, en avril 2011, devant le tribunal de Versailles. Il s'appelle Norbert Gilmez. Il a 91 ans.

Cette cour d'appel déclare officiellement révoquée la prescription et vote aux dix-sept plaignants (c. à d. surtout à leur veuves et descendants puisque presque tous sont morts) quelques clopinettes de dommages et intérêts : 30.000 € chacun.

Un semblant de justice a enfin été rendue.

Euh... c'est compter sans dame Christine Lagarde, l'alors ministre de l'Economie du gouvernement Fillon, qui a sous sa tutelle les Charbonnages de France. Et que fait dame Lagarde ? Elle introduit un pourvoi en cassation contre la cassation..

Survient le changement de gouvernement. Les avocats des mineurs espèrent que la nouvelle majorité abandonnera ces nouvelles honteuses poursuites, au bout de 64 ans. Euh... eh bien, non. Prié de s'expliquer, le ministère de M. Pierre Moscovici n'a pas jugé utile de répondre du tout. Avec les manants, n'est-ce pas plus simple ?

Et ce 13 octobre 2012 :

La Cour de cassation vient d'annuler la condamnation contre les Charbonnages de France pour licenciements abusifs des mineurs grévistes de 1948 et 1952. La prescription levée l'an dernier par la cour d'appel de Versailles s'est ainsi brutalement rabattue sur les ex-mineurs.

Ce qui veut dire que les malheureux vont sans doute devoir rembourser les clopinettes et apprendre une bonne fois pour toutes, par le fait, comment les riches deviennent riches et comment ils le restent.

C'est que, voyez-vous, l'histoire est en train de se répéter dans les Asturies, le Leon, l'Aragon... et que les Prix Nobel de la Paix européens ne se mordent pas entre eux.

Nos excuses pour cette video en anglais – Youtube a supprimé toutes les videos relatives à ces événements en espagnol et en français.


*

Choses sérieuses ou prétendues telles :

 

On vote cette semaine aux U.S.A.

Pour élire ou réélire un grand timonier

 

Un citoyen US appelle ses compatriotes à s’abstenir. Il explique comment et pourquoi :

Voter pour la mort

par Linh Dinh

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4 octobre 2012, "Information Clearing House"

Amérique, tu es devenue une  nation de complices et de défenseurs de la tyrannie et des meurtres de masse. Alors même que tu condamnes les nazis et les gardiens des goulags d’autrefois, tu célèbres tes propres mercenaires et bourreaux et tu minimises, voire glorifies, les crimes indicibles commis par tes fils et tes filles. Tant que tes soldats sont payés et que tes usines d’armement ronronnent, tu ne te soucies pas de savoir qui tu assassines.

Confortablement nichés dans leurs Luna Parks universitaires, tes intellectuels les plus en vue penchent légèrement à gauche ou à droite, mais jamais assez pour mettre en péril ce navire en feu, craignant trop de gâcher les cocktail-parties ou, dieu les en préserve, d’être révoqués de leurs postes. Des antipasti plein la bouche, ils sont experts dans l’art d’esquiver les sujets tels que la pléthore de crimes d'Israël, le 11 septembre 2001, la fausse mort de Ben Laden ou la Réserve Fédérale parasite et, à l’approche d’une nouvelle élection-mascarade, leur enthousiasme va aux candidats qui prônent les guerres illégales et les fraudes bancaires, puisque les unes comme les autres sont à leurs yeux des moindres maux.

Lors des cinq dernières élections, les vainqueurs l’ont emporté avec respectivement 52.9%, 50.7%, 47.9%, 49.2% et 43%  des votes populaires, ce qui dans aucun des cas n’a représenté un mandat écrasant, les finalistes de l’autre parti majoritaire arrivant bien souvent juste sur leurs talons, et depuis 2000, les devançant même par le nombre réel de voix, le système bipartite a confisqué notre vie publique et  nos porte-monnaie. Quant à nos sénateurs, seuls deux d’entre eux ne sont ni démocrates ni républicains. A partir de là, une élection aux Etats-Unis n’est plus qu’un référendum bidon en faveur de ce système profondément corrompu et meurtrier ; et, par le seul fait de voter, vous lui donnez le feu vert pour qu'il continue ses massacres et ses pillages. Tous les quatre ans, on nous amène par le bout du nez à cautionner  une guerre qui n’en finit pas et une corruption qui n'a pas de fond. Si nous nous montrons déçus, nos média abrutissants et laveurs de cerveaux sont là pour faire de nous des clones de ceux qui nous violent.

Le « Bon Vieux Parti » (républicain, NdK) flanque la frousse aux classes moyennes et supérieures en les menaçant : « Si vous ne votez pas pour nous, les Dems vous piqueront votre fric durement gagné pour le refiler à des parasites, des accros au crack et autres ratés de toutes sortes ! », tandis que dans le même temps les démocrates paniquent à leur tour les classes inférieures en les semonçant : « Si vous ne votez pas pour nous, les Reps laisseront pourrir vos culs à couches de retraités sous un pont, vous dormirez sur un bout de carton ! » mais, seigneur, seigneur, seigneur, tout ça est déjà en train de se passer, alors, motus sur les détails.

Il est dans l'ordre qu'au moment où notre bulletin de vote le plus important n'a pratiquement plus de signification,  on nous fourgue une myriade d’incitations à voter pour des tas de choses et de gens insignifiants, qui vont des balourds chantants aux bouffons dansants, en passant par les hypertrophiés aux anabolisants. Les Américains n’ont jamais autant ni aussi souvent voté pour rien.

Chaque parti dépeint l’autre comme le mal absolu, alors que tous deux sont prostitués jusqu'à la glotte à un complexe militaro-bancaire qui n'en finit pas de répandre le malheur et la destruction dans le monde entier, y compris ici. Tout en délocalisant vos emplois, il peut se faire qu'ils vous balancent un téléphone cellulaire gratuit ou vous permettent de vous marier avec un partenaire de votre sexe, mais, sérieusement, le temps n'est-il pas venu d’exiger que notre argent soit dépensé de manière responsable et dans notre intérêt ? Hélas, non : tout ce qu’il nous est pemis de faire, c'est mendier de misérables petites modifications sans portée, au lieu d'exiger et d’obtenir des changements véritables, et nous devons voter, et revoter encore, pour des menteurs et des criminels avérés, et espérer contre toute évidence que, cette fois, ils ne nous empaleront pas. Cela ne vous fait-il rien de sentir tous ces mensonges et ces trahisons vous sodomiser à sec ? Mais, le pire de tout, c'est que c'est vous-mêmes qui avez permis à cette chose de vous arriver, même si ce n'est que symboliquement, en votant comme vous l'avez fait pour l'un des deux partis de la guerre et de la corruption tous azimuts. Tout laisse penser qu'ils vont encore obtenir 99% de vos voix, et l'Amérique aura encore une fois soutenu en masse un programme ouvertement criminel, et le monde en sera une fois de plus atterré.

Avec sa dynamite de bande dessinée, le récent discours de Netanyahu à l'ONU rappelle Powell et son graphique bidon d'avant l’invasion de l’Irak, mais Bush, au moins, avait essayé de convaincre qu'une guerre était nécessaire, alors qu’Obama ne s’est même pas donné cette peine. Ignorant le Congrès et le peuple américain, il a simplement donné l’ordre de bombarder massivement la Lybie, crime qu'il a cyniquement qualifié d’«action militaire cinétique», déchaîné des frappes moindres contre la Somalie, le Yémen et le Pakistan, et envoyé en Syrie des terroristes mercenaires, tout cela sans aucune protestation notable de notre peuple anesthésié ni de notre intelligentsia rampante.

Abrutis par la propagande non-stop menée par nos media aux ordres dans cette maison (de fous) des miroirs, nous ne voyons pas et nous ne nous soucions pas de la manière dont les autres nous perçoivent, car, alors même que des protestations internationales s'élèvent, que nos drapeaux brûlent, que nos soldats sont tués par de prétendus alliés et que, sondage après sondage, nous apparaissons comme une des nations les plus méprisées sur la terre,  nous continuons de croire que nous sommes aimés et admirés de par le monde. Nos politiciens ne sont que trop heureux de flatter ce sentiment de vanité. Romney, «  Nous avons la responsabilité morale de maintenir l’Amérique au rang de la nation la plus forte sur terre, l’espoir de la terre, la cité brillante sur la colline. » Obama, « Ne soyez jamais contre les Etats-Unis. Les Etats-Unis ont été, et seront toujours, la seule nation indispensable aux affaires du monde. » Seuls des enfants peuvent croire en quoi que ce soit d'éternel, mais c’est ainsi que nos papas et nos mamans politiciens nous parlent aujourd’hui.

Ainsi, le monde sera une fois de plus atterré, comme le sera la postérité, à moins que nous ne puissions prouver que nous ne nous tenons pas tous derrière le criminel heureux. Déjà, presque la moitié des Américains ne donnent plus leur voix dans aucune élection, mais nous devons en faire une abstention volontaire, un signe de protestation clair et non pas un acte d’apathie. Le monde doit voir que les Américains ne sont pas tous aussi dérangés et hypnotisés que ceux qui votent avec allégresse pour un criminel après l’autre. Nous valons mieux que ça, alors prouvons-le. Imaginez des milliers d’entre nous dans des lieux publics, déclarant « PAS EN NOTRE NOM ! » Plus tôt nous pourrons divorcer d'avec notre gouvernement voyou, plus tôt nous pourrons nous en débarrasser. A défaut de mieux,  résister à cette farce électorale, c'est nous laver les mains, au moins partiellement, du sang innocent que l'on verse. C’est la seule décision morale.

Linh Dinh est un poète, auteur, traducteur et photographe vietnamo-américain né à Saïgon en 1963 et arrivé aux Etats-Unis en 1975. Il est l’auteur de deux livres de nouvelles, de cinq recueils de poèmes, et d'un roman qui vient juste de sortir, Love Like Hate. Il a traduit des poètes occidentaux en vietnamien et des poètes vietnamiens en anglais. Il témoigne de l'évolution de notre société en déclin par les photos qu’il publie très fréquemment sur son blog State of the Union.

Source : http://www.informationclearinghouse.info/article32649.htm

 

traduction de Kahem

pour Les Grosses Orchades

 

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Analyse confirmée par Thierry Meyssan, toujours aussi lucide et parfaitement informé :

Show électoral aux Etats-Unis

 Au cours des 30 dernières années, aucune élection présidentielle US n’a marqué de changement dans la politique extérieure de Washington. Les décisions importantes ont toujours été prises en dehors de cette échéance. Il est tout à fait évident que le président est le maître d’œuvre d’une politique dont il n’est pas le décideur. L’impérialisme yankee sera t-il plus performant avec le sourire d’Obama ou avec celui de Romney ?

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Et pendant qu’on y est, et parce que le sort des Syriens nous importe au moins autant que celui des citoyens US :

 

Les mauvais perdants de la crise syrienne

En 2010, la France a fait le choix de relancer sa politique coloniale. Cela l’a conduit à changer le régime en Côte d’Ivoire et en Libye, puis à essayer de la faire en Syrie. Mais face à l’échec de cette troisième opération, Paris se trouve emporté par les événements qu’il a provoqués. Après avoir armé et encadré des groupes terroristes en Syrie, la DGSE a frappé au cœur de la capitale libanaise.

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Enfin, pour le cas où d’aucuns n’auraient pas compris en quoi tout ceci nous concerne, rien ne vaut un saut chez Jean-Pierre Dubois qui, sur son blog Le Petit Blanquiste, se fait un plaisir et un devoir de nous le rappeler :

 

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17 octobre 2012

Européocentrisme et impérialisme

Sans réalité géographique, « Occident » est un euphémisme utilisé pour désigner le bloc des pays capitalistes/impérialistes constitué des principales puissances européennes et de certaines de leurs extensions historiques : Etats-Unis, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, etc.

Les peuples de ces pays, qui ne représentent qu'environ 20% de la population mondiale, ont le privilège de bénéficier du niveau de vie moyen le plus élevé de la planète.

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 31 octobre 2012

Etats-Unis : Pseudo-démocratie et vraie idéologie

« Parce que l’armée reste dans les casernes et que la domination n’est pas totale, nous pouvons prétendre vivre en "démocratie" », observait Howard Zinn. [1]

« Son ouverture et sa souplesse rendent une telle société plus séduisante que bien d’autres, mais elles induisent également un type de contrôle bien plus efficace ».

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 Vient de tomber, au moment où nous mettons en ligne :

 

Cercle des volontaires

 Bibi à l’Elysée : Juifs, « faites d’Israël, votre chez vous ». Un affront aux juifs, un affront à la République.

 

IN ACTUALITÉ, FRANCE, TRIBUNE / BY JONATHAN MOADAB / ON 1 NOVEMBRE 2012 AT 11 H 38 MIN /

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Le Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahou, actuellement en visite en France, a exercé ses talents de VRP à l’Elysée pour l’Agence Juive. Il a en effet appelé les citoyens français juifs à partir en Israël pour en faire leur « chez eux ».(Voir la vidéo BFM)

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« Jusques à quand nous les briseras-tu, François Normal, avec tes c…….s impérialistes étiquetées socialotes ? »

 

Questions d’Hugo Chavez au président  de la République (sic) Française…

 


 

« Il est espiègle le roi d’Espagne ! »

et quelques considérations du même sur l’Empire, en réponse à une improbable descendante de Newton, qui réussit le tour de force de faire la gueule pendant  20 minutes sans reprendre haleine.

 


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 Pour prendre date :

 

Tous place Stalingrad à Paris le 2 février 2013, pour le 70ème anniversaire de la bataille !

Le rassemblement national avec représentation internationale aura lieu

SAMEDI 2 FÉVRIER 2013 à 15 h. 00

Place de la bataille de Stalingrad à Paris  

(métro Stalingrad)

avec prises de parole et dépôt de fleurs au monument des héros de Stalingrad.

 

Lire ici…

 

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Combien de temps avant que Volgograd retrouve son véritable nom ? Il est étonnant, vu leurs habitudes, que les bookmakers grands-bretons n’aient pas encore ouvert de paris là-dessus.

 

mis en ligne par Théroigne  le 1er novembre 2012.

 

 

 

 

28/09/2012

Aux sources du chaos mondial actuel - 2 - XIII.

 

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Aline de Dieguez

 

AUX SOURCES DU CHAOS MONDIAL ACTUEL

" La chose la plus difficile au monde est de suivre à la trace n'importe quelle idée jusqu'à sa source. " ( Edward Mandell HOUSE )

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2ème Partie

Aux sources du sionisme

Chapitre XIII

XIII - Et les Kazars entrèrent dans l'histoire … 

1 - Un tremblement de terre géopolitique 


2 - Petit rappel démographique


3 - Pourquoi les Juifs se sont détournés de la Palestine entre le IVe et le XXe siècle 


4 - La Palestine avant le sionisme 


5 - Les vagues migratoires successives à partir de la naissance du mouvement sioniste 


6 - Et les Kazars entrèrent dans l'histoire

7 – Comment le Talmud devint le fil d'Ariane qui conduisit au sionisme. 


 

1- Un tremblement de terre géopolitique

Impossible de ne pas voir que la transplantation en plein cœur d'un monde majoritairement arabo-musulman d'une population hétérogène, aussi bien ethniquement que sociologiquement, demeure le pivot autour duquel tourne l'histoire du monde depuis le milieu du XXe siècle.

Unis par un contenu commun des cervelles remplies à ras bords de mythes et de songes élaborés en des temps lointains durant lesquels chaque ethnie se plaçait sous la protection de sa divinité personnelle, des groupes d'immigrants fanatisés issus des quatre coins de la machine ronde, mais se réclamant néanmoins d'ancêtres communs, et soutenus par des Etats aveugles aux conséquences géopolitiques de leurs décisions, se sont déversés en vagues successives sur un territoire déjà abondamment peuplé.

 

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 Arrivée de juifs européens à d'Haifa. 1950

Un tremblement de terre géopolitique d'une intensité telle en est résulté que les répliques qui affectent la politique internationale n'ont plus cessé depuis lors d'ébranler non seulement tous les Etats du bassin de la Méditerranée, mais la quasi-totalité de la planète. En effet, ces humains-là se déclarent eux-mêmes si profondément différents et si allogènes au reste de l'humanité, qu'ils éprouvent un besoin incoercible de ne vivre qu'entre eux et de chasser du territoire qu'ils ont investi les représentants d'autres variétés d'humains lorsqu'ils sont les plus nombreux - et donc, détiennent le pouvoir. Ils refusent vigoureusement toute forme d'assimilation au groupe chez lequel ils se sont installés lorsqu'ils sont minoritaires, tout en exigeant haut et fort de bénéficier des droits universels des sociétés-hôtes.

Comme l'écrit François Fejtö, écrivain juif hongrois, dans son ouvrage Dieu et son Juif : " Ce n'est pas l'antisémitisme qui a crée le Juif. A l'origine se trouve le Juif, peuple élu, prototype des nations nationalistes, expansives, xénophobes, intransigeantes et dont l'orgueil, l'auto-affirmation fervente ont survécu aux désastres de l'Etat et se prolongent à travers les siècles d'exil jusqu'à la résurgence sioniste et à la naissance d'Israël ." (Ed. Grasset 1960, p.32)

Voir - 12 - Petite généalogie du ghetto appelé Israël, 29 juin2012

2 - Petit rappel démographique

La destruction de Jérusalem et de son temple par les légions romaines avait porté un coup très rude à la présence juive en Palestine. La Judée était dépeuplée, mais d'innombrables et prospères communautés juives étaient présentes dans toutes les provinces et les villes de l'empire romain et notamment en son centre, à Rome.

Durant deux millénaires, les communautés juives ont donc prospéré dans la quasi totalité des pays d'Europe occidentale et orientale, ainsi que dans toutes les provinces du bassin de la Méditerranée… sauf en Palestine. La Palestine est le seul endroit de la terre que les Juifs boudaient. Jacques Attali nous en donnera la raison ci-dessous.

En effet, depuis le règne de l'empereur Julien, dit l'Apostat, les Juifs s'étaient détournés de la Palestine et n'avaient plus le moindre désir d'y retourner Cependant, une faible présence juive s'était malgré tout maintenue dans la région depuis l'antiquité. Il semble que cette catégorie, connue sous le nom de Yichouf ancien, ne représente pratiquement plus personne aujourd'hui. Les démographes de l'actuel Etat hébreu n'ont trouvé qu'une seule famille, les Zinati de Pek'in, qui aurait résidé en Palestine sans aucune interruption depuis l'antiquité.

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 Juifs de l'ancien Yichouv, Jérusalem 1895

Jusqu'en 1880, c'est-à-dire jusqu'à la naissance du sionisme, seuls de petits groupes d'étude et de prières, en général sépharades et plutôt pauvres, étaient installés à Tibériade, Safed, Jérusalem ou Hébron et vivaient misérablement de l'argent envoyé par les Juifs de l'étranger. A partir du XVe siècle, quelques communautés exclusivement religieuses composées de groupes expulsés d'Espagne et du Portugal s'étaient également installées en Palestine. Hier comme aujourd'hui, leurs prières étaient censées hâter la venue du Messie et le soutien financier des juifs de la dispersion représentait une sorte de placement commercial dans un système d'échange gagnant gagnant, puisqu'il était prévu que le Messie attendu rétablirait le mythique royaume de David, d'autant plus glorieux qu'il n'a jamais existé que dans l'imagination des rédacteurs de la fiction sacrée. Ce royaume à venir comblerait les Juifs de toutes les richesses de la planète.

3 - Pourquoi les Juifs se sont détournés de la Palestine entre le IVe et le XXe siècle

A partir du moment où, vers le VIIIe siècle, les Etats européens se sont constitués peu à peu en nations régies par la doctrine et la morale du catholicisme, les communautés juives, qui niaient la divinité du Christ, se sont trouvées en situation d'ennemis de l'ordre social né du triomphe de l'Eglise catholique, c'est-à-dire universelle, face à l'étroit particularisme juif.

Mais cette situation de paria social n'avait pas que des inconvénients. Elle produisit des conséquences particulièrement favorables aux Juifs sur le plan économique. En effet, comme je l'ai développé dans le texte précédent les communautés dispersées, unies par un lien religieux puissant et des règles sociales impérieuses, demeuraient en rapports constants avec un centre, dirigé par un exilarque (gaon) dont le lieu de résidence a varié selon l'influence exercée par ce groupe humain dans telle ou telle région du monde. Après avoir été localisé en Babylonie jusqu'à la naissance de l'islam, le centre s'est déplacé en Espagne, puis en Pologne.

Voir - 12 - Petite généalogie du ghetto appelé Israël, 29 juin2012

Devenus d'habiles commerçants dans la prospère province mésopotamienne, leur dispersion, l'unité politique et la solidarité tribale des fidèles du dieu Jahvé leur offrirent d'excellentes opportunités d'échanges de marchandises de pays à pays. Ce commerce d'importation et d'exportation particulièrement lucratif, permit à quelques-uns d'amasser les richesses considérables. L'historien juif de l'antisémitisme, Bernard Lazare, nous apprend qu'avant de diversifier leurs activités, les commerçants jufs s'étaient spécialisés dans la vente d'esclaves . (L'Antisémitisme, chapitre V)

Petit à petit, ils se sont spécialisés dans l'usure et le commerce de l'or. Mais ils n'étaient ni les seuls, ni les premiers à êtres fascinés par le métal jaune. On connaît la cupidité des feneratores romains auxquels la loi des Douze Tables reconnaissait le droit de couper des morceaux de chair sur le corps vivant de l'emprunteur insolvable; les Lombards ont été des usuriers voraces, l'or fut la principale motivation de la conquête de l'Amérique, l'avidité des colons hollandais ou anglais est célèbre et les alchimistes s'épuisaient à essayer de fabriquer de l'or à partir de métaux grossiers. Au Moyen Age, l'or était devenu une véritable divinité...et il l'est resté.

Interdisant le prêt à intérêt et à plus forte raison l'usure, l'Eglise a empêché la formation d'un capitalisme chrétien. Ses interdits n'avaient évidemment aucune prise sur les Juifs qui faisaient commerce de l'argent et qui occupèrent tout naturellement la place laissée vacante par les riches bourgeois chrétiens. Ils se sont donc rendus utiles au développement du commerce et odieux par les abus que leur pouvoir a engendré. C'est ainsi qu'ils sont devenus progressivement les banquiers du monde.

  

 

"Peuple énergique, vivace, d'un orgueil infini, se considérant comme supérieur aux autres nations, le peuple juif voulut être une puissance. Il avait instinctivement le goût de la domination puisque,

Pour exercer cette sorte d'autorité, les Juifs n'eurent pas le choix des moyens. L'or leur donna un pouvoir que toutes les lois politiques et religieuses leur refusaient, et c'était le seul qu'ils pouvaient espérer. Détenteurs de l'or, ils devenaient les maîtres de leurs maîtres, ils les dominaient." (Bernard Lazare, L'antisémitisme)

 

 

Aux causes sociologiques et politico-économiques mises en avant par l'historien du judaïsme, Jacques Attali ajoute des arguments théologico-étymologiques. Dans son ouvrage Les Juifs, le monde et l'argent il analyse longuement les relations étroites entre la religion juive et le commerce à partir de l'étymologie du vocabulaire: "L'argent substitut du sang : on asperge l'autel avec le sang de l'animal sacrifié, acheté avec l'argent de celui qui offre le sacrifice. (p.40, souligné par l'auteur) (…) Le peuple juif fait de la monnaie l'instrument unique et universel d'échange, tout comme il fait de son Dieu l'instrument unique et universel de la transcendance." (p.41) 

Et notre Attali ajoute, en point d'orgue: "La valeur en argent de chaque chose est indissociable de sa valeur éthique." (p.42 )

Il en résulte qu'un lingot d'or est infiniment plus éthique qu'une miche de pain et que la famille Rothschild, M. Jacob Schiff , M. John Pierpont Morgan , M. Paul Warburg et tous leurs acolytes et complices qui sont parvenus à mettre la main sur le système financier américain au moyen de grandes et de petites manœuvres politiciennes et grâce à l'invention de leur monnaie privée - le dollar - sont les humains les plus moraux de la création. La fin justifie les moyens et seule la victoire est jolie. Toujours est-il qu'aujourd'hui, ils sont en mesure de manifester aux yeux du monde entier tout l'éclat de leur éthique en tapissant de lingots d'or les murs de leurs banques et de leurs logis.

La naissance de la Fed (Federal Reserve System) a permis non seulement un enrichissement exponentiel des heureux propriétaires de ces institutions bancaires privées, mais elle témoignait de la sollicitude de Jahvé envers des spécimens particulièrement "pieux" de son "peuple élu". Et M. Attali explique complaisamment que "pour un juif, la pauvreté est intolérable." C'est pourquoi, "pour les Juifs, tirer un intérêt de l'argent n'est pas immoral. (…) L'argent est, comme le bétail, une richesse fertile, et le temps est un espace à valoriser. Pour les chrétiens, au contraire, comme pour Aristote et les Grecs, l'argent - comme le temps - ne produit pas en soi-même de richesse, il est stérile ; aussi faire commerce de l'argent est-il un péché mortel." (p. 120)

Il se délecte à énumérer quelques belles réussites financières: "Peu de gens savent que l'agence Havas et l'agence Reuter au XIXe siècle sont des créations juives, au même titre que la Deutsche Bank, Paribas ou les principales banques d'affaires américaines. Et encore bien d'autres destins fascinants en France, en Allemagne ou en Russie."

Le même ancien conseiller spécial du Président François Mitterrand fournit la clé qui ouvre la porte de ces cavernes d'Ali Baba: "Comme les prêts sont de très courte durée - un an ou moins - et à des taux d'intérêt très élevés, de l'ordre de 50 à 80%, l'accumulation va très vite".

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Le Président François Mitterrand et Jacques Attali

Mais le monde est très méchant, alors notre hagiographe de la haute finance est brusquement saisi par un doute. Il s'inquiète de voir "les Juifs prendre le risque d'être haïs pour services rendus", alors que "les Juifs ont toutes les raisons d'être fiers de cette partie de leur histoire". [1]

D'ailleurs dans la section de son ouvrage consacrée au commerce, notre faux naïf et ancien directeur de la BERD (Banque européenne pour la reconstruction et le développement) à la tête de laquelle il a été remercié en raison d'un train de vie pharaonique, ajoute une forte sentence, qui aurait enchanté Alice en son pays des merveilles: "Le commerce n'est pas le résultat d'un calcul de bénéfice, mais la juxtaposition de deux dons équivalents, la simultanéité de deux actes généreux, unilatéraux, où chacun des deux protagonistes est en situation d'égalité."(p.42) (Cette fois, c'est moi qui souligne)

Le marché simoniaque se poursuit de nos jours puisqu'une forte minorité de 20% de juifs ultra orthodoxes passent leur vie à étudier le Talmud et à prier afin d'accélérer l'arrivée d'un Messie pourvoyeur de munificences, tout en étant entretenus par de riches membres de la communauté, notamment américaine, qui ont, comme il se doit et conformément aux principes énoncés par le théoricien du judaïsme financier cité ci-dessus, acquis leur fortune grâce à la "générosité" dont ils font preuve à l'égard de l'humanité dans l'activité bancaire à laquelle ils s'adonnent si brillamment et espèrent un "retour sur investissement" à la hauteur de leur éthique.

Et voilà pourquoi il y eut si peu de candidats durant deux mille ans pour peupler, entretenir et cultiver à la sueur de leur front la terre "promise" par le Dieu Jahvé à son "peuple" bien-aimé, lequel a snobé son cadeau pendant près de deux millénaires, avant de se raviser à la fin du XIXe siècle. Il s'est alors engouffré dans le grand mouvement de colonisation des Etats européens en direction de l'Afrique et de l'Asie.

4 - La Palestine avant le sionisme

Lorsque les populations autochtones de Galiléens honnis, de Cananéens détestés, de Samaritains méprisés et d'autres sous-hommes, tous qualifiés péjorativement d' "arabes", eurent, durant deux mille ans d'un labeur acharné, transformé une Palestine plutôt aride en un jardin florissant et en une serre prospère, le mouvement sioniste des marches de l'Asie s'est souvenu de sa "terre promise".

Il a refusé avec horreur d'aller défricher l'Ouganda ou la Patagonie, comme certains naïfs le lui proposaient. La Thora d'une main et le Talmud de l'autre, il s'est rué sur le lopin qu'il avait sporadiquement et partiellement habité deux millénaires auparavant. Réitérant le vol accompli lors de sa première installation dans une région déjà hautement peuplée et civilisée, il a fait main basse pour la seconde fois sur les propriétés et les richesses des "indigènes" et s'est auto-justifié de ses rapines en brandissant les écrits rédigés in illo tempore par des notables religieux en Babylonie.

 

 

"Lorsque Yahvé ton Dieu t'aura conduit au pays qu'il a juré à tes pères, Abraham, Isaac et Jacob, de te donner, aux villes grandes et prospères que tu n'as pas bâties, aux maisons pleines de toutes sortes de biens, maisons que tu n'as pas remplies, aux puits que tu n'as pas creusés, aux vignes et aux oliviers que tu n'as pas plantés. Dt 6:11

"Lorsque Jahvé, ton dieu, t'aura amené dans le pays où tu vas entrer pour en prendre possession et qu'il aura délogé devant toi de nombreuses nations (…) alors, Jahvé ton dieu les aura livrées à ta merci et que tu les livreras à l'anathème (à la destruction) . Tu ne concluras pas d'alliance avec elles, tu n'en auras point pitié ! " (Dt 7:1-2)

"Des villes de ces peuples que Jahvé, ton Dieu, te donne en héritage, tu ne laisseras rien vivre de ce qui a souffle de vie. Détruisez-les jusqu'au dernier… comme Jahvé, ton Dieu, vous l'a ordonné. " (Dt 20.16)

 

 

Voir : VI - Le messianisme biblique à l'assaut de la Palestine 

Les images sont souvent plus plus parlantes qu'un long discours. Quelques documents particulièrement représentatifs datant du temps de la Palestine heureuse suffisent à anéantir l'affirmation cynique des sionistes qui prétendaient que la Palestine était une "terre sans peuple" - donc vide depuis deux mille ans - qui attendait un "peuple sans terre" , lequel aurait réfléchi durant deux mille ans avant de se mettre en route. Ces clichés d'un temps paisible et heureux crèveront le coeur de tous ceux qui sont aujourd'hui sensibles à l'irréparable injustice dont le peuple palestinien est la victime innocente.

 

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Brodeuses palestiniennes, Ramallah 1940 (à gauche) 1920 (à droite)

 

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Classe de fillettes, Palestine, Ramallah, 1890

 

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Classe de fillettes, Palestine, XXIe siècle

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Port de Jaffa, 1914

Tous ces clichés viennent du site incontournable http://www.palestineremembered.com/MissionStatement.htm qui, dans sections "images" en présente des centaines.

5 - Les vagues migratoires successives à partir de la naissance du mouvement sioniste

L'immigration de masse n'a vraiment commencé qu'à partir de 1880 avec la première colonie fondée par les Amants de Sion. Cette fois, il s'agissait de juifs originaires d'Europe de l'Est en majorité, ainsi que de quelques groupes de juifs askhenazes allemands.

En 1885, le nombre de résidents auto-déclarés "juifs" en Palestine était de 24 000.

En 1914 leur nombre se montait à 85 000 personnes sur une population totale de 725 000 habitants: soit 12 % de l'ensemble.

Dès l'origine, l'expropriation des Palestiniens s'est installée quasi naturellement. En effet, de riches banquiers comme les barons Edmond de Rothschild et Maurice de Hirsch ont ouvert largement les vannes financières afin d'acheter des terres à n'importe que prix.

 

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Baron Edmond de Rothschild

 

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Baron Maurice de Hirsch

La "Jewish Colonization Association" fondée dès 1891 est à l'origine des premières colonies juives agricoles et son activité ne fera que croître au fil du temps.

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 FONDS NATIONAL

Il faut reconnaître que les "arabes" de Palestine et des Etats environnants ont manifesté un aveuglement et une passivité révélateurs de ce total manque de sens politique dont continuent de faire preuve tous les dirigeants de la région, notamment ceux de la mal nommée "Autorité palestinienne" qui, de l'Arafat signataire des calamiteux "Accords d'Oslo" à Mahmoud Abbas, l'actuel complaisant collaborateur du Jüdenrat de Cisjordanie, ont conduit les Palestiniens dans un gouffre dont ils auront le plus grand mal à sortir - s'ils en sortent un jour.Les actuels dirigeants du Hamas à Gaza semblent tentés à leur tour par les délices à courte vue de la collaboration. Les héros sont fatigués. [2] Les dirigeants palestiniens pelotonnés sous l'aile de l'occupant seraient bien inspirés de méditer sur le sort de Chaim Rumkowski, le "Président" du ghetto de Lodz, dont Primo Levi raconte l'histoire édifiante dans son ouvrage Les naufragés et les rescapés.

Voir :8 - La zone grise. Israël et la Palestine sous le regard de Primo Levi et de Kafka, 4 juin 2007.

En effet, le sionisme n'a rencontré pratiquement aucune résistance de la part des Palestiniens ni même de l'ensemble des Arabes de la région. Comme l'écrit le chercheur égyptien, Mounir Mahmoud, spécialiste de la presse sioniste au sein du Centre d'études politiques et stratégiques : "Les décisions émotionnelles irréfléchies des Arabes ont contribué à la réussite des projets sionistes en Palestine pendant près de cinquante années, avant même la création de l'entité sioniste, avec le prétendu "Yichouv " qui signifie l'implantation juive en Palestine."

Cette passivité des Palestiniens s'explique par une totale absence de racisme anti-juif. Les Palestiniens n'avaient pas compris qu'ils n'avaient plus en face d'eux des juifs, c'est-à-dire des hommes normaux qui honoraient simplement leur dieu d'une autre manière qu'eux-mêmes et avec lesquels ils avaient cohabité tranquillement jusqu'alors, mais une autre catégorie humaine, composée de colons fanatiques et impérialistes pour lesquels tout "arabe" palestinien était un ennemi à chasser ou à tuer.

C'est pourquoi notre anthropologue égyptien précise que "les Juifs qui vivaient dans les pays musulmans jouissaient d'une vie tranquille et stable, avec une liberté religieuse totale sans persécutions, et étaient investis dans les sociétés islamiques tolérantes pendant des centaines d'années jusqu'à l'époque moderne."[3]

Cette naïveté des Palestiniens trouve son expression dans la Charte de l'OLP (Organisation de Libération de la Palestine) qui, dans son article 6, prévoie candidement que "les Juifs qui demeuraient en Palestine jusqu'au début de l'invasion sioniste, seront considérés comme Palestiniens".

Les Palestiniens ont été bien mal récompensés de leur générosité. Les sionistes qui ont eu connaissance de cet article ont dû être secoués d'un rire à se décrocher la mâchoire devant une telle ignorance de leur psychologie, de leur projet secret et de leur mentalité messianique de colons.

6 - Et les Kazars entrèrent dans l'histoire

Jahvé s'était installé dans l'exil durant dix-sept siècles et le Dieu local d'une écharpe de terre du bassin oriental de la Méditerranée était devenu une divinité itinérante qui avait pérégriné durant deux millénaires dans le monde entier au gré des déplacements de ses fidèles.

Or, ses fidèles avaient la bougeotte. Tout en le refusant et en le combattant de toutes ses forces, Jahvé avait collé aux talons du Dieu Jésus. Malgré l'inimitié réciproque que les partisans des deux divinités se manifestaient, ses fidèles s'étaient immédiatement installés dans les régions progressivement converties au nouveau Dieu trinitaire. C'est ainsi qu'à la fin du premier millénaire, et alors que le Dieu Jésus régnait en maître sur toute l'Europe occidentale - Jahvé ne l'avait précédé qu'en Espagne - ses fidèles s'étaient attachés aux pas des chrétiens et on les trouvait en France, en Allemagne et jusqu'en Europe centrale, notamment en Bohême et en Pologne.

C'est là que s'était produit l'évènement extraordinaire qui permit au judaïsme de gonfler brusquement sa population, et donc de survivre jusqu'à nos jours en tant que groupe humain spécifique .

En effet, loin de s'épuiser au fur et à mesure qu'il s'éloignait de son camp de base judéen et qu'il expédiait tous azimuts des petits groupes d'éclaireurs, Jahvé avait offert à ses fidèles éberlués la surprise et le cadeau sans prix de découvrir que dans les plaines orientales de l'Europe et jusqu'aux confins de l'Asie vivait une immense population de co-religionnaires dont personne ni en Orient, ni en Occident n'avait entendu parler.

12 - kazaria.jpg

 L'empire Kazar au moment de sa conversion à la religion du Dieu Jahvé

C'est ainsi que les Kazars judaïsés étaient entrés dans l'histoire. Ils entrèrent dans l'histoire locale par la force des choses, puisqu'ils étaient là. Mais ils ne sont jamais entrés dans la narration officielle car leur existence même contredit le mythe sur lequel se fondent les revendications des colons installés en Palestine. C'est pourquoi la narration mythologique qui tient lieu d'histoire dans l'Etat né en 1947 continue de refuser officiellement leur existence et une filiation dont leurs descendants semblent avoir honte.

7 - Comment le Talmud devint le fil d'Ariane qui conduisit au sionisme

La simple présentation du tableau d'une biographie succincte de tous les Premiers Ministres qui se sont succédés depuis qu'un vote de l'Assemblée générale de l'ONU en date du le 27 novembre 1947 a crucifié les Palestiniens, permet de comprendre au premier coup d'œil pourquoi je dirigerao mes pas en direction des marches de l'Asie plutôt que vers les rives qui auraient semblé plus accueillantes et plus logiques des bords de la Méditerranée, ou vers les paysages verdoyants et cléments de notre Europe occidentale qui ont connu, elles aussi, d'importantes et puissantes implantations juives au cours des siècles.

On sait, en effet, que toutes les grandes vagues migratoires se sont toujours déroulées d'est en ouest. La mythologie judaïque ne s'y est pas trompée, puisque les communautés de nos régions se proclament les descendantes légitimes d'ancêtres "chassés" de la province de Judée par les armées victorieuses de Vespasien et de Titus lors de la deuxième Guerre des Juifs en l'an 70 et qui auraient été "contraints" de se réfugier en direction de l'Occident.

Il est vrai que des groupes ont suivi les conquêtes chrétiennes et musulmanes en direction de l'Ouest européen et méditerranéen, comme je l'ai montré ci-dessus. Mais il s'agit d'une minorité par rapport à l'immense population juive qui résidait déjà en Europe de l'Est et avec laquelle les petits groupes venus de l'ouest ont établi une jonction. Aucun des premiers ministres qui ont dirigé l'Etat créé en 1947 en terre palestiniennene peut exciper de racines méditerranéennes ou occidentales susceptibles de donner une apparence de crédit à cette prétention. Tous, sans exception aucune, sont issus des régions talmudiques de l'Orient européen ou des marches de l'Asie. Il en est de même pour l'immense majorité des immigrants venus s'y installer. Ce fait n'est évidemment pas le fruit du hasard.

Il est hautement significatif et presque comique de voir à quel point cette réalité historique est occultée, quand elle n'est pas farouchement niée par les autorités officielles de l'actuel Etat d'Israël, qui, depuis David Grün, alias Ben Gourion, s'échinent à refuser la vérité historique et à imposer une narration mythologico-théologique de leur passé et de leur présent.

Voir : 20 - David Grün, alias Ben Gourion, et la naissance de l'"Etat juif", 22 mars 2011

 

 

1 - David Ben Gourion (né David Grün) 16 octobre 1886-1er décembre 1973est né à Plonsk en Polognedans une famille sioniste . Son père, professeur d'hébreu, était un membre des Amants de Sion. Il émigre en Palestine britannique en 1906.

2 - Moshé Sharett (né Moshé Shertok), 15 octobre 1894 - 7 juillet 1965) est né à Kherson, dans l'Empire russe, aujourd'hui en Ukraine. Il émigra en Palestine britannique en 1908.

3 - Levi Eshkol( 25 octobre 1895 - 26 février 1969) est né dans un village à proximité de la ville de Kiev , dans l'empire russe, aujourd'hui Ukraine. Il émigre en Palestine ottomane en 1914.

4 - Ygal Allon(né Ygal Païcovitch) 10 octobre 1918- 29 février 1980, est né Kfar Tabor, au pied du Mont Tavor dans l'est de la Basse Galilée d'une famille originaire de Roumaniequi émigre en Palestine en 1901.

5 - Golda Meir ( Golda Meirson, née Golda Mabovitz), 3 mai 1898 -8 décembre 1978, est née à Kiev , au cœur de l'empire russe, aujourd'hui capitale de l'Ukraine. Sa famille émigre aux Etats-Unis en 1903, le couple Meirson arrive en Palestine en 1921.

6 - Yitzhak Rabin(Yitzhak Rubitzov) , 1er mars 1922 - assassiné à Tel Aviv par un colon juif extrémiste le 4 novembre 1995 est né à Jérusalem. Ses parents, Nehemiah et Rosa Rubitzov originaires d'Ukraineémigrèrent d'abord vers les Etats-Unis

7 - Menahem Volfovitz Begin(Mieczyslaw Biegun) , 16 août 1913 -9 mars 1992 . Il est né à Brest-Litovsk, alors ville polonaise à majorité juive, aujourd'hui Biélorussie.Il n'arrive en Palestine qu'en 1942.

8 - Yitzhak Shamir(Yitzhak Jazernicki), 15 octobre 1915( 30 juin 2012, est né à Ruzhany, en Pologne, actuelle Biélorussie. Il émigre en Palestine en 1935.

9 - Shimon Peres(Szymon Perski ) Il est né le 2 août 1923 à Wisniew, Pologne, actuellement Biélorussie. Il émigre en Palestine en 1934.

10 - Benyamin Netanyahou, (nom réel du père: Benzion Mileikowsky) né le 21 octobre 1949 à Tel Aviv, petit-fils d'un rabbin émigré de Lituanieen Palestine en 1920

11 - Ehud Barak (Ehud Brog) , né le 12 février 1942 au kibboutz Mishmar Hasharon, fils d'Israel Brog et d'Esther Godin, immigrés respectivement de Lituanie et de Pologne.

12 - Ariel Sharon (Ariel Scheinermann), né le 26 février 1928 à Kfar Malal en Palestine . Son père Shmouel Scheinerman est originaire de Brest-Litovsk alors en Pologne,actuellement Biélorussie. Sa mère Véra est un médecin originaire de Mohilev en Biélorussie.

13 - Ehud Olmert , né le 30 septembre 1945 à Binyamina en Palestine. Son père Mordechaï - né à Buguruslan en Russie, émigre en Chine en 1919, à Harbin, et arrive en Palestine en 1933

14 - Netanyahou (voir n° 10)

 


Pour comprendre qui sont réellement ces dirigeants originaires de l'Est et imbibés jusqu'à la moelle de messianisme sioniste, il est précieux de jeter un regard sur les circonstances historiques qui ont conduit les communautés juives d'Europe occidentale d'abord, puis orientale, au fil des déplacements et des conversions, à ériger le Talmud
en rempart mental infranchissable derrière lequel elles se sont enfermées à double tour.
 

Le triomphe du talmudisme notamment dans les communautés juives de l'Europe de l'Est largement composées de descendants de Kazars ignorants et frustes, constituait, pour les rabbins et autres notables du judaïsme, une manière d'unifier les esprits, de sauvegarder et de bétonner une identité nationale autonome face à un christianisme qui régnait alors en maître dans l'Europe occidentale tout entière et qui modelait les sociétés des différents Etats. Dans un environnement social et politique chrétiens, les Juifs représentaient un groupe allogène, qui refusait catégoriquement de s'assimiler. Comment l'auraient-ils pu sans renier leur religion?

Mais les conséquences de cet isolement social étaient prévisibles. Les sociétés humaines, tout comme les sociétés animales, sont spontanément hostiles aux intrus et s'emploient à les rejeter avec plus ou moins de brutalité, en fonction du tempérament national et du degré de civilité des autorités politiques, si bien que des persécutions, parfois très violentes, ne manquèrent pas de se produire au fil des siècles dans de nombreux pays. Dans les sociétés intolérantes, comme le furent longtemps les Etats chrétiens, les motifs religieux officiellement brandis cachaient fréquemment, en réalité, des causes financières et économiques. Leurs victimes en voulaient aux prêteurs abusifs ou à aux usuriers, mais une fois déchaînée, la violence populaire ne faisait pas de quartier et s'en prenait également à la foule des besogneux innocents pour la simple raison qu'ils participaient à cette communauté et qu'ils étaient là.

A une situation politique et sociale qui leur fut très défavorable durant les siècles régis par un christianisme triomphant, donc arrogant, qui les tolérait du bout des lèvres, les notables des communautés juives répondirent par le renforcement de l'auto-exclusion, laquelle renforça à son tour l'animosité des sociétés-hôtes. La spirale était enclenchée car toutes les sociétés modelées par la religion aspirent à l'unité des cerveaux.

D'ailleurs l'actuel Etat créé en 1947 en Palestine en est un exemple particulièrement éloquent. Les moyens d'information du monde contemporain et la diffusion des images ne lui permettent plus de se comporter avec la brutalité qui fut celle des sociétés plus anciennes à l'égard des populations autochtones, bien que l'indulgence dont il a été l'objet durant des décennies lui a permis de procéder à des centaines de milliers d'expulsions - la nakba - de raser des milliers de villages, de tuer des milliers d'habitants, d'en emprisonner des centaines de milliers et d'ignorer superbement les recommandations et même les condamnations du Conseil de Sécurité de l'ONU qu'il considère comme des chiffons de papier.

Voir : 7 - Ils ont crucifié Marianne... Les nouveaux exploits de Tartuffe en Palestine, Pâques 2007.

A partir du XIIe siècle environ, le nouveau parti de zélotes bigots, bornés et ignorants, ennemi des sciences profanes qui avaient rayonné du temps de l'Espagne arabe avec Maïmonide et Ibn Gabriol, et qui n'avaient que le Talmud pour tout horizon intellectuel, posa un lourd couvercle sur les cervelles et les enferma avec une férocité incroyable dans l'espace ratatiné de ses ratiocinations.

 

 "Les Juifs (...) persécutèrent leurs coreligionnaires plus âprement, plus durement qu'on ne les avait jamais persécutés. Ceux qu'ils accusaient d'indifférence étaient voués aux pires supplices; les blasphémateurs avaient la langue coupée ; les femmes juives qui avaient des relations avec des chrétiens étaient condamnées à être défigurées : on leur faisait l'ablation du nez. " (Bernard Lazare, L'Antisémitisme)

 

 

Les conséquences intellectuelles, psychologiques et morales de l'enfermement tyrannique des esprits dans le coral du Talmud furent désastreuses pour le monde et pour fidèles de Jahvé. En effet, le Talmud est censé avoir tout prévu et tout décrit. Toute recherche intellectuelle ou scientifique se trouvait ipso facto non seulement délégitimée, mais violemment combattue. Comme seuls les actes extérieurs comptaient, il suffisait de suivre sans états d'âme et à la lettre les règles prescrites. La dictature des talmudistes réussit, certes, à maintenir par la terreur, l'unité du troupeau, mais elle le sépara irrémédiablement de son environnement et développa dans la population un esprit ritualiste, positiviste et pinailleur, ennemi de tout ce qui n'est pas juif, tourné vers les satisfactions matérielles et donc vers la recherche frénétique de la richesse.

On imagine l'effet des ratiocinations de certains des rabbins dont le Talmud a pieusement recueilli les élucubrations sexuelles, immorales et choquantes sur des cervelles uniquement gavées de cette nourriture-là.

Voir dans 12 - Petite généalogie du ghetto appelé Israël, 29 juin2012 , le tableau d'un petit florilège de grossières absurdités .

Une des des victimes les plus célèbres de l'obscurantisme et de la tyrannie des talmudistes hollandais fut le philosophe Baruch Spinoza qui s'était permis de penser par lui-même.

En effet, le 27 juillet 1656, le philosophe fut ostracisé et frappé de l'infamie et de la malédiction du herem, autrement dit, d'une mort sociale et religieuse. Un fanatique juif issu des fidèles de la grande synagogue d'Amsterdam, située sur le quai du Houtgrach, a même tenté de l'assassiner. Blessé, heureusement superficiellement, il a conservé durant de longues années son manteau troué par le poignard afin de garder sous les yeux les preuves des méfaits de tous les fanatismes, y compris et surtout de celui de ses co-religionnaires.

En 1948 David Grün, alias Ben Gourion a tenté de faire lever ce "herem", qui maudit le philosophe, y compris post mortem, mais les rabbins de l'Israel actuel s'y opposèrent. Le philosophe Baruch Spinoza demeure donc, aujourd'hui encore, frappé de pestifération par les rabbins juifs contemporains

Voir : -5 - La théocratie ethnique dans le chaudron de l'histoire, 3 janvier 2011

 

 

Le terme " herem " signifie beaucoup plus qu'une exclusion de la communauté, équivalente à une excommunion dans le christianisme. Il induit la "destruction", l'"anéantissement" du renégat, au point que le philosophe a été réellement frappé d'un coup de poignard.

" Les messieurs du Mahamad vous font savoir qu'ayant eu connaissance depuis quelques temps des mauvaises opinions et de la conduite de Baruch de Spinoza, ils s'efforcèrent par différents moyens et promesses de le détourner de sa mauvaise voie. Ne pouvant porter remède à cela, recevant par contre chaque jour de plus amples informations sur les horribles hérésies qu'il pratiquait et enseignait et sur les actes monstrueux qu'il commettait et ayant de cela de nombreux témoins dignes de foi qui déposèrent et témoignèrent surtout en présence dudit Spinoza qui a été reconnu coupable ; tout cela ayant été examiné en présence de messieurs les Rabbins, les messieurs du Mahamad décidèrent avec l'accord des rabbins que ledit Spinoza serait exclu et retranché de la Nation d'Israël à la suite du herem que nous prononçons maintenant en ces termes:

A l'aide du jugement des saints et des anges, nous excluons, chassons, maudissons et exécrons Baruch de Spinoza avec le consentement de toute la sainte communauté d'Israël en présence de nos saints livres et des 613 commandements qui y sont enfermés.

Nous formulons ce herem comme Josué le formula à l'encontre de Jéricho. Nous le maudissons comme Elie maudit les enfants et avec toutes les malédictions que l'on trouve dans la Torah.

Qu'il soit maudit le jour, qu'il soit maudit la nuit, qu'il soit maudit pendant son sommeil et pendant qu'il veille. Qu'il soit maudit à son entrée et qu'il soit maudit à sa sortie.

Que les fièvres et les purulences les plus malignes infestent son corps. Que son âme soit saisie de la plus vive angoisse au moment où elle quittera son corps, et qu'elle soit égarée dans les ténèbres et le néant.

Que Dieu lui ferme à jamais l'entrée de Sa maison. Veuille l'Eternel ne jamais lui pardonner. Veuille l'Eternel allumer contre cet homme toute Sa colère et déverser sur lui tous les maux mentionnés dans le livre de la Torah.

Que son NOM soit effacé dans ce monde et à tout jamais et qu'il plaise à Dieu de le séparer pour sa ruine de toutes les tribus d'Israël en l'affligeant de toutes les malédictions que contient la Torah.

Et vous qui restez attachés à l'Eternel , votre Dieu, qu'Il vous conserve en vie.

Ce texte a été affiché dans tous les lieux d'Amsterdam où vivaient des juifs et envoyé dans les principales villes d'Europe où il y avait d'importantes communautés juives.

 

 

L'afflux de centaines de milliers de fidèles nés d'une conversion de masse de la population d'un gigantesque territoire de l'Est européen et des marches de l'Asie, dont les ancêtres n'avaient évidemment jamais mis les pieds au Moyen-Orient et qui vivaient sous la poigne de fer de rabbins talmudistes métamorphosa définitivement le judaïsme. Et c'est ce talmudisme-là qui finit par donner naissance au sionisme contemporain.

J'aborderai plus longuement cette question dans le prochain texte.

 

Notes:

[1] Jacques Attali : "Les juifs ont toutes les raisons d'être fiers de cette partie de leur histoire", propos recueillis par Eric Conan http://www.denistouret.fr/ideologues/index.html

[2] Joseph Massad , Hamas et le nouveau/vieux croissant américain http://www.ism-france.org/analyses/Hamas-et-le-nouveau-vieux-croissant-americain-article-17320

[3] Mounir Mahmoud
http://www.wmaker.net/etreinformer/Chercheur-egyptien-les-regimes-arabes-ont-contribue-au-succes-de-la-judaisation-en-Palestine_a3422.html

 

Bibliographie

Professor Abdel-Wahab Elmessiri: 
The function of outsiders : http://weekly.ahram.org.eg/1999/435/op2.htm
The kindness of strangers: http://weekly.ahram.org.eg/1999/436/op2.htm
A chosen community, an exceptional burden : http://weekly.ahram.org.eg/1999/437/op5.htm
A people like any other : http://weekly.ahram.org.eg/1999/438/op5.htm
Learning about Zionism: http://weekly.ahram.org.eg/2000/476/eg6.htm

Mario Liverani, La Bible et l'invention de l'histoire, 2003, trad. Ed. Bayard 2008

Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman,La Bible dévoilée. Les nouvelles révélations de l'archéologie, 2001 ,trad. Ed. Bayard 2002

Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman, Les rois sacrés de la Bible, trad.Ed.Bayard 2006

Arno J. Mayer, De leurs socs, ils ont forgé des glaives, Histoire critique d'Israël, Fayard 2009

Ernest Renan, Histoire du peuple d'Israël, 5 tomes, Calmann-Lévy 1887

Douglas Reed , La Controverse de Sion

Shlomo Sand, Comment le peuple juif fut inventé, Fayard 2008, coll. Champs Flammarion 2010

Avraham Burg, Vaincre Hitler : Pour un judaïsme plus humaniste et universaliste , Fayard 2008

Ralph Schoenman, L'histoire cachée du sionisme, Selio 1988

Israël Shahak, Le Racisme de l'Etat d'Israël, Guy Authier, 1975

Karl Marx, Sur la question juive

SUN TZU, L'art de la guerre

Claude Klein, La démocratie d'Israël,1997

Jacques Attali: Les Juifs, le monde et l'argent, Histoire économique du peuple juif. Fayard, 2002

18 septembre 2012

Source : http://aline.dedieguez.pagesperso-orange.fr/mariali/chaos...

 

 

*


FILMS

et pourquoi pas ?

Deux mots sur un film qu'on vient de voir :

 

Sept jours à la Havane

 

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Comme la plupart d'entre vous doivent le savoir, « Sept jours à La Havane», c’est donc sept chapitres, sept réalisateurs, sept regards, un pour chaque jour de la semaine. Un film construit en cadavre exquis porté par sept talents du cinéma international chargés de dérouler autant de récits. Des récits indépendants qui, mis bout à bout, rassemblés dans une trame commune constituent au final un instantané inédit de La Havane. Au fil des quartiers, des atmosphères, des générations, des classes sociales et des cultures, les réalisateurs entrecroisent leurs sensibilités, leurs parcours et leurs styles pour offrir un véritable portrait contemporain de la mythique capitale cubaine. » (Grand Ecart).

Et, n'en déplaise aux Inrocks, qui ne l'aiment pas, le résultat n'est ni hirsute, ni de bric et de broc, ni fade, mais atteint à une unité, ou si on préfère à une fusion, qui doit bien être un peu due à la vertu particulière du lieu et de ceux qui l'habitent.

Je mentionnerai juste pour mémoire les sept réalisateurs :

Le lundi revient à Benicio del Toro, avec El Yuma, histoire d'un jeune Américain venu faire un stage à l'école de cinéma de La Havane. On l'appelle ainsi, parce que « Yankee » est une injure. Il est pris en charge par un chauffeur de taxi entre deux âges, qui lui fait faire un tour de la ville by night dont il se souviendra.

Le mardi voit l'arrivée d'Emir Kusturica venu recevoir un prix récompensant sa carrière de cinéaste. Ici, il est acteur, fortement imbibé et tracassé par la colère probablement justifiée d'Anita, son épouse restée en Serbie. Il déteste les mondanités, les soupers de gala et le reste. C'est simple, il refuse de quitter le malheureux chauffeur noir qu'on a chargé de veiller sur lui et de le mener sans faute à bon port. Cette Odyssée – ce n'est pas Leopold Blum mais il y a un peu de ça – passe notamment par une cour d'immeuble, où, au milieu des poules et en présence d'un petit cochon, le chauffeur exténué par ses efforts inutiles joue de la trompette comme un dieu. C'est Jam Session, de Pablo Trapero.

Mercredi, Julio Medem suit le parcours de Cecilia, jeune chanteuse noire, qu'un Espagnol, ébloui par son talent, veut emmener à Madrid. Tentation amoureuse plus tentation de la gloire dans la riche Europe. Or, Cecilia vit avec José, un bronze de Riace noir qui a des ennuis dans sa carrière de champion de base-ball. José est portoricain, et veut prendre la mer en bateau gonflable pour passer à Miami, où il croit qu'il renouera avec le succès . Le film s'appelle La Tentación de Cécilia. Cecilia résistera à la tentation espagnole, mais pas à celle de suivre José dans son mirage américain.

Vendredi, Gaspar Noe raconte, dans Ritual, que les parents d'une jeune fille, ayant découvert qu'elle s'est fait séduire par une jeune gringa, bref, qu'elle est lesbienne, la font désenvoûter ou contre-envoûter, comme on voudra.

Samedi, c'est Dulce Amargo de Juan Carlos Tabio et l'histoire de Mirta Gutierrez, psychologue, animatrice d'un show télévisé où elle donne, une fois par semaine, des conseils aux gens pour mieux vivre. Dans la réalité, elle ne vit pas trop bien elle-même, entre son mari qui boit parce qu'il n'a plus d'emploi et sa fille (Cecilia) qui s'apprête à s'expatrier dans un sens ou dans l'autre. Et avec l'embargo qui n'arrange pas les choses, il faut bien qu'elle ait, comme presque tous, une seconde activité pour arriver à nouer les deux bouts. Un gros client lui commande des gâteaux, beaucoup de gâteaux, pour une occasion spéciale. Et voilà que son mari, rendu maladroit par l'alcool et la déprime, lui casse tous ses oeufs. Comment trouver autant d'oeufs d'un coup, à La Havane ? La débrouille et la solidarité entre petites gens y pourvoient. Comme on dit : la suite à l'écran. L'émission de Ménie Grégoire en direct est un petit morceau d'anthologie.

Dimanche enfin, vient une espèce de feu d'artifice tiré par Laurent Cantet : La Fuente, histoire d'une fontaine. Marta est une Havanaise d'un certain âge, qui habite au premier étage d'un immeuble à locataires multiples. Une statuette de la Vierge Marie trône dans son salon, car elle est très pieuse. Ce dimanche matin, elle réveille à grands cris toute la maison : la Vierge lui est apparue en rêve et a exigé une nouvelle robe – jaune – ainsi qu'une fontaine à ses pieds. Et, bien entendu, une grande fête. Aussitôt, tous de s'activer de gré ou de force. On se croirait au siège de Paris raconté par Rabelais. Maçons, peintres, couturière, tous portent, courent, volent, pédalent, s'échinent. Pas assez de place ? Qu'on abatte un mur. Pas d'eau courante ? Qu'on traverse la route et qu'on ramène de l'eau de mer !

La mer, c'est le domaine d'Ochun, mais Ochun et la Sainte Vierge s'entendent plutôt bien, elle ne dira rien. [ Ochun, déesse de la beauté dans la santeria, et première épouse de Chango, qu'on représente justement vêtue de jaune, un miroir à la main. Oui, vous avez compris, c'est l'Aphrodite de par là. Les Cubains, oecuméniques, l'ont assimilée à la Vierge de la Caridad del Cobre, sainte patronne de Cuba. La voilà. ]

Oshun - 2 .jpgComme de bien entendu, la vision de Marta s'accomplit. La Vierge avait dit : « Et une robe jaune aussi pour toi. » On lui en a fait une. L'apothéose, c'est quand une vieille dame noire très distinguée, chante a capella, en concertiste consommée, un très classique Ave Maria de Gounod, puis, sans transition, des chants africains peu susceptibles de déplaire à Ochun, chants et battements de mains que tous reprennent en choeur jusqu'à l'écroulement. L'histoire de Marta, c'est celle de tous les chefs et de tous les fondateurs de religion.

J'ai sauté le jeudi. Je le gardais pour la fin. C'est Diary of a beginner, d'Elia Suleiman, qu'il a réalisé et où il joue son propre rôle.

Quand les Inrocks disent de Sept jours à La Havane : « Une semaine à Cuba et sans inspiration. Deux jours auraient suffi. », ils se plantent le doigt dans l'oeil jusqu'aux cheveux. Quand ils ajoutent que seuls sauvent le « fade ragout » un « rituel vaudou moite et sensuel » et le film de Suleiman, ils se plantent davantage encore. Le vaudou passe assez mal à l'écran et le rituel du film, d'ailleurs, n'est pas du vaudou, c'est de l'exorcisme. Les rites d'exorcisme sont toujours un peu ridicules, qu'ils se déroulent dans une église ou en plein air. Tous font ample consommation d'eau bénite, celui-ci plus que d'autres : tout le monde est dans l'eau. La séquence de Gaspar Noe m'a fait l'effet d'être la plus faible des sept, même s'il réussit à communiquer la passion du coup de foudre entre les deux gamines, ce qui n'est pas donné à tout le monde. Quant à ce que nos bobos du VIe ou du VIIe (à vue de nez plutôt des Champs) disent de Suleiman, c'est à se demander s'ils n'ont pas visionné le film au soleil, sur la Croisette :

 

 « En résulte un brillant court-métrage d’une quinzaine de minutes, quintessence du cinéma suleimanien où le réalisateur se filme lui-même, impavide voyageur à la démarche lunaire, face à des situations absurdes dont le sens semble lui échapper [c'est à eux qu'il échappe, NdC]. Il voudrait interviewer Castro, mais n’a accès, depuis sa chambre d’hôtel, qu’à ses (interminables) discours télévisés ; alors il attend, observe le triste ballet des touristes et des jolies cubaines photographiées comme des trophées de chasse… “Il ne s’agit pas de juger le régime, mais de poser un regard politique sur un pays, c’est-à-dire un regard conscient. Tout est politique, même filmer la mer vide” ».

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Les Inrocks n'aiment pas Cuba, ils n'aiment pas Castro, et parce que Suleiman leur a dit que « tout est politique, même filmer la mer vide », ils s'imaginent avoir vu un film critique à l'égard de Cuba. Comme si un artiste de cette envergure pouvait manquer de savoir-vivre au point d'aller donner des leçons à des gens qui ne lui ont rien demandé. C'est Suleiman qu'il s'appelle, pas Kouchner ou BHL.

 

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Voici comment le film est décrit dans Première :

« Elia Suleiman arrive à La Havane et flâne dans les rues de la ville en attendant un rendez-vous organisé par l’ambassade de Palestine. Toute communication étant rendue impossible par son ignorance de l’espagnol, sa supposée solidarité politique avec le peuple cubain se heurte bientôt à son ignorance des codes culturels. Peu à peu, alors qu’il pénètre le cœur de la ville et s’imprègne de ses sons et de ses images, ce qu’il pensait n’être qu’une façon de tuer le temps, devient un test pour redéfinir son identité. »

Que signifie « toute communication étant rendue impossible par son ignorance de l'espagnol » ? Il parle anglais, Suleiman, et les Cubains aussi. Kusturica et le jeune Américain du lundi ne savent pas un traître mot d'espagnol non plus. Et alors ? La communication n'est pas impossible pour eux. Elle l'est pour lui. Y compris avec le fonctionnaire de son ambassade. Mais pourquoi ? Ce qui est sûr, c'est que ce n'est pas nouveau dans son oeuvre.

Qui, ayant vu Le temps qu'il reste, n'est pas hanté par les premiers instants du film, où un ami du réalisateur, au volant d'un camion, par une nuit de tempête, dans un pays d'Europe du Nord, lui crie dans son téléphone cellulaire qu'il est perdu, qu'il fait noir comme en enfer, que les éclairs l'aveuglent, que le tonnerre est assourdissant, qu'il pleut, qu'il n'en peut plus et pourquoi ne répond-il pas ? « Eli Eli ! Lamma Sabachtani ! ».

Silence.

Ce que ces critiques paraissent ignorer, c'est que Suleiman ne parle jamais que de la Palestine, ne filme jamais que l'absence de la Palestine. A la rigueur, le silence de Dieu.

Je vous raconte le film que j'ai vu :

Elia Suleiman arpente les couloirs d'un luxueux hôtel, celui où les Cubains logent leurs hôtes de marque et qui sert de décor à plusieurs des autres films, leur donnant ainsi une sorte d'unité de lieu. Dans ces couloirs, il croise des gens : une femme de chambre noire qui passe un aspirateur, un maître d'hôtel, etc. Aucun ne lui parle ni ne lui adresse le moindre signe car aucun ne le voit. Ce n'est pas Elia Suleiman qui est là, vêtu en touriste et le chapeau de paille sur la tête, c'est la Palestine. Et la Palestine n'existe pas. Comment les gens pourraient-ils la voir ? A plus forte raison lui parler ! Il sort et, apparemment sans but, se rend à son ambassade. Belle villa en bord de mer, élégante, sereine, presque luxueuse elle aussi, avec son buste d'Arafat en marbre dans le hall d'entrée, et la clim, c'est sûr. Quelqu'un - un fonctionnaire ? l'ambassadeur ? - lui annonce que le commandant Fidel Castro est en train de prononcer un discours à l'Université de la Havane et le recevra dès qu'il aura fini. Suleiman l'entend mais ne répond pas, et l'ambassadeur, si c'est lui, n'a pas l'air de s'en formaliser. On dirait qu'il a parlé de derrière une vitre épaisse. Suleiman arpente maintenant les pièces de cette ambassade d'un pays qui n'existe pas, une des seules qu'il ait au monde sans doute. On a même allumé pour lui un téléviseur, où il peut suivre le discours en train de se dérouler. La voix qui en sort est celle d'un très vieil homme, cassée. La rhétorique est toujours la même, les gestes toujours énergiques, les visages attentifs, les applaudissements nourris, mais où cela se passe-t-il ? Sur quelle planète ? Suleiman sort sur le pas de la porte, d'où il domine la route. Une voiture (vintage, années 50) s'arrête pile, en panne. Le chauffeur en sort, soulève son capot et commence à trifouiller. Ses passagers, une jeune femme et un homme, sans s'émouvoir, se mettent, elle à prendre des poses à la manière des magazines hollywoodiens (années 50 aussi), lui, à la mitrailler de son Nikon en sautoir : sur le toit, contre une portière, un pied dans le coffre. Le chauffeur claque son capot et repart, tout le monde rejoint sa place en courant. Routine. Suleiman a peut-être souri, comme un qui comprend les petites misères d'un pays sous embargo. La Palestine, elle, reste impavide. On ne voit que son dos. Une autre voiture arrive en sens inverse et tombe en panne à son tour. Le chauffeur s'encourt armé d'un petit bidon. Panne d'essence. Routine on vous dit. Suleiman traverse la route et gagne le bord de mer. Une femme, sur un rocher, a l'air d'attendre. Suleiman est à quelques pas. Elle ne le voit pas. Il ne la regarde pas. Comme elle, il regarde la mer vide. D'où sort, au bout d'un très long temps, un plongeur – combinaison, palmes,tuba. La femme et lui s'enlacent et s'en vont. Suleiman n'a pas bougé. Ce genre de « bateaux qui se croisent dans la nuit » se répète plusieurs fois. A la fin de la journée, Suleiman repart en taxi pour l'aéroport, comme il en était venu. « Sans avoir vu Castro », disent les critiques. On n'en sait rien. Qu'importe ? Ce n'est pas le sujet du film. La Palestine est sortie de son néant pour venir à Cuba. Elle y rentre. Il ne s'est rien passé, car même les Cubains ne peuvent pas voir les fantômes et même Castro ne peut pas les matérialiser. Elle laisse derrière elle ce seul morceau de son territoire qui ne soit pas souillé par les bombes, les offenses et les humiliations : son ambassade, où vaquent des gens qui ont l'air de poissons dans un bocal, autour d'un buste d'Arafat en marbre.

Le jour du Shock & Awe sur l'Irak, un représentant de l'Algérie dont je n'ai pas retenu le nom est monté à la tribune des Nations Unies et, au lieu d'un discours inutile, il a récité, en français, Le loup et l'agneau. Il y fallait un certain courage et pas mal de désespoir. Ce Jeudi à La Havane est une parabole semblable, dont même le titre est politique en effet : « Journal d'une débutante »... parmi les nations souveraines, et ce n'est sûrement pas pour rien qu'il est en anglais, quand tous les autres sont en espagnol. Ce septième d'un film international et collectif est une épure, une fable de La Fontaine, Le loup et l'agneau. Admirable Elia Suleiman.

Carte d'identité du film, de la part des producteurs :


http://www.7joursalahavane.fr/


Catherine


*

 

 Mis en ligne par Théroigne, le 28 septembre 2012.  

 

 

26/07/2012

Incursion au paradis... Interlude estival

 

 

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Héraclès, Thésée, Ulysse y sont allés avant elle... en descendant très très bas.

Elle y est allée malgré elle, en montant très très haut.

Mais ses découvertes valent bien les leurs.


 

 

Aline de Diéguez

 

Incursion au paradis

avant de replonger dans l'enfer du sionisme

 

Interlude estival

 

 

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Le grand départ

 

C'est arrivé au moment où Sémimi, rampant sur le dos, d'un côté de la porte, essayait de saisir avec ses deux pattounes tendues la plume de coq que je glissais à partir de l'autre côté. Impertinente, cette plume, allait et venait. C'était magique, elle avait l'air de bouger toute seule et lui chatouillait tantôt les moustaches, tantôt les pattes, tantôt lui gratouillait le ventre.

Excitée, la chatonne guettait, se précipitait, reculait et émettait chaque fois un petit roucoulement de triomphe lorsqu'elle réussissait à l'immobiliser un instant. Elle se roulait sur le tapis, offrant au regard les bouclettes duveteuses de son ventre et sa somptueuse toison d'oursonne qu'elle refusait obstinément de laisser peigner.

Tout à coup, un gigantesque éclair blanc, un bruit de fin du monde …

L'apocalypse.

Et je vis une nuée blanche et le feu fut partout. Je vis sortir des éclairs et j'entendis des voix et des tonnerres .


 

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Et puis pffftt… le grand départ.

Nous n'étions plus là pour contempler l'horizon blanc, rouge, embrasé. Alors lentement, très lentement, un majestueux champignon s'éleva dans les airs et envahit la nuée.

Sublime scénario! Spectacle enchanteur! In illo tempore, les magiciens de l'atome avaient fait une petite répétition sur deux villes d'un archipel du Pacifique et depuis lors, ils se languissaient de revivre l'extase de la toute-puissance. Orgasme de la folie et désir d'apocalypse intimement mêlés.

Je ne peux même pas dire que nous étions réduites en poussière, car la poussière est encore quelque chose, alors que nous n'étions plus RIEN.

Le néant.

Par la grâce d'Einstein et les vertus de sa célèbre équation, notre masse s'était changée en énergie et, photons au milieu de milliards de photons, nous galopions dans l'azur .


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Résurrection

 

Mais les mystères de l'au-delà sont, comme chacun sait, impénétrables et d'abord à leurs heureux bénéficiaires. C'est pourquoi je ne saurai jamais ni comment, ni quand nous avons atterri, les fesses dans l'herbe pour moi et ventre à terre pour Sémimi, sur une pelouse, devant un immense édifice d'où sortaient de mélancoliques volutes mélodieuses.

J'étais ressuscitée ! La résurrection, c'était donc ça !

Même Sémimi était ressuscitée ! Voilà qui n'était pas prévu, car je savais de science certaine que les animaux sont bannis des champs élyséens depuis l'affaire de la pomme de sinistre mémoire et de la gloutonnerie d'un couple de benêts.


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Ainsi, nos photons avaient fait machine arrière et s'étaient reconcentrés en matière - je touchais mes bras, je tâtais mes jambes, tout fonctionnait, mes muscles, mes articulations, ma tête. Aussi sûr que deux et deux font quatre j'en conclus que j'étais au paradis et je fus ravie en esprit.

Mais dans quel paradis avions-nous atterri ?

Pour l'instant nous étions toutes les deux, Sémimi et moi, plutôt ahuries et désorientées. Ressusciter n'est pas une petite affaire. Assises sur l'herbette verdoyante regardant en haut, à gauche, à droite, cherchant un point de repère, je m'aperçus tout à coup que mon pantalon à fines rayures et ma chemisette rose étaient demeurés dans la stratosphère mais qu'ils avaient été pieusement remplacés par une longue tunique blanche à la coupe rudimentaire dotée d'une grande poche sur le ventre. C'était tout à fait le modèle qu'enfant je taillais à mes poupées.

Je fis donc une première déduction capitale : on ne ressuscite pas tout nu.

Mes fesses endolories m'amenèrent à une seconde conclusion : le sol du paradis n'est ni mou, ni cotonneux, ni vaporeux, mais parfaitement ferme et dur .

Le paradis serait-il désert? me demandai-je, ne voyant personne autour de moi. Mais une mélopée envoûtante et mélancolique bourdonnait dans le lointain et signalait d'autres présences.

A tout hasard et ne sachant si je devais me montrer inquiète ou rassurée, je remisai prestement dans la précieuse poche ventrale une Sémimi encore groggy et pour tout dire, non ressuscitée à cent pour cent. Je vis en la soulevant que tous les poils de sa collerette n'étaient pas au rendez-vous et qu'il en manquait également dans le panache de sa queue. Le Très Haut avait dû se tromper dans ses calculs quand il avait compté les photons nécessaires à sa réincarnation parmi les bienheureux. Il avait des excuses, la fourrure était si touffue, si soyeuse et si longue qu'il n'avait pas repéré les poils masqués par le duvet, et peut-être ne connaissait-il pas toutes les ressources de e=mc².


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 Procession

 

La musique se tut. Je me dressai, les sens en alerte et le souffle court. Une colonne d'ombres encapuchonnées avançait en silence dans notre direction, précédée d'un dignitaire richement paré et portant une croix.

Je compris que nous étions ressuscitées chez les mangeurs de dieu. On les nommait ainsi parce que leurs occupants ne se contentaient pas de capter les paroles de leur Très Haut avec une ouie aiguisée ou de flairer le passage de leur créateur dans le thym et le serpolet. J'avais entendu dire qu'ils le saisissaient carrément avec les dents, tout comme Sémimi attrape une souris et, ni une, ni deux l'avalaient et le déglutissaient. C'est pourquoi ils se nommèrent eux-mêmes les déiphages.

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Je continuais à me sentir à la fois inquiète et rassurée en même temps et sous le même rapport. Inquiète parce que, tout de même, cette pulsion anthropophagique me troublait et je ne savais pas si j'étais ou non appétissante; et rassurée, parce que je ne croyais pas avoir une tête de Dieu et Sémimi encore moins. J'en conclus, tout bien réfléchi, qu'il y avait peu de risques que nous fussions destinées à la consommation .

La procession nous doubla sans un regard. Les fantômes avançaient, les yeux baissés, concentrés sur le miracle dont ils étaient le siège. Avaler un Dieu, ce n'est pas une action ordinaire et je me demandais comment exactement se faisait la digestion et l'assimilation. Les leçons de biologie de mon heureuse scolarité me revenaient en mémoire. Je voyais le passage par l'œsophage, l'estomac, la sortie par le duodénum, la fabuleuse usine du foie et sa fonction glycogénique - un mot que la grande sauterelle d'Andrée n'a jamais réussi à prononcer correctement. Et le bol alimentaire progressait dans le labyrinthe de l'intestin grêle et ses mignonnes ventouses et puis la station d'épuration du gros intestin, et puis … la sortie. Ouh, la la.

 

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A ce moment là, le dignitaire de tête dont le coup d'œil perçant, le crâne aussi lisse qu'un genou et la taille rebondie ne m'avaient pas échappé, fit demi tour. Il se planta devant moi et sans même me demander mon nom et s'enquérir des raisons pour lesquelles je me trouvais là, un peu ahurie, avec un chaton grelottant de peur dans la poche, il leva la croix, écarta les bras et à ma grande stupeur, entama une longue homélie. Je me retournai discrètement, mais pas de doute, Sémimi et moi étions bien les seules auditrices d'un sermon prononcé d'une voix à la fois forte et gémissante qui commençait par ces paroles ailées : " Ah ! si vous saviez… Rien ne peut donner un idée … "


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 Généalogie des « ah si vous saviez… » et des « rien ne peut donner une idée… »

 

- Ah ! si vous saviez comme ces lieux sont enchanteurs ! Rien ne peut donner une idée des merveilles qui s'y produisent. Nous nous nourrissons exclusivement de la chair et du sang de notre dieu. Toute autre nourriture nous est interdite car, comme nous sommes immortels, nous deviendrions rapidement gras et ronds comme des barriques, alors que la chair de notre dieu est une nourriture énergétique mais de très basses calories.

Je souris intérieurement, retrouvant mes réflexes de bonne ménagère: plus de problèmes d'approvisionnement, plus de perte de temps à faire la cuisine et un corps toujours svelte. Ce régime m'allait comme un gant. Mais je me demandais comment mon interlocuteur s'y était pris pour conserver son avenante bedaine.

J'avais d'ailleurs remarqué que dans la procession il n'y avait ni vieux, ni invalides, ni clopinants , ni arthrosiques, ni enfants. Est-ce que mon voisin qui avait perdu une jambe dans un accident d'automobile était ressuscité unijambiste, me demandais-je, ou bien sa deuxième jambe avait-elle repoussé? J'opinais pour la seconde hypothèse. Mais le Très Haut avait vraiment bonne mémoire car cet accident était vieux de quinze ans et la jambe coupée ne devait plus être en très bon état.

Je venais de comprendre que mon interlocuteur ne savait pas parler normalement et que l'homélie était son mode d'expression ordinaire. Mais pourquoi toujours ce ton plaintif et traînard ?

Je profitai d'un moment où l'orateur reprenait son souffle pour lui poser une question qui me tourmentait depuis longtemps, à savoir, quel était l'âge idéal pour faire un bon ressuscité. Je me souvenais de la hantise d'une très vieille dame de mes amies sur le point de fêter son centenaire et obsédée par la crainte de ressusciter dans l'état où elle se trouvait au moment où elle me parlait. Elle se faisait tout un roman sur le sujet et avait décidé elle-même le moment de sa vie qui lui semblait le plus agréable à revivre et surtout à vivre pour l'éternité .

La bouche ouverte, il me regardait sans comprendre. Je mis les points sur i .

- S'il vous plaît, pouvez-vous me dire quel est l'âge idéal pour faire un bon ressuscité?

Je n'avais pas de miroir et je ne savais pas si mon moi ressuscité avait le même âge que le moi qui avait été transformé en photon.

Et puis, il y avait la question de la beauté. Est-ce que l'injustice de l'inégale répartition des grâces et de l'harmonie des traits se perpétuait pour l'éternité lors de la résurrection des corps. Il me semblait que c'étaient là des questions capitales à éclaircir .

- Ah ma fille ! rien ne peut donner une idée des perfections de notre paradis. Vous avez l'âge , la forme et la consistance idéales pour être des nôtres . Ah si vous saviez comme le Très Haut sait mettre en place toutes choses afin que la perfection soit au rendez-vous, car il EST la perfection et nous devons tout accepter de LUI. LUI seul connaît le BIEN.

- Mais justement , je ne le sais pas et je voudrais bien être éclairée, insistai-je.

J'avais l'impression désagréable qu'il cherchait à se défiler.

- Ma fille , c'est un grand mystère et nous devons accepter les mystères avec humilité et d'un cœur ingénu. Heureux les simples d'esprit car le paradis leur appartient. Les premiers seront les derniers et les derniers seront les premiers.

Je commençais à être agacée par sa familiarité. Pourquoi m'appelait-il sa "fille"? Nous n'étions pas parents. Quant à faire des derniers les premiers, j'étais outrée d'une telle proposition. Je repensais de nouveau à mes années d'école. J'avais été une élève studieuse et appliquée et une telle injustice, véritable prime à la paresse, m'aurait indignée !


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 La diplomatie céleste

 

J'avais entendu parler de plusieurs variétés de paradis. L'inquiétude de n'avoir pas ressuscité dans le bon paradis commençait à me tarauder. J'essayai de sonder mon interlocuteur sur l'existence des paradis concurrents. Je vis son nez s'allonger de contrariété. Il me concéda que ce paradis-là n'est pas, généalogiquement parlant, le premier. Il n'était pas non plus le dernier. Il avoua un peu piteusement qu'il n'avait pas d'informations sur ce dernier rival car il était déjà un locataire de ces lieux enchanteurs lors de la construction du nouveau-venu et n'en avait entendu parler que par ouï-dire et pas en bien si j'en crois sa petite moue de dégoût.

Je vis que ce sujet le tarabustait. Pourquoi ces mécréants avaient-ils construit un nouveau paradis alors que celui que foulaient ses sandales était parfait et qu'il y avait de la place pour tout le monde?

Il changea prestement de sujet et se lança dans un récit enflammé sur la préhistoire de son habitacle. Il m'expliqua que les Déiphages sont les enfants des Elusiens, ainsi nommés parce qu'ils se déclarent eux-mêmes les élus du Très-Haut, c'est-à-dire ses chouchous.

- Nos racines plongent dans leur terreau, mais comme nous sommes d'habiles jardiniers, notre arbre prospère dans un ciel plus bleu et plus pur si bien que la luxuriance de sa chevelure de feuilles et de branchages s'épanouit dans un monde nouveau.

Il s'enflammait de plus en plus et devenait lyrique, accompagnant son discours de grands mouvements des bras. Je reculais un peu pour éviter le va-et-vient intempestif de la croix sous mon nez. La voix geignarde continua sa démonstration ponctuée par de légers balancements de la tête .

- Le climat, la végétation, la qualité de l'air tout concourt à l'épuration de nos âmes et produit des effets bienheureux sur nos corps. Nos nuques ont perdu la raideur que beaucoup dénonçaient chez nos pères. Notre silhouette est devenue souple et gracieuse et nos voix déroulent des arpèges mélodieux à la gloire de notre maître bien aimé.

Il ne put s'empêcher de faire une petite moue d'autosatisfaction . Puis il reprit une mine modeste pour ajouter .

- La discipline s'est assouplie: l'obéissance à la lettre de la loi de sinistre mémoire n'est plus la règle absolue. Nous savons que l'esprit est caché sous la lettre et nous nous exerçons jour après jour à soulever des kilomètres et des kilomètres de voiles de brume afin de tenter de le débusquer. Nous traquons le mystère, le souffle du Très Haut et les manifestations les plus infimes de ses grâces éthérées. Ainsi, les meilleurs de nos athlètes sont en mesure de communier avec les ramifications les plus minuscules de l'abondante frondaison de notre arbre.

Ces exploits me remplissaient d'admiration. Ces sportifs du Très Haut pouvaient donc rivaliser avec Sémimi quand elle s'élançait dans le cerisier à fleurs et galopait jusqu'à l'extrême pointe tout en sachant toujours apprécier le centimètre qu'il ne fallait pas dépasser pour avoir des chances de faire demi tour sur la branche ployante. Je jetai un coup d'œil à ma poche: le chaton avait les yeux fermés et semblait dormir.

Je n'osais pas bouger. Pendant ce temps, la voix monocorde me parlait du respect que les Déiphages éprouvent pour l'antique paradis des ancêtres , mais je sentais comme une réticence dans le ton de sa voix.

- Je reconnais cependant que notre respect pour nos parents est tout frais. C'est vrai que pendant les lustres et des lustres, nous leur avons fait d'aigres reproches et notamment celui d'avoir vilainement occis notre père fondateur. Ah ! les méchants ! Mais maintenant, nous chantons à pleine gorge un hymne à leur gloire et à chaque nouvelle aurore, nos litanies s'ouvrent par l'hommage suivant que nous répétons plusieurs fois: "Quand les Elusiens, nos pères, eurent connu mille et un printemps, ils engendrèrent les déiphages, porteurs de l'ultime accomplissement" - c'est-à-dire nous-mêmes ajouta-t-il avec une petite moue qui se voulait modeste. Mais j'avoue que notre réconciliation est une couche de peinture qui nous colle encore aux doigts et nous n'avons pas réussi à effacer tous les tags et les graphismes insultants qui ornaient - pardon, polluaient - nos murs et nos manuscrits . Nous les traitions alors d'embryons desséchés, de préludes racornis et pire encore, de tueurs du Très Haut.

Il baissa la tête, tout contrit, perdant un instant de sa superbe et de son assurance. Bien que mes lèvres fussent aussi hermétiquement closes qu'une tombe, il devait m'entendre m'étonner de ce que le BIEN et la PERFECTION eussent égaré leurs pères pendant tant de lustres. Comment cela se pouvait-il ? Encore un mystère. Ah ! si nous savions…

Mais il retrouva toute son énergie pour continuer.

- Même si nous n'osons plus le dénoncer à haute et intelligible voix, leur forfait nous reste sur l'estomac. Car c'est bien un forfait, même si nous disons maintenant qu'il a été exécuté sous les ordres d'un intrus, un barbare qui commandait alors la place.

Il s'échauffait.

- C'est tout de même eux qui ont livré le doux pacifiste, notre maître, à ce chef cruel qui l'a fait occire. Incarnation de la bonté et de toutes les vertus, maître des éléments, apaisant les tempêtes, marchant sur les eaux, multipliant les pains et les poissons, guérisssant des aveugles, des paralytiques, des hémoroïsses, redonnant vie à des membres desséchés, ressuscitant une jeune fille par-ci, un jeune homme par-là, il a même réussi à se ressusciter lui-même après avoir passé, dans une sorte de grotte, trois longues journées durant lesquelles nous ignorons de quelles métamorphoses il a été le siège. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il en est ressorti tout frais et rose et, pour notre plus grand bonheur, il s'est élevé dans les airs par ses propres moyens et siège maintenant parmi nous.

Ce discours enflammé m'impressionna. Accomplir tous ces exploits avant d'arriver au paradis, c'était vraiment très fort. Mais je revins timidement au sujet.

- Vous avez donc réussi l'exploit admirable d'avoir signé un traité de paix avec vos ennemis héréditaires. Ainsi, après deux mille ans d'obstination, ces opiniâtres se sont donc enfin ralliés à la Vérité!

- Oui et non répondit-il avec gêne. Et même plutôt non. Ce fut une négociation ardue dans laquelle ils sont restés sur leurs positions et j'avoue que c'est nous qui avons fait un grand pas en arrière dans leur direction. Car notre bureaucratie est ingénieuse et elle a produit une nouvelle doctrine : celle de la supercession par laquelle nous avons reconnu que cette ancienne tribu était déjà sauvée et qu'elle n'avait pas besoin de notre nouveau sauveur. D'où il résulte qu'eux seuls, sur toute la planète, n'avaient pas besoin de notre Maître et Sauveur.

J'étais pleine d'admiration pour ce subtil match nul qui permettait à chacun de camper dans son paradis particulier .

- Quel travail vous allez avoir pour expurger tous les anciens grimoires et récrire l'histoire du monde à partir des lunettes qu'apporte cette nouvelle doctrine, m'exclamai-je. En somme, vous reconnaissez que cette tribu s'était arrogé à bon droit un statut particulier .

- Du calme, ma fille, rien ne presse. Je préfère ne pas chercher à élucider ce mystère. Les mystères sont faits pour demeurer mystérieux.

Il se lança dans une démonstration alambiquée sur l'évolution des mathématiques, une histoire de parallèles qu'Euclide ne pouvait pas réunir et qui, maintenant, se croisent joyeusement.

Je ne voyais pas le rapport entre les perpendiculaires et les parallèles de la géométrie classique et l'histoire du salut, mais je me tus prudemment. D'autant plus qu'il voulait visiblement changer de sujet, puisqu'il conclut:

- D'ailleurs les questions théologiques n'intéressent plus personne.

Soupir…

Il fut un temps où nous levions des armées et traversions la moitié du globe pour défendre un dogme. La moindre déviation, le plus petit déplacement de virgule, un chuchotement de doute nous permettaient d'allumer de beaux feux de camps au cours desquels nous rôtissions aux milieu des prières, des processions et des chants les relaps, les renégats et les douteurs de tous acabits.

Nouveau soupir…

Déicide, enfer, damnation sont maintenant des mots pestiférés. Nous sommes devenus mous, mous, mous.

Et pour souligner cette forte parole, il appuya son poing fermé sur son estomac proéminant, où il s'enfonça comme dans un mol oreiller.

Je protestai véhémentement en affirmant que je connaissais un savant ermite qui avait fait de l'étude de ces questions son lait et son miel. Sa grotte est sise dans les forêts de Walburgis et elle est facilement reconnaissable aux manuscrits, rouleaux et papyrus que le sage a attachés sur les branches de l'arbre qui ombrage l'entrée de son modeste refuge afin que tous les oiseaux du ciel puissent se nourrir, eux aussi, de sa divine science.

D'un grand mouvement de croix, il écarta ma pieuse objection et affirma, toujours sur le même ton plaintif, que les déiphages s'étaient amollis et étaient devenus de grands sentimentaux .

- Le social, ils n'ont plus que ce mot-là à la bouche. Ce ne sont plus d'ardents théologiens et des fermes logiciens, mais de molles assistantes sociales.

J'osai l'interrompre en levant timidement le doigt :

- Justement, est-ce que votre sauveur n'a pas cautionné une grave injustice sociale en prétendant que l'ouvrier de la onzième heure et celui de la première heure auraient le même salaire? Est-ce que ce n'est pas là un encouragement à la paresse et une déstabilisation du tissu social? Récompenser les tire-au-flanc qui n'exécutent qu'un douzième du travail, c'est commettre une grave injustice à l'égard des courageuses masses laborieuses et cet arbitraire n'est-il pas de nature à démotiver les lève-tôt, qui rêvent de travailler plus pour gagner plus?

Un peu gêné, il bafouilla quelques paroles sur les voies du Très Haut qui sont impénétrables et sur une générosité qui devrait plaire aux syndicats, puis il dévia la conversation sur une histoire de chameaux et de riches qui ne pouvaient passer par le chas d'une aiguille - il voulait me faire comprendre que le chas d'une aiguille est la porte d'entrée normale de ce paradis.

Je restai longtemps méditative. Même en faisant de gros efforts de mémoire, je ne parvenais pas à me souvenir à quel moment j'étais passée par un si petit orifice. Même Sémimi a dû avoir du mal à se glisser par un si petit trou. Mais, conciliante, je ne voulus pas le contrarier et je reconnus volontiers que les pauvres sont si maigres qu'ils se glissent aisément à travers le chas de l'aiguille la plus fine.

Mais un doute s'infiltrait dans les circonvolutions de ma cervelle pendant que je regardais sa mine vermeille et son bedon rebondi.

C'est à ce moment-là qu'il aperçut la petite tête de Sémimi. Réveillée par quelques éclats de la voix monocorde, elle s'était risquée à jeter un coup d'œil sur le monde extérieur. Les deux pattounes posées sur le bord de la poche, elle avait l'air d'écouter gravement le sermon. Mais le sermonneur n'était pas d'humeur à apprécier la grâce d'un chaton angora chu d'un astre obscur. Il fit un saut de carpe en arrière, lâcha la croix qu'il tenait dans la main droite en poussant un cri d'horreur. Soulevant à pleines mains la robe de laine blanche qui le couvrait jusqu'aux chevilles et découvrant des mollets de coq, il détala à toutes jambes en levant très haut les genoux.


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 Fuite

 

Je pris la fuite moi aussi, mais en sens inverse . Sémimi toujours blottie dans ma poche, je filai, le nez au vent droit devant moi. Mais où me diriger? J'aurais bien aimé rencontrer le miraculeux fondateur de ce paradis et vérifier de mes yeux son état de conservation après un passage de trois jours dans une grotte obscure. Mais je ne savais pas où ils l'avaient mis.

Nous avons longtemps, longtemps, marché, errant au hasard. Partout le vide et un silence cotonneux troublé de-ci, delà, par les volutes de mélopées mélancoliques et de gracieuses vocalises lorsque nous passions à proximité de grandes bâtisses rectangulaires ornées de croix. Mais ma première rencontre avec le déiphage-qui-n'aimait-pas-les-chats m'avait rendue méfiante. Pourquoi en voulaient-ils à ma petite merveille? J'étais consternée de découvrir que nous évoluions en milieu hostile.

Mes yeux commençaient à s'habituer à la lumière d'un gris bleuâtre, ni jour ni nuit, qui donnait l'impression de nager dans le brouillard .

- Est-ce le soleil ne se lève jamais en ces lieux, me demandai-je? Comme tout a l'air triste !

Je fis une caresse à ma petite chatte et je poursuivis un chemin qui avait l'air de ne mener nulle part. Comme nous étions dans une sorte de désert, je déposai Sémimi sur le gazon. Je sentais qu'elle avait envie de se dégourdir les pattes et de renifler l'herbette du paradis.


 

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Je suivais son errance. Tout à coup elle marqua un temps d'arrêt devant un buisson particulièrement touffu et disparut dans l'herbe haute. Inquiète, je l'appelai d'une manière de plus en plus pressante. Silence et absence.

Nerveusement, j'écartai les branches et je vis qu'elles masquaient l'entrée d'un tunnel. J'appelai ma chattoune, hésitant à entrer. Toujours rien. Alors, rassemblant mon courage, je me lançai dans le tuyau noir .


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 Rencontre

 

Devant moi, un rai de lumière et un spectacle qui me cloua sur place de stupeur.

Un vieil ermite, les cheveux en broussailles, appuyé sur un bâton noueux et vêtu d'une longue robe crasseuse, gratouillait le ventre d'une petite chatte qui se roulait de bonheur sur le dos en jouant avec les poils gris et crépelés d'une barbe qui lui arrivait jusqu'aux genoux. Le vieil homme hoquetait de rire en ouvrant une bouche presque vide dans laquelle un chicot dans la mâchoire du bas avait l'air de danser au rythme de ses éclats de rire.

Interdite, j'appelai doucement ma chatte. Elle vint offrir à la caresse de ma main son petit front têtu avec un léger roucoulement de fond de gorge, puis retourna vivement vers le vieil homme et sa barbe odoriférante qui offrait de si passionnantes ressources à ses gratouillis.

Il me fit un petit signe de la main, accompagné d'un sourire édenté qui se voulait engageant.

J'avançai prudemment, méfiante.

J'avais tort .

Il entra dans une cahute qui me rappela la chaumine enfumée de mon ami le fabuliste et ressortit avec des victuailles: des pommes de terre bouillies pelées et non pelées, en rondelles ou entières, une assiette de purée froide et un petit pot d'un produit blanc que je devinai être du lait caillé .

En levant le nez, je vis une chamelle dont l'état de décrépitude me semblait à peu près égal à celui de son maître, mais qui réussissait l'exploit de produire un peu de lait afin d'accompagner les tubercules qui semblaient faire l'essentiel, sinon la totalité de la nourriture du vieil homme.

Tout corps glorieux que j'étais devenue grâce à ma résurrection, je sentais un petit creux dans l'estomac et j'acceptais avec enthousiasme et mille remerciements l'offrande du vieil ermite, un peu surprise par cette mono nourriture. Sémimi émoustillée par la barbe du vieil homme lapa joyeusement un petit bol de lait caillé .

Pendant que nous nous restaurions, tout heureux de voir sa solitude égayée par des visites, mon ermite me raconta l'histoire de son paradis. Et, comme il se doit, il commença son récit par ces paroles ailées : " Il était une fois…


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L'annexe temporaire des anti-chameliers

 

Il était une fois …

- Nous étions un groupe ardent, composé de frères déiphages et de membres de l'antépénultième paradis. Nous vivions modestement et fraternellement et nous respections tous les codes et toutes les lois de notre paradis. Nous avions tout mis en commun et chaque matin, nous distribuions à chacun le même nombre de spaghettis, de pommes de terre, de noisettes et de cacahouettes, selon l'arrivage. Nous étions solidaires, fraternels et plutôt maigres, parce que le temps passé à compter et à partager équitablement les biens empiétait sur celui qui était réservé à la production.

Mais tout le monde sait que la justice est un poste coûteux et peu rentable.

Mais, très rapidement nous nous aperçûmes avec colère et indignation que les passe-droit, les inégalités et les injustices s'étaient insinués subrepticement et prospéraient comme des orties près d'un tas de fumier. De plus en plus de gros et gras congénères nous narguaient en conduisant dans les pâturages de plantureux troupeaux de chameaux et de chamelles.

A la vue de ces troupeaux, notre sang n'a fait qu'un tour. Nous qui étions toujours aussi maigrichons que le jour où nous sommes passés par le chas de l'aiguille d'entrée, nous avons nourri de gros soupçons : nous avons compris que le chas de l'aiguille n'était pas le seul moyen pour pénétrer dans les espaces azuréens et qu'il devait y avoir quelque part un grand portail qui laissait passer les gros richards et les somptueux troupeaux de chameaux qui leur permettaient d'arrondir les panses et les bourses.

Un barbu issu du paradis des Elusiens a rédigé pour notre usage un nouveau code de conduite qu'il a appelé, pour faire court, un Manifeste .

Il fallait, disait-il tout raser et repartir à zéro avec des volontaires, construire un nouveau paradis et consolider nos frontières. Lorsque le Bien et toutes les Perfections règneraient chez nous, nous pouvions espérer convaincre les autres paradis de se joindre à nous et d'adopter nos règles. Quelques missionnaires particulièrement musclés fourniraient une aide précieuse.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Nous avons construit un grand mur autour de notre paradis avec un seul portail pour assurer le passage à tous ceux qui acceptaient de mettre en commun les troupeaux, les vêtements, les économies petites et grandes et même les quignons de pain. Tous étaient les bienvenus, sauf les chameliers, ces koulaks malhonnêtes, en représailles de ce qu'ils avaient frauduleusement occupé et perverti le paradis précédent.

 

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Mais c'est plus difficile qu'on ne le croit de vivre harmonieusement dans un paradis. Comme disait un éminent adepte de la secte des déiphages, il y aura toujours des tire-au-flanc, des crasseux, des voleurs et des filous. Beaucoup se sont reconstitué en catimini un petit troupeau de chameaux qu'ils ont introduit nuitamment dans le parc céleste malgré le grand mur qui avait été érigé devant le portail principal.

L'annexe a donc bouillonné, puis fermenté vicieusement. Elle a fini par faner, d'abord discrètement, puis spectaculairement. Les feuilles des arbres se sont recroquevillées, les maisons se sont barricadées, tous volets fermés. Puis l'ensemble a pourri et est tombé en quenouille. La moisissure, la rouille, les mites, les cafards et même les crabes et les méduses ont proliféré. Les termites s'y sont mises et par un beau jour d'automne, le frôlement d'une aile de papillon a fait s'écrouler une Baliverna dans laquelle ne végétaient plus que quelques ivrognes, quelques radoteurs et une poignée de policiers.

Quant au mur, un beau jour il s'est si bien effondré sur lui-même qu'il n'est resté qu'un gros tas de poussière et, se plaignit mon hôte, il n'avait même pas pu récupérer quelques gravas pour construire une niche à son chien afin de lui offrir un abri contre le général Hiver.

Pendant que je finissais les dernières miettes du frugal repas généreusement offert par mon ermite et que Sémimi léchait consciencieusement le fond de la coupelle de lait, j'éprouvai un pincement au cœur lorsqu'il m'annonça la mort de son compagnon et le départ, l'un après l'autre, des derniers résidents du paradis des anti-chameliers qui avaient cru qu'on pouvait construire, à partir de rien et avec beaucoup de vertu et de bonne volonté, un beau petit paradis sur terre.


 

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Interlude estival, 23 juillet 2012

 


 

Quand Héraclès est sorti de son incursion dans l’Autre Monde, ses cheveux avaient tellement blanchi que les feuilles d’un bouleau à peine frôlé par lui en sont restées tout argentées d'un côté.

Sémimi aussi a changé. On grandit vite au Paradis…


*

 

 

        

Mis en ligne par Catherine le 25 juillet 2012