30/11/2017

QUAND LA YOUGOSLAVIE...

1. Black sail ship 2.jpg

 

Quand la Yougoslavie démembrée se réunifie dans les supplices

 

Hier, au machin qui sert de bras pseudo-judiciaire à l’OTAN, sous l’appellation effrontée de TPIY (Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie), c’était le tour du général croate Slobodan Praljak d’être jugé « pour crimes de guerre » par les plus grands criminels de guerre de toute l’histoire de l’humanité, qui s’étaient, comme on sait, déjà fait les dents sur un certain nombre d’Allemands à Nuremberg, juste après Hiroshima, Dresde et Nagasaki. Et qui continuent tandis que les foules européennes hébétées continuent, elles, de regarder passer les trains en mâchonnant le foin qu’on leur jette.

Cette fois, l’accusé s’est soustrait au verdict illégitime de la seule façon qui lui était laissée : en avalant une fiole de poison. Aussitôt les fantoches de s’agiter, de « suspendre l’audience », d’appeler l’ambulance et même de déclarer – enfin ! – leur tribunal « scène de crime ».

 

3. PRALJAK.jpg

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

Regardez : Un criminel de guerre croate de Bosnie boit du poison en plein tribunal et meurt

 Le Tribunal pénal International pour l’ex-Yougoslavie de plus en plus bordélique et discrédité

Adam Garrie – The Duran 29 novembre 2017

 

Slobodan Praljak était un des rares non-Serbes à avoir été traîné devant le Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie, une institution qui s’est largement discréditée en refusant de prendre en compte le fait que les patriotes serbes de Yougoslavie comme Ratko Mladic avaient combattu des djihadistes armés qui menaçaient de tuer davantage encore de civils serbes s’ils n’étaient pas affrontés sur le champ de bataille.

Peu après la condamnation de Mladic, qui a accusé cette cour d’être un OTAN politique, Praljak, se voyant condamner pour avoir ordonné à ses troupes croates d’ouvrir le feu sur des musulmans bosniaques, a avalé une fiole de poison après avoir dénoncé la légitimité du tribunal. Il est mort quelques heures plus tard.

On peut voir ici cet instant dramatique :

 


 

Source : http://theduran.com/watch-bosnian-croat-war-criminal-drin...

Traduction : c.l. pour Les Grosses Orchades

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

Accusé de crime de guerre, un ex-militaire croate se suicide en plein procès avec du poison

 

RT en français – 29 novembre 2017

 

L'ancien chef militaire des Croates de Bosnie, Slobodan Praljak, accusé de crimes de guerre, a ingéré une substance alors que le Tribunal pénal international (TPI) de La Haye lui lisait son verdict. Il est décédé peu de temps après.

Slobodan Praljak, ancien chef militaire des Croates de Bosnie âgé de 72 ans a bu une substance liquide alors que Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), qui le jugeait à La Haye, lui lisait son verdict le 29 novembre.

Son avocat a alors fait savoir à la cour que son client venait « d'avaler du poison ». Le juge a immédiatement suspendu la séance et appelé les secours en urgence, selon Reuters. Pris en charge par les secours, il est ensuite décédé, selon l'agence de presse croate HINA.

 

« Scène de crime » : une enquête ouverte

« La salle d'audience 1 est une scène de crime » a déclaré le juge président Carmel Agius après l'annonce de la mort de l'accusé. Une enquête a par ailleurs été ouverte par la police néerlandaise.

Avant de boire la substance, Slobodan Praljak, qui avait fait appel, s'est vu dire que sa peine de prison de 20 ans pour de présumés crimes de guerre dans la ville bosnienne de Mostar était maintenue. Pour sa part, il clame son innocence.

Il est accusé d'avoir ordonné la destruction d'un pont en novembre 1993, un acte qui a « causé des dommages disproportionnés à la population civile Musulmane » selon le juge.

La séance était retransmise en direct depuis l'intérieur du tribunal.

 

4. photo-montage-de-ratko-mladic-a-gauche-le-15-fevrier-1994-quand-il-etait-chef-militaire-des-serbes-d.jpg

Ratko Mladic, condamné le 22 novembre à la réclusion perpétuelle

 

La semaine précédente, le même tribunal a condamné à perpétuité l'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie Ratko Mladic pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité durant la guerre de Bosnie-Herzégovine. Peu avant l'énoncé du verdict, le prévenu, qui plaidait non-coupable, avait été évacué de la salle d'audience du tribunal pénal international de La Haye après s'être levé et avoir crié, énervé, aux juges, qu'ils mentaient. « Ce n'est pas une cour de justice, c’est l'OTAN », avait-il notamment lancé.

 

 

5. Mladic.jpg

 

Certains observateurs remettent  en cause l'impartialité des jugements internationaux pour des crimes de guerre commis durant la guerre des Balkans. Parmi les 161 individus poursuivis par le TPIY, 94 sont serbes, tandis que 29 sont croates. Le tribunal se défend toutefois de tout déséquilibre et soutient que les inculpations reflètent la réalité du conflit. [Lequel conflit a été déclenché dans leur seul intérêt et perpétré de toutes les façons possibles par les puissances jugeantes…ndGO]

Il y a deux ans, la Russie avait utilisé son droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU pour bloquer une résolution sur le vingtième anniversaire de la tragédie de Srebrenica, estimant que le projet de résolution présentait les Serbes comme la seule partie coupable d'un conflit armé complexe en Yougoslavie dans lequel l'OTAN est intervenue.

Source : https://francais.rt.com/international/46051-accuse-crime-guerre-ex-militaire-croate-avale-poison-proces

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

Réactions :

« Dans lequel l’OTAN est intervenue !!! »

« Il est accusé d'avoir “ordonné la destruction d'un pont en novembre 1993”. 20 ans de taule pour avoir détruit un pont (même avec des conséquences pour la population), et bé ! Le jour où nos dirigeants seront jugés (OK ils ne le seront jamais) pour leurs crimes de guerre et contre l'humanité en Asie, en Afrique et au Moyen-Orient, ils vont prendre combien ? 15 fois perpétuité ? »

« Pendant la débâcle de 40, nos soldats ont fait exploser des ponts pour ralentir l’avancée des Allemands, alors que des civils étaient encore dessus. Des mères ont même tué leurs propres bambins... tellement elles furent prises de folie (nous raconta un militaire témoin) »

« C’est tout à son honneur d’avoir refusé d’être Jugé par ces clowns. »

« Mon Général, allez en paix. »

« C'était un soldat, mon général. »

« Quel que soit le grade, un militaire est automatiquement un soldat ! »

« En 1991, lorsque la guerre de Croatie éclate, il s'engage dans l'armée croate et dirige une unité formée d'artistes et d'intellectuels, avec laquelle il défend victorieusement la ville de Sunja  “contre les forces yougoslaves”. Il est alors fait général, entre au ministère de la Défense et devient l'un des 14 membres du Conseil de défense croate (HVO), dont il prend le commandement du 24 juin au 8 septembre 1993. »

_______________  

« Truly Shakespearean...! »

« The mind truly "boggles" trying to imagine how future historians, dramatists, recorders, will write of these times; of the rulers of the AngloEuro Empire and their many injustices and pure Evils. These people have no idea or concern, not only for how hated, despised and loathed their memory will be - but how much their descendants will have to pay for their deeds. Anglos and Euros the world over are going to be known as traitorous liars, murderers, hypocrites, greedy grasping immoral materialists, born without a soul. Damned indeed. »

« Shakespeare already did it. Macbeth comes to mind »

« Yes, true, but I dont think he was dealing with insanity and evil on the same scale. He was examining the effects of greed and ambition on a weak mind. Here we have so many evils on so many scales, in so many places - it's hard to get a grip on all of it I suspect. At least, must admit I find it so. Trying to fit its immensity into my head - I just can't. »

« I respect him for doing this, It will hurt the legitimacy of this court even more. »

« What did he say ? You'd think that would be important enough to quote or translate verbatim. »

« He say : Slobodan Praljak is not war criminal. I despize your judgement. »

« The West, and its Bedlam of a Victor's Justice System degenerates into grand guignole. »

« a man of convictions, or total despair... »

« I am briefly, but mercifully only slightly, tempted to drink poison myself. »

« Brave man, and a martyr who shall be remembered ! »

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

Le général Praljak a donc rejoint Philippe Le Bas au cimetière des Errancis.

 

En guise de bouquet de fleurs sur une tombe qui n’existe pas…

 


 
Rhapsodie pour contralto, chœur d’hommes et orchestre n°53 de Brahms sur le poème de Goethe « Harzreise im Winter »

`(Soutitres All/Angl/Esp)

 [Sara Mingardo et l’Orchestre du Festival de Lucerne 2015 dirigé par Andris Nelsons]

 

 

 

6. Drapeau YOUGO-fusil.jpeg

 

 

 

 

Mis en ligne le 30 novembre 2017

 

 

 

 

20:11 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

23/11/2017

ET MAINTENANT ?

1. Bateau Manuedl de D.jpg

 

Et maintenant ?

 

2. titre_manuel xxx.gif

3 bis. Manuel de Diéguez xxx.jpg

 

Que dirait le Général de Gaulle aux Français d'aujourd'hui ?

 

5. Général-De-Gaulle-Bundesarchiv-B-145-Bild-F010324-0002-Steiner-Egon-CC-BY-SA-3.0-1716x700_c.jpg

 

Français, Françaises, nous avons deux voisins. L'un se trouve à portée de voix: la Russie; l'autre habite un continent d'au-delà des mers, distant de six mille kilomètres de nos rivages, mais qui, depuis soixante douze ans, a planté cinq cents garnisons armées jusqu'aux dents sur nos terres et qui manifeste la ferme intention de ne jamais repartir.

Notre tâche est donc aussi claire qu'évidente: il nous faut retrouver la souveraineté de notre patrie et celle du continent de Copernic, de Descartes et de Voltaire. La question n'est plus de savoir quel rôle la Russie jouera dans la configuration nouvelle du globe terrestre qui s'ouvre devant nous, mais de tracer clairement les premiers contours d'une civilisation dont le centre de gravité serait franco-russe.

Le premier devoir d'un chef d'État informé de l'histoire réelle des nations est de réfuter la prédéfinition de la nature même des relations internationales que l'on tente de faire triompher. Qu'en est-il du concept "d'ingérence" si artificiellement contrefait ? Imaginons une France du XVIIe siècle qui n'aurait pas consacré toutes les forces de sa diplomatie afin de tenter de faire élire un pape favorable à ses intérêts nationaux par le cénacle des cardinaux, à l'heure où l'Église traçait les lignes de force du gallicanisme. Certes, le pape élu était censé se trouver expressément choisi par la volonté souveraine de la divinité en personne, mais il fallait lui prêter une main vigoureuse, comme il faudra trois siècles plus tard, prêter non moins énergiquement la main au fameux "processus historique" du marxisme afin qu'il voulût bien porter au pouvoir une classe dirigeante issue de la sainte volonté du prolétariat mondial.

Or, la Russie n'est pas seule : à ses côtés, la Chine et l'Inde dressent déjà leur immense silhouette. Il nous faut donc nous demander de la manière la plus pressante comment nous ferons du monde de demain une civilisation de la pesée des âmes vives et de la pesée des âmes mortes de Gogol.

 

Il apparaît de plus en plus clairement que la Chine entend exercer une souveraineté pleine et entière sur l'Asie centrale et que l'heure sonnera donc inévitablement où la Russie aura besoin de l'Europe pour fonder avec elle un duumvirat à l'échelle planétaire. Si, entre temps, nous n'avions pas clairement pris conscience de cette situation et si nous ne l'avions pas théorisée dans tous ses détails, comment pourrions-nous seulement rêver d'un réembarquement pour les États-Unis des cinq cents bases militaires qui occupent l'Europe depuis 1945 et, avec plus de fermeté encore, depuis 1949, date du déclenchement de la guerre froide ?

Nous nous trouvons donc d'ores et déjà placés à un tout autre carrefour de l'histoire du monde, celui d'une mutation du regard du genre humain sur lui-même et sur son destin. Cette situation n'est pas nouvelle: au IVe siècle, un ancien préteur romain, saint Ambroise, avait tenté d'apposer le sceau du christianisme sur l'histoire du monde - mais la langue de l'empire romain était empreinte de la lourdeur, de la lenteur et des solennités du temporel. Elle n'était pas en mesure de christianiser l'univers. Il a fallu attendre sa mutation interne pour que saint Augustin pût entrer dans le combat de christianiser la langue de Cicéron. Avec Les Confessions de cet évêque, le latin a acquis une sensibilité, une douceur, un souffle spirituel, une aura inaccessibles aux Salluste, aux Pétrone ou aux Quintilien.

C'est ce nouveau diapason de la langue française qu'il s'agit de conquérir. De nos jours, on voit des auteurs briser le rythme du français classique, afin de semer partout des surprises et de l'inattendu. Andocide pour les Grecs, Pétrone pour les Romains ont tenté de comprimer et de donner un pas hyper-pressé à l'éloquence latine; mais celle-ci n'y était nullement préparée. C'est l'âme et la tonalité du français qu'il faut donc porter à un autre niveau, et cela ne se fera que dans la continuation de la métamorphose du latin sous la plume de l'auteur des Confessions.

Rousseau avait compris cela d'instinct: il était allé porter de nuit ses propres Confessions sur l'autel de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Mais les temps n'étaient pas mûrs et son génie était trop épris d'un spectaculaire superficiel pour qu'il pût porter le génie français à une nouvelle souveraineté intérieure de la pensée occidentale et étendre le champ de son regard à une lucidité transcendante aux grigris collectifs planétaires qu'on appelle des théologies.

 

Dès les jeux olympiques d'hiver de Sotchi en 2014, il était devenu bien évident que la Russie entendait placer cette compétition internationale sous le signe de relations prospectives entre l'internationalisme de la culture française et l'internationalisme immanent à la culture russe. Depuis lors, il est devenu encore plus évident que l'espèce humaine ressortit à une animalité cérébralisée et prospective et que seules la Russie et la France bénéficient d'une disposition innée à faire entrer une anthropologie critique en mesure de forger une intelligentsia scientifique capable de comprendre la signification d'une religion chrétienne construite sur le mythe d'une divinité censée se subdiviser en trois "personnes", un "Père", un "Fils" et un "Saint Esprit".

Cette construction familiale de l'origine, de la finalité et des intentions du cosmos ne devient intelligible au sens psychophysiologique du terme que si l'une ou l'autre civilisation dispose de moyens virtuels de comprendre la Trinité sur le terrain psychogénétique, donc anthropologique. Car toute divinité repose évidemment sur une symbolique et un Dieu symbolique ne saurait se donner une progéniture physique, ce qui signifie que le Père et le Fils sont tous deux des personnages symboliques et que le Saint Esprit qui les soutient ou les chapeaute se révèle symbolique à son tour.

Pour préciser la nature et l'avenir d'une civilisation franco-russe, il nous faut donc une réflexion capable de décrypter les fondements anthropologiques de ce mythe de la trinité, puisque c'est du vêtement de ce mythe-là que le christianisme s'enveloppe depuis vingt siècles. Quand deux civilisations s'entendent sur un cadrage aussi fondamental, elles ne peuvent que s'approfondir ensemble. Or, si l'Occident catholique attelle le Père et le Fils à la charrue de l'histoire, l'orthodoxie russe les subordonne tous deux à un personnage insaisissable, réputé les chapeauter de haut et censée avoir débarqué sur la terre avec la Pentecôte.

Fonder une anthropologie critique capable de radiographier ce mythe, c'est se donner l'arène d'une réflexion fidèle à la fois au "connais-toi" socratique et aux Confessions d'Augustin qui, pour la première fois, a élevé le genre humain au rang d'un interlocuteur de lui-même et de personne d'autre.

 

L'approfondissement de la connaissance scientifique sur l'anthropologie d'une divinité trinitaire, met donc nécessairement la France et la Russie en dialogue sur le mode le plus originel possible, celui de la définition de la hauteur et de la bassesse, de la grandeur et de la petitesse, d'un aristocratisme des sommets et des ruptures de l'ignoble.

Qu'on le veuille ou non, il faudra donc forger des âmes capables de féconder la civilisation franco-russe à partir de l'évidence qu'aucun démiurge ne s'est attardé à créer des plaines, des montagnes, des mers et des fleuves. Il faudra bien forger une humanité qui acceptera qu'il n'y ait personne dans son dos, qui acceptera comme une évidence qu'il existe des milliards de soleils en feu et des vermisseaux acharnés à ramper sur une petite boule instable. Une civilisation du néant est à nos portes - à nous d'apprendre à féconder le vide et le silence de l'éternité. Pour cela, il nous faudra, comme l'écrivait Balzac, à "arracher des mots au silence et des idées à la nuit".

Mais ne sommes-nous pas déjà en route sur ce chemin-là, puisque nous retrouvons, à ce carrefour l'homme qui savait qu'il ne savait rien et qui avait fait de la science de son ignorance, l'objet même de la philosophie occidentale ? Déjà nous observons comment l'étau de l'OTAN se referme sur elle.

24 novembre 2017

Source : http://aline.dedieguez.pagesperso-orange.fr/tstmagic/1024...

 

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

Sotchi

Bachar al-Assad embrasse chaleureusement Vladimir Poutine et le remercie

Le Saker.is – 21 novembre 2017

 

5. POUTINE-ASSAD SOTCHI.jpg

 

Bachar al-Assad de Syrie a rendu une visite surprise à la Russie pour la remercier de l’aide qu’il a reçue de Moscou dans la lutte contre le terrorisme.

[Une fois encore – prudence élémentaire - cette visite à Sotchi n’a été révélée qu’après son retour à Damas. NdGO]

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

La rencontre Poutine-Al Assad cimente la fin de la domination US au Moyen-Orient

Quoi qu’il puisse arriver après cela, les États-Unis ont perdu toute crédibilité dans la région, sauf à Riyad et à Tel Aviv

Tom Luongo – Russia Insider 21.11.2017

 


 

Je ne suis pas un homme terriblement religieux. Mais j’aimerais croire qu’un coin spécial de l'enfer est réservé à ceux qui ont fomenté la guerre de Syrie.

Depuis ses débuts en Libye et les premiers acheminement d’armes via l’ambassade US à Benghazi jusqu’à la rencontre d’hier entre le président russe Vladimir Poutine et le président syrien Bachar al-Assad, on se souviendra de cette affaire tout entière comme d’un des épisodes les plus cyniques et les plus violents de l’histoire.

La « guerre civile » syrienne aurait dû constituer le couronnement de la politique US-israélo-saoudienne au Moyen-Orient, l’apothéose du néo-conservatisme.

Si l’entreprise avait réussi, elle aurait transformé le monde en un enfer sur la terre, gouverné par les Hillary Clinton, George Soros, Angela Merkel, cartel des banques US/UK et tutti quanti.

La Syrie devait être le coin qui allait permettre de faire sauter non seulement le Moyen-Orient mais également l’Asie Centrale. Sa défaite aurait mis fin à la renaissance de la Russie en tant que puissance mondiale, aurait soumis l’Europe à un cauchemar sans fin d’assimilation culturelle forcée et achevé de mettre en faillite les États-Unis, pour les aligner sur un projet raté d’intégration européenne.

Des traités internationaux tels que le TPP, le TTIP et les Accords de Paris ont été conçus pour créer une superstructure qui devait supplanter les souverainetés nationales, sans aucune intervention des peuples qui en auraient été les plus affectés.

 

Le tournant Poutine

Avec le discours-charnière de Vladimir Poutine aux Nations Unies, le 28 septembre 2015, une opposition à ce plan s’est exprimée de la manière la plus énergique et dans les termes les plus humanistes qu’il fût possible d’imaginer. Je me permets de vous en rappeler le passage le plus important, puisqu’il se rapporte à la Syrie.

 

« Dans ces circonstances, il est hypocrite et irresponsable de faire de bruyantes déclarations sur le danger que représente le terrorisme international, en même temps qu’on ferme les yeux sur les canaux par lesquels sont financés et équipés les terroristes, en ce compris le trafic illicite des armes et du pétrole. Il serait tout aussi irresponsable d’essayer de manipuler des groupes extrémistes et de les prendre à son service, avec l’intention d’atteindre par là ses propres buts politiques, en espérant pouvoir s’occuper d’eux plus tard, autrement dit les liquider.

À ceux qui font cela, je voudrais dire : Messieurs, vous avez affaire sans aucun doute à des gens brutaux et cruels, mais aucunement à des primitifs ou des idiots. Ils sont tout aussi malins que vous l’êtes et on ne sait jamais qui manipule qui. Les récentes informations sur les armes transférées à cette opposition « des plus modérées » en sont la preuve.

Nous croyons que toute tentative de se livrer à des jeux avec les terroristes, pour ne rien dire de les armer, n'est pas seulement à courte vue mais joue carrément avec le feu. Cela pourrait avoir pour conséquence l’augmentation dramatique d’une menace terroriste mondiale qui submergerait de nouvelles régions du globe, surtout si l’on considère que l’« État islamique » entraîne dans ses camps des militants venus de nombreux pays, y compris des pays d’Europe. »

 

À la vérité, ce discours tout entier mérite d’être relu et médité.  Il rappelle de façon frappante comment Poutine, généralement très réservé dans ses paroles, a mis toutes ses cartes sur la table et accusé directement les États-Unis d’avoir déclaré la guerre au monde.

Et dans les 48 heures qui ont suivi, les Sukhois ont commencé à survoler la Syrie et à bombarder tout ce qui s’opposait au gouvernement syrien, permettant ainsi à l’Armée Arabe Syrienne assiégée de remporter victoire après victoire. Peu de temps après, une coalition devait se former autour du gouvernement Assad, comprenant la Garde Républicaine iranienne, l’aile militaire du Hezbollah et le soutien tacite, moral et financier, de la Chine.

À l’ONU, Poutine a dit à tout le monde « Ça commence à bien faire ! ». Puis, il a soutenu ses paroles par des actes. La guerre est toujours regrettable. Elle n’est presque jamais justifiée. Mais, quand on se trouve face à un ennemi implacable, il n’y a vraiment pas d’autre solution.

Et je prétends que les forces néo-conservatrices qui ont décidé de la politique anti-Assad sont cet implacable ennemi.

 

La fin d’« Assad doit partir »

Cette action a déclenché le processus de détricotage de la fable soigneusement ourdie qu’a été la prétendue guerre civile syrienne.

Mais laissons là l’histoire.

Hier, Poutine a présenté les uns aux autres Assad et les commandants militaires qui sont au premier chef responsables de la stabilisation du pays. La Syrie en tant qu’unité politique a survécu.

 

 

 

La vieille garde de l’Arabie Saoudite est emprisonnée, dépouillée de ses biens et elle perd, à chaque minute, davantage de son influence dans le monde. Le gouvernement néoconservateur d’Israël, avec à sa tête le dément Benjamin Netanyahou, fulmine d’impuissance devant le tour qu’ont pris les événements, et, bien entendu, l’ISIS a été rien moins que balayé tant en Syrie qu’en Irak.

Les États-Unis continuent à parler « des deux coins de la bouche », permettant à certains membres de l’ISIS de s’échapper pour pouvoir les réutiliser plus tard, probablement contre l’Iran et/ou le Liban, tout en s’attribuant le mérite de l’effondrement de l’« État islamique » et de la prise de Raqqa.

Ceci donne une image des profondes questions qui agitent les vastes communautés US – diplomatique, militaire et du renseignement –, et les difficultés qu’affronte le président Trump pour mettre au pas ces groupes disparates sans paraître faible et inefficace.

Il n’y a qu’à voir le curieux événement de ce week-end, avec son ballet d’hélicoptères militaires atterrissant au Quartier Général de la CIA à Quantico, pour savoir que, au minimum, une guerre intestine se déroule au sein du gouvernement US.

La meilleure explication que j’aie entendue (mais ce n’est aucunement un fait corroboré) est que l’Armée US se livre à une démonstration de force contre les reliquats de l’administration Obama, qui s’accrochent à l’intérieur de la CIA et continuent à manipuler leurs mandataires en Syrie. Et que ces opérations sont directement en conflit avec les buts qu’y poursuit l’Armée US.

Si c’était bien le cas, Poutine a raison de tout simplement ignorer les Américains et de poursuivre ses pourparlers politiques à un rythme accéléré, en faisant fi de ceux de Genève et en apportant à Assad tout le soutien dont il a besoin pour continuer à diriger la Syrie, du moment que c’est ce que les Syriens veulent.

Étant donné le soutien évident que son armée apporte à Assad et la manière dont elle a mené sur le terrain la guerre contre ISIS et les autres forces séparatistes, il n'est guère douteux qu’Assad obtiendra leur adhésion lors de toute élection à venir.

 

Poutine ne pavoisera pas

La grosse question, en attendant, est de savoir quel prix sera exigé des USA pour le rôle qu’ils ont joué dans cette affaire. Poutine ne mettra pas Trump dans une position intenable. Les USA ont déjà perdu la face au plan international.

La complicité de l’administration Obama dans ce triste chapitre de l’histoire du Moyen-Orient a été mise à nu pour quiconque a des yeux pour voir.

Poutine offrira à Trump un moyen, pour les États-Unis, de sauver la face en faisant porter le blâme par les Obama, Clinton, McCain et le reste de la clique. Si vous ne pensez pas que ceci a quelque chose à voir avec le fait que l’enquête de Robert Mueller sur le Russia-gate  soit devenue incontrôlable, c’est que vous ne faites pas assez attention.

Mueller est désespérément en train d’essayer de faire échapper tous ceux qui ont trempé dans cette affaire à des poursuites pour haute trahison. Mais, à mon avis, tout ce qui se rapporte à la scène politique américaine est sur le point de changer radicalement. Une fois que le juge Roy Moore sera entré au Sénat (et les chance pour que cela n’arrive pas sont proches de zéro) Trump aura une majorité inaccessible aux manoeuvres de destitution, tant à la Chambre qu’au Sénat, et pourra réduire Mueller au silence ou l’envoyer se faire voir.

Trump a ici la possibilité de jouer les pacificateurs. Il peut affermir sa position en se faisant le manieur des pires acteurs d’Arabie Saoudite et d’Israël, et en les tenant au bout d'une courte laisse.

En fait, on pourrait arguer de façon crédible que c’est à cela que rime réellement la purge en train en Arabie Saoudite. Le contre-coup de Mohammed ben Salmane s’est fait avec la bénédiction de Trump.

Poutine peut agir de même pour dissiper les soupçons quant aux intentions de l’Iran et du Hezbollah. Il peut aussi empêcher Assad, s'il en est besoin, d’exercer sur ses ennemis des représailles pourtant richement méritées, de manière à construire une paix durable. Et une fois les pourparlers terminés et la menace d’indépendance Kurde écartée, la Turquie retirera ses troupes de Syrie.

Poutine doit appeler Trump ce soir pour le mettre au courant du suivi. Il est évident que les deux hommes ont été en contact sur la manière dont les choses progressent en Syrie. Et Trump a, pour sa part, très intelligemment laissé le nettoyage final aux soins de Poutine, pour ne s’occuper que de ses problèmes néoconservateurs internes.

Quoi qu’il puisse arriver après cela – mise en place d’une structure pour une paix durable ou cessez-le feu précaire avec la Russie jouant temporairement les médiateurs – les USA ont perdu toute crédibilité dans la région, sauf à Riyad et à Tel Aviv.

Et nous n’avons personne à blâmer que nous-mêmes.

 

0. Tom Luongo.jpgTom Luongo est un analyste économique et politique indépendant. Sans détours et intransigeants, on peut trouver ses travaux sur Seeking Alpha pour ce qui touche à l’économie, sur Halsey News pour les questions culturelles et géopolitiques, ainsi que sur son blog personnel Gold, Goats ‘n Guns (« De l’or, des chèvres et des flingues »). Tom est aussi l’ex-rédacteur de Resolute Wealth Letter et il contribue couramment à Newsmax Media’s Financial Intelligence Report. Il vit au nord de la Floride avec sa femme, sa fille, son troupeau de chèvres laitières et ses chiens.

On peut le suivre sur Twitter @TFL1728

Source : http://russia-insider.com/en/putin-assad-meeting-cements-...

Traduction : c.l. pour Les Grosses Orchades

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

Discours de Vladimir Poutine aux Nations Unies – 28 septembre 2015

(sous-titré en français)

 


 

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

Voici qui va s’ajouter aux 500 bases que déplore tant Manuel de Diéguez :

 

Lart de la guerre

 

Naissance de la PESCO, fille de lOTAN

 

Manlio Dinucci - Il Manifesto - 21.11.2017

Traduction : Marie-Ange Patrizio

 

7. PESCO .jpg

 

Après 60 années d’attente, annonce la ministre de la Défense Roberta Pinotti, va naître en décembre la PESCO, “Coopération structurée permanente” de l’Union européenne, dans le secteur militaire, initialement entre 23 des 27 États membres.

C’est le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, qui explique ce que c’est. Participant au Conseil des affaires étrangères de l’Union européenne, il souligne “l’importance, mise en évidence par de nombreux leaders européens, que la Défense européenne soit développée de manière à ne pas être compétitive mais complémentaire à l’OTAN”.

La première façon de le faire est que le pays européens accroissent leur propre dépense militaire : la PESCO stipule que, parmi “les ambitieux et les plus contraignants engagements communs” il y a “l’augmentation périodique en termes réels des budgets pour la Défense afin d’atteindre les objectifs convenus”. Au budget en continuelle augmentation de l’OTAN, dont font partie 21 des 27 États de l’UE, s’ajoute maintenant le Fonds européen de la Défense à travers lequel l’UE accordera 1,5 milliards d’euros annuels pour financer des projets de recherche en technologies militaires et acheter des systèmes d’armes communs. Ce chiffre sera celui de départ, destiné à augmenter au cours des années.

En plus de l’augmentation de la dépense militaire, parmi les engagements fondamentaux de la PESCO se trouvent “le développement de nouvelles capacités et la préparation pour participer ensemble à des opérations militaires”. Capacités complémentaires aux exigences de l’OTAN qui, dans le Conseil Atlantique Nord du 8 novembre, a décidé l’adaptation de la structure de commandement pour accroître, en Europe, “la capacité de renforcer les Alliés de façon rapide et efficace”.

À cet effet deux nouveaux commandements sont institués. Un Commandement pour l’Atlantique, avec la mission de garder “libres et sûres les lignes maritimes de communication entre Europe et États-Unis, vitaux pour notre Alliance transatlantique”. Un Commandement pour la mobilité, avec la mission d’”améliorer la capacité de mouvement des forces militaires OTAN à travers l’Europe”.

Pour que les forces et armements puissent se déplacer rapidement sur le territoire européen, explique le secrétaire général de l’OTAN, il faut que les pays européens “éliminent de nombreux obstacles bureaucratiques”. On a beaucoup fait depuis 2014, mais il reste encore beaucoup à faire pour que soient “pleinement appliquées les législations nationales qui facilitent le passage de forces militaires à travers les frontières”. L’OTAN, ajoute Stoltenberg, a en outre besoin d’avoir à disposition, en Europe, une capacité suffisante de transport de soldats et armements, fournie en grande partie par le secteur privé.

Plus important encore : qu’en Europe soient “améliorées les infrastructures civiles - comme routes, ponts, voies ferrées, aéroports et ports - de façon à être adaptées aux exigences militaires de l’OTAN”. En d’autres termes, les pays européens doivent effectuer à leurs frais des travaux de conformité des infrastructures civiles pour un usage militaire : par exemple, un pont suffisant pour la circulation des cars et poids lourds devra être renforcé pour permettre le passage des chars d’assaut.

Voilà la stratégie dans laquelle s’insère la PESCO, expression des cercles dominants européens qui, bien qu’ayant des conflits d’intérêts avec les cercles étasuniens, se re-compactent dans l’OTAN sous commandement USA quand entrent en jeu les intérêts fondamentaux de l’Occident mis en danger par un monde qui change. Voilà alors que pointe la “menace russe”, face à laquelle se lève cette “Europe unie” qui, alors qu’elle fait des coupes dans les dépenses sociales et ferme ses frontières intérieures aux migrants, augmente les dépenses militaires et ouvre les frontières intérieures pour faire circuler librement soldats et chars d’assaut.

Édition de mardi 21 novembre 2017 de il manifesto

 

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

0vation debout de 8.000 personnes pour Dieudonné à Marseille

 

Malgré l’interdiction tentée par le Maire de la ville Jean-Luc Gaudin, le résistant N°1 de France a été gratifié d’une ovation debout par les 8.000 spectateurs (aspirants résistants peut-être) venus rire à son spectacle du Dôme de Marseille, plein à craquer.

 

Dieudonné : LA GUERRE

à Marseille

 


 

Même l’im-Monde a été obligé d’en rendre compte, en dépit des efforts (surhumains) de son Décodex et de Manuel Valls réunis ! (Ceux qui traînent leurs guêtres sur Facebook n’ont qu’à y aller voir.)

 

 

2 LOGO EUROPE GF .gif

 

 

 

 

Mis en ligne le 23 novembre 2017.

 

 

 

 

 

 

 

19:50 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

16/11/2017

MISCELLANÉES DE PRESQUE RÉOUVERTURE

1. euronouillerie.jpg

 

Miscellanées de presque réouverture

(Engrangé pour vous pendant notre pause forcée)

Encore avec les moyens du bord et nos excuses renouvelées à la majorité de nos abonnés dont les adresses sont restées coincées dans le matos absent.

 

 

5. Chat lisant xxx GIF.gif

 

 

0. AFFICHE KADHAFI.jpeg

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

Revirements tectoniques en Arabie Saoudite,
sur fond de purge politique radicale

Lawrence Delforges – Comité Valmy11 novembre 2017

 

3. Adam_Garrie.jpg

 

Le roman-feuilleton géopolitique moyen-oriental ne cesse de surprendre par ses changements soudains et inattendus, si bien qu’en dépit de certains signes avant-coureurs décelés par les meilleurs analystes les gens peuvent, comme pris de court, se laisser embarquer par le discours le plus dominant, c’est-à-dire le plus relayé par la presse occidentale.

Au cours de ces derniers jours Mohammed ben Salmane, Prince héritier du trône saoudien, a procédé à une violente et radicale purge politique au sein de certaines des institutions les plus puissantes du Royaume. Au cours de celle-ci, un Prince saoudien est mort dans un accident d’hélicoptère, tandis qu’un autre était abattu parmi ses gardes du corps, alors qu’il « résistait à son arrestation ». Le Premier Ministre du Liban Saad Hariri, qui possède la double nationalité libanaise et saoudienne, a été contraint à la démission tandis que rien, extérieurement, ne semblait présager d’un tel événement.

Que se passe-t-il donc en Arabie Saoudite ? Certains avancent que Riyadh répond aux exigences de son allié secret israélien qui, en désarroi face à l’échec patent de sa stratégie de balkanisation de la Syrie (le « plan Oded Yinon »), chercherait à ouvrir un nouveau front par le Liban, en oeuvrant à déstabiliser ce pays. Cependant le Liban, tout comme la Syrie, a su résister aux tentatives de déstabilisation israéliennes par l’entremise des divers groupes « djihadistes » ou « révolutionnaires » de la région, et Riyadh sait très bien que l’Arabie Saoudite figurait aussi dans les cibles du plan Oded Yinon tandis que la monarchie a des raisons de craindre que son protecteur étasunien, inquiet des rapprochements saoudo-chinois et du tarissement inévitable de la manne pétrolière saoudienne, ne cherche à la renverser pour installer un régime encore plus fantoche à sa place.

Ainsi donc, à la roulette du pouvoir les tables tournent et avec, des changements géopolitiques d’ordre tectonique deviennent envisageables, tandis que la monarchie saoudienne lutte pour sa survie en pariant sur des projets pharaoniques dans sa « Vision 2030 », et en abjurant de se défaire de ses traditions wahhabites enfin reconnues comme d’un autre âge.

Adam Garrie, directeur de la rédaction de site TheDuran.com, devenu ces derniers temps une référence en la matière, nous en livre son analyse à Londres, le 6 novembre 2017.

 

 

 

Lawrence Desforges,
le 11 novembre 2017

Source : http://www.comite-valmy.org/spip.php?article9208

Source d’origine : GLOBAL RELAY NETWORK

 

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

Dans la foulée…

Ça baigne, en Palestine comme en Israël

Israël Adam Shamir – 15 novembre 2017

Entre la plume et l’enclume

 

Cent ans après la Déclaration Balfour, où en est-on, en Palestine ?

J’aimerais pouvoir dire que la Palestine est en flammes et qu’Israël souffre intensément, mais il faut dire la vérité. Sous Netanyahou, l’Israël et la Palestine prospèrent.

Jamais ça n’a mieux marché. Le salaire minimum du côté israélien est à plus de 1500 dollars; en deux ans, il est passé de 4000 shekels à 5300 shekels. L’inflation n’a pas suivi, en dépit des prédictions les plus lugubres. Les pauvres ne sont plus si pauvres, même si certains ne connaissent pas vraiment la prospérité. Les prix en monnaie locale sont stables. Sur la scène internationale, le shekel est haut, très haut (sans atteindre les records fulgurants de 2014), et le Trésor se bat pour l’empêcher de monter encore. C’est pourquoi les prix paraissent plutôt chers aux étrangers. Un sandwich, le modeste falafel, aussi  israélien  que palestinien, avec une boisson, vous coûteront au moins 10 dollars, et à Tel Aviv cela vous sera probablement préparé et servi par un réfugié africain. Un menu à midi coûte environ 20 dollars, un bon dîner beaucoup plus, et il faut s’y prendre bien à l’avance pour trouver une table. Voilà pour le côté israélien. Du côté palestinien, le même déjeuner vous coûtera un peu moins, environ 15 dollars. Les restaurants sont bondés, les Israéliens adorent la bouffe et ils bouffent tout le temps, s’empiffrant à tout bout de champ.

Lire la suite…

Source : http://plumenclume.org/blog/298-ca-baigne-en-palestine-co...

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

SOMMET DE l’APEC :

Le centre névralgique de l’impérialisme se déplace

Bibeau.robert@videotron.cahttp://www.les7duquebec.com

15 novembre 2017

 

5. APEC_Economic_Leaders_Week-800x445.jpg

 

Le Sommet de l’APEC 2017 au Vietnam.

 

6. apec1-300x230.gif

La semaine dernière, grand rassemblement capitaliste au Vietnam ex-socialiste et ex-anti-impérialiste sous le haut patronage des ex-vietminh « libérateurs », mutés en marchands libre-échangistes. Le communiqué d’invitation était ainsi libellé : « Le Sommet annuel des dirigeants de l’APEC est le principal évènement d’économie politique dans la région Asie-Pacifique. Ce sommet réunit les dirigeants des 21 économies du pourtour du Pacifique, ainsi que des chefs d’entreprises qui vont discuter de la voie à suivre pour la croissance, les investissements et le libre‑échange »(1).

 Comme nous le répétons inlassablement, le centre névralgique de l’économie politique impérialiste se déplace vers l’Asie-Pacifique, où sont concentrés des centaines de millions d’ouvriers surexploités, menés à la cravache par d’ex-mercenaires « libérateurs » devenus investisseurs pour le « développement » des forces productives et la « croissance » des profits. Deux invités d’honneur, parmi la fine fleur des caciques nationalistes, l’aspirant Xi Jinping, chef suprême du Politburo « communiste » chinois (déjà 350 millions de prolétaires asservis), a fait face au trouble-fête Donald Trump, défenseur du titre, ex-champion aujourd’hui moribond (moins de 150 millions de prolétaires dans ses cartons).

 Tout au long de son parcours asiatique de combattant Donald Trump a mis à mal la légende isolationniste et anti-libre-échangiste inventée par les plumitifs alors que systématiquement ce marchand de canons a offert sa camelote à chacun de ses « potes » nationalistes. Chaque fois que Donald dénonce les traités de « libre-échange » c’est pour mieux les renégocier de gré à gré au bénéfice de ses alliés de Wall Street.

 Donald le commis voyageur.

 Quels furent les enjeux de ce voyage largement médiatisé ? Sans fausse honte, le Président américain, en transit au Japon et en Corée, a vanté les mérites des armes américaines de destruction massive, indiquant ainsi le vrai motif de son agressivité patentée vis-à-vis la petite Corée du Nord, qui ne s’en laisse pas imposer par le criminel yankee, seul pays ayant utilisé deux fois la bombe atomique et moult fois des munitions à l’uranium appauvri. En Chine, Donald le colporteur, n’y tenant plus, se transforma en laudateur à l’endroit de son hôte, client privilégié, acquéreur de 230 milliards de dollars de marchandises (2). En effet, la Chine prépare soigneusement son désengagement du dollar US, la première étape étant de se débarrasser des 3500 milliards de liquidités ($) stockées dans ses banques plombées.

Lire la suite…

Source : http://www.les7duquebec.com/7-au-front/le-sommet-de-lapec...

 

Note des Grosses Orchades :

Nous avons, dans un post précédent, rendu compte du grand discours de Xi Jinping au 19e Congrès du PCC, analysé par Adam Garrie. Cela ne veut pas dire que nous partageons l’enthousiasme ou, si on veut, l’optimisme de Garrie quant aux buts annoncés et poursuivis. Considérant cependant ce que notre camarade Saint-Just appelait « la force des choses », reste à savoir quelles chances ils (aur)ont de pouvoir faire autrement, quand bien même ils le voudraient. Ces choses-là, hélas, ne se font pas in vitro.


 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

L'euronouillerie dans toute sa splendeur

Observatus geopoliticus – Chroniques du Grand jeu 14 novembre 2017

 

1. euronouillerie.jpg

 

Si la vassalité eurocratique n'existait pas, il faudrait l'inventer... Une info délicieusement navrante quoique hilarante a paru, évidemment soigneusement cachée par la presstituée.

Les Paradise Papers nous révèlent qu'une société américaine a acheté du gaz russe, l'a liquéfié puis l'a revendu bien plus cher à l'Union européenne, en le faisant peut-être passer pour du gaz de schiste américain ! Ô tempora ô mores.

Moscou vend de toute façon son or bleu et doit bien se marrer. L'empire US se moque éperdument de ses vassaux, les obligeant à torpiller leur relation énergétique avec la Russie tandis que ses compagnies font leurs petits profits avec ce même gaz russe. Quant à l'euronouillerie, heu... Comment dit-on « dindon de la farce » à Bruxelles ?

Source : http://www.chroniquesdugrandjeu.com/2017/11/l-euronouille...

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

Hexagone

 

0. Coq tricolore.jpg

 

[RussEurope en exil]

75e anniversaire de Normandie-Niémen

Jacques Sapir – Les Crises12 novembre 2017

 

Le 12 novembre 1942 arrivèrent sur la base de Rayack, en Syrie, trois C-47 (appellation militaire du DC-3) qui devaient transporter les pilotes et mécaniciens français, désignés pour constituer le GC-3 (3ème Groupe de Chasse) « Normandie » vers Bagdad, d’où ces personnels rejoindraient Téhéran puis Ivanovo, à 250 km de Moscou. Ainsi débutait ce qui allait devenir l’épopée du Groupe de Chasse le plus connu des Forces aériennes françaises libres (FAFL), le célèbre « Normandie-Niémen ».

 

8. NN jpg.jpg

Le capitaine Alfred Littolff et le commandant Jean Tulasne en juillet 1943, sur le front russe, avec des pilotes français et russes

 

Cette date du 12 novembre est symbolique des difficultés rencontrées des deux côtés, que ce soit du côté des Français Libres ou des Soviétiques. Pour ces derniers, on est en plein dans la bataille de Stalingrad[1]. Si les troupes allemandes de Paulus, le commandant de la 6ème armée, ne progressent plus dans une ville qu’elles ont conquise à 90%, la contre-offensive, que les soviétiques appellent l’opération « Uranus », n’a pas encore débuté. Elle ne commencera que le 19 novembre 1942. La contribution française, pour symbolique qu’elle soit, est venue non pas dans les temps plus faciles de 1943 et 1944, mais au moment ou tout était en suspens, où se décidait le sort de la guerre.

Lire la suite…

Source : https://www.les-crises.fr/russeurope-en-exil-75eme-annive...

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

Pourquoi nos enfants deviennent des crétins !

Charles Sannat – Insolentiae14 novembre 2017

 

9. carte-du-crétinisme.jpg

 

Mes chères impertinentes, mes chers impertinents,

Tout d’abord, je tiens tout de suite à préciser que ce titre un peu violent n’est pas une insulte à l’égard de nos enfants, mais bien une inquiétude profonde de notre avenir à commencer par le monde qu’en tant qu’adultes nous préparons, et avons d’ailleurs déjà préparé, à nos enfants.

Le crétinisme est une maladie liée au manque d’iode et qui touchait particulièrement les zones éloignées des côtes où l’apport en poissons et produits de la mer permet de fournir nos organismes en iode. C’est dans les Alpes et dans l’Eure que la prévalence de crétinisme était la plus forte.

Puis, avec des régimes alimentaires meilleurs, nous avons su faire reculer cette maladie terrible. Pourtant, le crétinisme revient, mais il n’est pas le seul.

Baisse du QI, du comportement et autisme en hausse, la santé mentale et les capacités cognitives de nos enfants, là, maintenant, sous nos yeux effarés, sont en train de s’effondrer.

La réponse à titre collectif tarde ? Prenez les devant à titre individuel.

 

Lire la suite…

Source : https://insolentiae.com/pourquoi-nos-enfants-deviennent-d...  

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

Procès Merah

Clash BHL/Dupond-Moretti : « obscénités » contre « vieille pompe à merde »

RT en français 15 novembre 2017

 

13. BHL-Dupond-Moretti jpg.jpg

 

Deux figures médiatiques s’écharpent par tribunes interposées. Bernard-Henri Lévy taxe l’avocat d'Abdelkader Merah d’« obscénité » et de « vanité », quand Eric Dupond-Moretti n’hésite pas à dégainer contre le philosophe une « vieille pompe à merde ».

C’est le choc de deux robustes égos. Le philosophe Bernard-Henri Lévy n’a goûté ni la défense et les interventions de l’avocat Eric Dupont-Moretti lors du procès d'Abdelkader Merah, qui s'est achevé le 2 novembre, ni ses interventions dans les médias. Il a exprimé son émoi dans un édito paru le 13 novembre sur le site de sa revue, La règle du jeu. La réponse du ténor du barreau n’a point tardé, en un bref exercice rhétorique assez convenu mais dans lequel il ridiculise son accusateur, concluant sa lettre par une formule empruntée qui a réjoui nombre d'internautes : «Vieille pompe à merde».

Lire la suite…

Source : https://francais.rt.com/france/45618-clash-bhl-dupont-mor...

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

Pour ce que rire est le propre de l’homme et qu’on voudrait l’avoir écrit :

Relancer le christianisme par la pub ? Chiche !

Tous les chemins mènent à Rome

Jean-Paul Brighelli – Causeur10 novembre 2017

 

10. havas-christianisme-publicite-jesus-1200x734.jpg

 

Nous recevons toutes sortes de visiteurs improbables, chez Havas. Mais quand celui-ci a franchi le seuil de notre siège, à Puteaux…

C’était un homme tout en longueur, le visage osseux, tourmenté, d’un être en proie à bien des doutes et des démons, victorieusement vaincus. « Il y avait sur sa figure la lutte de deux principes opposés, une nature mauvaise domptée par la volonté, peut-être par le repentir » dit justement Dumas. Les yeux enfoncés, le regard sombrement lumineux, les cheveux gris en brosse, il tenait à la fois de l’ancien parachutiste et du prédicateur d’apocalypses. Savonarole ressuscité !

Nous l’avons fait patienter dans l’un des canapés Boca qui agrémentent la réception. Dans ces lèvres de polyuréthane inspirées à Dali par celles de Mae West (mais les nôtres appartiennent au remodelage de l’objet par le Studio 65 sur celles de Marilyn), il avait l’air aussi à l’aise qu’une truite saisie au bleu dans une poêle chaude. Quand je l’ai reçu enfin, il paraissait à point — comme la truite susdite. Plus écarlate que le lycra rouge baiser du canapé.

Fidèle, fidèle, dis-moi qui est la plus belle

Il s’est présenté. Il était prêtre (ce qui ne m’étonna point : même en civil, il avait l’air d’être en soutane), et était mandaté discrètement par le Vatican pour explorer la possibilité (la faisabilité, dit-on désormais en français global) d’une campagne visant à relancer le catholicisme.

« Nous perdons des fidèles chaque jour, depuis des années », a-t-il expliqué. « Une hémorragie que nous ne nous expliquons pas. »

J’ai discrètement consulté ma Bible — je veux bien entendu parler du Net. Qui m’a révélé, si je puis dire, que près de 65% des Français ne se reconnaissent dans aucune religion, et que la plupart d’entre eux s’affirment athées. « Quel magnifique marché potentiel ! », me suis-je exclamé en lui communiquant ces chiffres — qu’il connaissait, hélas… Après tout, nous avons fait boire Evian, il y a quelques années, à un bon nombre de vieux qui se sont identifiés à nos plongeurs (tous des ex-champions recrutés pour la circonstance).

 


 

Et à une quantité de jeunes femmes convaincues qu’elles y trouveraient l’eau de Jouvence et de résurrection de leurs petits capitons.

 


 

Sans parler de celles qui ont réellement cru, sans que nous l’ayons dit, que c’était l’eau-miracle des biberons — alors qu’elle a plutôt un effet laxatif, mais chut !…

Nos chrétiens ont du talent !

Mon visiteur m’a avoué que cette vieille campagne — « We Will Rock You » remixé par KCPK avec des intonations enfantines — avait décidé la hiérarchie catholique à oser cette démarche quelque peu iconoclaste sur laquelle il nous demandait, bien sûr, la plus grande discrétion.

 


 

« Nous avons eu une grande concertation, à Rome, et le Saint Père (j’appartiens à la même congrégation que lui — il n’y a que des jésuites pour oser la modernité) s’est enthousiasmé de nos propositions. « Ce serait formidable, a-t-il dit, si dans toutes les églises, les fidèles pouvaient…

 

1719155957.31.GIF

Lisez la suite de l’article ici sur le blog de Jean-Paul Brighelli

 

Source : https://www.causeur.fr/catholicisme-combat-publicite-egli...

 

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

11. cropped-mathaba_header  GIF.gif

Hommage à Mouammar Kadhafi – Sam. 18 nov. – Théâtre de la Main d’Or, avec Dieudonné.

 

12. LES KADHAFI.jpg

 
Le 20 octobre dernier datait le sixième anniversaire de l’assassinat du dirigeant Libyen et Africain. Nous rendrons hommage ce samedi 18 novembre au combattant pour l’indépendance de son pays et du continent africain, tombé dans les champs de bataille orchestrés par les criminels Sarkozy et Bernard-Henri Levy, la haineuse Clinton et le fourbe Cameron avec le soutien matériel du Qatar et la complicité de la presse arabe.

Hommage au grand héros africain : Mouammar Kadhafi, guide de la Jamahiriya !

Tout ce qui est arrivé après l’assassinat du Guide, le renversement de la Jamahiriya, la situation chaotique dans laquelle se trouvent la Libye et le Sahel, le flot de migrants généré par cette situation confirment les constats qui suivent.

Kadhafi avait un projet de civilisation que les ennemis de l’humanité ont fait échouer.

Kadhafi avait un projet humanitaire qui a été confisqué afin de faire tomber la Libye et les régions voisines dans un conflit permanent.

Kadhafi avait un projet de liberté qui a été liquidé en faveur de la domination des forces de l’injustice, de l’oppression et de l’asservissement religieux, social et économique.

Kadhafi avait un projet de justice sociale et économique ciblant le capitalisme mondial qui met la main sur tous les moyens d’existence de tous les peuples.

 

Où est le corps du leader Kadhafi ? Pourquoi a-t-il été caché ?

Pourquoi n’a-t-il pas été rendu à sa famille ou à sa tribu, comme le veut la tradition ?

Pourquoi les Instances internationales n’ont elles jamais enquêté sur le meurtre de Mouammar Kadhafi ?

Nous avons créé une commission d’enquête en mars 2011 afin de faire connaître la vérité sur les mensonges et les accusations de la presse nationale et internationale.

Nous allons créer un Comité de Soutien à Saïf Al Islam Kadhafi dans son combat pour rassembler les Libyens épris de Justice, de Liberté et de Solidarité.

Hommage à Mouammar Kadhafi – Sam. 18 nov. – 15 h. à 18 h.
Théâtre de la Main d’Or, avec Dieudonné.
Signataires :

La Voix de la Libye.com

Dieudonné et le Théâtre de la Main d’Or.

Le CRI, Comité Révolutionnaire International.

Comité de Soutien à Saïf Al Islam Kadhafi.

L’Association   Entre la Plume et l’Enclume.

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

Libye : CNN filme une enchère aux migrants vendus comme esclaves pour 400 dollars (VIDEO CHOC)

RT en français15 novembre 2017

 

14. CNN .jpg

Un migrant dans un centre de rétention à Gharyan, ville côtière en Libye, en octobre 2017

 

Une équipe de journalistes de CNN a pu filmer une scène témoignant de la réalité de l’esclavage en Libye. La vidéo atteste de l'enfer humain qu'est devenu le pays depuis le renversement de Mouammar Kadhafi en 2011.

En août 2017, CNN recevait une vidéo tournée clandestinement, attestant de la tenue de marchés aux esclaves en Libye. En octobre dernier, une équipe de la chaîne s'est rendue sur place et a pu filmer une mise aux enchères similaire, dans un lieu qui n'a pas été précisé. « Un homme grand et fort pour les travaux fermiers », vante la voix d'une personne hors-champ, vraisemblablement un vendeur. Le  jeune homme noir en question sera finalement vendu pour sa force de travail pour 1 200 dinars libyens, soit environ 740 euros. D'autres sont vendus pour l'équivalent de 400 euros.

 

 

 

Lire la suite…

Source ; https://francais.rt.com/international/45629-libye-cnn-fil...

 

4 LOGO EUROPE  GIF.gif

 

 

Mis en ligne le 16 novembre 2017

 

 

 

16:52 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

07/11/2017

LA BÉNÉDICTION SYRIENNE & LA RÉVOLUTION D'OCTOBRE

1. Le croiseur Auroe 1.jpg

 

Michel Raimbaud :

La bénédiction syrienne

Institut Tunisien des Relations Internationales 7 novembre 2017

 

Grand ami de la Syrie et de son peuple, du droit et de la justice, Michel Raimbaud était aux côtés de la Syrie depuis le début de cette guerre. Ce faisant il a sauvé l’honneur de la diplomatie française. Merci Excellence.

 

0. asma-al-assada-rose-in-the-desert1.jpg

 

Durant ces interminables années de brouillard et d’enfer qu’a traversées la Syrie, qu’aurait été la vie sans l’espoir ? Pensons ici d’abord au peuple syrien martyrisé et exposé à un ethnocide, à son armée nationale qui aura payé un si lourd tribut à l’agression barbare lancée par le groupe de ses « amis », et aux responsables qui face à la « communauté internationale » ont dû porter à bout de bras l’État visé par un politicide…

La bénédiction syrienne Durant ces interminables années de brouillard et d’enfer qu’a traversées la Syrie, qu’aurait été la vie sans l’espoir ? Pensons ici d’abord au peuple syrien martyrisé et exposé à un ethnocide, à son armée nationale qui aura payé un si lourd tribut à l’agression barbare lancée par le groupe de ses « amis », et aux responsables qui face à la « communauté internationale » ont dû porter à bout de bras l’État visé par un politicide…

On pensera aussi aux amis, défenseurs et partisans de la Syrie légale, tous ceux qui aimaient cette société plurielle, tolérante, aimable et hautement civilisée, et craignaient qu’elle ne disparaisse à jamais.

Certes, la flamme ne s’est jamais éteinte, mais il était permis aux plus optimistes de s’interroger parfois ou de douter de l’avenir face aux assauts d’une coalition islamo-israélooccidentale abreuvée de centaines de milliards de pétrodollars et puisant ses combattants dans un vivier inépuisable de mercenaires venus de cent horizons. La Syrie tiendrait-elle, face à la meute féroce des puissances impériales – grandes, petites ou moyennes – de « l’Axe du Bien », contre la horde sauvage des djihadistes démocrates, des terroristes modérés, des révolutionnaires en peau de lapin ? Résisterait-elle aux cohortes de déserteurs, de transfuges qui se donnaient rendez-vous au sein d’une « armée libre » téléguidée par ses pires ennemis, aux ordres et à la botte des islamistes et de leurs parrains, faisant la roue pour séduire le ci-devant « ennemi sioniste »?

Comme tous les pays plongés dans des situations troubles, la Syrie a connu la fatalité des infidélités, des lâchetés, des compromissions, des corruptions petites ou grandes, mais son peuple, au sens noble du terme, a résisté vigoureusement, ses institutions sont restées debout et ses gouvernants ont tenu bon. Grâce à sa résilience étonnante, l’État syrien s’est fait des alliés solides qu’il a su fidéliser : la Russie et la Chine d’une part, l’Iran, le Hezbollah et ses alliés d’autre part. Une réalité qui allait interdire la répétition au « Pays de Cham » d’un scénario irakien, libyen ou yéménite.

Néanmoins, les « grandes démocraties » ne pouvaient que rester aveugles et sourdes à ces réalités dérangeantes et déplaisantes, la Syrie étant depuis la fin de la guerre froide un pays à détruire et à abattre. Les élites désormais acquises au néoconservatisme n’ont rien trouvé de mieux que de soumettre les « opinions » à un tapage médiatique sans précédent allant de pair avec une omerta sans faille et un lavage de cervelle ahurissant. En brèves de comptoir de « sciences-po » ou de « France désinfo », la doxa occidentale sur le conflit de Syrie s’est trouvée résumée dans une ou deux sentences lapidaires, symboles assez désolants de la subtilité réduite de nos dirigeants, de nos analystes et de nos penseurs, expressions de l’arrogance indécrottable des Occidentaux. « Bachar doit partir », « Pas de place pour Bachar dans l’avenir de la Syrie »…

C’est alors qu’intervient la « malédiction syrienne » qui aura sanctionné les décideurs, les faiseurs d’opinion, tous ceux qui avaient perdu une occasion de se taire. La liste est longue de ces imprécateurs qui expédiaient avec morgue Bachar Al Assad à La Haye, à Moscou, à six pieds sous terre, ou ailleurs, et qui concoctaient des plans sur la comète Syrie, en écrivant un avenir qu’ils ne verraient jamais. Combien ont répété la rengaine comme des perroquets des années durant avant d’être expédiés par les électeurs, par la providence ou par la justice immanente vers les poubelles ou les oubliettes de l’Histoire. Exit donc les innombrables bouffons et imposteurs « amis de la Syrie ».

Pour sa part, Bachar Al Assad est toujours là, incontournable, populaire chez lui comme bien d’autres en rêveraient…La Syrie, qui s’achemine vers une victoire décrétée « impensable » face à tant d’ennemis si puissants, est debout, alors que la discorde, fruit de la défaite, s’est installée dans le camp des agresseurs et que le chaos y règne en maître…

Pas besoin à la rigueur de croire au ciel pour admettre qu’il y a une « malédiction syrienne » qui a frappé et frappe les ennemis de cette « terre sainte » que « Dieu protège » (Allah hami-ha), mais il faut bien en tout cas parler d’une bénédiction syrienne. Ce qui est en train d’arriver est logique et juste, mais l’issue désormais attendue de cette guerre universelle constitue une sorte de miracle, même et notamment pour ceux qui ont eu foi en l’avenir.

Cette victoire, la Syrie l’aura amplement méritée ! Malgré tout ce que diront les esprits chagrins, quel peuple admirable, quelle armée d’exception ! Et on cèdera à la tentation de dire : s’il y a bien un homme d’État qui mérite d’être sur terre, c’est ce Président qui aura su incarner l’espoir, rester fidèle à ses alliances et conduire son pays vers la victoire.

La Syrie a, selon tous les augures, gagné la guerre. Il lui reste à gagner la paix. Mais le vaillant pays qui a combattu pour nous a certainement toutes les capacités requises pour relever avec succès ce nouveau défi afin que cette guerre n’ait pas été « une guerre pour rien ». Ce qu’à Dieu ne plaise ! Ce sera une rétribution qui, bien mieux que la vengeance, paiera le sacrifice des innombrables victimes, les morts comme les vivants.

Michel Raimbaud

Ancien ambassadeur

Source : https://tunisitri.wordpress.com/2017/11/07/michel-raimbau...

 

2. russep.gif

 

Annie Lacroix-Riz :

La Révolution d’Octobre, normale ou monstrueuse ?

 

1917 2017 c’est le centenaire de la révolution d’Octobre : Annie Lacroix Riz revient sur les causes, le contexte, le déroulé de la révolution soviétique, dans un article publié par la revue belge Le Drapeau Rouge, et en France par Initiative Communiste.

Annie Lacroix-Riz (née en 1947) est une historienne française, professeur d’histoire contemporaine à l’université Paris VII – Denis Diderot, notamment connue pour son engagement communiste de sensibilité marxiste-léniniste.

 

3. centaine-révolution-doctobre-1917-2017.png

 

La révolution d’Octobre est aussi logique que la Révolution française, qu’on ne peut expliquer qu’en décrivant, à l’exemple des grands historiens Albert Mathiez, Georges Lefebvre et Albert Soboul, la crise, de long et de court termes, de l’Ancien Régime féodal qui précéda et provoqua ce séisme.

 

Une longue situation prérévolutionnaire

Un pays arriéré, jeté dans le capitalisme entre l’oukase de 1861 abolissant le servage et la mise en coupe réglée de cette Caverne d’Ali Baba, depuis les années 1890, par les puissances impérialistes développées. La masse des paysans, plus de 80% de la population, fut soit privée de terre, soit enfoncée, plus gravement au fil des générations, dans la dette du rachat obligatoire des terres devenues « libres », à la superficie réduite à quasi rien (les paysans français avaient, eux, arraché en juillet 1793, au terme d’une lutte ininterrompue de quatre ans, l’abolition des droits seigneuriaux sans indemnité). La classe ouvrière issue de ce monde paysan misérable fut surexploitée par la grande bourgeoisie nationale et plus encore par les tuteurs de cette dernière, les grands groupes bancaires et industriels étrangers (français, britanniques, allemands, suisses, américains), qui, depuis l’ère du ministre de Witte, contrôlaient toute l’économie moderne.

Concentrée plus qu’en tout autre pays dans les grandes villes, avec sa capitale politique, Saint-Pétersbourg–Petrograd, en tête, avec l’énorme usine d’armement Poutilov, elle était combative : 40% des 3 millions d’ouvriers d’avant 1914 travaillaient dans des usines de plus de 1 000 ouvriers, et « la courbe des grèves » enfla sans répit du second semestre 1914 à février 1917, passant de 30 000 à 700 000 grévistes.

 

4. MANIF FEMMES 1917.jpg

Les manifestations de femmes ouvrières qui se déroulent à Petrograd en 1917 amorcent la révolution russe

 

La guerre russo-japonaise de 1904, insigne manifestation des appétits des grands impérialismes rivaux pour le pactole russe, s’était achevée, vu l’ineptie militaire du régime tsariste, sur un fiasco aussi cuisant que celui qui avait mis fin à la guerre de Crimée. Avec pour conséquence la révolution de 1905, dans laquelle Lénine, chef de la fraction « bolchevique » (majoritaire au congrès de Londres de 1903) du Parti ouvrier social-démocrate de Russie (POSDR), vit, après coup, « le plus grand mouvement du prolétariat après la Commune » et « la répétition générale » de celle de 1917. L’échec du mouvement fondateur des « conseils » (soviets), nouveau mode d’expression et de pouvoir populaires, fut suivi d’une terrible et durable répression : plus que jamais, l’empire fut une prison des peuples, chérie absolue du grand capital français prêteur de crédits garantis par l’État français et « tondeuse de coupons » 1. Cet échec retarderait de cinquante ans l’échéance d’une nouvelle révolution, à moins, pensait Lénine, d’une crise ou d’une guerre. La suite raccourcit les délais en conjuguant les deux.

Le système tsariste s’avéra aussi inepte qu’habituellement dans la conduite de la guerre générale. Sa chair à canon ne disposa même pas du minimum de munitions, la Russie fabriquant de 1914 à 1917 neuf fois moins de cartouches et fusils que nécessaire. Baisse de la production agricole de près du quart, gabegie des réquisitions, récoltes pourrissant sur les lieux de production, insurmontables problèmes de transport, catastrophe du ravitaillement : début 1917, même sur le front, la ration de pain ne dépassait pas la journée et les soldats-paysans (95% de l’armée) rentraient à pied chez eux. C’était pire en ville, à Moscou et Petrograd notamment. La faim fut « la cause immédiate de la révolution » de février 2. Celle-ci aboutit à l’abdication de Nicolas II, qui « avait fait l’unanimité contre lui ».

Une révolution logique

Les bolcheviques, exilés, comme Lénine (en Finlande), ou clandestins en Russie, étaient certes alors ultra-minoritaires. Mais ils cessèrent vite de l’être car le peuple russe, avide de réformes profondes, dut constater que son sort ne changeait pas. Il fut au fil des mois amèrement déçu par ceux auxquels il avait accordé sa confiance, tels les socialistes-révolutionnaires qui avaient depuis longtemps promis la terre à ceux qui la travaillaient. Même les paysans finirent par admettre, au tournant d’octobre 1917, qu’aucun autre parti que celui de Lénine, seul à démontrer depuis février sa capacité à tenir ses engagements, ne leur donnerait la terre et ne les libérerait de droit de la boucherie à laquelle ils avaient d’ailleurs commencé à se soustraire de fait depuis 1916.

Les historiens français des années 1970 montraient comment l’évolution de la conjoncture et des rapports sociaux avait en un temps record, entre août et octobre 1917 surtout, érigé les minoritaires de février en délégués exclusifs des « aspirations populaires ». L’universitaire René Girault a décrit ce processus dominé par deux questions, la terre et la paix. « À partir du putsch manqué du général Kornilov (fin août), l’évolution accélérée des soviets vers les bolcheviks, marquée par le passage de bon nombre de soviets urbains, de soldats et même de paysans à des majorités bolcheviques, montre que la constante opposition des bolcheviks à l’égard du gouvernement provisoire (et envers son “incarnation” Kerensky) remporte l’adhésion populaire ».

Le parti bolchevique réalisa dès la prise du pouvoir les réformes promises en « faisa[n]t basculer de son côté la grande masse de la paysannerie », sachant que « la confiance [que lui accordaient] les masses urbaines était beaucoup plus forte » que celle des paysans. L’analyse de l’historien socialiste rejoignait, soixante ans plus tard 3, celle du grand journaliste communiste américain John Reed, auteur des « Dix jours qui ébranlèrent le monde », chef-d’œuvre d’« histoire immédiate » de la révolution d’Octobre et de ses enjeux de classe qu’il faut lire et relire 4.

La coalition impérialiste contre les Soviets

Ce sont ces transformations effectuées avec autant de pragmatisme que de fidélité aux principes, selon Girault, qui assurèrent aux bolcheviques seuls (solitude qu’ils n’avaient pas voulue) la victoire finale dans une « guerre civile » qui, comme pour la Révolution française et toutes les « guerres civiles » depuis lors, fut d’origine et de financement surtout étrangers (comme l’atteste l’actuel cas vénézuélien). Ce n’est pas parce que les bolcheviques étaient des dictateurs sanguinaires haïs de leur peuple que, depuis 1918, « les forces armées de quatorze États envahirent la Russie soviétique sans déclaration de guerre », avec en tête « la Grande-Bretagne, la France, le Japon, l’Allemagne, l’Italie, les États-Unis », tuèrent plus de Russes que la guerre même, 7 millions d’« hommes, femmes et enfants », et causèrent des « pertes matérielles estimées par le gouvernement soviétique à 60 milliards de dollars », montant très supérieur aux « dettes tsaristes aux Alliés » et qui ne donna lieu à « aucune réparation » des envahisseurs, selon « le bilan » de Michael Sayers et Albert Kahn 5. Comme les aristocrates d’Europe coalisés en 1792 pour rétablir en France l’Ancien Régime et assurer chez eux la survie des privilèges féodaux, les groupes étrangers qui avaient fait main basse sur l’empire russe et les États à leur service plongèrent à nouveau la Russie dans trois ans de chaos pour conserver leurs trésors et s’en tailler de nouveaux, telle la Royal Dutch Shell, qui comptait à l’occasion rafler la totalité du pétrole caucasien. Comme en France, la Terreur révolutionnaire ne fut que la réplique obligée aux assauts extérieurs.

L’étape actuelle de la démonisation de la Russie soviétique (ou non)

En comparant les révolutions française et russe, le grand historien américain Arno Mayer, professeur à Princeton, a confirmé ces analyses de Sayers et Kahn, futures victimes du maccarthysme 6. Si la France, a-t-il conclu, avait été une « forteresse assiégée » avant que la nouvelle classe dominante pût « s’arranger » avec les privilégiés contre-révolutionnaires de France et d’ailleurs, la Russie soviétique demeura un paria assailli de sa naissance à sa mort, et pour des motifs indépendants du caractère et des façons de Lénine ou de Staline 7. Exception, heureusement traduite, dans le paysage historiographique.

 

5. livre-noir-de-lanticommunisme-et-de-la-contre-révolution-delga.png

 

Car les historiens « reconnus » présentent aujourd’hui la révolution d’Octobre comme le coup d’État d’un groupuscule anti-démocratique et assoiffé de sang, ou, au mieux, comme une entreprise initiale sympathique, confisquée par une « minorité politique agissant dans le vide institutionnel ambiant » et débouchant, ô horreur, sur « des décennies de dictature » et sur « l’échec soviétique [marquant] l’échec et la défaite de toutes les formes historiques d’émancipation du XXe siècle liées au mouvement ouvrier » : ces jugements respectifs de Nicolas Werth et Frédérick Genevée, dans « Que reste-t-il de la révolution d’Octobre? », hors-série de L’Humanité publié à l’été 2017, confirment les regrets officiels du PCF sur son passé « stalinien » dès la publication du « Livre noir du communisme » de 1997 du tandem Stéphane Courtois (successeur de feu François Furet)–Nicolas Werth.

Écho significatif du tournant antisoviétique et pro-américain des manuels français d’histoire du secondaire négocié dès 1983, qui frappa l’URSS 8 puis la Révolution française : c’était la double obsession de Furet, historien sans archives dont « ceux d’en haut », en France, aux États-Unis et dans l’Union européenne, Allemagne au premier chef, usèrent tant des services 9. Après la chute de l’URSS et ses suites, l’extension considérable de la sphère d’influence américaine en Europe, la criminalisation de l’URSS s’imposa d’autant plus aisément que presque tous les anciens partis communistes avaient cessé d’y résister.

L’historiographie dominante est alignée sur la propagande anti-bolchevique et russophobe déversée depuis la fin de 1917. Mais on peut encore confronter la litanie des grands médias et de leurs historiens fétiches aux nombreux travaux scientifiques qui ont décrit correctement la révolution d’Octobre. Les lire sur l’événement majeur du XXe siècle permet d’aspirer une grande bouffée d’air frais. N’hésitez pas…

 

2. russep.gif

 

Note du Saker Francophone : Cet article permet d'introduire l'interview à suivre de Mme Lacroix-Riz. Il est publié sur notre site dans la suite des textes parus en septembre, 100 ans après le coup d’État bolchevique, présentant la vision de différents auteurs sur cette révolution, Emmanuel Leroy, Valérie Bugault, Youssef Hindi et Lucien Cerise. Enfin, Mme Lacroix-Riz a accepté aimablement de répondre à quelques questions.

 

2. russep.gif

 

Annie Lacroix-Riz : Révolution d’octobre et Révolution française : mythes et réalité historique.

 


 

Interview d’Annie Lacroix-Riz

par Le Saker Francophone  - 30 octobre 2017

 

Le Saker francophone : – Est-ce que cet anniversaire de la révolution russe n’est pas finalement une excellente occasion de remettre l’Histoire sur le devant de la scène ? On a l’impression que l’Histoire cachée sous le tapis du confort matérialiste ressurgit de tous les côtés comme celle de la création de l’UE à l’occasion des dernières élections présidentielles ?

Annie Lacroix-Riz : – L’Histoire n’a en France pas si souvent été « cachée », elle est plutôt sur le devant de la scène, et tout ou presque est l’occasion d’en faire ou de faire semblant d’en faire : bicentenaire de la Révolution française, « mémoire » de la colonisation, centenaire de la Première Guerre mondiale, anniversaires de 1944, de 1945. On peut noter cependant la discrétion de violette sur l’anniversaire, en 2008, de la conférence de Munich de septembre 1938, silence d’autant plus singulier que toute campagne de propagande contre un « ennemi » présenté comme égal à Hitler ou pire, depuis plus de 60 ans (Nasser en 1956, Milosevic dans les années 1990, les Russes à toute occasion, la Syrie depuis 2011, etc.) offre l’occasion de tonner contre « l’esprit de Munich » supposé animer un Occident naïf et «faible » face aux menaces des « États voyous » (les Rogue States chers à la présidence des États-Unis).

Mais cette histoire est maniée par la grande presse et ses « experts » historiques à une sauce qui en masque le plus souvent l’essentiel ou qui transforme en son contraire la réalité historique pourtant établie par le travail sur les sources originales. La nouveauté des dernières décennies, en France, est que l’Histoire, qui a été et demeure un enjeu politique décisif, et qui si elle est diffusée au grand public davantage qu’autrefois, ne l’est plus guère que sous une forme qui correspond aux intérêts des puissants. Elle est présentée avec la collaboration permanente d’historiens bien-pensants, régulièrement invités, seuls admis aux « débats » dont tous les protagonistes sont toujours d’accord (les absents étant régulièrement qualifiés de « complotistes »), aux présentations de documentaires et d’émissions télévisées ou radiophoniques : les historiens officiels ou officieux jouent aujourd’hui le rôle dans la propagande des classes dirigeantes que jouaient avant-guerre les universitaires des facultés de droit et de sciences économiques, qui se mettaient souvent au service direct du grand capital. Lequel, en juillet 1936, dans une phase de propagande patronale intense à destination du public, plaça même l’un d’entre eux, le cagoulard Claude-Joseph Gignoux, à la tête (apparente) de la Confédération générale du patronat français.

Les effets de cette mise en avant sont d’autant plus graves que notre enseignement historique a été simultanément cassé, par une politique d’ailleurs conduite à l’échelle de l’Union européenne, très bien analysée par mes collègues, professeurs de l’enseignement secondaire, Gisèle Jamet et Joëlle Fontaine, dans leur ouvrage « Enseignement de l’histoire. Enjeux, controverses autour de la question du fascisme », 10. Une historienne américaine qui a depuis abandonné ce métier, Diana Pinto, avait relevé il y a plus de 30 ans la brutalité de l’offensive antisoviétique et pro-américaine dans l’historiographie française : elle avait été surprise par le « zèle de surenchère » d’une « conversion intellectuelle à l’anti-soviétisme » et au « pro-américanisme » en cours dans les manuels de fin d’enseignement secondaire, qui depuis l’après-guerre s’étaient en général montrés bienveillants pour les Soviets vainqueurs militaires du IIIe Reich et tièdes envers l’impérialisme américain 11. Certes, Diana Pinto était heureusement surprise de cette soudaine détestation de l’URSS par les historiens français (et fâchée contre les géographes qui restaient trop russophiles). Mais à mon avis, un tel article est impubliable aujourd’hui : sa franchise ferait scandale dans le Landerneau du conformisme, dont l’APHG (l’association des professeurs d’histoire géographie) est devenue une sorte de porte-parole.

La croisade n’est donc pas nouvelle mais elle a été rendue plus efficace par le succès de cette classe « européenne » de l’enseignement historique et par l’utilisation directe de l’histoire et des historiens académiques, à l’échelle européenne voire internationale : pensons aux énormes moyens dont a été dotée la campagne politique de lancement et de diffusion du « Livre noir du communisme », événement suivi depuis lors par d’autres lancements tapageurs centrés sur le caractère monstrueux de Staline et du socialisme soviétique, et accréditant le thème de l’identité nazisme–communisme. Et surtout, cette offensive ne rencontre quasiment plus de résistance. Le mouvement progressiste, et singulièrement le parti communiste, avait depuis sa naissance, et plus encore après la Deuxième Guerre mondiale, permis l’accès à un public limité mais non négligeable d’un courant historique scientifique marxiste, par différents canaux, sa propagande courante via sa presse, la formation de ses militants, la production de ses éditions, notamment les Éditions sociales.

Ce courant a disparu, non seulement parce que les éditions du PCF ont subi les conséquences de son considérable affaiblissement politique et de sa ruine consécutive, mais aussi parce que ce parti a accepté de se situer seul du point de vue de l’historiographie dominante (ou de la propagande historique dominante) : il s’est battu la coulpe à l’époque de la publication du « Livre noir du communisme » (1997) et n’a jamais cessé depuis. Il n’est que de lire l’ahurissant « hors-série » de L’Humanité de l’été 2017 sur le centenaire de la Révolution d’Octobre (évoqué dans l’article que vous avez reproduit), au titre très en vogue mais absolument a-historique (« Que reste-t-il de la révolution d’Octobre ? », mots soulignés par moi). Il n’a été fait appel qu’aux historiens partageant cette hostilité envers l’URSS et le passé communiste, qu’ils soient membres ou sympathisants du PCF ou anticommunistes et antisoviétiques notoires.

Il est piquant de noter que les historiens de la première catégorie sont parfois, tel le responsable des archives du PCF, Frédérick Genevée, beaucoup plus négatifs que ceux de la seconde catégorie, telle la collègue qui m’a succédé à Paris 7, Sophie Cœuré, auteur d’un texte plus modéré que sa production habituelle. L’article « Ces Français de Russie qui firent le choix de la révolution » est plutôt factuel, différent du ton des travaux habituels de l’intéressée, qui portent, non pas sur la réalité de l’URSS mais sur la littérature d’entre-deux-guerres des Français durablement séduits par le bolchevisme ou (surtout) transfuges du bolchevisme devenus croisés antisoviétiques. Car les travaux de Sophie Cœuré et leur affichage médiatique (systématique, notamment sur Mediapart) révèlent une vraie détestation du bolchevisme, des bolcheviques et de l’URSS.

Son principal ouvrage, « La grande lueur à l’Est », Paris, Seuil, 1999 (dont elle a confirmé l’orientation en présentant avec Rachel Mazuy, « Cousu de fil rouge. Voyage des intellectuels français en Union soviétique. 150 documents inédits des Archives russes » 12, manifeste une immense admiration pour les « témoins lucides, Victor Serge, Boris Souvarine, Pierre Pascal » : ceux qui ont rompu avec l’URSS (et dont elle ne décrit pas les modalités de l’exploitation systématique par le grand patronat français dès leur rupture) ; il professe en revanche un grand mépris pour les intellectuels restés pro-soviétiques, érigés en benêts. Sa bibliographie est idéologique, politique extérieure comprise 13. Mme Cœuré va jusqu’à reprocher à l’État français d’avoir entretenu des relations diplomatiques avec un État criminel qu’il aurait laissé libre d’organiser sa propagande en France sans mettre en place contre lui la « contre-information » indispensable (remarque hautement comique dans un pays où l’anti-soviétisme a tout submergé depuis 1918 au plus tard).

Je laisse vos lecteurs réfléchir sur le sérieux de cet extrait de sa conclusion qui atteste au moins autant d’ignorance sur les réalités françaises que soviétiques (je vous renvoie à mon ouvrage « Le Choix de la défaite : les élites françaises dans les années 1930″ 14 : « Les gouvernements de la IIIe République acceptent l’instauration de rapports inégaux dans les domaines de la presse ou de la présence diplomatique. Aucune contre-information systématique n’est organisée. Car, jusqu’au Front populaire peut-être, la France ne semble pas menacée directement. La primauté de l’enjeu intérieur explique largement l’indifférence aux souffrances des peuples soviétiques. Concevoir et comprendre cette violence massive, inédite, sans justification militaire aucune, aurait demandé aux hommes et aux femmes de l’époque, imprégnés des logiques de la guerre mondiale, un effort qu’ils n’étaient pas prêts à faire, ou qu’ils n’étaient pas en mesure de réaliser. » (op. cit., p. 294).

Mme Cœuré est régulièrement appelée à montrer avec quelle précocité les méchants bolcheviques martyrisèrent un peuple si avide de démocratie : dans le « débat » de Médiapart du 4 octobre 2017 15, le malheureux Christian Salmon doit rappeler, vers 55 minutes (sur une heure) – alors que l’animateur (François Bonnet) a tonné contre le délire massacreur de Lénine en 1918 et que Sophie Cœuré a dit son désespoir que les bolcheviques eussent si vite étouffé les « ébullitions démocratiques » nées de la si prometteuse révolution de février –, que la Russie soviétique est alors envahie par 18 pays étrangers (en fait, c’est 14, dont notamment la France, l’Angleterre, l’Allemagne, l’Italie, le Japon, les États-Unis), ce qui perturbe le fonctionnement « normal » de la démocratie. L’Humanité a évincé tout historien non antisoviétique (pour un motif ou un autre), et sollicite des intellectuels au rôle essentiel dans la croisade antisoviétique, mais dont l’autocensure pour l’occasion interdit aux lecteurs de L’Humanité de soupçonner la véritable problématique sur les Soviets.

Certes subsiste un courant historiographique critique, qu’on trouve disséminé parmi de vaillants petits éditeurs, parmi lesquels Le Temps des cerises, Delga, et tel grand éditeur accepte de publier, çà et là, un ouvrage qui détonne (j’ai eu la chance de bénéficier de telles exceptions depuis les années 1990). Mais c’est un minuscule ruisseau en regard des machines de guerre déployées tous les jours par la grande presse écrite, par la radio et la télévision, en compagnie des « historiens du consensus » (expression d’un excellent spécialiste américain du fascisme français, Robert Soucy). Ce qui vaut pour les Soviets vaut aussi pour l’histoire de Vichy, de la Résistance, de l’épuration, qui ont fait l’objet depuis une vingtaine d’années d’une droitisation radicale : certains grands éditeurs, tels Perrin et Tallandier, s’en sont fait une véritable spécialité 16. Ce courant « révisionniste » droitier, très respectueux envers nos élites, qui brocarde le « résistancialisme » (sic) ne cesse de grandir : pourvu d’un écho éditorial et journalistique considérable, il seconde efficacement des carrières universitaires difficiles dans la terrible conjoncture actuelle des sciences sociales.

– Vous postulez que l’on ne peut comprendre l’histoire qu’à travers la lutte des classes. Peut-on avoir aussi une autre grille de lecture, par exemple avec l’énergie ? N’est-ce pas la quantité, la densité et la fluidité de l’énergie qui façonne le monde ? La lutte des classes venue avec l’industrialisation n’est-elle pas qu’une construction sociale éphémère qui disparaitra avec le début de la fin des ressources fossiles ?

– La lutte des classes n’exclut en aucun cas d’autres aspects constitutifs de l’histoire, tel le développement des forces productives, auquel elle est étroitement liée et qu’elle infléchit. C’est aussi sous l’effet des luttes de classes que les forces productives et les modes de production ont évolué, et ce bien avant l’apparition du capitalisme. Pourquoi croyez-vous qu’un beau jour l’esclavage, qui avait donné lieu à de terribles révoltes, dont nous ne connaissons qu’une petite partie (Spartacus n’est évidemment pas un exemple unique des troubles provoqués par l’esclavage antique), est devenu impossible ? Pourquoi le système russe, qui s’était si longtemps accommodé du servage, a-t-il dû y renoncer et s’aligner en 1861 sur le modèle capitaliste de calcul des prix de revient ?

Il faut en finir avec les décennies d’ignorance qui nous ont fait oublier le sens exact du terme de classe, concept qui se définit par des sources de revenu objectivement antagoniques : le salaire et le profit varient objectivement en sens inverse, réalité qui oppose objectivement le prolétaire et le capitaliste, comme cela avait été le cas dans le mode de production féodal entre la rente seigneuriale et le revenu du paysan. Il faut relire Marx et Engels, notamment « L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’État » (1884) : les luttes de classes ont commencé avec l’apparition des classes, c’est-à-dire quand une minorité s’est appropriée un produit qui avait été commun à l’ère du « communisme primitif » ; la différenciation entre classes est établie dans les civilisations les plus anciennes connues par l’écriture et les fouilles archéologiques, Mésopotamie, Égypte, etc.

Les luttes des classes ne sont pas « éphémères » et elles ne datent pas de l’apparition du capitalisme ou de son triomphe comme mode de production dominant. Qu’on produise au bois, au charbon ou à l’énergie nucléaire, la question de la propriété de ces moyens de production demeure fondamentale. À quel titre pourrait-on considérer la propriété de l’énergie aujourd’hui comme une question secondaire ? Celle de l’accès à la santé publique et aux médicaments serait-elle indépendante du statut des groupes pharmaceutiques ?

– À 47’40, vous parlez très justement de guerre civile extérieure. Un peu plus tôt, vous critiquez la position des Chouans d’avoir été le parti de l’étranger, comme les nobles d’ailleurs, avec le complot des prisons. Ne peut-on pas aussi dire que d’une certaine manière, les révolutionnaires eux-mêmes représentant la bourgeoisie l’ont été directement et indirectement par des courants maçonniques anglo-saxons notamment ? Ou par l’idée de l’enrichissement par le commerce international ? Les Syriens ont par ailleurs aussi fait appel à l’étranger avec bonheur à cette heure. Finalement n’est-ce pas la qualité de l’étranger qui pose question plutôt que le principe même ?

– Le dirigeant radical Camille Chautemps, président du Conseil et pronazi notoire, définit devant les Anglais, fin novembre 1937, avec un cynisme parfait, l’excellente « guerre civile extérieure » déclenchée en Espagne contre le régime républicain par l’Axe, tuteur de Franco, qui allait triompher grâce à l’aide multiforme, pas seulement passive, des « démocraties » (France, Angleterre, mais aussi États-Unis). La France était d’ailleurs prête à recommencer, en compagnie de Londres, la même opération à propos de la Tchécoslovaquie alliée. On trouvera des précisions dans « Le Choix de la défaite », qui traite surtout du cas de la France, aux chap. 7 et 8, et dans l’ouvrage, malheureusement non traduit, de Douglas Little, « Malevolent Neutrality : The United States, Great Britain and the origins of the Spanish Civil War » 17, qui est très précis sur les responsabilités écrasantes des deux grandes puissances anglophones dans la victoire de l’Axe Rome–Berlin et de Franco.

J’ai traité de l’aide apportée par des privilégiés étrangers à des homologues menacés dans leur pays par une révolution qui venait de les déloger du monopole du pouvoir et de la propriété, en citant l’exemple de la Révolution française et celui de la Révolution d’Octobre. Il s’agit donc d’autre chose que de la question des influences extérieures exercées sur un mouvement, telles les influences mutuelles exercées par les classes bourgeoises de divers pays aux XVIIIe et XIXe siècles ; et d’autre chose que l’aide extérieure apportée par les dirigeants d’un pays étranger à des alliés, majoritaires dans leur pays, qui se trouvent en butte aux assauts d’alliés étrangers des anciennes classes dirigeantes chassées de leurs positions dominantes par la volonté populaire. La mise de tout sur le même plan (Rouges et Blancs, résistants et collaborateurs, nazis et communistes, etc.) ne saurait gommer l’essentiel : le contenu de classe des pratiques respectives.

Ce qu’on demande à un historien, c’est d’exposer le plus honnêtement possible, et sur la base des sources originales, ce qui s’est passé, c’est-à-dire d’établir les faits, leur cheminement, leurs causes. Ses préférences personnelles relèvent de sa responsabilité politique, et elles sont le fruit, elles aussi, de choix de classe : le soutien de ceux d’en haut ou celui de ceux d’en bas. Moi, et c’est actuellement rare dans le monde académique français en raison de la forte droitisation évoquée ci-dessus, je revendique plus de sympathie pour le peuple qui se défend, éventuellement avec l’aide d’amis étrangers, que pour les privilégiés qui tentent d’échapper à l’éviction que leur a infligée la majorité de leur population. Tout le monde réagit ainsi chez les historiens, souvent sans le dire ou en le niant.

Un prestigieux collègue, grand ami des banques et spécialiste des banques du XIXe siècle, un des créateurs dans les années 1990 de la « Mission historique de la Banque de France », a osé un jour me dire que je ne pouvais pas décemment être recrutée dans sa grande université de la banlieue Ouest où je souhaitais candidater, parce que j’étais « très » ou « vraiment engagée ». Je lui ai répondu courtoisement que je ne l’étais pas plus que lui, mais pas au service des mêmes, et que mon engagement ne mettait pas en cause ma complète indépendance à l’égard de mes sujets d’étude (ce qui n’était pas le cas de son « Histoire de la Banque de France » faite sur financement de la Banque de France).

J’ai assurément plus d’empathie

  • Pour les Soviétiques qui aidaient avant 1949 les Chinois à se débarrasser de leurs tuteurs vernaculaires (la clique Tchang-Kai-Chek et Song qui ruinait et affamait la population) et étrangers (les Américains, qui avouaient dans leur correspondance que cette clique était définitivement condamnée par un mouvement de libération des terres, disposant d’une majorité écrasante, général Marshall compris). Il avait été chargé de la question chinoise jusqu’à la fin 1946, avant de s’occuper de gérer l’Europe américaine, priorité immédiate car l’issue du dossier chinois était connue de tous les responsables américains dès 1945-1946 : la thèse « maccarthyste » des « taupes » du Département d’État responsables de la « perte » de la Chine relève de la pure propagande mensongère ;
  • Pour les Soviétiques aidant les Vietnamiens, qui avaient déjà, avec leur soutien politique et en armes, chassé le colonialisme français, à affronter l’épouvantable attaque américaine, projetée bien avant la signature des accords de Genève de 1954 que les États-Unis ont aussitôt violés ;

Pour les Russes, qui aident depuis plusieurs années les Syriens à résister à des assauts que les Américains avaient via le général Wesley Clark, dès 2007, annoncés contre les pays gaziers et pétroliers dont ils ne contrôlaient pas encore le produit. Après lecture du lien 18, chacun reconnaîtra que les plans affichés là ont été mis en œuvre.

Sur les interventions systématiques des États-Unis au service de leurs intérêts économiques et au mépris des intérêts économiques et sociaux de tous les peuples qu’ils assaillent, je recommande les excellents travaux, faciles d’accès et souvent traduits, du politiste américain William Blum. Il a d’ailleurs écrit une suite sur l’intervention américaine au Venezuela, dont les groupes pétroliers américains contrôlaient jusqu’à Chavez tout le pétrole : « Les Guerres scélérates » 19.

Notes

  1. Lénine, chap. 8 de « L’impérialisme, stade suprême du capitalisme »
  2. Michel Laran, « Russie-URSS 1870-1970, Paris, Masson, 1973
  3. « Les révolutions russes », t. 5 de l’ »Histoire économique et sociale du monde », Léon Pierre, éd., Paris, Armand Colin, 1977, p. 125-142
  4. Paris, 10-18, réédition, 1963
  5. « The Great Conspiracy : The Secret War Against Soviet Russia », Little, Boni & Gaer, New York, 1946, traduit en 1947
  6. Liens : http://www.independent.co.uk/news/obituaries/michael-saye...; https://en.wikipedia.org/wiki/Albert_E._Kahn
  7. Les Furies, 1789, 1917, « Violence vengeance terreur aux temps de la révolution française et de la révolution russe », Paris, Fayard, 2002
  8. Diana Pinto, « L’Amérique dans les livres d’histoire et de géographie des classes terminales françaises », Historiens et Géographes, n° 303, mars 1985, p. 611-620
  9. « L’histoire contemporaine toujours sous influence », Paris, Delga-Le temps des cerises, 2012
  10. Adapt-Snes éditions, Millau, 2016 (voir aussi mon ouvrage « L’histoire contemporaine toujours sous influence », Paris, Delga-Le temps des cerises, 2012)
  11. « L’Amérique dans les livres d’histoire et de géographie des classes terminales françaises », Historiens et Géographes, n° 303, mars 1985, p. 611-620
  12. Paris, CNRS Editions, 2012
  13. Le pacte de non-agression germano-soviétique du 23 août 1939 est réduit au pamphlet d’Yves Santamaria « Le pacte germano-soviétique », Bruxelles, Complexe, 1998, modèle d’histoire de combat idéologique, sans source aucune
  14. Paris, Armand Colin, 2010, passim
  15. https://www.youtube.com/watch?v=4rQlXw49xIA
  16. voir notamment « Troublante indulgence envers la Collaboration », feuilleton de 4 ouvrages : Denis Peschanski et Thomas Fontaine, « La Collaboration Vichy Paris Berlin 1940-1945, Bénédicte Vergez-Chaignon, « Pétain », Bernard Costagliola, « Darlan. La collaboration à tout prix », Claude Barbier, « Le maquis des Glières. Mythe et réalité », juillet 2015, p. 25, https://www.monde-diplomatique.fr/2015/07/LACROIX_RIZ/53208
  17. Ithaca, Cornell University Press, 1985
  18. https://www.youtube.com/watch?v=zXcu29fFs2M
  19. Lyon, Parangon, 2004 (Killing Hope : « U.S. Military and CIA interventions since World War II », Monroe, Maine, Common Courage Press, 2003, édition complétée de son ouvrage essentiel, « The CIA : A forgotten history », Londres et New Jersey, Zed Books, 1986) ; « Freeing the World to Death : Essays on the American Empire » (Common Courage Press) , 2004 ; « America’s deadliest export : Democracy – The truth about US Foreign Policy and everything else » (Zed Books), 2013

Ajoutons que William Blum publie, à peu près mensuellement, en anglais, un « Rapport Anti-Empire », que l’on peut recevoir en s’abonnant à sa newsletter ou en le suivant ici : https://williamblum.org/aer/read/147 [NdGO]

_________  

Source d’origine : https://www.initiative-communiste.fr/articles/culture-deb...

Source : http://lesakerfrancophone.fr/annie-lacroix-riz-la-revolut...

 

2. russep.gif

 

4. banniere-livres.jpg

 

7. LACROIX - LE CHOIX.jpg

 

 

Annie LACROIX-RIZ

Le choix de la défaite : Les élites françaises dans les années 30

(2e édition revue et augmentée)

Paris, Armand Colin, 2010

688 pages

 

 

Quelles sont les causes de la Défaite de 1940 ? Le grand historien Marc Bloch écrivait en avril 1944 : « Le jour viendra […] et peut-être bientôt où il sera possible de faire la lumière sur les intrigues menées chez nous de 1933 à 1939 en faveur de l’Axe Rome-Berlin pour lui livrer la domination de l’Europe en détruisant de nos propres mains tout l’édifice de nos alliances et de nos amitiés. » 

Annie Lacroix-Riz analyse l’histoire des années 1930 pour éclairer les causes de la défaite de 1940. Selon elle, les Français n’ont pas été simplement vaincus en cinq jours par une Wehrmacht invincible ; le haut patronat les a sacrifiés à son plan de « réforme de l’État » copié sur les voisins fascistes et à son obsession d’accord avec le Reich. Cette affirmation incroyable paraît moins audacieuse à la lecture des archives, françaises et étrangères, relatives à une décennie d’actions des élites : militaires ; politiciens ; journalistes ; hommes d’affaires surtout, qui régnaient sur tous les autres, avec à leur tête la Banque de France et le Comité des Forges.

 L’autonomie des politiciens ou des journalistes relève ainsi du mythe, celle des militaires aussi. C’est bien la France des grands intérêts économiques et financiers qui dicta le choix de l’Allemagne comme partenaire privilégié dès les années 1920 et sabota l’alliance russe de revers qui avait évité la défaite en 1914. Aujourd'hui, l’accès aux archives éclaire les causes intérieures et extérieures de la Défaite et permet « l’instruction du procès de la vaste entreprise de trahison » que réclamait Marc Bloch. 

La présente édition de l’ouvrage a été systématiquement revue et complétée à la lumière des nombreux fonds d’archives, ouvrages et articles consultés depuis 2006.

 

8. REED DIX JOURS  .jpg

 

 

 

John REED

Dix jours qui ébranlèrent le monde

Paris, Seuil, 1996

469 pages

 

 

 

Le livre

À Petrograd, l'état de siège vient d'être proclamé. Dans les salles du palais Marie, le Conseil de la république débat de la politique étrangère de la Russie, engagée aux côtés des Alliés dans la Première Guerre mondiale. Dehors, deux compagnies de junkers remontent la rue Morskaïa en chantant un refrain datant de l'époque des tsars, et de petits groupes s'efforcent de déchiffrer les innombrables proclamations collées sur la moindre surface plane : Tsik, soviets paysans, partis socialistes " modérés ", comités d'armée...

Au cours des grandes journées d'octobre 1917, John Reed a parcouru en toute liberté la "Capitale Rouge ", recueilli les analyses des principaux acteurs politiques, et écouté le peuple de Petrograd dans les cercles qui se formaient, dès l'aube, sur les places publiques, à la porte des boulangeries, à l'intérieur des casernes. De retour aux Etats-Unis, il rassembla dans ce livre l'essentiel de ses observations er revécut, dans l'urgence, cette " aventure " humaine dont il apparaît toujours, aujourd'hui, comme l'un des témoins les plus proches.

L’auteur

John Reed (1887-1920) américain, aventurier, reporter, observateur et ardent révolutionnaire communiste, a fourni un témoignage, documentaire et reportage sur la Révolution russe de 1917 qui confine au roman historique tant sa prose est prenante de vie et d'humanité.

 

9. REED-DIX JOURS xxx.jpg

 

 

 

 

 

Réédition Tribord, 2012

624 pages

 

 

 

 

 

Présentation de l’éditeur :

John Silas Reed est un militant et écrivain américain né à Portland aux États-Unis en 1887 qui mourut à Moscou en 1920 en pleine révolution bolchevique à laquelle il était partie prenante. Journaliste et socialiste, il est connu comme l'auteur de deux reportages sur des révolutions : Le Mexique insurgé (1914) et le présent livre : Dix Jours qui ébranlèrent le monde (1919), ainsi que d'un reportage de guerre (La guerre dans les Balkans - 1916). Il y raconte la prise du pouvoir en Russie par les Bolcheviks sous la direction de Lénine. John Reed suivit ainsi les premiers temps de la révolution russe décrivant le parcours de plusieurs leaders bolcheviks, Grigory Zinoviev et Karl Radek principalement. John Reed meurt en 1920, après la publication de son livre. Seul Américain à être enterré au Kremlin auprès des plus éminents leaders soviétiques. Lénine en recommanda la lecture, écrivant en 1920 : « Voici un ouvrage que j'aimerais voir imprimé à des millions d'exemplaires et traduit en toutes langues, car il décrit de manière véridique et extraordinairement vivante des événements d'une importance considérable pour l'intelligence de ce qu'est la révolution prolétarienne, de ce qu'est la dictature du prolétariat. » Par contre Joseph Staline n'exprimera pas pareil enthousiasme. Son désaccord porte particulièrement sur Léon Trotski qui est magnifié comme un héros révolutionnaire, tandis que Staline lui-même est réduit à une silhouette secondaire et mentionné une seule fois dans une liste de noms. Inacceptable pour Staline : Le livre de Reed fut donc banni. Le livre de John Silas Reed est aujourd'hui un grand classique des événements survenus lors des premiers temps de la révolution russe de 1917.

Biographie de l’auteur ;

John Reed (1887-1920) américain, aventurier, reporter, observateur et ardent révolutionnaire communiste, a fourni un témoignage, documentaire et reportage sur la Révolution russe de 1917 qui confine au roman historique tant sa prose est prenante de vie et d'humanité.

 

10. MAYER FURIES.jpg

 

 

 

Arnold J. MAYER

Les furies : 1789 – 1917 Violence Vengeance Terreur

Paris, Fayard, 2002

650 pages

 

 

 

Présentation de l’éditeur

S'interroger sur la nécessaire violence d'une révolution n'est pas une réflexion neuve mais les réponses sont ici originales. Longtemps le modèle des révolutions fut français, puis vint la russe qui relégua la révolution française au rang de péripétie. Pourtant leurs points communs sont plus nombreux qu'on ne pourrait le croire et leur comparaison se révèle d'une grande richesse réflexive. Appuyée sur une documentation impressionnante, cette étude révèle à nouveau l'importance de la violence dans l'Histoire.

Biographie de l’auteur

Professeur à l'université de Princeton, Arno Mayer a publié plusieurs ouvrages de réflexion historique (« Persistance de l'Ancien Régime »; « La solution finale dans l'histoire »).

 

2. russep.gif

 

11. LENIN_ARABIC_TRAD_DAWLA_THAWRA.jpg

 

100 ans avant la révolution Vélib, Lénine circulait à bicyclette à Paris…

Herboris – 6 novembre 2017

 

12 - Lénine à bicyclette.jpg

 

Devant les trois appartements qu'il a occupés dans le 14ème arrondissement (c'est toujours émouvant pour des croyants comme nous d'y faire un pèlerinage, même une fois par an), on pouvait, il y a plus de 100 ans, voir Lénine entretenir ou réparer sa bicyclette sur le trottoir.

La préparation était nécessaire avant de se rendre ici ou là dans la capitale ou en banlieue pour étudier l'histoire de la révolution française à la bibliothèque, améliorer son français avec une amie, ou discuter dans les cafés du quartier dans lequel se tapissaient aussi des espions du Tsar…  

Voilà donc, non pas un médecin maoïste aux pieds nus, mais, un des rares philosophes au monde qui osait mettre ses mains dans le cambouis…  

Lénine ne se déplaçait qu'à bicyclette, parfois très loin dans l'Essonne où il a également vécu et travaillé (école des futurs cadres du Parti). Quand nous sommes allés faire un petit pèlerinage à Longjumeau, nous avons retrouvé sous son appartement un restaurant turc… aux employés duquel nous fîmes l'honneur de partager le pain quotidien. Très peu francophones, ils ne comprirent pas bien nos questions et remarques sur l'appartement :

-"Il y a un vieux monsieur là haut", nous dirent-ils

-"Pouvons-nous monter le visiter ?"

-"Non, non, ce n'est pas possible…"

Alors un client bien francophone s'immisça dans notre discussion et nous demanda de la manière la plus stupide au monde:

-"Vous cherchez un hôtel ?"

Alors, ayant soudain la question kurde à l'esprit, sans savoir très bien pourquoi, nous répondîmes:

-"Non, Monsieur. Nous disions simplement que dans l'appartement du dessus, avait vécu un grand révolutionnaire"….

ET comment ne l'aurait-il pas été. Il y a quand même une plaque commémorative sur le mur extérieur qui dit: "Ici a vécu et travaillé en 1911 V. Lénine, théoricien et guide du mouvement communiste universel, fondateur de l'Union Soviétique""

IMAGE (d'un film soviétique des années 80 sur son séjour à Paris): En revenant de Juvisy, et peut-être à Longjumeau (à vérifier), Lénine descendait à toute vitesse la rue de droite quand arriva une voiture en bas à gauche, au pied de l'établissement nommé "Le Singe Violet". Elle le heurta et cassa sa bicyclette. On peut le voir tenant la roue arrière à la main et maudissant le propriétaire; en fait un vicomte: "Que le diable l'emporte", écrivit-il par la suie à sa sœur à qui il a raconta cet accident historique. Il aurait même porté plainte avec un avocat. Il serait intéressant, en cette veille ô c combien sacrée d'anniversaire de la Grande Révolution d'Octobre, si Lénine obtint effectivement des réparations de la justice bourgeoise de l'époque ou ce que cette affaire est devenue…

 

 

2. russep.gif

 

 

 

Mis en ligne le 8 novembre 2017

 

0. freccia nera grande.gif

 

 

22:54 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

UN DRONE LARGUE LES AMARRES

 

1. DRONE aux-volants-steampuk-en-carton-de-Jeroen-van-Kesteren-6.jpg

 

 

Un Drone largue les amarres

L’ANTIPRESSE, que nos lecteurs connaissent bien, s’adjoint, début janvier, une version papier à laquelle il vous est loisible de vous abonner. Pour savoir de quoi il retourne et comment faire, c’est ici :

http://www.antipresse.net/

Cliquer sur « Le Drone ? ».

En guise d’avant-première, voici l’essentiel du n° 101 de l’ANTIPRESSE, qui est aussi le n° 0 du DRONE

 

2. russep.gif

 

NOUVELLEAKS par Slobodan Despot

 

POURQUOI IL NE SE PASSE RIEN

 

Nous nous sentons dépossédés comme citoyens, trompés comme électeurs, exploités comme consommateurs, empoisonnés comme patients. Notre environnement est tissé de faux-semblants. Malgré les catastrophes qui menacent et les révélations fracassantes sur la corruption du système, rien ne change, personne ne bouge. Pourquoi ? Sommes-nous tous paranos, ou notre monde se serait-il mis à marcher selon d’autres règles?

Voici un an déjà, un film documentaire essayait de donner un sens à cette suspicion que chacun rumine sans oser l’exprimer ouvertement. Hypernormalisation d’Adam Curtis est produit par la BBC et cela constitue un utile sauf-conduit. S’il provenait d’une petite production «alternative», il eût vraisemblablement fini au purgatoire du conspirationnisme.

Curtis est un reporter audiovisuel original, connu et primé. Souvent taxé de gauchisme, lui-même se reconnaît plutôt des penchants conservateurs-libertariens. Son dernier opus témoigne d’une ambition vertigineuse de compréhension du monde actuel, tant par sa thèse que par sa longueur (2h45). Il dépeint une «grande rupture» qui serait survenue, selon lui, à l’orée des années 1970, lorsque la société industrielle est devenue trop complexe et menaçait d’échapper à tout contrôle.

Le film s’ouvre sur une tempête d’images incohérentes. Entre absurde et horreur, le narrateur pose la question unique qui sera le fil rouge de son itinéraire à travers la postmodernité. Pourquoi ne se passe-t-il rien? Comment se fait-il que nous n’ayons plus aucune vision d’un avenir différent ou meilleur? Il livre d’emblée sa thèse, qu’il illustrera au cours de neuf chapitres en apparence éclatés:

« Politiques, financiers et utopistes technologiques, plutôt que de faire face aux complexités du monde, ont battu en retraite. Au lieu d’affronter la réalité, ils ont construit une version plus simple du monde. »

Pour les élites, c’était une manière de préserver et de conforter leur pouvoir. Pour les gens ordinaires, un oreiller de paresse:

« Nous les avons tous suivis, parce que la simplicité était rassurante. »

L’idée générale qui a germé dans les têtes de la technocratie anglosaxonne et de ses ramifications globales était qu’« on pouvait gérer le monde comme un système stable ».

Cette stabilisation impliquait la mise au rebut de la politique, trop aléatoire. Les structures de gouvernement devaient s’effacer devant les structures de gestion. Celles-ci consistaient, dans le monde occidental, en une alliance entre la haute finance et la révolution informatique, offrant d’emblée des moyens de surveillance et de contrôle inouïs à des conglomérats de puissance totalement opaques. Les ex-hippies régnant dans la Silicon Valley ont habillé cette main de fer d’un psychédélique gant de velours.

Résultat observable par tous: le remplacement global des produits universellement accessibles et organiques par des produits d’ingéniérie calibrés, brevetés et élevés hors-sol, qu’il s’agisse de tomates ou de gouvernants de synthèse du modèle Macron®. (1)

 

La réalité ? On n’en a plus besoin

La neutralisation des pouvoirs publics par les structures invisibles supposait donc la construction d’un univers de façade où les rites et les valeurs de la société «ancienne» apparaîtraient préservés, mais seraient désactivés comme des armes d’exposition. La gestion de la perception allait devenir une discipline ayant pignon sur rue, hautement lucrative pour les entreprises de relations publiques. La frontière entre finance et politique, politique et médias, science et fiction, manipulation et recherche, allait peu à peu s’estomper. Bref, au mensonge de circonstance allait succéder un mensonge structurel. Et, par-delà l’appareil de cerveaulavage médiatique, l’ensemble des élites allait y contribuer.

« Les militants, les artistes, les musiciens et toute notre contreculture devinrent parties intégrantes de la manipulation, parce qu’eux aussi s’étaient retirés dans un monde de faux-semblants. C’est pourquoi cette opposition n’avait aucun effet et n’induisait aucun changement. Mais ce repli dans le rêve allait permettre à des forces obscures et destructives de croître et de prospérer dans le monde extérieur. »

Comme dans l’URSS en phase terminale, la plupart des Occidentaux avisés savaient ou sentaient que le système courait à sa perte, mais se pliaient faute d’alternative à une version virtuelle et lénifiante de leur propre modèle. En Union soviétique, cette fiction gestionnaire (jusqu’à l’effondrement final) fut appelée, justement, l’hypernormalisation.

« Vous étiez tellement un rouage du système qu’il était impossible de voir au-delà. »

Lorsque les représentations médiatiques (au sens large, comprenant la formation, la recherche et les faiseurs d’opinion) sont calquées sur la réalité objective, elles sont variées et conflictuelles. Lorsqu’elles visent à entretenir un simulacre sur lequel tout le monde s’entend tacitement, elles vont nécessairement toutes dans le même sens.

D’où le remplacement du discours réaliste par un discours politiquement correct. D’où l’appauvrissement et l’abêtissement spectaculaires des programmes culturels, médiatiques et scolaires. Un effondrement qui se chiffre aujourd’hui en pertes sèches de quotient intellectuel dans les populations occidentales. La mutilation délibérée des capacités de mémoire et de discernement est compensée et masquée par une hypermoralisation générale et la multiplication de tabous de pensée et de langage. En quelques années, nous avons annihilé le travail de plusieurs siècles d’éducation à la raison.

Curtis illustre de manière saisissante l’emprise des fictions moralisantes sur la conscience commune. Il narre entre autres la montée en épingle d’un «méchant à notre goût» qu’on aimait à détester: Mouammar el-Kadhafi — bad boy narcissique et donc consentant à son rôle —, puis sa «rédemption» opportune au profit de l’Occident à la veille de l’invasion de l’Irak. Pour être subitement reconnu comme chef d’Etat honorable, et même comme philosophe, il lui avait suffi de revendiquer à la face du monde l’attentat de Lockerbie, dont tout le monde, à commencer par lui-même, savait qu’il n’était sans doute pas coupable !

On comprend pourquoi un « ennemi utile » aussi encombrant devait absolument être éliminé. Ce fut la mission, en l’occurrence, des services français, sous le couvert de lynchage par les milices locales. De même que — ceci n’est pas dans le film —, l’asset de la CIA Oussama Ben Laden devait disparaître sans laisser ni témoignage ni trace. Du coup, le seul «document» attestant de sa traque et de sa mort demeure le film de Kathryn Bigelow, Zero Dark Thirty. Un bon film… de fiction.

Dans le sillage de ces jeux d’ombres, l’actualité internationale ressemble de plus en plus à des numéros de prestidigitateurs ou de marionnettes, où d’épouvantables méchants occupent toute la scène avant d’être remplacés par d’autres une fois leur partition accomplie… et de disparaître (pour de bon) dans le néant. Ceausescu fusillé, Saddam pendu, Kadhafi empalé, Milošević sans doute empoisonné, Ben Laden jeté dans l’océan… pour que son Al Qaïda puisse redevenir un allié officiel de l’Occident!

A suivre au prochain numéro: *Une expérience personnelle: Guerre de Bosnie, 1992.

NOTE

  1. Savourer à ce propos la dernière bouffonnade «hors sol» du Conseil fédéral sur l’«ouverture» ultralibérale du marché agricole suisse.

 

HYPERNORMALISATION

Alan Curtis


 

2. russep.gif

 

ANGLE MORT par Fernand Le Pic

 

LES ANTIFAS SANS CAGOULE

 

Ils frappent partout, mais semblent venir de nulle part. Ils dénoncent un «fascisme» omniprésent et fantasmé. Ils n’ont aucune existence juridique mais bénéficient d’incroyables indulgences judiciaires. Qui sont-ils ?

 

13. become-ungovernable.jpg

 

Les Antifas se plaisent à revêtir le noir, toujours encapuchonnés et masqués comme les Black Blocks, dont ils sont l’avatar. Comme on le sait, la dénomination Schwarzer Block fut imaginée dans les années 1980 par la police de Berlin-Ouest pour désigner les Autonomes de Kreuzberg. Ce quartier jouxtant le «Mur» faisait encore partie du secteur d’occupation US jusqu’en 1990. Autrement dit, les Black Blocks sont nés dans un territoire sous contrôle militaire américain.

C’est important, car au même moment apparaissait aux États-Unis, plus exactement à Minneapolis (Minnesota) l’Anti-Racist Action Network (ARA). Ce groupe recrutait dans les mêmes éprouvettes punk et squat qu’au sein du laboratoire de Berlin Ouest. Entre scientifiques de l’agitprop, on collabore. Dissous en 2013 pour ressusciter sous le nom de Torch Antifa Network, le but de ce mouvement était, dès l’origine, de combattre le sexisme, l'homophobie, les idées anti-immigrationnistes, le nativisme, l'antisémitisme ou encore l'anti-avortement. Bref, quelques-uns des leviers de démantèlement d’une société traditionnelle bordée d’ignobles frontières, que l’on retrouve aussi bien dans les programmes officiels de la Commission de Bruxelles et de ses ONG-écrans que dans les feuilles de route de la galaxie Soros.

 

Les étranges filières de l’argent « humanitaire »

Mais on a beau se faire appeler du doux nom d’Anti-Racist Action Network, cela ne suffit pas : il faut des sous. En cherchant un peu, on les trouve en Alabama, du côté du SPLC (Southern Poverty Law Center), une ONG qui se targue, sur son propre site web, d’être la matrice de l’ARA. Autrement dit, la genèse des Antifas américains n’a évidemment rien de spontané. C’est à ce richissime SPLC qu’a incombé la tâche de créer cet ARA de laboratoire. Il est vrai qu’avec une dotation de financement de plus de 300 millions de dollars, le SPLC a de quoi voir venir, même si on retranche le salaire net de son président, qui émarge à plus de 300'000 dollars par an. C’est beau le « non-profit » politique au pays de l’oncle Sam !

Mais si ces gens-là ont les moyens, ils ne jouent pas pour autant la transparence sur l’origine des fonds. Il est vrai qu’on n’aime jamais trop raconter pourquoi ces fonds devraient transiter par les Iles Caïmans ni comment ils ont connu la tirelire d’un certain Bernard Madoff.

Mais pourquoi le SPLC? Très simple, en dehors de la défense de ses minorités préférées, la spécialité du SPLC est de ficher ses adversaires politiques, systématiquement qualifiés de « fascistes », qu’ils le soient ou non, puis de publier ses listes noires très élaborées et constamment mises à jour. Un travail de pro qui est devenu une référence du genre.

 

Et les barbouzes qui s’en mêlent

Ce modèle d’activisme et de fichage très professionnel ne vient évidemment pas de nulle part. Il est notamment issu du modèle imaginé par le mouvement Friends of Democracy qui était en réalité une antenne américaine des services secrets britanniques durant la Seconde Guerre mondiale. Son but officiel était de pousser les Américains à entrer en guerre, tout en fichant les récalcitrants, ce qu’il a continué à faire jusqu’à la fin du conflit.

Son organe de communication avait pour titre Propaganda Battlefront dont on peut encore trouver des copies en ligne.

 

14. george-soros- deep state linked-funded-organizations-deep-state-jared-kushner-933x445.jpg

Georges Soros – Jared Kushner

 

On notera, juste en passant, que ce nom a été ranimé en 2012 par Jonathan Soros, fils de George Soros. Ce choix n’est évidemment pas un hasard.

Pour revenir à nos Britanniques, ces derniers furent également très actifs à domicile, puisque, toujours dans les années 1980, ils fondaient à Londres L'Anti-Fascist Action (AFA), recrutant là encore dans les mêmes milieux punk et squat. Le label «action antifasciste» avait quant à lui été inventé par les communistes européens des années trente. Une contrefaçon de marque politique non déposée qui présentait l’avantage de donner l’illusion d’une filiation légitime. (Il paraît que question détournement d’image, on sait très bien faire dans les services.)

A la veille de la chute du Mur, on voit donc bourgeonner aux États-Unis et partout en Europe les mêmes affiliations à un antifascisme « Canada Dry », qui a le goût et l’odeur de l’antifascisme communiste historique, mais pas une goutte de communisme dans sa composition chimique. Une façon de monopoliser l’usage de l’infamante étiquette « fasciste » contre tout adversaire d’un postcommunisme 100 % américanisé, tel qu’il apparaîtra dès 1989, avec la chute du Mur.

 

Une galaxie hors la loi

Il existe donc une raison objective à la simultanéité de l’apparition des Antifas ces années-là. Mais comme c’est encore le cas aujourd’hui, on se garda bien de créer la moindre structure juridique qui permettrait de remonter jusqu’aux organisateurs et financeurs avérés. Il vaut toujours mieux, surtout lorsqu’on travaille avec le grand banditisme. Un nom fut en effet exposé au grand jour pour ses liens avec la mafia de Manchester. Il s’agissait de Desmond « Dessie » Noonan, grand Antifa devant l’éternel mais surtout braqueur professionnel et chef de gang, soupçonné d’une centaine de meurtres (1). Outre ses responsabilités directes dans l’AFA, il fut également l’un des exécuteurs attitrés des basses œuvres de l’IRA. Il mourut finalement poignardé devant chez lui à Chorlton (sud de Manchester), en 2005.

Son frère Dominic Noonan prit le relais. Outre ses activités mafieuses, on le filma en train de diriger les graves émeutes de Manchester de 2011, dont le déclencheur fut la mort de son neveu, Mark Duggan. Ce dernier, soupçonné d’être impliqué dans un trafic de cocaïne, s’était fait abattre par la police le 4 août 2011, ayant résisté à son arrestation dans le quartier de Tottenham. Il s’ensuivit une semaine d’insurrection qui s’étendit jusqu’à Liverpool, Birmingham, Leicester ou encore le Grand Londres, faisant 5 morts et près de 200 blessés parmi les seuls policiers.

La porosité des services de renseignement, de la mafia et des activistes d’extrême gauche n’est pas sans nous rappeler le rôle des Brigades rouges dans le réseau Gladio, piloté par l’OTAN. Il se trouve que justement les Autonomes Ouest-berlinois de la guerre froide finissante étaient eux-mêmes affiliés au mouvement italien Autonomia Operaia (« Autonomie ouvrière »), très proche des Brigades rouges. Le monde est si petit !

 

Tout ce que la police n’ose pas faire

Mais le point commun le plus spécifique à tous ces Antifas du monde demeure le fichage. Derrière leurs épais écrans de fumée lacrymogène, leurs capuches noires et leurs casses de vitrines qui font toujours les gros titres, il leur incombe essentiellement de ficher en masse leurs adversaires politiques et d’en exposer publiquement les identités et les occupations, exclusivement sur la base de leurs opinions politiques ou religieuses. Une tâche qui est précisément interdite aux autorités, en démocratie.

Ces mouvements sont donc objectivement, à cet égard, des supplétifs des services de police et de renseignement. Ce qui explique notamment leur proximité, voire la facilité de leur noyautage, leur impunité ou encore l’extrême difficulté qu’on peut avoir à les identifier.

 

Le cas Joachim Landwehr

C’est par exemple le cas de Joachim Landwehr (28 ans), citoyen helvétique, condamné à 7 ans de prison le 11 octobre dernier par le tribunal correctionnel de Paris, pour avoir, le 18 mai 2016, bouté le feu à l’habitacle d’une voiture de police grâce à un engin pyrotechnique, avec ses deux occupants encore coincés à bord. Une peine plutôt légère pour une atteinte à la vie de policiers.

On sait que Landwehr est lié au groupe suisse « Action Autonome », dont les mots d’ordre passent notamment par le site <rage.noblogs.org/>, dont 90 % du contenu relève du fichage, avec un degré de précision qui dépasse très largement les capacités d’une équipe d’amateurs, même à temps plein. On se demande d’ailleurs ce qu’attend le Préposé cantonal à la protection de données pour se saisir du dossier.

On sait également qu’il était présent lors de la manif antifa de Lausanne de mai 2011, et que c’est sans doute lui aussi qui a mis en ligne une petite vidéo de propagande à la gloire de sa promenade.

On sait enfin qu’il fut acquitté en août 2017 par le tribunal de police de Genève, alors qu’il y avait participé à une manifestation interdite.

 

Des agitateurs venus de la « haute »

En revanche, on connaît mieux les profils de ces complices parisiens. Par exemple, Antonin Bernanos, condamné à 5 ans de prison dont 2 avec sursis, est l’arrière petit-fils du grand écrivain Georges Bernanos. On reste issu d’un milieu plutôt cultivé et protégé chez les Antifas. On imagine que l’œuvre de l’illustre aïeul avait encore sa place dans les discussions familiales. Yves, le père du délinquant et réalisateur sans succès de courts-métrages, le confirmait lors d’une interview pour KTO, l’organe cathodique de l’archevêché de Paris, lequel diffusa d’ailleurs l’un de ces courts-métrages, par charité chrétienne sans doute. Mais on n’a pas trop de mal à comprendre que c’est sa femme, Geneviève, qui fait bouillir la marmite. Elle a la sécurité de l’emploi comme fonctionnaire. Elle est en effet directrice de l’aménagement et du développement à la mairie de Nanterre. Côté convictions, elle est fière de n’avoir pas raté une seule fête de l’Huma depuis ses 15 ans.

Dès l’arrestation de leurs deux fils (Angel, le plus jeune, sera mis hors de cause), Monsieur et Madame Bernanos ont arpenté les radios, les salles de rédaction, les collectifs et manifs en tous genres, pour dénoncer l’ignominie policière montée de toutes pièces par l’État fasciste contre leur digne rejeton. Ils ont reçu le meilleur accueil, notamment chez Médiapart. Ils ont même réussi à enrôler le vieux Me Henri Leclerc, qui osa comparer l’arrestation du jeune Bernanos aux fameux morts du métro Charonne, durant la guerre d’Algérie. Il arrive que les fins de carrières soient pathétiques…

Ce qui frappe, c’est la facilité avec laquelle les relais d’opinions se sont mobilisés en faveur d’un délinquant, dont on omet par ailleurs complètement de dénoncer le racisme, sachant que l’un des policiers qu’il attaqua était noir. Dans les réseaux deep-state, on assure donc autant le service après-vente que l’anesthésie morale.

Même milieu BCBG pour Ari Runtenholz, condamné aussi à 5 ans de prison assorti de sursis, pour avoir défoncé l’arrière de la voiture de police à l’aide d’un plot métallique. Lui, on le trouve classé 34ème de l’épreuve d’épée aux championnats de la fédération française d’escrime de 2013. Il pratique aussi la voile à Granville (Normandie) et participe à des régates officielles. Sports très popu, comme chacun sait.

Nicolas Fensch, informaticien sans emploi, détonne quant à lui par son âge (40 ans). Il prétend être arrivé là par hasard, alors que les vidéos le montrent s’acharnant à frapper le policier noir avec une tige, très semblable à un nerf de bœuf. La parfaite maîtrise du geste trahit néanmoins un entraînement certain. Qui est-il vraiment? Les policiers qui ont gaffé à l’audience sur le noyautage de la bande n’en diront pas plus. Il écopera aussi de 5 ans dont 2 avec sursis.

Il y a enfin le LGBT de service: David Brault, 28 ans, devenu mademoiselle Kara, sans adresse en France. Ce(tte) citoyen(ne) américain(e) a traversé tout spécialement l’Atlantique pour la petite fête improvisée. On se demande tout de même si ce n’est pas le SLPC qui lui aurait payé son billet et ses faux frais? Verdict : 4 ans de prison dont 2 avec sursis pour avoir lancé un plot métallique à travers le pare-brise dans le but d’atteindre les passagers. Pas très doux, le trans. Pendant les audiences, à l’extérieur du Palais de justice, plusieurs centaines d’Antifas viendront, comme il se doit, provoquer violemment la police, en soutien à leurs camarades de promotion. Il faut savoir garder la forme et les écrans de fumée.

 

Les confluences profondes

Mais casser de la vitrine ou du flic n’est pas tout. L’idéologie est là. A y regarder de près, elle n’a certes pas grand-chose à voir avec le marxisme, le trotskysme ou l’anarchisme, ni même avec les Gardes rouges de Mao.

Elle égrène en revanche tous les mots d’ordre qu’on lit ouvertement sur tous les sites des ONG-Ecrans du deep-state euro-atlantique et sorosien : défense des LGBT, de la théorie du genre, des migrants, du multiculturalisme, de l’ineptie des frontières, du voile islamique, et même du Kurdistan libre. Et l’inévitable complément : attaques contre Trump, Vladimir Poutine, le « régime » syrien alaouite, etc.

Dans les quincailleries en ligne des antifas, on trouve évidemment toute la panoplie du parfait émeutier connecté et tous les conseils pratiques qui vont avec. Un mode de propagation qui a très largement fait ses preuves depuis les révolutions de couleur. Une routine du « sans limite », car il faut quand même bien les motiver ces jeunes !

Et justement, c’est l’abolition des limites qui est la première condition à la jouissance de la grande casserie. Mais là n’est pas le plus important. Ce qui compte, c’est que, sous couvert de combattre un fascisme fantasmé pour les besoins de la cause, on fiche à tour de bras et on rend tout cela public. Et cela ne scandalise évidemment personne. L’agit-prop manipulée et noyautée par les «services» est donc un leurre. Pendant qu’on s’interroge sur les excuses sociales de leur violence urbaine, ou la qualification juridique de leurs crimes téléguidés, les soutiers de l’antifascisme constituent, là, sous nos yeux, une branche administrative de la police politique du deep-state, qui n’a rien à envier aux recrues de la Stasi.

 

NOTES

  • Sean Birchall, Beating The Fascists, Freedom Press, Londres, 2010.

 

2. russep.gif

 

4. banniere-livres.jpg

 

CANNIBALE LECTEUR de Pascal Vandenberghe

 

TOTALITARISME ET DIVERTISSEMENT

 

Le roman policier allemand – ou Krimi – fut prolifique sous le Troisième Reich. Participant à la politique de « divertissement » voulue par le régime, il pouvait être outil de propagande ou refuge de la résistance au régime.

Contrairement à ce que l’on peut imaginer, les loisirs et le divertissement se sont multipliés sous le Troisième Reich. Considéré par le régime à la fois comme nécessaire pour divertir le peuple et comme potentiel outil de « propagande douce », le divertissement populaire échappa dans une certaine mesure à la censure. C’est particulièrement vrai d’un genre littéraire: le livre policier.

 

15. Platini Lire s'vader résister.jpgVincent Platini, spécialiste de littérature et du cinéma, est enseignant-chercheur à la Freie Universität de Berlin. Au printemps 2014, il a publié deux livres (1): Lire s’évader, résister. Essai sur la culture de masse sous le IIIe Reich (Éditions La Découverte), dans lequel il offre une lecture totalement inédite du régime nazi. Si la «haute culture» a bel et bien été mise au pas dès 1933 – le point culminant de cette mise au pas étant atteint dès le 10 mai 1933, avec l’autodafé organisé par des étudiants, enseignants et dignitaires du régime nazi de dizaines de milliers de livres –, le divertissement « populaire », considéré comme peu digne d’intérêt, a quant à lui joui d’une certaine liberté. Au grand dam des idéologues, la littérature populaire fut épargnée par les autodafés de 1933, qui visèrent principalement les opposants politiques, la littérature « dégénérée » ou « obscène » de Weimar.

16. KRIMI 1.jpgSecond livre: Krimi. Une anthologie du récit policier sous le Troisième Reich (Éditions Anacharsis). Accompagnée d’une longue introduction de Vincent Platini qui met parfaitement son sujet en perspective, cette anthologie propose des textes (extraits de romans ou nouvelles) inédits en français avec une présentation de chaque auteur et publiés dans l’ordre chronologique. L’ouvrage se termine par un « dossier critique » constitué de trois articles publiés entre 1937 et 1940 par des spécialistes du livre: deux bibliothécaires et un écrivain de roman policier.

Le profond mépris dans lequel les tenants de la culture institutionnelle, la « haute culture », tenaient le roman policier apparaît clairement dans le premier article du dossier critique, signé par le bibliothécaire Arnold Eichberg et consacré à la «psychologie du lecteur de roman policier». Il écrit en préambule qu’il ne s’agit pas là d’une véritable « lecture », mais d’une « occupation ». Déplorant que les lecteurs de roman policier se recrutent dans toutes les couches de la société, il considère que ce sont tous des « natures faibles et pessimistes », et que « […] tout homme doté d’un esprit vif et d’une profonde sensibilité repoussera ce remède bon marché, ou du moins il refusera d’en être un lecteur assidu […] ». S’il trouve encore quelques excuses aux lecteurs masculins de roman policier, il n’en va pas de même pour les femmes, sur lesquelles son jugement est sans appel : « […] nous pouvons affirmer que celle qui prend un "plaisir durable" à ces romans est une femme dégénérée. » Rien que ça !

Rien d’étonnant donc à ce que peu de traces subsistent des quelque 3'000 Krimis publiés entre 1933 et 1945, avec un pic en 1937-1938, avec respectivement 385 et 447 nouveaux romans mis sur le marché. Car après la Seconde Guerre mondiale, au mépris pour le genre lui-même s’ajouta, dans les quelques rares études qui lui furent consacrées, le soupçon – infondé – que les romans policiers publiés durant le nazisme étaient un outil de propagande et quoi qu’il en soit un produit culturel empreint de l’idéologie nazie, ayant par conséquent plus valeur de document que de littérature. D’ailleurs la seule bibliothèque publique spécialisée – la Kriminalbibliothek, fondée à Brême en 1999 – ne contient que des romans policiers publiés après 1965.

De plus, en Allemagne comme ailleurs, avant 1933 ce pan de la littérature était dominé par la production anglo-saxonne. Cette influence se poursuivra d’ailleurs durant la période 1933-1945: avec plus de 600 traductions publiées, le livre policier constitua ainsi le genre littéraire le plus traduit du Troisième Reich. C’est donc, pour beaucoup, un produit de l’étranger, avatar de la société bourgeoise et capitaliste et inconciliable avec le « véritable esprit allemand ». Entre 1933 et 1935, près de 60 % des Krimis publiés sont des traductions d’œuvres anglo-américaines (Agatha Christie et Arthur Conan Dyle, par exemple, sont plébiscités par les lecteurs). Pour limiter cette « entreprise étrangère », des mesures de censure et de restrictions sont prises. Dès 1938, la part des traductions s’amenuise d’année en année.

La littérature étant particulièrement surveillée par la censure, le roman policier (et le livre pour enfant) devient un refuge pour certains écrivains en délicatesse avec le régime, comme par exemple Erich Kästner (2).

Le livre le plus emblématique de cette résistance tapie dans le Krimi est sans doute Strogany und die Vermißten (3) d’Adam Kuckhoff (1887-1943) et Peter Tarin (pseudonyme d’Edwin Tietjens, 1894-1944), publié en 1941 par les éditions Universitas Verlag (Berlin). Tous deux membres du groupe de résistance allemand « L’Orchestre rouge », ces deux écrivains ont continué à publier jusqu’à ce que leur réseau clandestin soit démantelé par la Gestapo en 1942. Kuckhoff fut arrêté et exécuté par les nazis en août 1943. S’il en réchappa, Tietjens mourut peu après d’une crise cardiaque. Kuckhoff compte parmi les rares écrivains allemands à avoir opposé aux nazis une résistance politique et littéraire au sein même du Troisième Reich.

Le dernier texte de l’anthologie Krimi, coécrit par Adam Kuckhoff et John Sieg (4) (1903-1942), s’intitule Lettre ouverte au front de l’Est. Jamais éditée sous le Troisième Reich (5), cette lettre, probablement écrite vers le milieu de 1941, est la huitième d’une série de missives dactylographiées, imprimées en grand nombre et envoyées anonymement aux soldats sur le front de l’Est. On sort ici du genre «roman policier» au sens strict, avec un texte de combat, s’appuyant sur des faits historiques précis, mais au style littéraire très ciselé, qui en fait un objet à double tranchant, à la fois politique et poétique.

Krimi est un livre unique en son genre: il n’a pas d’équivalent, même en allemand. Et plus qu’une simple « curiosité », par un choix des textes basé sur des critères multiples offrant à l’arrivée une grande diversité, il fait émerger au fil des pages les divergences politiques exprimées de façon ambiguë, ce qui renforce encore l’intérêt du livre, le lecteur gardant sa liberté d’interprétation.

 NOTES

  • 17. L'EXTASE TOTALE.jpg

    Plus récemment, il fut le traducteur du passionnant livre de Norman Ohler L’extase totale. Le IIIe Reich, les Allemands et la drogue (Éditions La Découverte, 2016), préfacé par l’historien allemand Hans Mommsen.
  • Dont le roman Vers l’abîme, publié en 1932, fut brûlé en 1933, faisant passer l’auteur du célébrissime Émile et le détective (1929) du statut d’auteur adulé à celui d’écrivain honni. Resté longtemps inédit en français, nous avions salué la parution en français en 2016 de Vers l’abîme (Éditions Anne Carrière) dans le numéro 40 d’Antipresse (4 septembre 2016). Il est sorti depuis en poche (coll. « 10/18 »).
  • Les disparus de Strogany, jamais traduit en français, pour lequel Vincent Platini cherche un éditeur qui pourrait en financer la traduction et en assurer la publication… À bon entendeur…

Également arrêté par la Gestapo peu après Kuckhoff, John Sieg se pend le 13 octobre 1942 dans sa cellule de la Prinz-Albert-Straße à Berlin pour échapper aux interrogatoires de la Gestap

 

Elle fut publiée en 1963 dans un ouvrage d’études sur l’histoire et les effets des guerres de libération (Straube, Fritz [dir.], Das Jahr 1813, Studien zur Geschichte une Wirkung der Befreienkriege, Berlin, Akademie-Verlag).

 

2. russep.gif 

 

Le désinvité de la semaine

 

WALTER HABICHT : CONVOQUER LE MÉDECIN INTÉRIEUR

 

Le Dr Walter Habicht est un interlocuteur hors du commun. Ce médecin atypique ne nous préconise pas de «vivre avec la maladie», mais de retrouver les conditions de la santé.

Psychiatre, érudit, polyglotte, il a eu une destinée atypique qui l’a conduit à remettre en question nombre de dogmes de la médecine moderne. C’est grâce à lui et à ses contacts que j’ai pu réaliser mon mois de jeûne sur les rives du lac Baïkal, en mars-avril derniers.

Cet entretien passionnant fut réalisé dans son chalet d’Arolla, au fin fond des Alpes valaisannes, où il organise régulièrement des semaines de jeûne. Il y revient sur ses expériences de médecin de la Croix-Rouge en ex-URSS, les limites de la médecine traditionnelle face aux «maladies de civilisation», l’agressivité du système face à la pratique du jeûne, les ravages de la chimie...

Mais il nous rappelle surtout les vertus oubliées du «médecin intérieur» d’Hippocrate que nous portons tous en nous, que la médecine commerciale s’efforce d’étouffer — mais que le jeûne réactive.

Entretien audio réalisé par Slobodan Despot. A écouter sur Soundcloud.

 

2. russep.gif 

 

LA POIRE D’ANGOISSE par Slobodan Despot

 

ENTRE DIFFÉRENCE SEXUELLE ET ISLAM, LA FACULTÉ A TRANCHÉ

 

Ne dites plus que certains États musulmans punissent de mort la déviance sexuelle : vous risqueriez d’avoir affaire à l’Équipe d’intervention comportementale !

Le jeune Alfred MacDonald est de toute évidence un sujet turbulent. A l’université du Texas à San Antonio, on ne compte plus ses absences de classe. Et il semble aussi avoir la langue bien pendue. Face à une collègue étudiante qui lui annonçait ses fiançailles avec un musulman, il n’a pas trouvé d’autre mot de félicitation que de lui exprimer de vives réserves sur l’islam. Au motif somme toute futile et narcissique que dans dix pays musulmans, les bisexuels comme lui sont condamnés à mort et exécutés.

La discussion est arrivée aux oreilles du chef (pardon : de la cheffe) du département de philosophie, Eve Browning, qui l’a convoqué illico pour lui remonter les bretelles à cause de cette « offense », l’avertissant que son mauvais penchant à raconter tout ce qu’il pense pourrait « faire crouler tout le programme ». Enfin, elle a menacé de le faire traiter par l’Équipe d’intervention comportementale (sic) de l’université. On se croirait dans un cauchemar à l’héroïne de Philip K. Dick ! Mais il y a mieux.

Car le sournois MacDonald a enregistré en douce la conversation. La transcription est parue dans Gay Star News, et elle est fascinante. On la croirait tout droit sortie d’une antiutopie d’Orwell ou de Zamiatine. L’intimidation s’y allie à l’attaque ad personam et à l’argument d’autorité sans qu’un seul instant la « philosophe » ne concède le droit à son étudiant en philosophie, de critiquer l’obscurantisme islamique.

BROWNING : Ce sont des choses qui vous feraient renvoyer si vous travailliez dans mon bureau. Le commentaire sur l’islam vous ferait virer.

MACDONALD : … Serais-je vraiment renvoyé pour avoir dit qu’on pourrait me tuer quelque part ?

BROWNING : Dans cette situation telle que vous l’avez décrite, absolument oui.

MACDONALD : Comment ?

BROWNING : Ne posez même pas la question (…)

Ainsi donc, il est de plus en plus difficile — pour reprendre l’expression du professeur Steven Pinker —, de voir la différence entre une université et une madrassa. L’étudiant a eu le malheur de persévérer et a fini par quitter l’université du Texas (cet État progressiste où règnent par ailleurs les red necks et le Ku Klux Klan).

Nous sommes donc avertis désormais: si la cause LGBT est une vache sacrée dans le milieu académique, il en est une plus sacrée encore.

 

 2. russep.gif

 

SUISSE | Le ministre était un comique déguisé

 

Le Conseiller fédéral Johann Schneider-Ammann est (bien involontairement) le plus célèbre des sinistres — pardon : ministres — suisses à l’étranger depuis que son allocution sur les vertus du rire est devenue virale... par le sérieux morbide avec laquelle elle fut prononcée.

Le Droopy national s’illustre encore une fois dans l’humour à rebrousse-poil en prônant la libéralisation du secteur agricole, en particulier par l’abaissement des barrières douanières.

C’est qu’il a sans doute omis de regarder par la fenêtre de son bureau. Le monde entier, à commencer par l’ONU, comptabilise désormais les ravages de l’agriculture industrielle globalisée. Les pays qui le peuvent renforcent les mesures protectionnistes. Sans compter un tout petit détail : le fait que ses compatriotes eux-mêmes viennent de voter en septembre dernier à près de 80% pour la sécurité (et donc l’autonomie) alimentaire !

Ach, petit oubli ! Cette démocratie directe, quelle poisse! Le geek Schneider-Ammann avait pourtant une panacée idéale à la concurrence débridée des géants agro-industriels qu’il s’apprête à relancer : la révolution numérique !

Paysans suisses, qui arrachez encore un peu de terre arable aux terrains à bâtir les plus chers du monde, numérisez-vous !

Encore une fois, il l’a énoncé sans le moindre clin d’œil, le plus infime sourire !

Avec ses faux airs de croque-mort recueilli, M. Schneider-Ammann incarne en réalité le bouffon idéal pour les puissances qui gouvernent le monde sans rendre compte à personne. Il ne nous écoute pas, mais au moins il nous amuse.

 

  2. russep.gif

 

 

 

 

Mis en ligne le 8 novembre 2017

 

 

 

 

 

22:49 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

01/11/2017

EN PAUSE

0. PAUSE 1.jpg

                                 Forcée

 

 

À bientôt !

 

 

 

21:11 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

25/10/2017

LA PARTIE D'ÉCHECS LA PLUS IMPORTANTE DE TOUS LES TEMPS -

1. croiseur_aurore.jpg

 

« LA PARTIE D’ÉCHECS LA PLUS IMPORTANTE DE TOUS LES TEMPS »

 

(1)

 

Théroigne – L.G.O. 25 octobre 2017

 

Dans leur dernier chef d’œuvre en date, consacré à l’écrivain italien Curzio Malaparte (Morte come me, on vous en parle en fin de post), Rita Monaldi et Francesco Sorti évoquent la partie d’échecs qui a opposé pendant plusieurs jours de 1908, dans l’île de Capri, Vladimir Ilitch Lénine et Aleksandr Aleksandrovitch Bogdanov, sous l’œil attentif de Maxime Gorki.

Il nous a semblé que vous offrir cette page était une façon comme une autre de célébrer, avec nos très modestes moyens, ce que Malaparte – précisément – a qualifié de « fait de nature », semblable à l’« éruption d’un volcan ».

Dans ce livre du célèbre duo, une jeune poétesse anglaise a été trouvée morte au pied d’une falaise, après une brève rencontre avec Malaparte et un duel qui a opposé l’écrivain au Sturmbannführer SS Helmut Aichinger à propos de la jeune femme. Meurtre ? Suicide ? Accident ? On ne le sait toujours pas aujourd’hui. C’était en 1935. En 1939, certains ont accusé Malaparte de l’avoir tuée. La trame anecdotique de ce roman extraordinaire, fondé sur des événements historiques réels, raconte les efforts du « suspect », poursuivi par l’OVRA (police secrète de Mussolini) qui veut l’embastiller discrètement, dans le but de découvrir la vérité et se sauver ainsi d’une arrestation qu’il redoute définitive. Dans le chapitre ci-dessous, il va interroger Axel Munthe, médecin et romancier suédois, qui vit en solitaire à Capri, réputé aveugle, mais Malaparte sait que, derrière ses lunettes noires, le vieil homme y voit très bien. Malaparte a trouvé, dan sa « Maison comme moi » en construction - celle-là même où Jean-Luc Godard a tourné Le Mépris – un mystérieux échiquier sur lequel sont gravés les mots « Qui est comme Dieu » et « PAM ». Le Febo (Phoebus en français), dont il est ici question, est le célèbre chien de l’écrivain toscan.]


9. CASA COME ME - PUNTA MASSULLO.jpg

« Casa come me » - Cap Massullo, Capri,

léguée à la République Populaire de Chine mais captée par les héritiers de l’écrivain, à la suite d’un procès qui ne grandit ni la famille Suckert-Perelli ni les tribunaux italiens.

 

[…]

10. Axel Munthe.jpgMais, dites-moi, Malaparte, que puis-je faire pour vous ?

– Il y a quelques années, ici, à Anacapri, est morte une jeune fille anglaise, Pam Reynolds. Il semble qu’elle se soit suicidée en se jetant dans un précipice.

– Je m’en souviens. Ce fut une bien triste chose. On dit qu’elle s’est jetée de la falaise d’Orrico.

– Je voudrais vous confier quelque chose de très délicat, docteur Munthe. Mais j’aimerais avoir votre parole que vous n’en soufflerez mot à personne.

– Vous avez ma parole, Malaparte. N’oubliez pas que je suis un médecin. J’ai l’habitude du secret.

– Eh bien, quelqu’un essaie de monter un coup contre moi. On dit que j’ai quelque chose à voir dans la mort de Pam. Que peut-être même c’est moi qui l’ai tuée.

– Vous n’êtes pas sérieux ? Mais c’est horrible ! Comment puis-je vous aider ?

Je pris, sur une petite table octogonale, un des livres poussiéreux qui s’y trouvaient. C’était la traduction anglaise des mémoires de Munthe, intitulé Le livre de San Michele, parce qu’elles racontaient l’histoire de la construction de la villa San Michele.

– La villa San Michele… Que voulez-vous savoir ? C’est un morceau de ma vie. Je l’ai construite de mes propres mains, mais je n’y habite plus. Même les domestiques, maintenant, je les fais dormir ici. J’y vais de temps en temps.

Je lui montrai l’échiquier avec ses graffiti, que, jusqu’à présent, j’avais laissé emballé dans du papier. Je lui expliquai l’équivalence « Qui est comme Dieu = saint Michel ».

– Je ne comprends pas qui a voulu m’envoyer cet étrange message, dis-je pour conclure. Vous, qu’est-ce que vous en dites ? Peut-être la mort de Pam Reynolds a-t-elle quelque chose à voir avec la villa San Michele ?

Munthe se tut quelques instants. Je l’entendis frémir un peu, comme pour réprimer un éternuement. Puis, je me rendis compte qu’il riait. Nous étions tous les deux assis dans l’obscurité en train de parler d’un homicide dont j’étais accusé, et Munthe riait poliment, gentiment, comme seul peut le faire un cher, vieux médecin suédois.

– Mon pauvre Malaparte, mais vous ne comprenez pas ! L’allusion contenue dans cet échiquier est des plus claires et n’a rien à voir avec la villa San Michele.

– Et qu’est-ce qu’elle signifie, alors ?

– Vous savez ce qu’est la Construction de Dieu ?

 

Le bonhomme Lénine

Sans attendre ma réponse, il me conduisit dehors.

– C’est l’heure où les oiseaux chantent. Mes oiseaux, dit Munthe, d’une voix extatique, de prophète.

Nous sortîmes de la tour, dans la propriété de Munthe. La clarté du jour me blessa les yeux. Munthe, en revanche, passa de l’obscurité à la lumière comme si de rien n’était ; il était entraîné à rester des après-midi entiers dans l’obscurité, à recevoir ses visiteurs dans l’ombre, à percevoir courants et vibrations comme une chauve-souris, puis à sortir tout à coup avec ses chiens et ses oiseaux. Le parfum de la mer et de la résine des pins m’ôta des narines l’odeur douce et grasse du médecin suédois et de son faux musée. Nous fîmes quatre pas dans les pins et les arbustes, Munthe s’appuyant sur son bâton. Febo nous suivait en remuant la queue.

– Malaparte, vous êtes jeune. Vous ne connaissez pas Capri comme le petit vieux que vous avez devant vous. Ceux de mon âge ont vécu une période entre 1908 et 1910, quand vous étiez encore un enfant, où l’Europe était pleine de Russes. C’étaient des errants clandestins, qui avaient pris le maquis depuis des années, qui s’étaient enfuis de la mère patrie parce que la révolution de 1905, par laquelle ils avaient tenté de renverser le tsar, avait échoué. Ils cherchaient à tirer, depuis l’étranger, les fils d’une nouvelle révolution qui n’allait se réaliser que dix ou douze ans plus tard. Un de leurs chefs spirituels, pour ainsi dire, était le grand écrivain Maxime Gorki. Et Gorki, comme vous devez le savoir, vivait ici, à Capri.

Naples et l’Italie, à cette époque, grouillaient d’exilés russes, dit Munthe, et aussi de socialistes italiens, de nature plus ou moins subversive. La police italienne les contrôlait tous, mais ne pouvait avoir la main trop lourde, parce que les socialistes étaient fortement représentés au Parlement et dans la presse. Quand Gorki était arrivé à Capri, en novembre 1906, on avait vu, sur le mole, des centaines de Napolitains et de Caprais venus l’applaudir.

– J’ai rencontré Gorki. À Moscou, il y a sept ans, dis-je.

– Alors, il vous aura peut-être parlé de l’École de Capri, ou peut-être pas. Ce sont là des choses, cher Malaparte, que, dans le fond, tout le monde connaît, mais dont personne aujourd’hui ne bavarde volontiers. Et un jour viendra où on ne s’en souviendra plus. Ce n’est pas sans raison que Staline a fait tuer Gorki, comme tant d’autres.

À Capri, poursuivit Munthe, Gorki et d’autres exilés avaient fondé une véritable école révolutionnaire. Ils voulaient former les cadres dirigeants du parti qui organiseraient la révolution, celle qui devait être définitive, qui a fini par éclater en 1917. L’île devait servir de base stratégique, de centre de sélection du personnel politique et d’école de formation idéologique. Elle s’appelait, justement, École de Capri.

– Et excusez-moi, cher Malaparte, si je vous raconte encore des choses que vous savez peut-être déjà, mais un souvenir en amène un autre. Qu’est-ce qui reste à un pauvre aveugle comme moi ? Des souvenirs, rien d’autre que des souvenirs.

L’École de Capri n’était pas qu’un point de ralliement organisationnel. Gorki voulait créer une nouvelle culture, un nouveau savoir ouvrier et prolétaire, une idée du monde, de l’art, de la littérature, de la musique faite sur mesure pour les ouvriers, les paysans, les pauvres et les exploités. Il ne s’agissait pas seulement de les faire se rebeller, de les faire s’emparer des richesses des bourgeois et des aristocrates, il fallait créer une nouvelle idée du monde, de sorte que les révolutionnaires se voient, eux et les autres hommes et tout l’univers, de façon très différente et inédite.

– Cette opération s’appelait en russe bogostroitel’stvo, « Construction de Dieu ». Une idée perverse, mais très russe. Les hommes modernes, les constructeurs du futur, étaient destinés à avoir une religion de l’avant-garde, mais une religion terrestre, une religion athée qui ne se réalisât pas par la connaissance de Dieu mais par la formation de la société communiste. Vous comprenez ce que je dis quand je parle de religion athée, mon bon ami ?

– Oui, je le comprends, dis-je.

Je le comprenais parce que, à Moscou, j’avais connu des communistes comme Demyian Bedny, l’Ennemi de Dieu, le chef de la Ligue des besbojniki, les Sansdieu, qui écrivait des évangiles blasphématoires pour complaire à Staline.

– Gorki était le premier inspirateur de cette théorie, poursuivit Munthe, mais il y en avait d’autres avec lui. Le plus important était Alekzandr Bogdanov.

– Bogdanov était un grand cerveau. Scélérat peut-être, mais grand, dis-je.

– Oui, c’était un grand cerveau, répéta Munthe, le cerveau théorique de l’École de Capri. C’était un ennemi de la religion évidemment, parce qu’il restait toujours un communiste, donc un athée, un mécréant. Mais il voulait introduire la Construction de Dieu, l’Antireligion. C’était le moment exact pour le faire. Les Russes étaient affamés de révélations extraordinaires, le pouvoir les y avait habitués. En 1914, pour annoncer au peuple naïf qu’il allait y avoir la guerre, les militaires russes envoyaient tous azimuts des soldats habillés en archanges, avec des ailes en plumes et en carton attachées aux épaules, sur des chevaux blancs, attifés eux aussi de fausses ailes. Les Russes sont ainsi, à mi-chemin entre la morbidité, l’exaltation et le calcul politique.

Gorki était galvanisé par les idées de Bogdanov, dit Munthe. Il l’appela à Capri pour fonder l’École et lancer le nouveau marxisme, antiautoritaire, humanitaire, nourri par la littérature, par la philosophie et par la science. C’étaient des idées confuses mais proches de celles de la fameuse Fabian Society* anglaise, qui avait prospéré justement à cette époque. Petit à petit arrivèrent de Russie des douzaines de peintres, d’écrivains, de musiciens, de sculpteurs, d’hommes de sciences, mais aussi de simples ouvriers. Sur l’île, ils étaient accueillis, logés, nourris, soignés. Ils disposaient même d’une cantine et d’une infirmerie à eux.

– Ils se réunissaient chez Gorki, à la villa Behring, mais aussi à l’extérieur, au grand air, sur les plages, dans les grottes. Ils étaient souriants, détendus, enchantés par la beauté de l’île, de la mer, de Capri. Ils avaient presque l’air d’un groupe de joyeux touristes. Ils montaient des comédies dans les grottes de Capri, sur les plages, ils chantaient des chansons, composaient des bouts rimés et des charades en russe, en italien et même en anglais. Mais, bien à l’abri de leurs chambres, ils préparaient le bain de sang de la révolution, les attentats, les pillages, les vols à main armée, les mutineries, les massacres. Je sais que vous, Malaparte, avez écrit des livres sur Lénine et sur la révolution russe.

– J’en ai écrit trois, et plusieurs articles de Russie. Je connais aussi assez bien le russe.

– Donc, vous savez parfaitement que Gorki et Bogdanov faisaient partie des bolcheviques, majoritaires dans le parti, où montait depuis peu l’astre de Lénine. Mais, entre eux, il y avait une inimitié puissante. Et cette inimitié était aussi causée par l’École de Capri. Lénine s’inquiétait du projet de Bogdanov. Sa ligne politique avait un bien autre but que la Construction de Dieu. Pour lui, c’était une sottise bourgeoise, une déviation du projet révolutionnaire.

Munthe s’interrompit, regarda vers le haut et commença à siffloter, d’une façon inimitable qui lui était propre, à mi-chemin entre un ocarina, une flûte et une pendule à coucou. J’allais presque me mettre à rire quand, des arbres, s’éleva un chœur qui lui répondait. Les oiseaux répondaient à Munthe et non par deux ou trois, mais par douzaines. Lui les appelait, eux répondaient. L’incroyable dialogue se poursuivit pendant quelques minutes, puis Munthe me demanda : « J’adore parler avec les oiseaux. Vous ne parlez jamais avec les animaux, Malaparte ? »

– Parfois, oui. Je parle avec Febo.

Febo remua la queue, me regardant tout fier, il montra qu’il avait compris.

– Ah, bien, dit Munthe, un peu vexé de ne pas être le seul homme de Capri à communiquer avec les bêtes, et il poursuivit son récit.

Bogdanov était plein d’imagination et ardent, un feu de joie purificateur. Lénine, en revanche, était froid et coupant comme le nom de son journal clandestin, Iskra, « L’Étincelle ». Lénine méprisait Bogdanov. Il le prenait pour un utopiste et un hérétique. Il lui rappelait les socialistes anglais de la Fabian Society, qui disaient vouloir secourir les pauvres par esprit humanitaire et qui, pour Lénine, étaient des opportunistes, des espions de la bourgeoisie. Bogdanov, pour sa part, jugeait Lénine froid et incapable de soulever les foules, de les entraîner dans la lutte, de faire véritablement la révolution.

Puis, il y avait le problème de l’argent. Pour financer la révolution, Lénine manœuvrait des gangsters, des proxénètes, des trafiquants d’armes, des assassins, dont Staline lui-même, et l’argent affluait en abondance, au point que Lénine se permettait des voitures, des appartements de luxe à Paris, des hôtels et des vacances. Il pouvait se payer ses maîtresses et se rattraper ainsi de sa femme, très fidèles au parti mais froide et pédante.

– Tout de même, le groupe concurrent, de Bogdanov, dit Munthe, réussissait à accumuler lui aussi un beau paquet d’argent. Gorki, ici, à Capri, recevait de riches mécènes, des artistes, des armateurs. Des sommes énormes passaient par ses mains.

On ne pouvait pas continuer ainsi. Il fallait résoudre la fracture et se mettre d’accord sur l’avenir de la révolution, y compris sur la question essentielle des fonds, de la caisse commune. Gorki invita Lénine à Capri, où l’avait rejoint depuis un moment déjà Bogdanov, qui s’était installé à la villa Monacone, une des plus belles et panoramiques de l’île. Lénine tout d’abord hésita, puis accepta. L’objectif de Gorki était de réconcilier les deux âmes du parti, la léniniste et la bogdanoviste, en vue de la révolution. Mais comment s’y prendre ? Lénine était privé de sens de l’humour, rigide, pointilleux et méfiant. Bogdanov était un animal à sang chaud, impulsif, ardent. Dans une discussion face à face, on risquait l’irréparable. Gorki, alors, eut une idée : ne les faisons pas se parler mais jouer.

Lénine aimait les échecs Il se considérait comme un excellent joueur. Il avait appris les échecs en famille et continuait d’y jouer parce que cela le détendait. Dans la maison de Bogdanov, la villa Monacone, il y avait un échiquier (et quelle maison de villégiature n’en a pas ?), un bel échiquier de bois avec toutes les pièces prêtes pour la bataille. À vrai dire, il n’existe pas de sport plus agressif que les échecs. Bogdanov et Lénine pourraient se déchaîner à leur guise sans pour autant se déclarer ennemis et faire capoter la médiation de Gorki.

 

11. lenin capri.jpg

Sur la terrasse de la villa Blaesus, de gauche à droite : Aleksandr Bogdanov, Maxime Gorki et Vladimir Lénine

 

La partie se tint en présence d’un grand nombre de révolutionnaires russes, élèves de l’École de Capri. Qui, pendant des jours, assistèrent à l’interminable rencontre entre les deux âmes du parti, sur la terrasse de la villa. De nombreuses photos en furent prises, pour célébrer l’importance de l’événement.

 

12. Lenin Bogdanov à droite Gorkij.jpg

Bogdanov (à droite) jouant avec Lénine (à gauche) sous le regard de Gorki (chapeau de travers) et de Lounatcharski (assis à côté de Lénine).

 

– Et comment a-t-elle fini, demandai-je ?

– Lénine a gagné.

– Et la médiation de Gorki

– Il n’avait pas été explicitement prévu que la partie d’échecs déciderait aussi de la partie politique, mais, de fait, il en fut ainsi. Dans le mouvement marxiste, c’est la ligne de Lénine qui prévalut, et Gorki s’aligna. L’École de Capri, lentement, se dépeupla. En 1913, Bogdanov retourna en Russie, profitant de l’amnistie accordée par le tsar. En 1917 éclata la révolution, et le tsar fut renversé. Mais Bogdanov n’adhéra pas à la révolte, parce qu’il était opposé aux crimes commis par les léninistes. Après la chute du régime tsariste, il fut mis à l’écart pour un certain temps et finit même en prison. En 1924, Lénine mourut et le pouvoir passa à Staline. Gorki se vendit au régime, dont il justifia tous les crimes. Pour toute récompense, Staline le fit tuer avec une bactérie fournie par les services secrets. Et nous en arrivons ainsi à trois ans d’ici à peine : 1936.

– Comment pouvez-vous dire que c’est Staline qui a tué Gorki ?

– Gorki est mort d’une étrange pneumonie et, étrangement, son fils aussi, que Staline détestait, est mort de pneumonie. Deux semaines auparavant, tous les domestiques de Gorki, jeunes et sains, avaient été frappés de pneumonie. Curieux, vous ne trouvez pas ? Je suis médecin, et je me méfie des situations aussi anormales. En outre, Lénine est venu à Capri deux fois, la première, en 1909, la seconde en 1910. La seconde fois, il y est venu avec Staline, qui était incognito, sûrement pour prendre quelque accord secret avec Gorki aux dépens de Bogdanov.

 

13. Staline en 1910 - Dossier criminel après arrestation à Bakou, Azerbaïdjan.jpg

Staline en 1910… prisonnier – Dossier criminel établi lors de son arrestation à Bakou, Azerbaïdjan.

 

– Alors, c’est vrai ce qu’ont écrit les journaux, même Staline est venu ici ?

– Bien sûr. Il savait que, pour mettre fin à l’École de Capri, il fallait venir sur les lieux, parler avec Gorki.

Mais Gorki, vieux, était désormais inutile. C’était devenu un romancier frustré et fatigué, célébré par le régime mais sans liberté et, tous comptes faits, malheureux. Il avait fini par approuver publiquement la haine de classe, la répression, les massacres.

– Il avait été le spectateur incommode de trop de choses. Un héros mort leur convenait mieux qu’un témoin vivant. Et ils l’ont fait éliminer, dit Munthe.

– Il y a sept ans, à Moscou, outre Gorki, j’ai rencontré un grand nombre de gros bonnets, Lounatcharski, Maïakovski…, j’ai côtoyé des agitateurs et des bureaucrates, je suis allé au théâtre avec Karakhan, avec Florenski, avec Kalinine… Mais personne ne m’a jamais rien dit de cette histoire de partie d’échecs.

– Évidemment. Elle ne devait pas arriver à trop d’oreilles. Vous doutez de ma parole, Malaparte, Allez, allez le demander aux Caprais. Et vous verrez qu’ils vous confirmeront tout.

– Donc, l’inscription « Qui est comme Dieu » se rapporte aux discussions qui ont eu lieu à Capri entre Lénine et Bogdanov : la révolution froide et impitoyable de Lénine contre celle, humanisée, chaude, de la Construction de Dieu de Bogdanov et de Lounatcharski ? C’est ainsi, docteur Munthe ?

– Cette phrase, à mon avis, n’est qu’une simple remarque écrite par quelque bon à rien. Ou peut-être, qui sait, par Gorki lui-même. Mais elle a été écrite sur l’échiquier du grand défi Lénine-Bogdanov. Votre échiquier, cher Malaparte.

– Un moment. Vous, comment expliquez-vous la présence du nom de Pam Reynolds sur l’échiquier ?

– Malaparte, vous me décevez. Vous savez le russe et vous vous noyez dans un verre d’eau ! Ce mot PAM confirme précisément ma conjecture. N’oubliez pas que ces révolutionnaires étaient russes, qu’ils parlaient russe et qu’ils écrivaient en russe, c’est-à-dire en alphabet cyrillique. Donc, PAM ne signifie pas Pamela. Parce que, en cyrillique, le r majuscule s’écrit P.

Je sursautai. Je retirai l’échiquier de son enveloppe de papier.

– Votre homme mystérieux, cher Malaparte, n’a pas écrit pam, mais ram. Mot anglais, certes, mais qui équivaut à l’italien capro. Au pluriel Capri. Par conséquent notre mystérieux scribe a tout simplement écrit Capri en anglais, mais en caractères russes. Cela confirme bien que celui qui écrivait était un Russe, pas un Italien ou un Anglais. Il s’agit d’une plaisanterie, d’un jeu de mots. Je ne vous l’ai pas dit que ceux de l’École de Capri s’amusaient à faire des chansons et des charades dans toutes les langues ? C’était un groupe bariolé et plutôt gai qui n’avait pas eu trop de mal à remplacer la vodka par le vin de Capri. Demandez confirmation à qui vous voulez : beaucoup, ici, s’en souviennent. Au milieu des jeux de mots, et entre deux verres, il sera venu à l’esprit de l’un ou l’autre d’entre eux ce stupide petit jeu de mots RAM/Capri. Et il l’a gravé sur l’échiquier. Voilà tout.

Munthe dut lire la déception sur mon visage, parce qu’il se dépêcha d’ajouter : « Je vais vous confier un secret que je dois à ma longue expérience de médecin : ne posez jamais de diagnostic compliqué si ce n’est pas absolument nécessaire ».

– Et alors, qui m’a mis cet échiquier dans la maison ? dis-je.

– Peut-être un de vos ouvriers qui ne s’attendait pas à vous voir débarquer de Rome, qui croit que vous aurez envie de l’acheter comme objet d’antiquité et qui l’a déposé là en attendant. Peut-être même que, dans les jours qui viennent, il va vous le proposer. Ou peut-être l’échiquier a-t-il été volé par quelque ouvrier à la villa Monacone où habitait Bogdanov, et pour un moment cachée dans un lieu très isolé comme l’est la pointe Massullo. Il peut y avoir diverses explications toutes valides. Vous, Malaparte, vous êtes un écrivain, et vous êtes habitué à vous servir de votre imagination. Mais, d’après ce que vous m’avez dit, vous êtes aussi dans un sérieux pétrin. Ne perdez pas de temps avec cette histoire d’échiquier, croyez-moi. Et si vous avez encore besoin de moi, je suis à votre disposition.

Je retournai l’échiquier entre mes doigts.

­– Et puis, consolez-vous, dit Munthe. Vous avez en mains un objet qui a fait l’histoire. Vous vous rendez compte ? L’échiquier de la fameuse partie entre Lénine et Bogdanov… Si Bogdanov l’avait gagnée, il n’y aurait peut-être pas eu de révolution russe … aujourd’hui, le tsar serait encore là et toute l’histoire du monde aurait été différente. Moi, à votre place, je ne montrerais cet échiquier qu’à des amis très sûrs, qui soient capables d’en comprendre l’énorme valeur historique. Mais maintenant, excusez-moi, il faut que j’aille donner à manger à mes chiens, ils doivent avoir une faim du diable. Vous reviendrez me voir, promis ?

_______________

* On se rappellera peut-être que c’est après avoir assisté, sur l’invitation de Bernard Shaw, à une séance de cette Fabian Society, qu’Oscar Wilde a écrit son texte trop peu connu : L’âme de l’homme sous le socialisme.

 

Monaldi et Sorti, Malaparte : Morte come meMilan, Baldini & Castaldi 2016 - pp. 138-147.

Traduction : c.l. pour Les Grosses Orchades

 

Bien entendu, Malaparte se fait ici somptueusement mener en bateau par un Munthe qui saupoudre allègrement des détails et des faits historiques indiscutables de carabistouilles de son cru, tels que les béliers qui deviennent des boucs en passant de l’anglais à l’italien via le russe, alors que Capri, comme on le sait, ne vient même pas du bouc latin mais du sanglier grec.

Malaparte, pourtant un monstre de lucidité dans la vraie vie, sauf quand il se plantait en politique, avale l’hameçon et la ligne avec, car, s’il savait que Munthe était un faux aveugle, il ne savait pas – l’a-t-il jamais su ? - que le bon docteur a été, du début du siècle jusqu’à son retour définitif en Suède (1942) l’agent du MI6 dans ce repaire du fascisme, du nazisme et de la jet set internationale qu’était son île d’élection.

 

14. Ajax et Achille 3.jpg

Avant que Capri ne devienne une colonie grecque…

Ajax et Achille jouant aux échecs sous les murs de Troie – Amphore attique à figures noires attribuée à Exchias (v. 540-530 av. J.-C.) – Musée du Vatican

 

Quant à savoir ce qui serait arrivé si Bogdanov avait gagné la partie ? Ce qui est arrivé dans la réalité. Bogdanov était un esprit encyclopédique. Lénine aussi, mais assujetti à un but unique dont il ne dévia jamais, alors que Bogdanov n’a cessé de se démultiplier dans tous les sens. Quand a-t-on vu, dans un duel entre un éventail et un fer de lance, gagner l’éventail ?

Il n’en reste pas moins que Bogdanov (ce n’est là qu’un de ses trente pseudos) est un des pères de la culture soviétique et même de la révolution qu’il n’a pas faite (parce que Lénine, s’apercevant que les menchéviques se servaient de la philosophie de Bogdanov pour marginaliser les bolcheviques, l’a fait exclure du parti). En Italie, il avait aussi fondé et animé l’École de Bologne, où enseigna Trotski. Son apport culturel est immense. Ses livres théoriques d’économie, de politique et de science, ont été lus et discutés dans les soviets à l’égal du « Que faire ? » de Lénine. Il a traduit Le Capital en russe, mais il est aussi – entre autres choses - le plus important auteur de science fiction d’avant 1917 (cf. L’étoile rouge et L’ingénieur Menni). Philosophe d’inspiration nietzschéenne, il voulait intégrer la philosophie dans la science et eût préféré sans doute faire la révolution « par la culture », en évitant les affrontements à sang coulant. Il a aussi été médecin psychiatre et s’est enfin jeté à corps perdu dans les recherches sur la transfusion sanguine. En 1926, c’est sous sa direction que fut fondé le premier institut soviétique spécialisé dans la transfusion du sang (qui porte d’ailleurs son nom depuis sa mort). En mars 1928, Bogdanov fit l’expérience de se transfuser le sang d’un étudiant atteint de malaria et d’une forme bénigne de tuberculose. Quinze jours plus tard, au terme d’une longue agonie, qu’il observa et décrivit lui-même avec lucidité et le plus grand scrupule professionnel, il mourut.

Sur le plan des coïncidences, il est étrange de constater l’importance du sang dans l’œuvre de Malaparte, qui eut, sur ce fluide vital, des idées si arrêtées qu’au cours de son agonie à lui (en 1957, à Rome) il refusa farouchement toute transfusion, comme allant à l’encontre de la notion quasi magique qu’il en avait.

La fiche Wikipedia la plus complète et objective sur Aleksandr Bodganov est, de loin, celle en italien  : https://it.wikipedia.org/wiki/Aleksandr_Aleksandrovi%C4%8...

 

2. russep.gif

 

0. Rita e Francesco.jpg

 

Note des auteurs

(Extrait)

 

La partie d’échecs entre Lénine et Bogdanov s’est déroulée en 1908, à Capri, sur la terrasse de la villa Blaesus [Aujourd’hui villa Krupp, ben oui, ndt]. Beaucoup de gens seraient aujourd’hui intéressés à retrouver l’échiquier sur lequel se joua la partie d’échecs la plus importante de tous les temps. Malheureusement, on en a perdu la trace.

Sur la confrontation Bogdanov-Lénine, il y a la brillante analyse de Vittorio Strada, L’altra rivoluzione, Gorki, Lunacharski, Bogdanov [« L’autre révolution : Gorki, Lounatcharski, Bogdanov »], La Conchiglia, Capri, 1994. En 1909 ou 1910, suivant les témoignages, se situerait la visite de Staline à Capri en compagnie de Lénine. Elle a été excellemment traitée dans le bel essai de Gennaro Sangiuliano, Scacco allo tsar 1908-1910 : Lenin a Capri, genesi della rivoluzione [« Échec au tsar 1908-1910 : Lénine à Capri, genèse de la révolution »], Milan, Mondadori, 2012.

Le rôle d’organisateur du défi Lénine-Bogdanov et de fondateur de l’École de Capri n’a pas porté chance à Maxime Gorki : d’après certains historiens, l’écrivain fut tué par Staline en 1936, au moyen d’une arme bactériologique fournie par les services secrets de la Loubianka.

Ibid, p. 493

 

Reste à savoir quel intérêt Staline pouvait avoir à liquider Gorki en 1936, même s’il « ne lui servait plus à rien ». D’autres historiens éclaireront peut-être ce point d’histoire, grâce aux archives de la Loubianka par exemple, en même temps que celui de l’assassinat de Trotski sur un autre continent.

Quant à l’opposition Lénine-Bogdanov, la copie est si conforme à l’opposition Robespierre-Danton que c'est à se demander si les historiens-propagandistes ne trouvent pas leur imagination dans des pochettes-surprise.

Comme dit pertinemment le Pr Faurisson : « Vos preuves ! »

 

2. russep.gif

 

En attendant, les habitants de Capri ont organisé, l’an dernier, leur deuxième tournoi international d’échecs « en souvenir de Lénine ».

 


 

Dont les vainqueurs ont été :

         Dans la catégorie OPEN A :

1er prix : le GM serbe Miroljub Lazic

2e prix : l’IM philippin Virgilio Vuelban

3e prix : la VG italo-russe Olga Zimina

4e prix ex-aequo : le FM italien Maurizio Caposciutti et l’IM serbe Gojko Laketic

         Dans la catégorie OPEN B :

1er prix : le petit Claudio Paduano, de Boscotrecase, âgé de 10 ans, qui est déjà vice-champion européen.

 

2. russep.gif

 

Ils avaient inauguré leur nouvelle vocation de capitale mondiale des échecs en octobre 2015, sur le lieu même de la partie historique :

http://napoli.repubblica.it/cronaca/2015/09/22/news/capri...

 

2. russep.gif

 

Et ils récidivent cette année

 

15. scacchi_d16x9_0_46_848.20170804131120.jpg

 

Du 26 au 29 octobre 2017 se déroulera, tous les jours, le :

 

TOURNOI D’ÉCHECS INTERNATIONAL « ÎLE DE CAPRI – VLADIMIR LÉNINE »

 

Hotel la Residenza, Capri – Participation : 50 €

 

Torneo valido per variazioni ELO Italia/Fide e per il conseguimento della norma di maestro FSI

Info, costi e iscrizioni: Club Scacchi Capri
Tel. 388 909 1730 - 331 379 6095
www.clubscacchicapri.it

 

2. russep.gif

 

4. banniere-livres.jpg

 

16. Pavel Florensky.jpg

 

 

Un des soviétiques avec qui Malaparte est allé au théâtre à Moscou est Pavel Florensky. Théologien, mathématicien, électro-technicien et philosophe russe, mort en 1937, il y a juste 80 ans (devenu saint Pavel Florensky). Il se trouve que ses œuvres ont été largement publiées en français. Il serait dommage de les passer sous silence.

 

 

Publications de Florensky en français :

La colonne et le fondement de la vérité, Lausanne, Suisse, Éditions L’Âge d’Homme, 1994, 508 p.

Le Sel de la terre, Lausanne, Suisse. Éditions l’Âge d’Homme, coll. « Petite bibliothèque slave », 2003.

Souvenirs d’une enfance au Caucase, Lausanne, Suisse, Éditions de L’Âge d’Homme, coll. « Au cœur du monde ».

La Géhenne, Lausanne, Suisse, Éditions de L’Âge d’Homme, coll. « Archipel slave », 2010. Ceci est en fait la lettre VIII de La Colonne.

Stupeur et dialectique, Paris, France, Éditions Payot et Rivages, coll. « Bibliothèque Rivages », 2012, 94 p.

Perspective inversée, iconostase, Lausanne, Suisse, L’Âge d’Homme, 1992

La Perspective inversée, Paris, Éditions Allia, 2013, 111 p.

Lettres de Solovki, Lausanne, Suisse, Éditions de L’Âge d’Homme, coll. « Classiques slaves », 2012, dont la traduction en français par Françoise Lhoest a été récompensée par le Prix Russophonie 2014

Les Imaginaires en géométrie, Bruxelles, Belgique, Éditions Zones sensibles, 2016, traduction de Françoise Lhoest et Pierre Vanhove. Préface de Cédric Villani

 

2. russep.gif

 

Chose promise chose due…

17. Morte come me.jpg

 

 

Rita MONALDI et Francesco SORTI

MALAPARTE – Morte Come Me

Milan, Baldini & Castoldi, 7 juillet 2016

Langue : italien

Couverture rigide

494 pages

 

 

Ce titre fait évidemment référence à la maison que s’était fait construire Malaparte à l’extrême pointe de Capri et qu’il avait baptisée « Maison comme moi », après avoir renvoyé l’architecte et décidé de la finir seul avec de simples maçons de l’île. Mais La Mort comme moi se réfère aussi à un autre livre de l’auteur (« Une femme comme moi », recueil de nouvelles consacrées aux femmes que se rêvait Malaparte)

C’est la première infidélité de Rita et Francesco à leur cher baroque et c’est une infidélité qui s’affiche en fanfare. Leurs raisons nous sont inconnues ­­– il doit y en avoir plusieurs, à commencer par le 60e anniversaire de la mort de Malaparte qui arrivait – mais je parierais qu’il y a aussi le fait qu’ils semblent partager un de ses sentiments les plus forts sur l’Europe, à savoir que le destin de notre continent post-romain catholique est devenu, depuis Luther, un destin anglo-saxon protestant et que cela n’a peut-être pas été pour notre bien.

La « justification » du roman est limpide :

Malaparte, tombé amoureux de la Chine, a dû être rapatrié pour mourir dans son pays d’un cancer des poumons en phase terminale, qu’il voulait, lui, se faire soigner en Chine, car il n’entendait pas mourir et se croyait capable de remporter cette ultime guerre.

Engagé à seize ans dans la légion Garibaldi pour voler au secours de la France, que son pays abandonnait dans la première des deux grandes boucheries du siècle, il avait été gazé au Chemin des Dames et il a jusqu’au bout prétendu mourir de la tuberculose causée par l’ipérite et non du cancer. De l’ipérite, de la tuberculose, du cancer et des cigarettes, comme mon grand père est mort d’un cancer du foie agrémenté d’une cirrhose.

Héros, donc, de ce roman, Curzio Malaparte est un des deux plus grands écrivains italiens du XXe siècle, mais c’est un écrivain maudit – aujourd’hui encore – parce que le choix qu’il a fait, à un certain moment, du fascisme, a sufi à plonger dans le néant tout le reste, comme Louis-Ferdinand Destouches est toujours Céline l’antisémite et non Céline l’écrivain de génie. Dans un pays comme dans l’autre, les médiocres n’en finissent pas de les juger sans essayer de les comprendre. Je ne vais pas le faire ici aujourd’hui, parce qu’il s’agit de vous parler d’abord d’un roman tout neuf assuré de faire date (que vous aurez peut-être la chance de lire en français dans dix ans) et parce qu’on a déjà d’autres maudits sur les bras : Lénine, Staline, etc.

Un peu à la fois !

Kurt Erich Suckert est né à Prato, d’un père allemand (saxon) et d’une mère milanaise. Il se voudra toscan – et pourquoi pas – et changera son nom, y compris pour l’état-civil, en celui de Malaparte, parce que, héritier de Machiavel, il a pris Napoléon pour César Borgia. Première erreur historico-politique et première admiration mal placée.

« Il s’appelait Bonaparte et il a mal fini. Je m’appellerai Malaparte et je finirai bien. »

(Vous le saviez, vous, que la tribu s’appelait en réalité Malaparte et qu’elle avait obtenu d’un pape l’autorisation de s ‘appeler Buonaparte ?)

Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il a réussi sa sortie.

Ayant légué par testament sa célèbre maison à la République Populaire de Chine, pour qu’y soient accueillis des artistes chinois et que des liens se tissent entre l’Italie et le pays de Mao, il redemanda sa carte du PCI, qui lui avait toujours été refusée. Cette fois, c’est Palmiro lui-même qui la lui apporta sur son lit d’agonie. Et qui dut, en partant, croiser dans les couloirs le père Rotondi, jésuite, venu entendre la confession du mourant et le recevoir dans l’Église, non sans qu’il ait d’abord abjuré La Peau, qu’elle avait mise à l’Index. L’Autre devra de même abjurer sa Trilogie de la vie, et pour les mêmes raisons, puisqu’ils sont partis tous les deux catholico-communistes. À mon avis, ils s’en sont tirés à bon compte. Watteau, lui, avait dû laisser brûler tous ses dessins érotiques, pour ne pas finir en enfer.

L’idée de Monaldi et Sorti est simple, on est le 19 juillet 1957 à Rome, à la clinique Sanatrix. Malaparte va mourir, veillé par une petite Sœur Carmelita qui s’assoupit. La mort arrive sous l’apparence d’une très belle femme qu’il a jadis connue à Capri, escortée de deux assistants. Des anges, évidemment. Elle révèle au moribond qu’elle est « la Justice du ciel » et que, oui, l’Enfer existe – si, si – et le Paradis et tout le reste, et que s’il ne veut pas, lui, Malaparte, finir dans les flammes éternelles, il a intérêt à se repentir avant qu’il ne soit trop tard. Mais comment faire ? « Je suis écrivain, je ne sais rien faire d’autre qu’écrire. » Qu’il fasse comme il veut, un roman s’il veut, mais que son repentir soit sincère, sinon, il sait ce qui l’attend. « Écrire un roman dans un poumon d’acier ? » Qu’à cela ne tienne, il n’a qu’à le dicter. Un des anges installe une Remington et s’assied. L’autre déballe une rame de papier, entrouvre un peu la fenêtre, change l’eau des fleurs, Sœur Carmelita ronflote doucement, et c’est parti. Malaparte n’a plus mal, ses jambes se réchauffent, sa respiration redevient normale, il peut même s’asseoir. N’est-on pas censé voir défiler sa vie quand on meurt ?

Cet examen de conscience in articulo mortis – on peut dire autocritique si on préfère – est écrit à la première personne. C’est Malaparte lui-même qui raconte et qui passe en revue sa vie, ses sentiments, ses opinions, ses jugements et ses choix. Plaidoirie ? Exposé candide ? Demandez à la Justice du ciel. Il faut saluer au passage l’idée de génie des auteurs d’avoir donné à la Mort le visage de cette Mona Williams – la femme la mieux habillée du monde et une des plus belles – qui finira par épouser le neveu homosexuel du Chancelier de Fer et deviendra ainsi Mona von Bismarck. Il n’y a pas une photo de la dame qui ne justifie ce choix.

L’anecdote qui, elle, justifie le roman se situe à Capri, où l’écrivain a rencontré, en 1935, une jeune poétesse anglaise, fille d’un des fondateurs de la Fabian Society (socialiste) et néanmoins courtisée par un Sturmbannführer SS. La rencontre est brève : Malaparte ne faisait que passer. Aussitôt après, la jeune fille trouve une mort tragique au pied d’une falaise.

L’histoire est vraie. Elle n’a jamais été élucidée. Il est vrai aussi qu’en 1939, des bruits ont couru accusant Malaparte d’assassinat et que la police secrète de Mussolini, l’OVRA, a tenté de l’arrêter. Discrètement, vu la société huppée dans laquelle il évoluait. Mais à cause de cette mort de quatre ans plus tôt ou pour une autre raison ? Malaparte n’a jamais eu la langue dans sa poche et il a toujours cru qu’il pouvait tout dire à n’importe qui. C’est ainsi qu’on se fait de nombreux et puissants ennemis.

On n’est pas à proprement parler dans un roman policier (même si les flics y circulent comme chez eux) mais dans un roman à énigme sans aucun doute. Pour échapper à une arrestation secrète et à un plongeon définitif dans les oubliettes, l’écrivain prend le maquis, dort à la belle étoile et essaie en même temps de faire la lumière sur la mort de la jeune fille.

Le grand art des deux sorciers est de mêler à ce qu’ils inventent tant de faits et de détails historiquement indiscutables qu’on a le plus grand mal à démêler ce qui relève de la chronique de ce qui appartient au roman. On passe ainsi, au fil des souvenirs de Malaparte, des tranchées de l’Argonne aux îles Lipari (où il a été deux fois relégué) et des villas de quelques originaux comme Axel Munthe à celles des successeurs de Tibère : milliardaires américains, nobles décadents d’Europe, hiérarques fascisto-nazis étroitement mêlés comme toujours. Malaparte, réputé bourreau des cœurs croise, dans cette histoire, principalement quatre femmes ; la jeune fille, qui disparaît trop tôt pour compter, Edda Ciano, fille du Duce, épouse bafouée du vrai tombeur, et Mona Williams, richissime américaine, qui le traitent toutes les deux fort mal, ainsi qu’une jeune femme qu’il prend pour une institutrice, dont il semble sincèrement s’éprendre, et qui est en réalité une agente de l’OVRA chargée de le faire tomber sans trop d’histoires. Pour Don Juan, on repassera.

J’ai dit ailleurs que les auteurs sont peut-être en train de ré-écrire l’histoire de l’Europe.

Il y a, dans ce roman, une habituelle mais toujours surprenante richesse d’informations (qui n’empêchent nullement l’art) sur de nombreux moments-clés de notre histoire, généralement mal ou pas connus. Sur la vie à Capri au début du siècle, puis sous le fascisme, sur sa population locale incroyablement pauvre et sa population cosmopolite incroyablement riche (remarquable portrait d’Edda Ciano en passant). Sur la guerre 14-18 du jeune caporal Adolf Hitler… et ses suites psychiatriques. Sur celle de Malaparte (la mort du jeune boulanger « de la classe 99 » à Bligny est une des plus grandes pages de roman jamais écrites sur la première guerre mondiale). Sur les autres guerres de Malaparte, en Éthiopie, dans les Balkans, en Ukraine, au siège de Léningrad (côté assiégeants), à la libération de Naples (côté alliés).

Il est dit dans les traditionnelles notes de fin de volume : « La prose de ce roman se réclame intentionnellement des particularités du style de Malaparte (parmi lesquels un goût musical pour la répétition) qui continue à trouver des admirateurs même en dehors d’Italie ». Il ne faudrait quand même pas oublier qu’un des deux auteurs est musicologue. Mais il n’y a pas que le style et pas que les répétitions. On peut, dans ce cas particulier, parler de véritable osmose (rien à voir avec le pastiche !) et pas seulement dans la forme.

Je mentionnerai un autre passage pour finir : s’agissant d’un auteur qui est dans l’enfer des lettres depuis soixante ans, Rita et Francesco se sont payé le luxe de le lui faire promettre et montrer par la mort. Pas celui des lettres : l’autre. Ce vers quoi se sent aspiré le mourant dépasse les visions – un peu enfantines, du coup – de Dante. D’autant plus impressionnant pour le lecteur d’aujourd’hui qu’il court un certain risque de le rencontrer lui-même.

 

2. russep.gif

 

Un des nombreux ouvrages du héros de leur livre :

 

20. CES CHERS ITALIENS.jpg

 

 

 

Curzio Malaparte

Ces chers Italiens

Paris, Les Belles Lettres, 2013

Coll. Le goût des idées

192 pages

 

 

 

Extrait

[ …] Cette liberté tout italienne, on la retrouve, non seulement dans les coutumes, mais dans l’art, en particulier dans la peinture et la sculpture, pleines de madones seins à l’air (les têtes des chérubins volant autour des bouts dorés comme des oiseaux autour de grains de raisin), de saints, de prophètes, d’apôtres les pudenda à découvert, d’anges blonds avec leur petit derrière rosé et leur petite bouche suce-miel, d’hommes et de femmes vêtus de leur seul poil, tout occupés à regarder les grands personnages de la Bible et leurs faits et gestes, de sorte qu’on ne sait s’ils contemplent le couteau d’Abraham ou les fesses d’Isaac, la verge d’Holopherne ou la chute de reins de Judith. Et ce n’est pas seulement la peinture sacrée, mais aussi la profane qui apparaît aux yeux des Italiens, comme une occasion d’étaler chairs nues, membres virils, héros le derrière en l’ air, héroïnes séchant leur sein au soleil ; sans compter les papes bénissant des foules de pèlerins nus ; des rois, des empereurs, des reines tout nus sur leurs trônes dorés ; des cardinaux à genoux dans de magnifiques églises peuplées de statues nues ; des ambassadeurs, tyrans, courtisans, tribuns du peuple, plébéiens, olives pendantes sous le nombril, haranguer, tenir conseil, pendre les pauvres diables, tramer et ameuter conjurations et séditions, brûler les demeures des seigneurs. Les trompettes sonnent et c’est une confusion d’étendards et de testicules, d’épées et de seins nus ; ce sont Marius et Sylla, César et Brutus, Pompée, Antoine, Auguste, Titus, Constantin qui montent au Capitole les fesses ouvertes ; des guerriers nus à cheval bataillant bourses au vent et jetant bas des ennemis nus, ou poursuivant des bandes nues de fuyards, on ne sait si c’est pour leur trancher la tête ou le sifflet.

Ce n’est pas là impudicité ; c’est une façon de mêler la nature à l’histoire, la chronique des faits naturels à celle des faits politiques ou militaires ; d’entendre l’histoire des hommes et des peuples comme une histoire de la nature. Et cela me semble, à moi, une façon juste et vraie, l’histoire n’étant, en Italie du moins, que l’histoire des faits humains en tant que faits de la nature, alors que l’histoire des Anglais, des Allemands, des Français, des Espagnols n’est que l’histoire des faits humains en tant que faits politiques, étrangers à la nature.

Vouloir tirer de l’histoire d’Italie, à commencer par celle de Rome, des principes d’éthique, une règle morale comme le firent, par exemple, Montaigne et Montesquieu, c’est commettre une erreur. Autant vouloir tirer une règle morale de l’histoire de la nature. Quel principe moral peut-on déduire, mettons, de l’apparition des mammifères sur la terre ? L’histoire de Rome n’est qu’un chapitre de l’histoire naturelle : le chapitre qui rapporte l’origine d’une espèce d’hommes et leur façon de l’emporter sur d’autres espèces d’hommes et non de la supériorité d’un principe moral sur d’autres principes moraux. Et cela est si vrai que, avec le triomphe du christianisme, qui est un fait moral et non un fait de la nature, l’histoire de Rome en tant que chapitre de l’histoire naturelle s’achève.

Voilà la raison pour laquelle les Italiens sont vis-à-vis de l’histoire comme vis-à-vis de la nature et en face des faits historiques comme en face des faits naturels. Ils considèrent l’histoire des hommes comme celle des arbres, des fleuves, des bêtes, des saisons. Ils regardent les peuples naître, croître en âge, en force, en richesse ; combattre, fonder des villes, envoyer des hommes à la mort ; les villes s’effondrer dans les flammes, les royaumes s’écrouler, d’autres nations surgir, d’autres cités, d’autres empires ; la terre se repeupler d’autres hommes, de murs, de palais, de temples et, tout à coup, n’être plus que désert.

Pareillement, ils regardent naître les arbres, les plantes, les herbes ; les fleuves couler et déborder ; le ciel s’abattre sur les champs, les moissons, les troupeaux ; la mer engloutir les vaisseaux ; la terre trembler, s’ouvrir et les villes s’y abîmer, et d’autres arbres, d’autres plantes, d’autres herbes naître, d’autres moissons murir. Les faits historiques se succèdent comme les saisons et se confondent avec les faits naturels au point de nous sembler des faits de la nature. La mort de César équivaut à une crue de fleuve, à un incendie de forêt, au fléau d’une épidémie ; une bataille est comme une tempête ; une invasion est une façon d’inondation ; une révolte évoque l’éruption d’un volcan ; la chute d’un règne rappelle une ville détruite par un tremblement de terre.

C’est la raison pourquoi les Italiens, plus proches de la nature que toute autre espèce d’hommes, ont une si grande familiarité avec les choses du sexe. Ce n’est pas là de l’impudicité, mais simplement une façon de prendre la nature comme elle est, c’est-à-dire comme un fait, non moral, mais physique. Cette familiarité date de leurs plus tendres années. Dès ce moment, ils voient statues et fresques avec hommes et femmes nus, Apollon, Vénus, Madones, Madeleines, martyrs peuplant les places et les églises d’Italie.

C’est chose commune que de voir de petits garçons et petites filles jouer avec les parties viriles d’Hercule, de Cacus, de David, de Goliath, d’Hector et d’Achille, de saint Jean-Baptiste et de saint Georges. Allez après cela plaquer le feuille de vigne sur le David de Michel Ange, ou les Dioscures du Quirinal, ou le Ménélas et le Patrocle de la loge des Lanzi ou sur le Neptune de la Seigneurie à Florence. Tous les gosses, garçons et filles, savent ce qu’il y a dessous, comment c’est fait, combien ça pèse, et à quoi ça sert. Inutile de leur dire que ça ne sert à rien ; ils savent. Et que serait-ce s’ils ne le savaient pas ou croyaient que ça ne sert à rien ? Ils finiraient par croire que ce que les Vénus ont sous la feuille, ça non plus ne sert à rien.

Par bonheur, en Italie, nul ne rougit en regardant ces statues. Et si je dis « par bonheur », c’est que, tout au moins en Italie, les yeux sont faits pour regarder.

J’allai un jour, encore gamin, au Dôme de Prato, voir danser Salomé, avec quelques camarades. Ô grâce de Filippo Lippi, quelle bonne leçon tu m’as donnée en m’apprenant que le nu est chaste ! Pour nous, gamins, assis en silence dans les stalles du chœur, derrière le maître-autel, il n’y avait rien d’étrange à ce que Hérode, Hérodiade, les courtisans, les pages, autour de la longue table luisante de lin candide et scintillante de cristaux, et les serviteurs avec les plateaux chargés de mets et les jarres de vin, rien d’étrange à ce que tous regardassent d’un œil tranquille la jeune danseuse sous ses voiles transparents qui laissaient à nu les tendres chairs, le duvet blond, les ombres secrètes. Que faisaient là de mal Hérode, Hérodiade et les commensaux et les serviteurs ? Ils regardaient cette jeune fille nue, si pudique, avec son pied levé, sa tête légèrement penchée en arrière, ses menus seins rosés et fermes, visibles sous la transparence des voiles. Il n’est pas jusqu’à la tête du baptiste, servie sur un plat d’argent qui n’ouvrît des yeux extasiés, où il n’y avait pas l’ombre de pudeur offensée, ni de désir, ni de reproche, mais uniquement le plaisir que donnent les choses belles et pures. Jusqu’à ce qu’enfin, du haut du beau campanile en pierre grise et marbre vert de Figline, les cloches laissaient tomber leurs appels graves et profonds ; l’onde sonore dérange les voiles de Salomé qui, un instant, dans la pénombre du chœur nous apparaît jusqu’à l’aine. En entendant les voix des chanoines, sortis un à un de la sacristie pour venir chanter les vêpres, nous courions nous blottir au fond du chœur, sous le grand vitrail. Les chanoines s‘asseyaient dans les stalles, fermaient les paupières et se mettaient à chanter, les yeux clos, pour ne pas voir Salomé.

Non, ils ne fermaient pas les yeux, ils faisaient semblant. Ils regardaient Salomé d’en dessous, à travers leurs cils baissés et chantaient. »

Curzio MALAPARTE, Benedetti Italiani [« Bienheureux Italiens », Ces chers Italiens dans l’édition française des Belles Lettres, 2003. Traduction : Mathilde Pomès. Chapitre 3.]

 

21. Filippo-LIPPI-la-danse-de-Salomé-XVe.jpg

Oh, que les souvenirs sont trompeurs ou l’imagination puissante !

 

2. russep.gif

 

Pour le luxe :

 

22. Gli intrighi.jpg

 

 

Abbé Atto MELANI

Manuscrit retrouvé et publié par MONALDI & SORTI

Gli intrighi dei Cardinali

Langue : italien

Milan, Baldini & Castoldi, 27 octobre 2016

127 pages

 

 

Ce texte, écrit en français Louis Quatorzième par le célèbre castrat italien Atto Melani (offert par sa noble famille à l’Église) qui fut pendant quarante ans l’agent secret du Roi-Soleil, s’intitulait en réalité Les secrets du conclave et racontait comment Melani, en qualité d’assistant du cardinal Rospigliosi, avait pu participer au conclave qui a porté son protecteur au pontificat sous le nom de Clément IX. Autrement dit que la cour de France avait fait un pape de plus à la barbe de quelques autres puissances.

Rita et Francesco ont découvert l’original autographe – rapport destiné à Louis XIV – dans les archives du Palais Bourbon, où il dormait depuis près de quatre siècles. Atto Melani étant le personnage principal de leur célèbre série baroque, ils ont eu à cœur de le publier.

C’est donc seulement traduit en italien qu’on le trouve, car, en français, il n’a semblé intéressant à personne de le faire imprimer.

 

2. russep.gif

 

23. Malap Coup d'etat.jpg

 

 

 

Curzio MALAPARTE

Technique du coup d’État

Paris, Grasset, (revu et corrigé, 2008)

Les Cahiers Rouges

224 pages

 

 

 

« Je vous connais bien, M. Malaparte. Et depuis longtemps. Votre Technique du coup d’État est mon livre de chevet. »

Mao Tse Toung

Présentation de l'éditeur

Comment on s’empare d’un État moderne et comment on le défend : à l’aide d’exemples pris dans l’histoire (le 18 Brumaire de Bonaparte) ou dans l’actualité plus proche (le coup d’Etat bolchévique de 1917, la marche sur Rome de Mussolini, l’inexorable montée de Hitler), Malaparte analyse les diverses méthodes d’insurrection moderne. Le Duce lui fit payer la justesse de ses réflexions de plusieurs mois de prison et de cinq ans d’assignation à résidence… À sa sortie en 1931, Technique du coup d’Etat fut salué dans le monde entier comme un « traité de l’art de défendre la liberté ». La fiévreuse clarté de ses théories tactiques, l’art du portrait et la finesse psychologique de l’auteur appliqués au personnel politique et militaire n’ont pas vieilli. Et font de ce livre un classique.

[Notons quand même que Malaparte s’est planté en attribuant à Napoléon le coup du 18 Brumaire, qui fut en réalité l’œuvre de Sieyès assisté de Lucien, tandis que Napoléon se contentait de s’évanouir ou de faire semblant, jusqu’à ce que l’on sût de quel côté le sort avait penché, comme le rapporte avec sa sécheresse de ton coutumière Paul Léautaud (Journal), qui n’aimait pas qu’on raconte n’importe quoi. N.d.GO]

Biographie de l'auteur

Curzio Malaparte (1898-1957) a été journaliste, reporter de guerre sur le front de l’Est pendant la Seconde Guerre Mondiale et écrivain. Il est l’auteur des romans Kaputt (1944) et La Peau (1949), de biographies, comme Le Bonhomme Lénine (Grasset, 1932) et du célèbre Technique du coup d’État (Grasset -1931). Il est considéré comme un des plus grands écrivains italiens du XXe siècle.

 

2. russep.gif

 

Mais pourquoi a-t-il tenu leurs manteaux aux bourreaux qui lapidaient saint Étienne ?

 

Le Malaparte qui s’est engagé à seize ans et a risqué sa vie pendant quatre ans pour défendre une France qu’il adorait, qui a été gazé au Chemin des Dames, qui a été relégué par deux fois aux îles Lipari par un régime qu’il servait pourtant, est le même que celui qui a trouvé la campagne de Russie « romantique » (et pour cela, il faut avoir un grain dans le cerveau qui n’est pas à sa place), qui a tremblé de timidité impressionnée devant Benito Mussolini, assisté de sa plume les assassins de Matteotti, applaudi aux massacres des Baléares et dîné avec Frank, le bourreau de Varsovie. Pour l’interviewer peut-être, mais bon. C’est difficile à concevoir, mais c’est ainsi. C’est lui aussi que les Allemands ont fait réexpédier du front de l’Est, parce que ce qu’il en écrivait dans le Corriere della Sera outrageait le Reich.

Entretemps, il avait fait, en correspondant de guerre mais avec la grade de capitaine, la campagne des Balkans, raté les combattants, Tito et Mikhailovitch, qui tenaient le maquis, mais interviewé Pavelich, l’ogre croate. L’histoire du panier plein d’yeux humains, c’est lui. Histoire dont s’est amèrement plaint l’intéressé dans son exil sud-américain : il se souvenait très bien que, quand Malaparte était venu le voir, on venait de lui faire cadeau d’un panier de groseilles. « Qu’est-ce qu’il voulait que je fasse avec un panier de groseille ?! » s’est exclamé l’auteur de génie à celui qui lui posa la question. « On ne frappe pas l’imagination avec des groseilles.»

On croit presque entendre Jules Michelet, venu questionner Élisabeth Duplay sur ce qu’elle savait des suppliciés de Thermidor, lui promettre : « Vous verrez, Madame, ce sera bien plus beau comme je vais le raconter. »

C’est que l’écrivain français qu’a le plus admiré Malaparte était Chateaubriand, hélas. Pas qu’il écrivît mal, mais enfin, c’était le roi des menteurs dont Michelet était le prince, à moins que ce soit l’inverse. Tous les Bretons sont des virtuoses ès-mensonge. Pardon. Mais si. À commencer par Céline, qui s’est prétendu normand. Mais ceci nous entraînerait vraiment trop loin… Alors, basta pour l’instant.

Il y a cent ans ce jour, un volcan s’éveillait et commençait à cracher des flammes.

 

2. russep.gif

 

 

Mis en ligne le 25 octobre 2017

 

 

 

21:25 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (1) |  Facebook |

LA PARTIE D'ÉCHECS LA PLUS IMPORTANTE DE TOUS LES TEMPS - II.

1. croiseur_aurore.jpg

 

 

« LA PARTIE D’ÉCHECS LA PLUS IMPORTANTE DE TOUS LES TEMPS »

 

(2)

 

Le discours de 3h1/2 de Xi Jinping devant le 19e Congrès National du PCC était en fait une introduction succincte à la feuille de route de la Chine pour le futur.

Le discours de Xi Jinping était à longue portée mais, ce qui est beaucoup plus important, absolument faisable, si on se fonde sur l’impressionnant bilan de la Chine

Adam Garrie – TheDuran18 octobre 2017.

 

Le président chinois Xi Jinping a pris la parole à la séance d’ouverture du 19e Congrès du Parti Communiste. Jusqu’ici, les principaux commentaires sur ce discours parlent de sa longueur monumentale, puisqu’il a duré plus de trois heures et demie.

 

3. Xi Jinping.jpg

Le président chinois Xi Jinping

 

Bien qu’endurer un discours d’une telle longueur ne soit pas spécialement facile, avec le recul, le discours de Xi constitue un résumé remarquablement succinct des réalisations de la Chine, tout en offrant une feuille de route aisée à comprendre de la Chine et d’ailleurs aussi de ses partenaires, pour le reste du XXIe siècle. Si on essaie de condenser et de synthétiser plus de cent ans de succès passés et de programmation future, écouter trois heures et demie d’un discours est en réalité plus court que les copieux documents et analyses politiques qu’on pourrait avoir à lire autrement pour engranger une information aussi essentielle.

À cause de cela, beaucoup des médias dominants occidentaux ont décidé d’occulter le discours complet en invoquant sa longueur, alors qu’en réalité ces « journalistes » ne tiennent pas à affronter l’ascension de la Chine à sa place de superpuissance du monde moderne.

Vous pouvez voir ici le discours en entier. Sous la vidéo, je vais essayer d’expliquer ce que j’ai ressenti comme en étant les points les plus importants.

 


 

L’intervention de Xi Jinping fut tout entière enchâssée dans le thème principal de sa présidence : le développement continué du marxisme dans sa particularité chinoise. Ceci signifie essentiellement l’engagement de conserver les habitudes culturelles et socio-économiques chinoises dans le contexte de l’économie de marché socialiste, dont Deng Xiaoping, qui fut le leader primordial de la Chine de 1978 à 1989, a été le pionnier.

L’aspect le plus révolutionnaire du discours comprenait un engagement à construire le progrès industriel, infrastructurel et financier de la Chine, pour en faire, à l’intérieur, un pays toujours plus prospère. Alors que des mots comme « luxe » charrient encore une certaine stigmatisation dans le contexte d’un parti communiste, ce qu’a promis Xi est en réalité exactement ça.

Alors que les travailleurs chinois ont travaillé inlassablement pour faire passer la Chine d’une économie agraire à une économie prospère qui va bientôt dépasser les USA en termes de puissance économique totale (dans beaucoup d’autres domaines, la Chine a dépassé les USA depuis quelque temps déjà), Xi a fait comprendre que le temps était venu, pour les Chinois et les Chinoises de jouir davantage des bénéfices de la richesse qu’ils ont créée.

Pour que ceci se réalise, Xi a parlé de plusieurs stades de développement du « grand socialisme moderne », excroissance naturelle du socialisme de marché de Deng.

Dans la pratique, cela exigera deux choses. Avant tout, Une Ceinture-Une Route aidera à raccorder le modèle chinois de croissance économique à d’autres économies dynamiques et croissantes à travers de multiples régions du monde. La Chine est en train de créer un monde où les pays en développement pourront augmenter leur productivité tout en maintenant fondamentalement une totale indépendance politique. Deuxièmement, Xi a un vaste programme destiné à faire pivoter les investissements intérieurs de la Chine de projets basés primordialement sur l’infrastructure vers des projets qui amélioreront la micro-direction de la vie quotidienne. De beaucoup de manières, des programmes de ce genre, au niveau des villes, sont déjà en très bonne voie.

La réticence de la Chine à intervenir dans les questions politiques des autres pays a constitué un thème récurrent du discours de Xi. Ceci avait pour but de rassurer les nouveaux partenaires de la Chine, mais faisait aussi partie d’une déclaration plus large, selon laquelle, dans un XXIe siècle dominé par la Chine, la domination serait organiquement économique en termes de ressources accessibles et non une domination politiquement ou idéologiquement impérialiste. De multiples façons, il n’y a pas de meilleur endroit pour rassurer ses partenaires du manque d’intérêt de la Chine à exporter une idéologie qu’un congrès du Parti Communiste. Dans ce sens il a été exprimé clairement que la dialectique idéologique de la Chine est réservée à la Chine et non à ses partenaires. On pourrait résumer cela en une seule phrase de la façon suivante : « Le grand socialisme moderne dans un seul État et Une Ceinture-Une Route pour tous les partenaires indépendants ». Pour le dire autrement : « Beaucoup de systèmes politiques, un but de prospérité commun ».

Entre aujourd’hui et l’année 2020, la Chine travaillera a solidifier les gains économiques et sociaux de la dernière décennie, chose qui sera couronnée par l’achèvement du projet de modernisation de l’Armée de Libération Populaire en 2020, en même temps que des efforts seront poursuivis pour éliminer totalement la pauvreté rurale et développer les secteurs de l’agriculture moderne et de l’industrie en dehors des régions urbaines modernes de la Chine.

Entre 2020 et 2035, la Chine travaillera à bâtir un pays « prospère, fort, démocratique, culturellement avancé, harmonieux et beau ». En termes plus pratiques, cela signifie un pays où les standards de vie réels des Chinois continueront de croître, tandis que les conditions de vie resteront à l’abri des pics et des effondrements qui ont été le fléau des sociétés occidentales au cours des dernières décennies.

Tandis que les capitalistes critiquent souvent les pays socialistes pour leur pauvreté en objets de luxe et en activités de loisirs et qu’à l’inverse beaucoup de socialistes critiquent les pays capitalistes parce qu’ils rendent la culture inaccessible et une stabilité de vie impossible, le programme de Xi ambitionne d’offrir à la fois la stabilité, des environnements résidentiels et de travail constants et satisfaisants, tout en augmentant également la capacité des citoyens de base d’enrichir leurs vies par des activités culturelles et que les nouvelles avenues de l’amélioration sociale seront rendues possibles par les technologies modernes auxquelles la Chine s’est à la fois préparée mentalement et a fait œuvre pionnière.

Dans ce sens, la Chine se prépare à la réalité économique et sociale de l’âge de la mécanisation industrielle. Là où beaucoup d’entrepreneurs occidentaux tels qu’Elon Musk ont préconisé un salaire vital fixe pour tous les citoyens, de façon à pouvoir affronter une mécanisation accrue, les propositions de Xi veulent garantir effectivement le partage et la distribution de l’immense richesse de la Chine par un programme d’investissements directs au bénéfice des gens et de leur environnement social. Ainsi, plutôt que de payer aux gens un salaire arbitraire, la Chine, après 2035, fera de plus en plus en sorte que se développe une société où la richesse sera transférée à l’ensemble des citoyens sous forme d’investissements diversifiés, chose qui pourra être harmonieusement réalisée grâce à l’entrée dans l’âge de la méga-mécanisation.

Une partie des recommandations de Xi pour améliorer la qualité de la vie des Chinois est de veiller à toujours équilibrer le développement infrastructurel et la protection écologique. Étant le pays qui s’est plus rapidement industrialisé que n’importe quel autre dans l’histoire, la Chine a déjà commencé à s’engager dans la technologie verte, particulièrement dans le domaine de la création d’énergies plus complètement que n'importe où ailleurs. Quand la Chine commencera à exporter ses technologies vertes, Pékin sera presque devenue un leader mondial dans ce domaine.

Xi Jinping a aussi parlé de la nécessité de s’assurer davantage encore que la corruption ne s’implante pas en Chine malgré la diversification économique et la croissance. Il a encouragé les fidèles du parti à rester attachés aux valeurs traditionnelles en préparant le développement des nouvelles manières de penser et des nouvelles manières de résoudre les problèmes.

 

Cela marchera-t-il ?

Prises au pied de la lettre, toutes les propositions de Xi sont impressionnantes. Il serait difficile pour quiconque autre qu’un idéologue de ne pas être d’accord avec le champ d’application global de ce long discours.

C’est pourquoi la plus grosse question qui reste à poser est : la Chine sera-t-elle capable d’accomplir ces exploits ?

La simple réponse, fondée sur le bilan moderne de la Chine est un OUI retentissant.

La Chine a été capable de créer et de bénéficier d’une révolution industrielle moderne, une révolution dans l’organisation et la vie dans les villes, une révolution de la consommation, une révolution des standards de vie et une révolution technologique, tout cela en une période de 30 à 40 ans.

Ce qui reste à faire à la Chine, c’est bâtir, sur ces fondations qu’elle a posées à une vitesse phénoménale, si on considère le volume de sa population et la masse de son territoire.

Parce que toutes les propositions de Xi comprennent une combinaison d’investissement intérieur et de partenariats extérieurs qui comprennent à leur tour de nouvelles opportunités d’investissements multilatéraux en même temps qu’un engagement déterminé envers la paix, la seule manière dont le progrès de la Chine puisse être compromis serait par l’intervention d’une puissance étrangère.

Quoi qu’il soit clair que les USA ont l’intention de compromettre le développement extérieur de la Chine par le moyen d'Une Ceinture-Une Route, il est également clair que les indubitables tentatives US de le faire se sont traditionnellement soldées par des échecs. Le pivotement de Washington vers l’Inde, tentative évidente de faire échouer l’alliance sino-pakistanaise, est devenu honte publique lorsque Washington a en quelque sorte pris diplomatiquement ses distances d’avec New Delhi, après qu’il fût devenu clair que l’Inde ne croit pas qu’il soit bien prudent de sauter dans le train du nouveau désastre afghan de l’Amérique. Ceci limite d’autant les options de l’Inde à long terme, si New Delhi ne réussit pas à rejoindre la Russie et le Pakistan sur le parcours d’Une Ceinture-Une Route. Bien que les USA aient pris soin de sortir quelques déclarations pro-Inde le jour du discours de Xi, le timing et la nature des remarques montrent qu’il peut s’agir là du dernier hoquet d’une politique en plein cul-de-sac plutôt que d’une réelle revitalisation.

Pour ce qui est de l’Asie du Sud-Est, la crise prolongée au Myanmar semble devoir être maîtrisée de l’intérieur. Le danger, c’est que les États-Unis pourraient encore internationaliser les conflits dans l’espoir de faire barrage aux partenariats de la Chine en Asie du Sud-Est. Ailleurs dans l’Asie du Sud-Est cependant, les Philippines pourraient bientôt devenir une double « success story », à la fois pour Manille et pour Pékin, puisque, dès cette année, Xi Jinping a salué « une ère dorée » des relations entre l’ex-colonie US et la Chine, chose qui a été rendue possible par le pivotement du président Rodrigo Duterte, qui s’est détourné de Washington pour se rapprocher à la fois de la Russie et de la Chine. La Chine se prépare aussi à construire tout un nouveau quartier à Manille, qui servira de vitrine aux Philippines pour le reste du XXIe siècle et au-delà.

En ce qui concerne le Moyen Orient, alors que les États-Unis y ont causé une dévastation majeure, il y a désormais davantage de pays disposés à (et capables de) travailler avec la Chine qu’il n’y en a jamais eu auparavant, en ce compris des pays comme l’Iran et l’Arabie Saoudite, le Qatar et l’Égypte, le Liban et l’Irak, la Syrie et la Turquie.

L’ouverture récente, par la Chine, d’une base militaire logistique à Djibouti, semble devoir aussi lui assurer de futurs partenariats en Afrique. De plus, la chaleur des relations de la Chine avec la Russie signifie que deux des trois superpuissances du monde sont sur la même longueur d’ondes, et c’est quelque chose de très différent de ce qui a caractérisé l’époque de la Guerre Froide, quand l’URSS, la Chine et les USA avaient trois ordres du jour très différents, dont chacun rendait possible à une des trois puissances d’exploiter les deux autres.

Par-dessus tout, sur le point de savoir si Xi Jinping et ses successeurs seront capables de concrétiser les monumentales promesses faites dans le discours d’aujourd’hui, les pronostics paraissent réalisables à un point surprenant. La Chine a montré au monde qu’elle peut faire se produire ce qui est difficile à une vitesse qui choque beaucoup de sceptiques et avec une exactitude qui laisse confondus les observateurs ou les précédents géants économiques émergents

Dans ce sens, il n’est pas du tout hors les bornes du réel qu’un discours de 3h1/2 puisse façonner les cent ans à venir de l’histoire de la Chine et du monde.

Source : http://theduran.com/xi-jinpings-3-5-hour-speech-before-th...

Traduction : c.l. pour Les Grosses Orchades

 

2. russep.gif

 

4. banniere-livres.jpg

 

J’y reviens parce que j’en ai marre d’entendre caqueter de fascisme et d’antifascisme par des gens qui ne savent pas de quoi ils parlent.

 

 

Déjà Caméléon perçait sous Malaparte

 

Théroigne – L.G.O.25 octobre 2017

 

C’était trop tentant pour qu’on y résiste et il ne faut jamais résister aux tentations.

Cela dit… est-ce juste ? Ou ses retournements vrais ou apparents, voire opportunistes, ont-ils eu une logique interne et des causes qui ont échappé à tous, y compris peut-être à lui-même ?

Il y a tout juste 60 ans qu’il est mort (juillet 1957) et il est toujours en enfer. Celui de la bien-pensance évidemment, mais celui de l’ignorance qui en découle n’est pas mal non plus. Je propose qu’on y revienne un peu plus tard, non pas pour vider l’abcès – que les italiens se débrouillent avec leur histoire ! ­–, mais pour essayer d’y voir clair, de « comprendre » comme le suggérait Simenon.

Dans l’immédiat, oubliez s’il vous plaît les petits maoïstes franchouillards à qui José Artur disait « À 40 ans, vous serez tous notaires » en ne se trompant pas. Oubliez Sollers, July et tutti quanti.

Le dernier très grand amour de Malaparte fut la Chine. Coup de foudre instantané.

 

Extraits de Io, in Russia e in Cina [Moi, en Russie et en Chine]

Publication posthume de 1958

(En français : « En Russie et en Chine » parce que les éditeurs français sont incapables de respecter un titre original)

 

5. Malaparte hôpital-1.jpg

Malaparte à l'hôpital Sanatrix - Rome - Juillet 1957

 

« Oui, c’est sûr, je suis encore très fatigué. Le voyage de Pékin à Rome a été long, fatigant, bien que toutes les précautions aient été prises pour m’épargner l’excès de fatigue du vol de dix mille kilomètres de la Chine à l’Italie. Et peut-être la raison de ma fatigue n’est-elle pas tant physique que la douleur de la séparation d’avec mes amis chinois.

Je le savais même avant d’aller en Chine, ce que signifiait le mot frère, mais la vraie, profonde, éternelle signification de l’expression amour fraternel, je ne l’ai apprise que pendant mon séjour et ma maladie en Chine. Et si j’insiste sur mon expérience en affection, gentillesse et solidarité humaine, ce n’est pas par esprit à la De Amicis*, mais parce que c’est un fait rare et merveilleux qu’un peuple engagé dans une lutte aussi dure contre l’héritage de misère et de souffrance du passé, pour la construction d’un grand pays moderne, libre, juste et humain, sache tourner une si grande partie de son esprit vers la bonté, la générosité et la fraternité.

La faim, la souffrance, l’esclavage, l’injustice rendent souvent les peuples durs et méchants. Le peuple chinois, nonobstant des siècles d’esclavage, de faim, d’humiliation, de terreur, est resté bon. Et la grande leçon qu’on apprend en Chine, dans la Chine Populaire de Mao Tse Toung, ce n’est pas seulement une leçon de courage, de sacrifice, de ténacité dans la lutte et dans le travail, mais c’est aussi, surtout, une leçon de modestie, de bonté, d’honnêteté. Pendant mon voyage à travers la Chine, du Shaanxi du nord à l’extrémité nord-occidentale du Turkestan, du Gansu au Hubei, j’ai vu de près un peuple de paysans et d’ouvriers uni et compact dans la construction d’une patrie neuve, libre et juste, d’une Chine socialiste.

Ce que j’avais vu à Ta Tun, dans le Shaanxi, à Urumçi, au Turkestan, à Langchou, au Hangzhou, à Xi’an, dans le Shenxi, à Tchoungking, au Setchouan, c’était une armée engagée dans une bataille contre les misères héritées du féodalisme, contre toute une histoire millénaire de tyrannie et de faim. Mais ce que j’ai vu pendant le cours de ma maladie, pendant les trois mois et demi passés dans les hôpitaux de Tchounking, de Hankou, de Pékin, c’est un spectacle encore plus extraordinaire et plus émouvant : celui d’un peuple entier engagé dans une bataille colossale contre la tuberculose, le rachitisme, l’anémie, la malaria, la dénutrition, c’est-à-dire contre les cent et cent maux qui, siècle après siècle de féodalisme, ont laissé un héritage épouvantable dans le sang de la population chinoise. […] Qu’on ne croie pas que les médecins des hôpitaux soient des médecins quelconques : ce sont en général des spécialistes de grande réputation, d’un niveau sûrement pas inférieur, et souvent même supérieur à celui des médecins américains et allemands. Le département psychiatrique de l’hôpital de Hankou est sans doute celui qui est équipé de façon la plus moderne de tout ce que j’ai pu voir, et il n’arrive pas, en Chine, comme c’est malheureusement le cas ailleurs, que les enfants qui peuvent y être hospitalisés soient seulement les enfants des riches. Ce sont les enfants d’ouvriers, de paysans, de pauvres gens. […] La directrice du département pédiatrique, le professeur Tao, m’a dit : « Les enfants ont une importance décisive pour l’avenir du monde, bien plus grande que beaucoup d’entre nous ne le croient ». Cette phrase du professeur Tao m’a fait ressouvenir de ce que m’avait dit un paysan chinois dans une coopérative agricole du Shaanxi: « Il n’y aura pas la guerre, parce que les enfants ne la veulent pas ».

Ce que j’ai télégraphié au président Mao Tse Toung en quittant la Chine est vrai : « Je suis venu en Chine en ami, j’en pars amoureux de la Chine ». Je ne pourrai jamais oublier ce que les autorités et le peuple chinois ont fait pour moi, et ce sentiment de gratitude et d’affection s’ajoute à mon sentiment d’admiration, de solidarité pour la grande œuvre de construction socialiste de ce peuple.

Comme je l’ai dit l’autre jour dans une interview à la Pravda, celui qui a vécu, de près, l’expérience chinoise, peut mieux que quiconque estimer sereinement et objectivement les douloureux épisodes survenus en Europe ces derniers mois. Ce sont des événements tragiques, pénibles, qui font de la peine à toute âme juste et honnête, mais qui ne peuvent toutefois, en aucune façon, ébranler la foi en l’avenir d’un monde de liberté, de justice et de bien-être, qui est le monde dont la Chine Populaire nous offre une image encore un peu verte, mais sûre et définitive.

Moi aussi, j’ai souffert de lire dans les journaux les nouvelles de Budapest, mais cette souffrance n’a jamais été accompagnée du moindre doute. La grande et positive expérience chinoise absout toutes les erreurs quelles qu’elles soient, parce qu’elle est la preuve manifeste et indiscutable que la somme des faits positifs, dans le mouvement du progrès, est supérieure toujours à la somme des erreurs. […]

J’aime les Chinois. Et je serai toujours à leurs côtés dans tous les cas, quoi qu’il puisse arriver dans le monde. J’aime les Chinois non seulement pour la raison personnelle du bien qu’ils m’ont fait, mais pour la raison plus valable et plus vraie du bien qu’ils font à tous les hommes et à tous les peuples. L’autre matin, à l’aéroport de Pékin, quand j’ai commencé à monter la raide passerelle d’embarquement du turboréacteur soviétique mis à ma disposition par le gouvernement chinois pour me ramener en Italie, la petite foule des autorités, de journalistes, de médecins, d’infirmières, d’employés de l’aéroport, d’écrivains, de diplomates, qui était venue me saluer – il y avait dans cette foule le ministre de la Culture de la République Populaire chinoise – est devenue tout à coup silencieuse. Je n’arrivais pas à monter les marches trop raides et je me suis affalé, à moitié évanoui. Le commandant du turboréacteur soviétique, un Russe blond aux mains énormes, est descendu en courant et m’a soulevé, presque porté, me hissant marche à marche vers la cabine de l’avion. La foule, frappée de ce spectacle pénible, se taisait. Arrivé en haut de la passerelle avec le souffle coupé (depuis plus de trois mois, je respire avec un seul poumon) je me suis arrêté pour reprendre des forces. C’est alors que je me suis rendu compte du silence de la foule. Je voulais dire quelque chose pour saluer mes amis, pour remercier, et me sont venus spontanément aux lèvres trois mots chinois, que j’ai prononcé lentement avec grande difficulté : « Uò ai zungkuojen », qui veulent dire « J’aime les Chinois ». Et ils se sont mis à pleurer.

_______________

* Edmondo de Amicis est un auteur italien mort en 1908, qui a écrit des livres pédagogiques, dont Cuore et Les deux amis, classiques de la littérature enfantine, exaltant l’amitié entre camarades d’école, le courage, le patriotisme, etc.

Io, in Russia e in Cina – La Feltrinelli

Source : « Fu la Cina l’ultimo amore di Malaparte » https://www.agi.it/cultura/curzio_malaparte_60_anni_cina_...

Traduction : c.l. pour Les Grosses Orchades

(de l’italien parce que pas l’édition française sous la main)

 

2. russep.gif

 

[Si je ne me trompe, c’était pendant les Cent Fleurs. Vladimir Vladimirovitch avait cinq ans, Xi Jinping en avait quatre. Malaparte n’a donc pas connu le « Grand bond en avant » ni la Révolution culturelle. Tant mieux pour lui.

Il n’aura pas connu non plus la Révolution cubaine, ses soixante et quelques années de blocus meurtrier, la Révolution des œillets portugaise, le Chili, l’Angola, la victoire des Sud-Africains, les petits Gazaouis vitrifiés au lance-flamme… Il n’aura pas connu les années Eltsine, Beslan, la guerre de Tchétchénie, la Russie de Poutine, la « libération verticale » qu’il avait pourtant annoncée (par les bombes) de la Yougoslavie, les années de plomb de son pays, Aldo Moro dans son coffre de voiture, le retour des nazis en Ukraine, les destructions systématiques de l’Irak, de la Syrie, de la Libye, du Yémen et j’en passe.

Il n’y a rien à répondre à ce qu’il dit, sinon le croire de toutes nos forces :

« …absout toutes les erreurs quelles qu’elles soient, parce qu’elle est la preuve manifeste et indiscutable que la somme des faits positifs, dans le mouvement du progrès, est supérieure toujours à la somme des erreurs ». ]

 

6. En Russie et en Chine.jpg

 

 

Curzio Malaparte

En Russie et en Chine

Paris, Les Belles Lettres, 2014

Coll. Le goût des idées

272 pages

 

 

2. russep.gif

 

Malaparte et les croix chinoises

Un récit d’Igor Man – La Stampa.it - 2002

 

7. curzio malaparte in hora mortis luca del baldo.jpg

« Curzio Malaparte in hora mortis », par Luca del Baldo

 

Sur la poche de poitrine du pyjama (de soie) de Malaparte, il y avait une petite broderie, un dessin simple et pourtant complexe. « C’est le signe de la longévité – expliquait Curzio – un dessin de mes amis chinois. Ce n’est pas juste pour conjurer le sort, c’est un réconfort. Une aide pour le cas où il faille s’en aller. On peut continuer à vivre aussi de l’autre côté, dans le nouveau territoire qui nous est assigné par le créateur. Ce sera une vie plus difficile, mais peut-être moins pénible. Parce que, comme on le sait, vivre bien est assez facile, ils ne sont que trop nombreux à y réussir. Mais ça ne m’a jamais été possible. Ce qu’il y a, c’est que les choses difficiles me plaisent trop. Et que ça fatigue, parfois. Tant.

Curzio Malaparte préférait la lumière tamisée. Il avait appris à l’apprécier en Chine et ainsi désirait que dans sa chambre n’entrât jamais une trop forte clarté. Un après-midi pourtant, il voulut que j’ouvre la fenêtre en grand. C’était l’après-midi du 13 avril 1957. Il disait, content : « On est en avril, on ouvre la fenêtre et c’est le printemps. Laissons-le entrer, il ne lui faut qu’un moment. Maintenant, referme, s’il te plaît, Igor. Merci. Même si on ferme la fenêtre, c’est toujours le printemps. Il est entré. Désormais, si je touche quelque chose, c’est le printemps : le printemps est dans l’air, partout. Dans l’eau que je verse dans mon verre. Je bois le printemps dans l’eau. Dans une gorgée d’eau à peine. C’est comme ça. »

Quand il était là-bas, en Chine, dans cet hôpital près du Fleuve Bleu, il lui arrivait souvent de penser au printemps. Il y avait dans l’air une suave couleur de rose, racontait Curzio. C’étaient les persiennes de la fenêtre qui rendaient rose la lumière. Et verte aussi. Ou grise. Ou d’un bleu voilé d’argent. Comme le bleu de la Montagnola ou l’argent des oliviers de Poggiboni et des collines du Val d’Elsa. De Spazzavento. Fermant à moitié les yeux, Malaparte disait : « Alors, je me trouvais tout d’un coup au milieu d’un pays toscan. En Chine, la lumière fait de ces miracles ».

Les Chinois disent que la lumière est bonne et qu’on doit être gentils avec elle, qu’il faut la traiter bien, la lumière, ne pas s’en emparer avidement. Si on est gentils avec la lumière, la lumière te fait cadeau de plein de couleurs. Comme cela se passait là-bas, quand Malaparte était dans un hôpital voisin du Fleuve Bleu. Novembre finissait, et pourtant la lumière avait les tons délicats du printemps. La même chose se produisait en approchant de Noël. Curzio, toutefois, n’était plus soulevé par celle lumière gentille. Le directeur de l’hôpital lui demanda ce qu’il avait : « Vous avez perdu votre sérénité » dit-il. « J’avais promis, m'expliqua Curzio, aux enfants des phares, aux gamins des gardiens des phares qui toutes les nuits s’allument en Italie, que je leur ferais faire une belle fête de Noël. Pauvres petits, si loin et si perdus, toujours au milieu des vipères et sans jouets. J’avais espéré pouvoir être rentré à la maison pour Noël. Mais j’étais encore à l’hôpital. Je regrettais pour les enfants des phares. J’allais les décevoir. » C’est pourquoi Malaparte était triste, de mauvaise humeur. Même la lumière qui filtrait de la fenêtre ne réussissait pas à le soulager. Mais le directeur sourit. Comme seuls les Chinois le font et on ne peut pas comprendre s’ils sont émus ou indifférents, s’ils t’aiment ou s’ils te haïssent. On ne comprend pas. Jamais. Il sourit, le directeur, et dit : « Ici aussi il y a des enfants comme ceux que vous dites. Ils sont quatre, les enfants du gardien du phare qui se trouve au milieu du grand fleuve. Quelle différence y a-t-il entre un enfant et un autre, entre un enfant italien ou chinois ou russe ou américain ? Ce sont tous des enfants ». Ainsi, les enfants du gardien de phare chinois ont eu des cadeaux inattendus. « Et Noël a aussi été bon pour moi – disait Curzio – : j’ai reçu un très beau télégramme. Le ministre Tambroni avait débloqué un million pour le Noël des phares, pour les enfants italiens qui vivent isolés. J’ai eu un beau Noël, même si j’étais à l’hôpital et si l’Italie se trouvait de l’autre côté du monde. Même si les douleurs me rongeaient les os et m’ôtaient le sommeil. Un Noël avec les enfants des phares ».

Les enfants du gardien de phare chinois voulurent remercier Malaparte. Ils vinrent à l’hôpital avec un cadeau pour lui. « Oh, comme le cœur me battait, disait Malaparte, leur cadeau, c’était deux bocaux dans lesquels frétillaient deux petits poissons. Ils les avaient pêchés dans le grand fleuve qui va très loin, expliqèrent-ils. Curzio devait plonger les doigts d’abord dans l’un, puis dans l’autre des bocaux et effleurer les poissons. Comme ça son mal, la mauvaise maladie, passerait aux petits poissons. Une fois retournés au phare, les enfants les rendraient au grand fleuve et le fleuve les emporterait, eux et la maladie appelée cancer, quoique Curzio refusasse d’avoir le cancer : « J’ai la tuberculose, moi. Je l’ai attrapée avec les gaz d’ipérite quand je jouais aux cartes avec les morts de Bligny » disait-il au mépris de la vérité.

Une fois arrivés à la mer, les petits poissons eux-mêmes perdraient la maladie et elle disparaîtrait pour toujours. « J’ai fait comme ils disaient – racontait Malaparte – j’ai agité les doigts dans les bocaux, et les petits ont murmuré, satisfaits. Ils se sont inclinés, ils ont repris leurs bocaux, et après s’être encore inclinés, ils s’en sont allés. Ils marchaient tout doucement, en faisant bien attention que les poissons ne s’échappent pas, parce qu’il fallait les reverser dans le grand fleuve bleu qui devait les porter loin. Eux et la maladie. Oh, comme le cœur me battait, maintenant que je t’en parle, Igor, je me rends compte que j’ai été heureux ». […]

Source : http://www.farodihan.it/2002/11/30/malaparte-e-la-croce-c...

Traduction : c.l. pour Les Grosses Orchades.

 

 

2. russep.gif

 

8. LA VOLGA.jpg

 

 

Curzio Malaparte

La Volga naît en Europe

Paris, Les Belles Lettres, 2012

Collection « Mémoires de guerre »

304 pages

 

 

 

 

Pourquoi la Volga est un fleuve européen et pourquoi la Seine, la Tamise, le Tibre (et le Potomac aussi) sont ses affluents.

Pendant la guerre contre la Russie, dès le début de la campagne, au cours de l'été 1941, ma connaissance de la Russie soviétique et de ses problèmes m'aida beaucoup à juger de la nature des événements, et à prévoir leur inévitable évolution.

Il ne faut pas oublier que j'étais un correspondant de guerre de l'Italie, pays de l'Axe, au même titre que les trois cents correspondants de guerre affectés aux troupes italiennes sur tous les fronts, en Libye, dans les Balkans et même en Russie : que l'on ne s'étonne pas, par conséquent, que je fusse avec les troupes de l'Axe et non point avec les Anglais ou les Russes. Ce n'est pas ma faute personnelle si j'étais un citoyen de l'Axe et si les citoyens russes, anglais et américains étaient des citoyens des pays alliés. Ce que j'observais sur les champs de bataille n'était autre chose que la confirmation, la preuve de ce que j'écrivais sur la Russie communiste depuis plus de vingt ans. Dans toute mon expérience personnelle des choses russes, je me suis toujours refusé à juger la Russie soviétique du point de vue qu'on pourrait appeler « bourgeois », c'est-à-dire d'un point de vue nécessairement subjectif.

[…]

Il faut rappeler cette vérité, à la veille de la grande lutte qui pourrait se terminer par l’effondrement de la Russie soviétique. Car beaucoup de gens s’abandonnent au préjugé trop simpliste que la guerre contre la Russie soviétique, celle d’hier comme celle de demain, est tout bonnement une lutte de l’Europe contre l’Asie, contre des idéologies asiatiques. C’est contre des idéologies européennes que l’Allemagne dans sa guerre contre l’URSS a combattu hier : c’est contre des idéologies européennes que l’Amérique combattra demain, dans sa guerre inévitable contre l’autre Europe.

[…]

L’Europe bourgeoise ne peut plus rien désormais ­ – et je crois ne pas me tromper – contre la Russie prolétarienne. Elle a passé les cartes de son jeu à la grande démocratie « bourgeoise » américaine.

Il y aura peut-être, et elle me paraît inévitable et hélas prochaine, une tentative américaine pour s’opposer au communisme russe. Même si l’Amérique réussissait dans son intention d’abattre la puissance soviétique (ce qui est probable), sa victoire laisserait sans solution, en Europe, les problèmes qui agitent profondément l’esprit des masses prolétariennes.

Extraits de la préface écrite en français par Malaparte, pour l’édition de 1948.

 

0. Malaparte Chine xxx.jpg

Malaparte jouant au samourai pour rire devant un public chinois bon enfant.

(Oui, je sais que les samourais c’est japonais !)

 

2. russep.gif

 

CATALOGNE

 

Réponse de Bruno Drweski

à Do, de Mai 68 (http://mai68.org/spip2/spip. php?article843) :

 

« Si nous soutenons le gouvernement bourgeois indépendantiste de Catalogne, alors il faut être logique, il faut soutenir l'indépendance "kouchnérienne" du Kurdistan irakien, le combat kurdo-israélo-usano-antisyrien pour le Rojava, l'indépendance néo-fasciste du Vlaams Blok flamand ou de la Padanie nord-italienne et du Xinjiang/Turkestan chinois ainsi que de la Tchétchénie russe, sans pour autant faire le bilan des résultats concrets qu'ont apporté aux peuples concernés et, plus largement, à l'humanité progressiste, le démantèlement déjà réalisé de l'URSS, de la Yougoslavie, de la Tchécoslovaquie, du Soudan, etc. »

 

On ne saurait mieux dire.


2. russep.gif

 

 

Mis en ligne le 25 octobre 2015.

 

 

 

21:24 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

25/09/2017

Moi pas vouloir « speaker » globish

1. Bottle women in a boat x.JPG

« Veuillez avoir l’obligeance de tirer sur la chaînette après usage » – «  Please flush ».

Avis bilingue dans les toilettes de Montreal

 

Moi pas vouloir « speaker » globish

Ingrid Riocreux –  Causeur 11 septembre 2017

 

11. brighelli-.jpg

Jean-Paul Brighelli

 

Si l’on m’avait dit qu’un jour je rédigerais la recension d’un livre signé Brighelli, moi qui appartiens à la génération des « crétins »…

C’est le français qu’on assassine se lit avec plaisir : le souvenir de Du Bellay (Deffence et illustration de la langue françoyse, 1549) et de Rivarol (Discours sur l’universalité de la langue française, 1784) irrigue un texte qui allie le sérieux didactique de l’essai avec le mordant du pamphlet. Brighelli s’efface parfois pour donner à entendre ici un poème, là un extrait de roman ou une tirade, qu’il commente, qu’il dissèque, qu’il étudie avec autant de rigueur que d’humour, à vous donner le goût de la littérature. Son style est chatoyant et varié, ne répugnant pas à employer, où il s’impose, le subjonctif imparfait, ni le mot bas où il est sûr de faire effet, ni tel autre signe d’oralité bienvenu qui vient conférer au texte sa force expressive et confirme ce que l’on sent tellement : que l’auteur a mis tout son cœur dans cette défense du français qui est aussi (la casse du titre, intégralement en majuscules, autorise cette lecture), une défense du Français, le vrai, celui qui sait « affiner les mots comme on affine un fromage, et les offrir à déguster à ses amis ».

 

« Démissions scolaires »

C’est ma vie que raconte Brighelli quand il parle de ces « quelques millions d’enfants nés entre 1985 et 2017 », victimes de l’« effet Meirieu » et de l’idéologisation croissante de l’école. J’ai sans doute été plus épargnée que d’autres, parce que j’ai dû tomber sur quelques profs qui « continuaient à appliquer ce qu’ils savaient faire ».

Tout de même, j’ai subi un nombre considérable de « projets pédagogiques » débiles assortis de leurs heures perdues au CDI (perdues pour les apprentissages, pas pour les bons moments entre copines, cela va de soi). Le programme d’histoire-géo du CM2 qui allait « jusqu’à nos jours » s’est achevé pour moi avec Louis XIV, notre classe ayant été choisie pour participer au Parlement des Enfants (renseignez-vous sur cette ineptie chronophage), ce qui fut aussi l’occasion de mon premier passage à la radio et de ma première rencontre avec des journalistes. Je n’ai jamais entendu parler de Napoléon durant ma scolarité puisqu’il était au programme de quatrième et que je me trouvais dans cette classe en 1999, année de naissance de l’Euro. Toute l’année fut donc consacrée à des exposés, films, projets, rencontres, recherches au CDI, visites et interventions diverses en mode glorification enthousiaste, sur le thème de la monnaie unique. Napoléon était aussi au programme de seconde mais dans une perspective « problématisée et non narrative, reposant sur l’étude de documents », aussi n’en ai-je évidemment rien retenu. À un mois du bac de français, je confondais encore Voltaire et Verlaine, Malraux et Marot et n’avais, de manière générale, aucune notion d’histoire littéraire, les grands auteurs flottant en complet désordre dans un passé brumeux ; ce qui ne m’empêchait pas d’être abonnée aux félicitations du conseil de classe. « Ce n’est pas le niveau qui a baissé, ce sont les ambitions », dit fort bien Brighelli. Et cela oblige à des prouesses : l’accession de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle fut pour moi une divine surprise puisque l’arrêt momentané des cours, justifié par l’impératif de la lutte antifasciste, me permit de me plonger dans le Lagarde et Michard de mon père et d’ingurgiter en deux semaines ce que les enfants de son temps apprenaient en sept ans ! Ce Lagmich dont Brighelli dit qu’il lui paraissait naguère « franchement un peu limité » est, comme il le constate, devenu « un monument de résistance à la paupérisation culturelle ».

Mais j’ai eu une chance, énorme, outre celle d’avoir appris à lire dès la grande section de maternelle avec la plus pure méthode syllabique : c’est d’avoir des institutrices qui, sans échapper aux vogues et défauts de notre temps, étaient restées très attachées à l’enseignement de la langue, à l’ancienne. Je me souviens des exercices d’analyse (nature-genre-nombre-fonction, pour chaque mot d’une longue phrase) occupant des après-midis entiers ; j’aimais cela follement. Et les verbes à conjuguer à tous les temps de tous les modes, y compris le conditionnel passé deuxième forme. J’en redemandais. C’est de cela que sont privés les élèves d’aujourd’hui, et Brighelli donne à voir la triste condition de ces crétins fabriqués à la chaîne, et le sombre sort qui en découle pour notre pays et même, notre humanité.

C’est dramatique et grotesque à la fois : on rit en lisant les aberrations débitées par les IPR (inspecteurs pédagogiques régionaux) afin de convaincre les professeurs d’appliquer la réforme Belkacem. Et, malin, Brighelli signale qu’il peut « identifier nommément les auteurs de ces calembredaines ». Que quiconque mettrait en doute l’authenticité des citations se le tienne pour dit !

 

« Je plaide pour le français, mais je plaide aussi pour l’anglais »

Brighelli dénonce ce qu’il appelle la « trahison linguistique », qu’une citation de Valérie Pécresse, en épigraphe de chapitre donne à entendre sans ambiguïté : « oui, l’anglais nous a envahis, alors cessons de le considérer comme une langue étrangère ! » Mais, démontre Brighelli, ce n’est pas l’anglais qui nous a envahis, plutôt une espèce de sabir bâtard qui, combiné à la dégradation de l’orthographe et de la syntaxe, est en passe de faire ressembler notre langage à celui de Salvatore dans le Nom de la rose d’Umberto Eco !

Il fustige la tendance actuelle des distributeurs de films à ne plus traduire les titres, ou bien, ce qui est peut-être pire, à substituer au titre anglais original un titre en globish. Ainsi The Hangover devint-il Very Bad Trip et Wild Things, Sexcrimes. Il dénonce la réécriture simplifiée des romans d’Enyd Blyton, non seulement dans leur traduction française mais également dans leur version originale. Défense du français, le livre de Brighelli est aussi une déclaration d’amour à la langue de Shakespeare : dans ses pages, Corneille, Mallarmé et Flaubert côtoient James Joyce et Virginia Woolf.

 

Les patries en danger

Quelle agaçante schizophrénie que celle dont s’offusque Brighelli : l’hypocrisie de cette Europe obsédée par le retour à l’unité linguistique d’avant Babel, et qui prône dans le même temps le développement des langues régionales. Tout particularisme linguistique, des patois locaux au parler banlieue, devient ainsi digne d’être valorisé, pour peu qu’il ne soit pas national, pour peu, en réalité, que sa valorisation contribue à démembrer la nation. Diviser pour faire régner le globish. La tâche d’unification linguistique que s’était assignée la Révolution française est ainsi méthodiquement ruinée. J’ai récemment appris que j’avais quelques gènes en commun avec l’un des grammairiens qui ont collaboré à cette mission révolutionnaire. Je ne sais ce qui ferait le plus de peine à Etienne Molard, petit instituteur parti en croisade contre les régionalismes : découvrir que mon mari emploie « déprofiter », un « lyonnoissisme » par lui condamné dans son ouvrage de 1792, que mon père utilise « beurziller », un verbe qu’il n’aurait pas manqué de proscrire s’il eût été breton plutôt que lyonnais, ou bien s’apercevoir que tous les Français ont délaissé « stationnement » au profit de « parking », un mot qui n’est pas même anglais, rappelle Brighelli.

La langue de l’Europe, la langue de la paix, ce ne peut être le globish qui n’est la langue de personne. C’est la polyglossie (ou multilinguisme) qui suppose l’effort du mouvement vers l’autre.

 

L’humanité en péril

Rien n’est dispensable ni inutile dans le fonctionnement d’une langue, des combinaisons phoniques aux compositions syntaxiques en passant par son lexique. Elle a son génie propre : ce que la plupart des gens se contentent de dire sans trop y croire ni le comprendre, Brighelli le démontre, exemples à l’appui. Or, les programmes reposent sur l’idée que les enfants d’aujourd’hui sont nés plus stupides que ceux d’hier et ne seraient, par conséquent, plus en mesure d’apprendre ni de comprendre les subtilités de leur langue. Brighelli aurait pu dire un mot de la pénible atteinte à l’estime de soi qui en résulte : on vit mal quand on a l’impression d’avoir volé son bac et j’avoue éprouver des difficultés à donner du « cher collègue » à des professeurs qui disposaient sans doute, avant même de commencer à enseigner, d’une culture bien plus vaste que la mienne le sera jamais.

Parce que la langue articulée, conceptuelle et subtile est ce qui arrache l’homme à son animalité, négliger son enseignement est une catastrophe pour l’humanité. Brighelli prononce deux grands mots :

« Racisme ». « Pourquoi l’indigène n’aurait-il pas le droit d’apprend la langue qu’ont maîtrisée Senghor, Hampâté Bâ, Césaire ou Ben Jelloun, sinon parce qu’on le méprise foncièrement ? » Notre auteur va plus loin et accuse les pédagos de complicité objective dans la résurgence du djihad

« On comprend mieux, écrit-il, comment l’islam rigoriste, qui exige de connaître l’arabe classique, a développé ses arguments. Face à une langue française en lambeaux, l’islam wahhabite impose une langue rigoriste, donnée de surcroît comme divine », quand la nôtre est réduite à des « compétences langagières qui appartiennent davantage au verbiage incontrôlé qu’au bon usage ».

Et ce professeur de s’offusquer que l’on valorise la propension des élèves à « s’exprimer », fût-ce par le bavardage (un IPR fait l’éloge du « papotis » !), alors qu’il faudrait « se taire pour apprendre ».

« Fascisme ». Brighelli exhume la réforme de l’éducation accomplie par Mussolini en 1923, dont les principes rappellent furieusement ceux qui ont dicté nos récentes réformes :

« en finir avec l’austérité des enseignements traditionnels, expurger l’école de ses éléments dogmatiques et livresques, valoriser les activités récréatives pour laisser s’épanouir l’expression spontanée de chacun, privilégier l’enseignement fonctionnel destiné à faciliter l’insertion professionnelle ».

Déjà, « la haine de l’intelligence ». Et ce fut le philosophe communiste Gramsci qui protesta du caractère libérateur de l’école « désintéressée » et exigeante qui seule rend l’enfant capable d’apprendre à réfléchir afin de diriger sa vie de manière responsable et autonome.

 

« L’UMP condamne cet acte de barbarisme sans nom »

Cette phrase, placée en tête d’un chapitre, a été prononcée par Jean-François Copé après un attentat suicide en Afghanistan, qui a fait quatre morts et cinq blessés parmi les soldats français. Il faut croire que cet acte n’avait pas de nom, en effet, puisqu’on le réduit à une faute de langue. Mais la confusion lexicale de Jean-François Copé est intéressante car, de fait, l’appauvrissement du lexique, l’assèchement de la syntaxe, l’accumulation des barbarismes, des impropriétés et des trahisons linguistiques sont bien les signes d’un glissement vers la barbarie. Mais la nôtre. Et l’on pense au mot de Sternberger à propos des nazis : « Leur langue est leur barbarie et leur barbarie est leur barbarisme, car parler et penser ne font qu’un ». Tant il est vrai que la dégradation de la langue constitue un coup porté à la civilisation.

Qui osera dire que Brighelli exagère ? Conséquence directe de l’incapacité à mener le combat par les mots, la violence gangrène notre société. L’illettrisme galopant engendre des comportements agressifs. La loi du plus fort reprend ses droits. L’illettrisme n’est pas l’analphabétisme : est illettrée une personne qui, bien qu’ayant été scolarisée, demeure incapable de lire et d’écrire avec aisance. Obtiennent donc leur bac aujourd’hui, et parfois même avec mention, des gens qui sont, à proprement parler, des illettrés. L’illettrisme est une frustration. L’école qui le produit trahit sa mission, son engagement, la confiance des parents, la soif d’apprendre des petits. Elle engendre de la bestialité et, loin de permettre la fermeture des prisons comme le voulait Hugo, cette école causera bien des guerres. Freud disait que la civilisation avait commencé le jour où l’on avait substitué l’insulte à la pierre. Brighelli propose bien quelques solutions et semble fonder quelques espoirs dans la nomination de Jean-Michel Blanquer. N’étaient ces lueurs dans la nuit, son livre apparaîtrait fort comme la chronique d’un retour à l’âge de pierre.

Publié sur La voix de nos maîtres, sous le titre « Je voglio nicht speaker globish »

Source : http://blog.causeur.fr/lavoixdenosmaitres/je-voglio-nicht...

Via : https://www.causeur.fr/francais-assassine-jean-paul-brigh...

 

Les très nombreux commentaires suscités par cet article – et la question qu’il traite – non seulement méritent d’être lus mais de susciter un débat aussi vaste et approfondi que possible. C’est une question de survie.

12. RIOCREUX.jpg

Pendant qu’on y était, on a lu aussi, à propos du livre de l’auteur La langue des médias qu’on avait raté quand il est sorti :

Un décryptage acerbe de la presse et de son langage

0. freccia nera piccola x.GIF

http ://reseauinternational.net/wp-content/uploads/2...

 

13. Apollon petit.JPG

 

M. Brighelli, également cinéphile, vient d’aggraver son cas avec ceci, qui ne traite qu’en apparence d’un autre sujet :

 

Sofia Coppola is a fraud

Jean-Paul Brighelli – « Bonnet d’âne » 9 septembre 2017

 

14. les-proies-affiche.jpg

 

Disons-le tout net pour commencer — et en finir : les Proies, le film de Sofia Coppola, est d’une nullité absolue. Pas un navet (ça peut être drôle, un navet, il y en a même pour lesquels on a une sorte de tendresse), mais un film de degré zéro, à partir duquel nous étalonnerons désormais le cinéma contemporain. Un zéro qui malheureusement multiplie parce que le réalisateur est une femme : c’est devenu un gage de qualité pour certains médias abonnés au politiquement correct — d’autant que pour se dédouaner devant de grotesques accusations de racisme, elle a déclaré avoir voulu faire un film sur les « genres ». Un zéro multiplicateur parce qu’elle est la fille d’un homme de génie, auquel je ne reprocherai pas d’avoir contribué à la naissance d’une buse : on n’est jamais trop responsable de ses enfants, et la mode actuelle consistant à promouvoir les « fils et filles de » n’est qu’une perversion typique de ces temps de crise où l’état-civil sert de passeport bien davantage que le talent. Curieux, quand on y pense, que tous ces progressistes qui exaltent la fille de son père croient au fond à une fatalité génétique à l’ancienne.

Alors, nul ?

Nul.

Savez-vous ce qu’est un chromo ? C’est une reproduction lithographique d’un paysage de carte postale. Le genre dont Flaubert se moque quand, se mettant dans le regard post-coïtal d’Emma, il écrit : « Les ombres du soir descendaient ; le soleil horizontal, passant entre les branches, lui éblouissait les yeux. Çà et là, tout autour d’elle, dans les feuilles ou par terre, des taches lumineuses tremblaient, comme si des colibris, en volant, eussent éparpillé leurs plumes. Le silence était partout ; quelque chose de doux semblait sortir des arbres ». Vous voyez le genre — mauvais genre. Pour y arriver, on est allé chercher un directeur photo français, Philippe Le Sourd — le même qui a filmé Gordes et Cucuron comme une collection de chromos dans l’un des plus mauvais films de Ridley Scott, Une grande année. Pour bobos du Luberon only.

Eh bien, le film de Sofia C*** (on est bien obligé de lui donner un prénom, puisque Coppola tout court, c’est son génie de père) est bourré de ces cartes postales à épingler sur le buffet de votre arrière-grand-mère. La réalisatrice s’est dit que son film se passant pendant la guerre de Sécession, elle devait copier les tableaux de Corot de cette période, style Mortefontaine, jeunes filles et bouquets d’arbres traversés de lumière.

Lire la suite…

Source : http://blog.causeur.fr/bonnetdane/sofia-coppola-is-a-frau...

 

N.B. On le savait depuis Marie-Antoinette.

 

13. Apollon petit.JPG

 

Et la guerre de l’art, on la livre quand ?

 

Est-il nécessaire de dire que les différents fléaux que déplore M. Brighelli font partie d’un tout ? Que l’anéantissement – je parle ici pour la France et la Belgique mais pas que – de toute forme d’éducation, que le meurtre de notre langue et notre gavage à coups de sucreries hollywoodiennes au cyanure ne sont que les diverses formes de ce que l’on nous a fait, que nous nous sommes laissé faire.

Sans remonter au déluge ni se prendre pompeusement au sérieux, on peut dire que la guerre froide, la vraie, a été bien plus une guerre à la sensibilité et à l’intelligence qu’à n’importe quoi d’autre, bombe atomique incluse. Que le but était de faire de tout un continent un animal docile, sans volonté, ni réactions, ni pulsions.

Si on veut introduire une chronologie, on peut dire que « Kennedy-Berlin-1963 » a été le pivotement vers l’irrémédiable, la pente savonneuse au bas de laquelle nous sommes, en même temps qu’un péan de victoire de nos vainqueurs des deux côtés de l'Atlantique. Mais la défaite avait commencé bien avant.

Votre servante n’a vu que deux films pendant la guerre (la IIe mondiale). Le premier était Les aventures du baron de Munchausen, merveilleux film de propagande nazie à la gloire de von Braun. L’autre s’appelait Petite princesse. Starring : Shirley Temple. À la gloire d’un héros du Transvaal je crois. Britannique. En Belgique occupée et en provenance directe de Hollywood. Dont trois grands vaincus allaient bientôt débarquer : Von Stroheim, Chaplin, Welles.

 

15. Anna Magnani.jpeg

 

Mais suis-je la seule à me souvenir aussi douloureusement de l’extraordinaire floraison du cinéma italien de l’immédiat après-guerre ? Et du français d’ailleurs ? Pendant dix ans, on a cru que cela allait durer toujours… Peu se souviennent encore de Nikolaï Tcherkassov en visite au TNP et du discours qu’il y fit en russe d’une des plus belles voix du monde*, Gérard Philippe alors au sommet de sa jeune gloire traduisant au fur et à mesure chacune des phrases du député de la Baltique. Et de Chaplin reçu à l’Opéra et au Théâtre-Français avec plus de faste que la reine d’Angleterre. Où est-il le temps où, entre deux cuites avec Dash Hammett, Lilian Hellman mettait Candide en opéra ? Nous n’avons pas, alors, manqué de nous indigner comme il se devait des méfaits du MacCarthysme, tout en absorbant avec délices ses bourdes sur la nullité de l’art soviétique, le ridicule du réalisme socialiste, le Bolchoi resté ringardement XIXe et la supériorité si évidente – si, si – du non figuratif, des Pollock, Warhol et consorts, sans parler de la musique « pop », « rock » and so on – Ah,Woodstock !... Ah, Wight !... L’avons-nous avalée avec assez d’enthousiasme la potion empoisonnée… Et l’ombre s’est étendue sur l’Europe. Voulue. Planifiée. Inexorable. Grâce à nous.

Dans les commentaires suscités par l’article d’Ingrid Riocreux ci-dessus, une internaute  écrit notamment :

 

«  Moi qui ai enseigné longtemps et vu beaucoup de réformes, je peux vous assurer qu’il a toujours été possible, quelle que fût « la réforme » en cours, d’enseigner la nature des mots et des propositions ainsi que leur fonction… ainsi que les grands classiques et qu’aucun inspecteur ne vous aurait sanctionné. C’étaient les professeurs les premiers à s’engouffrer dans des « réformes » ineptes. L’absence de bon sens et de culture fut toujours, dans l’E.N, la chose du monde la mieux partagée. (…) »

 

C’est maintenant que ceux qui dérangent se font arracher des rangs, comme nous avons pu le voir il y a peu avec l’affaire Salah Lamrani. Et pas même par le Pouvoir, qui n’a aucun besoin d’y mettre les mains, mais par des sous-fifres, soucieux de leur propre confort comme toujours. Reconnaissons-le : quand les « maths modernes » et le « français rénové » ont entamé leur progression de métastases, ils l’ont fait avec l’adhésion enthousiaste de ceux qui auraient dû savoir mieux et jouer les anticorps au risque de leur vie.

La vérité n’est pas toujours gaie à considérer. Tout de même, elle vaut mieux que n’importe quoi d’autre.

C’est alors qu’on a vu, au théâtre surtout mais aussi dans les films et dans la littérature, surgir la bien-pensance du politiquement correct. On a vu Théophile de Viau mis plus bas que terre par des « critiques » qui ne voulaient entendre parler que du Vietnam, partout et à toutes les sauces. Le propre des malfaisants est de savoir se servir des sentiments les plus sincères de leurs proies contre elles-mêmes. Se branler sur les souffrances des autres est alors devenu, et pour longtemps, le sport européen n°1. Même à l’Opéra ! Ça tombe bien. C’est là que je voulais en venir.

Sans autre raison qu’une Xième crise d’urticaire à la vue d’une vidéo de 2012 – ben, oui – celle de Jules César en Égypte, version Festival de Salzbourg, qui m’a rappelé une crise de foie de 2005 causée par David McVicar à Glyndebourne. Minces prétextes que des états d’âme personnels, mais c’est comme ça. L’actualité nous sortant par les trous de nez et par les oreilles, pourquoi pas ?

_______________  

* Les autres étant selon moi celle du polonais Mieczyslaw Voit et de Richard Burton dans ses bons jours.

 

13. Apollon petit.JPG

 

Haendel chez les freaks

ou

qui nous délivrera des metteurs en scène à ch… qui se prennent pour des innovateurs audacieux ?

Théroigne

 

Giulio Cesare in Egitto

Version Antonini – Festival de Salzbourg  2012

16. Bartoli affiche.jpg

On entend une symphonie. Le Parnasse s’ouvre et l’on voit la Vertu, sur son trône, entourée des neuf muses. – César : « Que vois-je ? Quand donc les dieux, dans un torrent de lumière, sont-ils descendus sur terre ? »

 

 

Tu l’as vu, mon gros symbole phallique ? Mieux vaut écouter sans regarder, mais si vous voulez regarder, c’est là :

0. freccia nera piccola x.GIF

https://www.youtube.com/watch?v=Nu9i5ExXazE

 

Quelques réactions d’internautes :

~ « Los regisseurs están arruinando lo más sagrado del drama musical ! »

~ « Registi imbelli e narcisi ....studiatevi il Torelli i Galli Bibbiena e lo Juvarra .... avete rotto con queste egocentriche regie del CAZZO !!!! » 

~ « La musique est superbe et les chanteurs si talentueux malgré une mise en scène à la con. Ecouter sans regarder est l'idéal. »

~ « Absolutely awful sets, an insult to Handel's music. Singing and orchestra good. »

~ « Beautiful music,beautiful singing, ugly dreadful production. I don't like to see opera taken out of context. »

~ « Jaroussky is dreadful in this. »

[Il n’est pas dreadful, il est victime de ses metteurs en scène. Imaginez un beau grand jeune homme, plutôt baraqué, d’une tête plus grand que sa mère (qui n’est pas petite) déguisé en écolier des années 20 : culottes courtes, chaussettes aux genoux et sandales à pattes. Histoire de l’achever, on lui fait jouer son Sesto craintif et velléitaire…]

 

19. Jaroussky Sesto.jpg

Sesto-Jaroussky jouant à se faire peur avec un serpent

 

C’est cette version qui m’a fait piquer une crise d’urticaire et de ras-le-bol à la fois. Celle où on voit Cécilia Bartoli s’élever dans les airs à cheval sur une fusée à la Tintin, pendant que le maître du monde lui tourne le dos mais la voit quand même grâce à des lunettes en 3 D.

Imaginez-vous Scholl, un peu ridicule mais touchant en soldat d’opérette chez les Danois ci-dessous, ici en costume trois-pièces bleu Union Européenne, avec, dans le fond, promis au dépeçage, un mannequin le représentant plus grand que nature, vêtu pareil, avec une chaîne d’huissier à étoiles autour du cou.

Mme Bartoli est petite et fut peut-être mince un jour. On l’a donc sanglée dans du cuir, assez pour la faire précéder d’un demi mètre par une poitrine en obusiers et suivre d’un autre demi-mètre par une croupe à l’avenant, qui s’agite beaucoup car on la fait se tortiller au petit bonheur la chance sur des cuissardes à talons aiguilles. Mais, dans sa première scène de séduction (où elle est censée s’être déguisée en Vertu entourée des Neuf Muses), elle est en balayeuse de rues du Caire, enfin, d’Alexandrie, voilée cela va sans dire et flanquée d’une vieille romanichelle plus mère maquerelle que nature : Nireno, joué par un homme bien sûr (Jochen Kowalski), qui s‘amuse comme un petit fou. Au moins lui, si pas nous. On dirait Michou à la fin de sa carrière.

Christophe Dumaux – en dreadlocks et tatoué des pieds à la tête – quoique bien mal dirigé se révèle acteur doué. Son Tolomeo existe. C’est le vrai sale gamin caractériel et immature, sexuellement indécis, mal dans sa peau, qui veut pour lui seul les joujoux de sa sœur-épouse. Quand il se déculotte pour la première fois, on n’est pas surpris par l’audace – on les a toutes vues - et c’est même en situation. Mais quand il le fait pour la quatrième fois et se masturbe avec un coussin, on finit par se lasser. Dommage qu’il n’ait pas eu le von Stroheim de La veuve joyeuse pour lui donner quelques indications…]

 

20. Christophe Dumaux Tolomeo.jpg

Tolomeo s’efforçant de provoquer sexuellement Cornélia

 

C’est dans ce lit où tout le monde passe que s’introduit, en liquette, au bout d’un strip-tease plus Feydau que nature, Scholl-César, pour y rejoindre sa technicienne de surface, laquelle s’est voilée d’un torchon pour l’occasion. Voir l’époux si discret de Tamara Halperin, en slip, tirer nerveusement sur son marcel – orné d’une couronne de lauriers il est vrai – est un spectacle trop triste pour qu’on ait le coeur d'en rire.

C’est de sous le matelas de ce même lit que Ruben Drole-Achilla, sort ensuite un fusil d’époque, baïonnette au canon, pour s’y coucher botté en le serrant dans ses bras, avant d’aller trahir le tyran qui l’a vexé.

Cornelia, ajoutée à son harem par Tolomeo, vient faire du ménage elle aussi, en tablier vert et gants de caoutchouc, également poursuivie comme on sait par les assiduités d’Achilla qui, ô surprise, a plus ou moins l’air d’un Égyptien, quoique suisse, et se révèle grand acteur dans le trio Cornelia-Achilla-Sesto du IIe acte (moment sublime au milieu d’une mer d’immondices).

Un des sommets de cette représentation si délicate est atteint lorsque Tolomeo, en pleine crise d’infantilisme pervers, finit par étriper le mannequin de son ennemi, en sort les tripes en guirlande, se les passe autour du cou et finit par en manger le cœur à belles dents. Cru of course. En se mettant de l'hémoglobine partout.

Pourtant, le meilleur est pour la fin, je veux dire pour la presqu'indécente caresse sonore du fameux duo « Caro » - « Bella ». Imaginez un piano demi-queue plus ou moins couleur bois de rose, autour duquel viennent s’agglutiner les personnages survivants (César et Curio en frac et nœud pap, Cleopâtre en combinaison courte noire, Louboutins et manteau doré à traîne, etc, etc., tous cotillons en tête, se repassant un joint et tirant sur des langues de belle-mère, la reine d’Égypte et la veuve éplorée du décapité se déhanchant sur des rythmes intérieurs (bamba ?) dont Haendel n’a jamais rien su. Bientôt rejoints par les morts relevés. Extase !

Tout le monde n’est pas Jérome Bosch, hélas.

Bref, MM. Patrice Caurier et Moshe Leiser sont des malfaiteurs de l’humanité, non moins que M. David McVicar avant eux. Et l’ovation que le public leur réserve à la fin ne fait qu’accroître leur culpabilité : faire applaudir la laideur et la vulgarité par un public sans méfiance est même le premier et le plus grand de leurs méfaits.

Pour la symbolique Occident-Moyen Orient-Pétrole, je passe la main.

 

Si vous voulez voir la version McVicar de Glyndebourne dont celle-ci n’est que le pâle remake (définition Brighelli), c’est là :

0. freccia nera piccola x.GIF

https://www.digitaltheatreplus.com/education/collections/...=

 

13. Apollon petit.JPG

 

« À regarder », je vous en ai quand même trouvé une (les actes 2 et 3) qui n’est pas exempte de l’insupportable militarisation à la mode depuis plus de soixante ans, mais croyez-le ou pas, c’est la moins pire de toutes.

 

On passera sur le premier acte, où Livia-Cléopâtre navigue entre Carmen et Bardot de La vérité. On a droit aussi, bien sûr, aux rangers et aux battle-dress, le contraire eût été trop beau.

Il faut voir l’immense Andreas Scholl en trouffion pataud, avec des épaulettes que même la grande–duchesse de Gérolstein n’en aurait pas voulu pour ses gardes ! Al Sissi avec une voix d’ange !… Cléopâtre, pour sa part, quoique nordique (Inger Dam Jensen), est une des meilleures qui se puissent concevoir : non seulement jolie, dotée d’un irrésistible sourire à fossettes, elle passe sans broncher d’une perruque à l’autre et finit par chanter chauve. À ravir. C’est aussi une comédienne accomplie, à l’aise dans tous les registres, de la commedia dell’arte à la tragédie en passant par Marivaux. Que demande le peuple ?

Bon. Certains aficionados n’ont pas apprécié que le metteur en scène (Francisco Negrin) fasse du jeune frère de Cléopâtre un Levantin libidineux en âge d’être son père, voire son grand-père. Cela donne certes à l’inceste ptolémaïque une saveur inattendue, mais une fois le parti pris avalé, il faut reconnaître que Christofer Robson s’amuse beaucoup et fignole son avatar aux petits oignons. Randi Stene est une Cornelia belle et racée. On ne comprend pas trop que Palle Knudsen-Achilla avec son physique impressionnant de héros wagnérien, ne réussisse pas à lui faire oublier son Pompée qui, si mes souvenirs sont exacts, n’était pas aussi sexy qu’elle le chante. Michael Maniaci est, comme le dit son admirateur ci-dessous, vocalement époustouflant et très crédible en Nireno, même chauve. La jeune Tuva Semmingen est d’une grande fraîcheur en Sesto, ce qui par les temps qui courent n’est vraiment pas à dédaigner. Et John Lundgren arrive à se faire remarquer en Curio, chose rare, surtout dans la scène très réussie du basculement d’Achilla.

Ce qui caractérise avant tout cette production, c’est son admirable direction d’acteurs. L’inverse absolu de Salzbourg. Et quelques heureuses trouvailles de mise en scène : ainsi, quand César, ivre d’admiration, titube devant le Parnasse qui se referme, c’est en compagnie d’un premier violon monté de la fosse (une dame à la chevelure pré-raphaélite en plus)  qu’il chante son fameux aria « Se in fiorito ameno prato ». Match au finish, pour violon et rossignol.

Enfin, il n’y a pas dans tout cela une once de vulgarité. Si je vous dis que c’est le moins pire.

 

Giulio Cesare in Egitto

Version danoise de Lars Ulrik Mortensen

Actes II & III


 

Les internautes :

~ « Excellent, great singing sets better in this part except the naff modern military outfits. »

~ « Of course Andras Scholl is amazing as Gulio Cesare...but what about Michael Maniaci with his incredible voice (Nireno) ? He isn't countertenor but natural castrato voice, perfect for this role. »

~ « Espléndido A. Schol en el rol de G. Cesare e igualando su nivel, el resto del elenco. Gran duelo entre el violin y la voz, de A. Schol. »

 

13. Apollon petit.JPG

 

Au diable l’avarice ! Sans raison particulière.

Pour le plaisir de partager avec ceux qui voudront : ma version préférée entre toutes.

 

César est ici la grande contralto serbe Marijana Mijanović, accessoirement un des plus beaux visages qui existent, mais vous ne le verrez pas car c’est une version audio, enregistrée en concert. Dans le rôle de Cléopâtre, lady Rattle soi-même, la mezzo-soprano tchèque Magdalena Kožená. Dans celui de Tolomeo, le contre-ténor US d’origine indienne Bejun Mehta, plus ou moins élève de papa pianiste, de maman violoniste et de tonton Zubin, chef. Tranquillement devenu, depuis, le meilleur contre-ténor du monde. Anne Sofie von Otter, ici bien plus convaincante en Sesto qu’en Cornélie à ramassette dans l’horreur de Salzbourg. C’est Charlotte Hellekant qui rend justice – et quelle ! - à la veuve de Pompée. Dans les quatre autres rôles, Alan Ewing, Pascal Bertin et Jean-Michel Ankaoua ne pourraient pas être meilleurs.

Quinze ans et pas une ride.

 

Giulio Cesare in Egitto

Version Marc Minkowski et les Musiciens du Louvre

Enregistrée au Wiener Konzerthaus, Grosser Saal

Novembre 2002


 

Les internautes :

~ « Amazing »! »

~ « In my opinion, some of the most beautiful music on God's green earth... thank you maestro Handel... »

~ « Handel y unas buenas voces, la compañía ideal. GRACIAS. »

  

 

Parenthèse

Dans un roman de 1966 [Le masque d’Apollon], l’auteur anglais Mme Mary Renault raconte l’histoire d’un acteur tragique athénien du IVe siècle avant notre ère appelé Nikostratès.

Comme on le sait, les tragédiens jouaient masqués : montrer leur vrai visage en scène eût été pour eux comme se prostituer dans la rue. Ils étaient toujours trois ou quatre à se partager tous les rôles, changeant à chaque fois de masque, de voix et de costume, soutenus par un chœur et des figurants.

Au cours d’une tournée pas très fortunée, un vieux masque d’Apollon échoit à Nikostratès, merveilleusement sculpté dans du bois d’olivier, mais de facture archaïque : sévère, démodé, sa peinture écaillée. L’acteur s’y attache. Il sent dans les yeux vides une présence, quelque chose qui le pousse à révérer, à dresser à l’objet un autel sur sa table de chevet, entre une branche de laurier frais et une petite lampe.

 

17. Apollon grand.JPG

 

Un jour, sa troupe est invitée à jouer pour une conférence de paix qui se tient à Delphes. Les envoyés perses qui la financent optent pour Les Myrmidons, d’Eschyle. Nikostratès, « protagoniste », jouera donc Achille, mais il s’adjuge aussi le rôle d’Apollon qui, dans le prologue, apparaît dans les airs et prophétise. « On n’est pas à Delphes tous les jours », dit-il à son associé qui s’étonne. « Appelle ça mon service au dieu. » Et il fait venir un peintre pour lui demander de raviver son masque. L’autre, qui est un artiste aussi, tombe en arrêt devant ce qu’on lui présente et murmure, après un long silence : « À quoi devait ressembler le monde, quand les hommes avaient de pareilles certitudes ? ». Bon, d’accord, il le repeindra.

L’anecdote est celle-ci :

Nikostratès, sanglé d’un harnais, est hissé dans les airs au bout d’un filin. Un acteur déchu qui lui en veut et qu’il n’a pas vu depuis des lunes a trafiqué le filin pour « se venger » peu importe de quoi. Comme il commence à parler, sa cithare à la main gauche, pour mille huit cents personnes qui ne peuvent perdre un seul de ses soupirs, il sent que quelque chose d’anormal se passe. Une secousse. C’est l’un des quatre brins du filin qui vient de lâcher. Il comprend que, s’il ne fait rien, dans un instant il s’écrasera sur les dalles, trente pieds en contrebas. Mais, incapable de ridiculiser le dieu qu’il incarne en appelant à l’aide, il s’abandonne à sa volonté et continue. Un spectateur qui a vu s’écrie. Il lève la main droite pour le faire taire et dit « Nous sommes tous dans les mains des dieux ». L‘assistance retient son souffle, des petits chevriers du tout dernier rang à Dion de Syracuse et Platon assis au premier. Le silence est si énorme qu’on entend le vent agiter les oliviers en contrebas. Et quand, au bout d’une éternité d’angoisse, il achève son monologue, il sent le sol sous son pied : le machiniste, ruisselant de sueur, l’a fait descendre aussi doucement qu’il pouvait sans casser le dernier brin. Nikostratès a juste la présence d’esprit de couper son dernier vers « Et maintenant je m’envole vers l’Olympe » et tout est fini. On s’empare de lui. Il endosse le costume d’Achille et – heureusement qu’Achille boude ostensiblement pendant une bonne partie de l’acte – sort peu à peu de sa transe.

Quand le visiteur sicilien le félicite pour son courage et lui dit qu’il ne jouera plus jamais aussi bien, il répond, hébété : « C’est le dieu, pas moi. » Et est frappé par la foudre. Parce que c’est aussi un roman d’amour. Grec. Mais ceci est une autre histoire.

 

C’est comme ça que chante Marijana Mijanović : en danger de mort. À chaque fois. Que ce soit en représentation ou en concert, voire même en séance de travail, sans rien voir, ni personne, ni les instruments ni les murs. Seule avec son dieu. Comme le jaune et le blanc dans un œuf.

 

 

« Svena, uccidi, abbatti, atterra piaghe, morte, strage, guerra sempre in vita incontrerò. e tu padre, in me riposa, dietro, all'ombra generosa a momenti volerò »

Bajazet, Vivaldi


 

La voici, pour finir, dans la scène de la folie du Roland furieux, se ruant sur les notes assassines sans en esquiver une seule si meurtrières soient-elles, quand d’autres s’accorderaient le répit d’un parlando.

La mise en scène est nulle et la prise de son pas terrible, mais l’artiste est unique, incomparable.

 

« Ah, Medoro, Medoro… Ah ! Stigie larve »

Orlando, Haendel, Opera de Zurich, 2007

Martina Jankova (Angelica), Marijana Mijanović (Orlando)


 

Pour cette hébétude, je donnerais toutes les Bartoli du monde, en dépit de leur beau nez, de leur art du chant et de leurs performances d’athlète.

 

 

17 bis. Apollon de Gaza.jpg

L’Apollon de Gaza [Statue en bronze d’1,70 m découverte par un pêcheur en 2014.]

Ce sosie de Mme Mijanović a 2500 ans.

 

 

 

Mis en ligne le 25 septembre 2017

 

18. freccia nera grande x.GIF

22:12 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

31/07/2017

CONTINENT CENTRIFUGE

1. UsS Liberty Cover Up.JPG

 

Continent centrifuge

 

USA : la dévolution à marche forcée

Wayne Madsen – Strategic Culture10 juillet 2017

 

2. Devolution US Transp. GD.gif

 

Demandez à la plupart des spécialistes de la Constitution des États-Unis et ils vous diront que la Constitution interdit aux États américains de se séparer. Ils souligneront que la Guerre civile américaine a réglé la question de la sécession, en fait aussi bien qu’en théorie. Mais tous les principes constitutionnels considérés n’empêchent pas les États-Unis de déléguer l’autorité du centre politique de Washington DC aux États et même au niveau des grandes métropoles.

Sous l’effet des politiques musclées de Donald Trump, les États-Unis expérimentent la même décentralisation que l’on a pu voir se produire dans d’autres fédérations qui se sont séparées rapidement. Certes, les États-Unis n’ont pas les mêmes causes sous-jacentes comme l’origine ethnique, la langue ou la religion qui ont contribué à la dissolution de l’Union soviétique, de la Yougoslavie et de la Tchécoslovaquie, mais les actions unilatérales du gouvernement fédéral éloignent régulièrement des États américains du centre de Washington DC.

Trump et ses conseillers, qui ont enfourché le slogan des « droits des États » à la Maison Blanche, ont tendance à ne pas tenir compte de l’autorité de ceux-ci et de leur représentation à Washington, incarnées par le Congrès, au bénéfice d’un exécutif unitaire fort. Le mouvement des États vers une plus grande indépendance vis-à-vis des souhaits du centre, ainsi que la tentative parallèle de l’administration Trump de se substituer aux intérêts des États est pleine de potentialités dangereuses.

Lire la suite…

Source : http://lesakerfrancophone.fr/usa-la-devolution-a-marche-f...

 

3.  Devolution US small.gif

 

Climat

 

Puisqu’ils en parlent tant…

 

4.  Climate 6.jpg

 

Il semble, à lire Wayne Madsen, que la fronde des États-dés-Unis contre leur président prenne de plus en plus pour prétexte sa prise de position sur le réchauffement climatique. Sont-ils sincères ? Et lui ? Ce qui est sûr, c’est qu’Aline de Diéguez n’y croit pas plus que Donald Trump, et elle dit pourquoi.

 

S.O.S. Nounours sur un glaçon

Aline de Diéguez – Interludes 31 juillet 2017

 

Alors que je contemplais distraitement mes branchouilles de coupes de rosiers en train de se consumer gentiment, la cloche du portail agitée avec vigueur me fit sursauter. La seule personne qui respire dans un voisinage de quelques centaines de mètres à la ronde était là, l'air plutôt revêche. Elle avait humé une fumée suspecte. Horreur ! Du CO2 se répandait dans l'atmosphère. Elle tendit un index accusateur en direction du petit tas de braises. Assurément, j'empoisonnais l'air qu'elle respirait. Est-ce que je n'avais pas entendu parler du réchauffement de la planète ? J'étais en train d'augmenter la pollution avec mon feu criminel. Savez-vous que c'est interdit ?

 

5. Chasse au criminel.gif

 

Son caractère querelleur est connu. Je lui tournai donc le dos, fuyant la discussion. Elle fit semblant de ne pas comprendre que c'était ma manière de lui montrer la porte. Elle continua son sermon et son indignation montait crescendo. Et la montée des eaux dans le Pacifique qui commence déjà à submerger certaines îles et les malheureux réfugiés climatiques, cela vous laisse indifférente ? Je n'avais donc pas pitié des pauvres ours polaires voguant sur des morceaux d'iceberg ?

Et puis, et puis... Agacée, je lui ris au nez, ce qui lui cloua le bec et la fit déguerpir.

Nous voilà brouillées à mort. Tant mieux.

Je regroupai tranquillement les cendres et les restes du petit tas de braises qui viendraient nourrir de potasse mes futures courgettes. L'écologie est sauve. Ouf.

*

Ce petit incident m'a permis de comprendre à quel point une croyance aussi puissante qu'une religion est en marche. Tout y est, manque de discernement et d'esprit critique, psittacisme, certitude en béton armé. Les fidèles de la nouvelle religion sont farouchement persuadés que les discours des politiciens et de leurs relais médiatiques sont porteurs de LA vérité. Du coup, des armées de Torquemada fanatiques sont prêts à condamner tout hérétique au bûcher à la moindre déviation par rapport à la doxa officielle. L'inquisition est en marche.

L'instillation de la peur dans l'esprit des masses est un moteur capital de la politique. C'est l'arme préférée des gouvernants. Comme l'écrivait le journaliste américain Henry-Louis Mencken (1880-1956) : « Tout l'objectif de la pratique politique est de faire en sorte que la populace ait, en permanence, quelque chose à redouter et donc qu'elle réclame bruyamment qu'on assure sa sécurité. On lui fait croire à toutes sortes de menaces et de maléfices, la plupart imaginaires ».

Comme il est facile de faire avaler aux masses n'importe quelle baliverne. Un zeste d'émotion, une bonne dose de terreur sous la forme de prévisions apocalyptiques, une campagne médiatique efficace et répétitive et l'affaire est dans le sac.

C'est ainsi que la revue américaine Nation a publié le 18 avril 2017, un article de Juan Cole intitulé: « Cet autre gaz toxique qui tue des Syriens : les émissions de dioxyde de carbone », où il disait notamment : «Si Trump et ses sbires s'intéressaient vraiment aux enfants tués par des gaz toxiques, ils n'essaieraient pas de rejeter plus encore de CO2 dans l'atmosphère ».

Ciel ! On reste sans voix face une telle dose de stupidité. Tant que les petits Syriens n'auraient à se protéger que du CO2 et pas des gaz méphitiques que le pays de M. Cole livre aux coupeurs de têtes anthropophages, nous serions pleinement rassurés pour eux. Mais, hélas, c'est bien la politique imposée à la Syrie par les Juan Cole américains qui nous fait trembler pour les enfants syriens.

Le lavage de cerveau de certains éditorialistes américains fonctionne donc à merveille et cela d'autant mieux qu'ils semblent ignorer que le CO2 n'est nullement un gaz toxique (à ne pas confondre avec CO). Bien au contraire, il est absolument essentiel à la vie sur terre. Sans CO2, pas d'arbres, pas de végétation, pas de micro-organismes… donc pas d'humains. D'ailleurs les scientifiques révèlent que durant certaines périodes glaciales, le taux de CO2 était trois à quatre fois supérieur à celui mesuré aujourd'hui, ce qui disculpe irréfutablement ce gaz des méfaits qui lui sont imputés.

Le CO2 est une molécule indispensable à la vie sur terre et elle existait dans la nature avant l'apparition de l'homme. Or, il est dorénavant si bien considéré comme un poison par les « réchauffistes » qu'ils oublient d'expliquer que tous les gaz composés de plus de trois atomes - ou de deux atomes s'ils sont différents - participent peu ou prou à un effet de serre, à commencer par la vapeur d'eau, dans la mesure où ils absorbent le rayonnement infra rouge.

Mais la nature, dont nous ignorons 90% de son mécanisme, semble absorber parfaitement les petites différences induites par l'activité humaine. Dans l'analyse des prétendus changements climatiques anthropiques des alarmistes professionnels, rien sur les cheminements des courants marins, rien sur le mystère de l'apparition d’El Niño ou de La Niña, rien sur le mystère de leur circuit et sur celui de leur disparition, rien sur le mystère des différences de salinité entre des couches de l'eau de mer, rien sur le mystère des déplacements des zones de haute et de basse pression et sur le régime des vents qui en est la conséquence, et surtout rien sur le fonctionnement du soleil, sur son activité, sur les causes de la présence des taches, sur l'influence que peuvent avoir sur notre astre les orages magnétiques et les violentes explosions observées sur sa couronne, rien sur l'influence du cycle de onze ans de cet astre sur les températures, sur la couverture nuageuse et sur les vents de la stratosphère, ainsi que sur leur impact sur la troposphère.

Or, on sait que les périodes d'activité solaire « minimale » ont correspondu à la période appelée « petit âge glaciaire » des XVIe-XVIIe siècles. Mais, nos réchauffistes anthropiques, le nez collé sur le guidon au lieu de regarder le ciel, ne jurent que par les gaz à effet de serre d'origine carbonée et ils clament sans complexe que le réchauffement - si réchauffement il y aura, ce qui est loin d'être assuré - que le réchauffement donc sera bloqué si la concentration de gaz à effet de serre, et principalement de CO2, aura « diminué de 40 à 70% entre 2010 et 2050, et devra disparaitre d'ici 2100 », afin d'ajouter une louche de terreur à leur potage.

Je reviendrai à la fin du texte sur les causes véritables de leur acharnement sur le malheureux CO2.

Et d'ici là tous les moyens de basse démagogie sont utilisés. Ah, le poncif des ours polaires ! Le malin Al Gore est le génial initiateur de la campagne ciblant le danger que courraient les si mignons ours polaires à cause d'un réchauffement climatique dont nous serions coupables. L'image d'un ours blanc jugé sur un morceau de banquise à la dérive, c'est lui, c'est une idée lumineuse du staff d'Al Gore.

 

6. Ours polaire.jpg

 

Ce pauvre nounours cramponné à son glaçon en a fait pleurer plus d'un dans les chaumières. Mais pourtant rien de plus simple que de réaliser une image parfaite avec Photoshop ! D'ailleurs, personne ne s'est demandé où se trouvait le photographe de la jolie image si bien cadrée, toujours la même, abondamment reprise par tous les médias. Elle est censée illustrer l'horrible catastrophe d'une pauvre bête qui allait mourir de faim sur son glaçon.

Or, tout éthologiste connaisseur de ce mammifère parfaitement adapté à son environnement sait que les ours polaires peuvent nager sans difficulté deux cents kilomètres et qu'ils ne sont nullement gênés par une diminution, d'ailleurs saisonnière, de la glace polaire. S'il arrivait, dans la vraie vie, qu'un ours facétieux, un ours en chair, en os et en poils, réussisse à grimper sur un morceau de banquise à la dérive, ce ne pourrait être que par plaisir ou parce que son instinct lui aurait fait juger ce promontoire particulièrement propice à la chasse.

La population d'ours blancs avait diminué c'est vrai, mais pas du tout à cause de la fonte saisonnière de la banquise : en raison d'une chasse intensive. Elle a, depuis, si bien ré-augmenté que la traque est de nouveau ouverte à l'encontre de cette pauvre bête, et aucun écolo-verdâtre ne réagit à ce massacre.

Al Gore, ex-vice-président des États-Unis, initiateur et gourou du réchauffement climatique - mais derrière lequel s’avance Goldman-Sachs - est bien à l'origine de l'hystérie qui a envahi la planète avec son documentaire Une vérité qui dérange (2006).

L'apocalypse était censée pour demain : la fonte d'un gigantesque glacier du Groenland, la banquise tant en arctique qu'en antarctique allait fondre comme un esquimau chocolaté sous l'Équateur et augmenter le niveau global de la mer de... six mètres, pas moins : la hauteur d'un immeuble de deux étages ! Les côtes de l'Europe et de l'Amérique sous les eaux, des millions de « réfugiés climatiques » en Europe même, le Gulf Stream refroidi par l'apport de toute cette eau glaciale. Tous ces malheurs en chaîne créeraient une situation dramatique dans les États côtiers du Vieux Monde .

Bref, le scénario du film Le jour d'après, qui décrit la catastrophe de New-York submergée par la glace. Ainsi, à en croire le pape de la religion du réchauffisme, le réchauffement du climat… produirait un froid glaciaire !

Et la faute à qui et à quoi ? À l'homme et à son usage des énergies fossiles qui produisent du CO2. Diminuons donc les rejets de ce pelé, de ce galeux. Il ne reste que « très peu de temps » pour agir pour la planète, reprennent en écho les aficionados du GIEC. Mais « nous avons les moyens de limiter le changement climatique », estime aujourd'hui encore Rajendra Kumar Pachauri, l'actuel président de ce Groupement Intergouvernemental de Recherche sur le Climat, le complice et la caution « scientifique » d'Al Gore, avec lequel il a partagé le prix Nobel de la paix en 2007.

Tout cet échafaudage repose sur des « modèles » climatiques, des courbes et des graphiques d'apparence irréfutable. Mais, en douce, les réchauffistes prennent soin d'écarter les données qui ne confirment pas la doxa officielle. Ils se livrent même à des « ajustements » subreptices afin de maintenir le principe que nous vivons un réchauffement « sans précédent », afin de maintenir la pression sur les gouvernants et le bon peuple qui n'imaginent pas qu'il pourrait y avoir une intention malfaisante dans un organisme officiel parrainé par l'ONU.

Et pourtant...

Comme l'a révélé le Climategate bienvenu, la tricherie est partout. Un grand nombre de courriers électroniques envoyés par divers scientifiques « climato-alarmistes » ont été révélés. Mais la presse officielle est d'une timidité remarquable dans la couverture des révélations.

Et pourtant...

On voit alors tous ces gourous réchauffistes discuter entre eux sur la meilleure façon de supprimer les opinions différentes des leurs. Ils demandent comment faire disparaître les observations qui les gênent. Ils complotent sur les procédés les plus efficaces destinés à intimider les éditeurs de revues scientifiques. Ils se demandent même comment manipuler les données d'observation.

L'objectif est d'être le plus terrifiant possible et de supprimer tout ce qui ne confirme pas leur pseudo théorie.

Contrairement aux prévisions des « modèles » du GIEC, les variations constatées du niveau de la mer sont infimes et peuvent être causées par des modifications normales du niveau du sol, par une activité volcanique ou par un tremblement de terre. La preuve qu'il n'y a aucun danger à ce sujet, c'est qu'Al Gore a lourdement investi dans des propriétés en bord de mer et qu'il fait donc fi de sa propre propagande alarmiste de montée des eaux !

Toujours dans le même objectif de terroriser les populations, il s'agit pour le synode des réchauffistes d'attribuer au « réchauffement climatique anthropique » la responsabilité des tornades, des ouragans, des sécheresses, des inondations (Katrina, snif !), un printemps trop chaud, un été trop froid, alors que les scientifiques honnêtes relèvent que ces événements ont toujours existé et n'ont rien à voir avec le CO2 rejeté par l'activité humaine. À les entendre, le réchauffement climatique serait la cause de tout et de n'importe quoi.

Comme le disait avec humour Vladimir Poutine, un peu de réchauffement ne nous déplairait pas. Il disait aussi que le climat obéit à des variations cycliques et que les hommes n'y peuvent rien.

Et pourtant, contrairement à Donald Trump, il ne s'est pas opposé aux conclusions de la grand-messe de la COP21 présidée par un Laurent Fabius plus bouffi de prétention que jamais et n'ayant, évidemment, aucune compétence scientifique en la matière, puisque n'ayant jamais cherché à en acquérir.

La Russie comprend qu'il est impossible d'arrêter un torrent furieux et qu'il arrivera un moment où le principe de réalité prévaudra. « Il faut savoir hurler avec les loups », écrivait Plaute. Sagesse reprise par notre Corneille:

 

Une vertu parfaite a besoin de prudence
Et doit considérer, pour son propre intérêt
Et les temps où l'on vit et les lieux où l'on est.

 

Contrairement aux prévisions alarmistes du GIEC, la température moyenne annuelle globale est stable depuis 1997, pas la moindre trace de réchauffement. Les niveaux océaniques n'ont monté que d'un millimètre et demi, ce qui est insignifiant et ne peut être attribué à aucune cause réellement isolable. Quant à la banquise australe, elle atteint des records de superficie. La somme des surfaces des deux banquises est à peu de chose près constante, même si la banquise boréale a légèrement et momentanément diminué.

Nous voilà pleinement rassurés pour les ours blancs... si les chasseurs de fourrure leur prêtent vie.

*

J'en viens à la géniale invention des financiers : la taxe carbone.

 

6 bis. Taxe carbone.jpg

 

On entre cette fois dans le dur de l'opération.

En effet, l'escroquerie ne serait pas complète si elle n'avait pas débouché sur des manipulations financières. Je passe sur les magouilles de quelques fricoteurs, notamment du « milieu affairiste franco-israélien », qui, en 2009, ont exploité « trois failles originelles », par eux immédiatement reniflées, du système d'échange européen de droits à polluer sous la forme de bricolage sur la rétention de la TVA.

Un cerveau de l'une de ces escroqueries s’en est d’ailleurs candidement étonné : « La faille du système était énorme. Je me demande toujours comment des États ont pu mettre en place un machin pareil ». Les États devraient toujours prendre les filous pour conseillers...

Mais il est un escroc qui est loin d'être un pied nickelé, je parle toujours d'Al Gore. Car, non content d'être à l'origine d'une hystérie climatique, habilement créée, alimentée, gonflée, entretenue avec une efficacité diabolique, ce pape du réchauffisme a réussi l'exploit de s'enrichir d'une manière phénoménale via des placements judicieux dans des entreprises qui bénéficient de la législation mise en place par la bourse américaine du carbone.

A partir du moment où les cours de la tonne de carbone ont été cotés en bourse, l'enfance de l'art a été de séduire suffisamment de complices bien placés, afin de se constituer en une sorte de maffia parfaitement honorable en apparence. Ils ont alors pu utiliser leurs nombreux et bienveillants contacts dans les médias, afin de diffuser des informations tantôt optimistes et tantôt pessimistes sur l'évolution des données climatiques grossièrement falsifiées. Une machination de haut niveau des cours de la tonne de carbone échangée sur le marché du Chicago Climate eXchange a permis à Al Gore, détenteur d'une part importante des fonds spéculatifs de ce marché, de réaliser de juteuses transactions à terme. (v. Paul Joseph Watsen sur www.prisonplanet.com).

Dans cette escroquerie à plusieurs millions de dollars, on trouve les habituels spécialistes de Goldman Sachs qui sont à l'origine de la grande crise des subprimes de 2008 : David Bloom son ex-directeur et surtout Henry Paulson, qui sera nommé Secrétaire au Trésor des États-Unis et qui, en récompense des malversations des banquiers et sous le prétexte d'assurer le « sauvetage » de l'économie américaine (le plan Paulson), avait offert aux banques un bonus de sept cents milliards (je dis bien 700 milliards) de dollars dont elles refuseront de justifier l'utilisation.

Voir L'agonie du dieu dollar.

Dans l'affaire de la cotation boursière de la taxe carbone, la même fine équipe était à l'œuvre.

C'est ainsi que, grâce à une efficace propagande sur une panique artificielle astucieusement gérée provoquée par un réchauffement climatique anthropique imaginaire, beaucoup d'astuce, de persévérance et de complicités diverses, on devient milliardaire.

Source : http://aline.dedieguez.pagesperso-orange.fr/mariali/interludes/climat/nounours.htm  

 

0. Climate Trump.jpeg

 

3.  Devolution US small.gif

 

« When in doubt, nuke China »

En cas de doute, atomisez la Chine

Pepe EscobarAsia Times 29 juillet 2017

Via Information Clearing House

 

7. Trump-nuke.jpg

 

D’un cas de figure où l’armée US ne se sent « pas entravée », il existe un précédent et, comme les efforts du général MacArthur en Corée le prouvent, c’est quelque chose dont il faut avoir peur.

________________

 

Le 29 juillet 2017 – Information Clearing House – L’effondrement en cours du monde unipolaire et l’inexorable émergence d’une structure multipolaire sont en train de permettre à une intrigue secondaire de prendre des proportions qui pourraient devenir incontrôlables – la normalisation de l’idée de guerre nucléaire.

Sa dernière manifestation en date n’est autre qu’un amiral US nous assurant tous qu’il est prêt à suivre l’ordre du président Trump de lancer un missile nucléaire contre la Chine.

 

0. Admiral Scott Swift.jpg

L’Amiral Scott Swift

 

Oubliez le fait qu’une guerre nucléaire impliquant des grandes puissances au XXIe siècle sera La Dernière Guerre. Notre amiral – admirablement nommé Swift – est simplement préoccupé par quelques menus détails démocratiques, du genre « tout membre de l’armée US a prêté serment de défendre la constitution des États-Unis contre tous les ennemis du dehors et du dedans, et d’obéir aux officiers et au président des États-Unis, qui est notre commandant en chef ».

Il n’est donc question que de loyauté envers le Président et du contrôle civil de l’armée – indépendamment du risque d’incinération d’innombrables masses des civils en question, Américains inclus (puisqu’il y aurait une inévitable réplique chinoise).

Swift encore, à la rescousse : « Ceci est le cœur même de la démocratie américaine et, chaque fois que vous avez un militaire qui s’éloigne de l’objectif et d’une allégeance au contrôle civil, alors, nous avons un réel problème. »

Il importe peu que le porte-parole de la flotte US du Pacifique – dans ce cas, Charlie Brown (le bien nommé ?) – se soit empressé avec une louable célérité [swiftly] de contrôler les dégâts en qualifiant la question (nucléaire) de « ridicule ». La réponse et la question sont en fait très révélatrices.

MacArthur Park se fond dans le noir*

Pour ajouter quelques nuances au « contrôle civil de l’armée », un petit retour en arrière jusqu’à septembre 1950 et la guerre de Corée, avec l’aide de Korea : The Unknown War [inédit en français, cf. article], de Bruce Cummings et  Jon Halliday, sera loin d’être ridicule. Surtout à présent que les factions du Parti de la Guerre à Washington plaident pour une atomisation non de la Chine mais de la Corée elle-même.

Il est essentiel de se rappeler qu’avant 1950, le président Truman avait déjà donné l’ordre – « contrôle civil de l’armée » – de larguer deux bombes atomiques sur la Japon. C'était en 1945 – une grande première historique.

Truman était devenu Vice-Président en janvier 1945.  F.D. Roosevelt l’avait traité avec le plus grand dédain, et il ne savait rien du Projet Manhattan. Quand FDR est mort, Truman n’avait été Vice-Président que 82 jours et il devint Président des États-Unis en ne sachant absolument rien de la politique étrangère ni de la nouvelle équation militaro-nucléaire.

Truman eut cinq ans après avoir bombardé le Japon au nucléaire pour tout en apprendre sur le tas. L’action se déroulait à ce moment-là sur le front coréen. Avant même un débarquement amphibie à Inchon sous le commandement du général MacArthur – le plus important depuis celui du V-Day de Normandie en 1944 – Truman avait donné la permission à MacArthur d'avancer au-delà du 38e parallèle. Il y a un débat historique sérieux sur le fait qu’on n’avait probablement pas dit en détail à MacArthur ce qu’il devait faire... du moment qu’il gagnait. Au poil, pour un homme qui adorait citer Montgomery : « On ne donne jamais de directives adéquates aux généraux ».

Quand même, il est sûr que MacArthur a bien reçu un memo top secret de Truman insistant sur le fait que toute opération au nord du 38e parallèle n’était autorisée que s’il n’y avait « pas d’entrée en Corée du Nord d’importantes forces soviétiques ou chinoises, pas d’annonce qu’elles avaient l’intention d’y entrer, pas de danger d’une contre-attaque militaire à nos opérations ».

Et alors… MacArthur reçut un message « pour les seuls yeux du  destinataire » en provenance du chef du Pentagone George Marshall, disant  : « Nous voulons que vous ne vous sentiez nullement entravé, tactiquement et stratégiquement, d’avancer au nord du 38e parallèle »

MacArthur continua donc d’avancer. Il était sûr que la Chine n’interviendrait pas en Corée : « Si les Chinois descendaient sur Pyongyang, il y aurait le plus grand des massacres».  Eh bien, c’était faux. Les forces US ont pris Pyongyang le 19 octobre 1950. Le même jour, exactement, pas moins de 250.000 soldats des Volontaires de l’Armée Populaire Chinoise ont traversé la rivière Yalu et sont entrés en territoire coréen. Le renseignement US n’a rien compris à ce que l’historien S.L.A. Marshall a décrit comme « un fantôme sans ombre ».

MacArthur a commencé à devenir incontrôlable, allant jusqu’à exiger que des bombes atomiques soient larguées sur la Corée du Nord. Il fallait qu’il s’en aille. La question était : de quelle manière ? Les civils – Dean Acheson, Averell Harriman – étaient pour. Les généraux – Marshall, Bradly – étaient contre. Mais ils se disaient aussi avec inquiétude que « si MacArthur n’était pas relevé de ses fonctions, une grande partie de notre peuple trouverait à se plaindre que les autorités civiles ne contrôlaient plus les militaires ».

Truman avait déjà décidé. MacArthur fut remplacé par le Lt. Général Ridgway. Mais la folie de la guerre continua de faire rage, au prétexte de la « menace » sino-soviétique » de « domination communiste du monde ». Plus de deux millions de civils nord-coréens furent tués. Et ce que le général Curtis LeMay – un Dr Folamour en chair et en os – suggéra plus tard en disant qu’il fallait bombarder le Vietnam jusqu’à le « renvoyer à l’âge de pierre » fut bel et bien infligé par les USA à la Corée du Nord.

L’industrie et les infrastructures du pays furent totalement détruites. Il est impossible de comprendre les actions du gouvernement de Pyongyang ces dernières décennies sans se représenter à quel point cette destruction totale des gens et des biens est encore présente à l’esprit de tous les Nord-Coréens.

Ainsi, ce que l’amiral Swift a vraiment dit, c’est – en code – que si un ordre civil lui est donné, l’armée US déclenchera la IIIe guerre mondiale (ou la IVe, si on compte la guerre froide) et appliquera sans sourciller la doctrine  « première frappe » du Pentagone. Ce que Swift n’a pas dit, c’est que le président Trump a aussi le pouvoir d’imiter Truman et de virer tout aspirant-clone de MacArthur en train de péter les plombs.

_____________  

* Allusion à une chanson de Donna Summer : MacArthur’s Park is melting in the dark

 

Source : http://www.informationclearinghouse.info/47544.htm

Traduction : c.l. pour Les Grosses Orchades

 

3.  Devolution US small.gif

 

À bons entendeurs…

Parade militaire en Chine, pour célébrer le 90e anniversaire de l’Armée Populaire de Libération

30 juillet 2017

 


 

On remarquera que M. Xi Jinping tient ici les rôles que se partagent en Russie Vladimir Poutine et Sergueï Choïgou.

 

3.  Devolution US small.gif

Sur notre continent à nous

Petit rappel de choses oubliées…

 

Y a-t-il deux Vladimir Poutine ?

Sayed kremlin.ru 14 juillet 2017

Extrait d’une interview de Vladimir Poutine par le journal allemand Bild, le 5 janvier 2016

Traduit et sous-titré par Sayed

 


 

Transcription

Journaliste : – Il y a une théorie selon laquelle il y aurait deux Poutine. Le premier était le jeune M. Poutine d’avant 2007, qui a exprimé sa solidarité avec les États-Unis et qui était l’ami du chancelier Schröder. Et puis, après 2007, un autre Poutine est apparu. En 2000, vous avez déclaré : « Nous ne devrions pas avoir de confrontations en Europe, nous devrions tout faire pour les surmonter. » Et maintenant, nous nous retrouvons dans une telle confrontation [en Crimée, etc.].

Puis-je vous poser une question directe ? Quand allons-nous retrouver le premier M. Poutine ?

Vladimir Poutine : – Je n’ai jamais changé. Tout d’abord, je me sens encore jeune aujourd’hui. J’étais et je continue d’être l’ami de M. Schroeder. Rien n’a changé.

Mon attitude à l’égard de questions telles que la lutte contre le terrorisme n’a pas non plus changé. C’est vrai, le 11 septembre, j’ai été le premier à appeler le Président Bush et à exprimer ma solidarité. En effet, nous étions prêts à tout faire pour combattre le terrorisme ensemble. Il n’y a pas si longtemps, après les attentats terroristes de Paris, j’ai appelé puis rencontré le Président de la France.

Si on avait écouté Gerhard Schroeder, Jacques Chirac et moi-même, il est probable qu’il n’y aurait eu aucune des attaques terroristes récentes à Paris, car il n’y aurait pas eu de poussée de terrorisme en Irak, en Libye ou dans d’autres pays au Moyen-Orient. […]

Vous m’avez demandé si j’étais un ami ou pas. Les relations entre les États sont un peu différentes de celles entre les individus. Je ne suis ni un ami, ni une mariée ou un marié. Je suis le Président de la Fédération de Russie. C’est 146 millions de personnes ! Ces personnes ont leurs propres intérêts, et je dois protéger ces intérêts. Nous sommes prêts à le faire de manière non conflictuelle, à rechercher un compromis, mais bien sûr, en fonction du droit international, qui doit être compris uniformément par tous.

Source : http://lesakerfrancophone.fr/y-a-t-il-deux-vladimir-poutine

 

 

3.  Devolution US small.gif

 

Message à Ariane Walter

 

9. bouteille-a-la-mer-basse-def.png

Madame,

Qu’estce que vous foutez sur Agoravox ?

Ça vous amuse d’écrire pour des veaux ?

On vient d’essayer de vous déposer un mot de commentaire : impossible. On n’a pas réussi à se dépêtrer des formalités. Il y a pourtant plein de nuls qui y arrivent. Zut alors.

Et pourquoi votre délicieux Jupiter & Jupenlair n’est-il pas sur Le Grand Soir, i sont bégueules ?

S’il vous plaît, pour nous faire plaisir, trouvez-vous à crécher dans un endroit où... il y ait un minimum de Q.I.

Bien à vous.

Théroigne

 

3.  Devolution US small.gif

 

Il est 11 heures (23), on vient de trouver ça chez Mermet. On rouvre.

Je t’aurai cherché partout...

Le 31 juillet 2017

Surtout ne pas écouter la radio aujourd’hui, surtout ne rien lire sur elle, pas même l’écouter chanter, fuir les conversations, les superlatifs, se barrer dans les dunes, trouver un coin, un creux et rester là, seul avec elle, seul avec notre jeunesse, avec les nuages qui passent et les oiseaux, fermer les yeux et doucement entendre Miles et la voir elle dans Paris sous la pluie comme je la vis en noir et blanc de tous mes dix sept ans palpitants au fond du cinéma Champolion, et vous l’avouer enfin, quand elle dit "Julien je t’aurai cherché partout", je peux le dire maintenant, l’histoire n’avait plus aucune importance, le film n’avait plus aucun sens, sauf un : Julien c’était moi.

Daniel Mermet

(Jeanne Moreau est morte)

 

 

 

Mis en ligne le 31 juillet 2017.

 

 

 

 

22:31 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |